Chronique Financière
Et quar.d tous reunis au siege de notre
symphonie, nous apprenions la décision du
■conseil communal, éliminant notre chef dis-
tingué, ce fut un véritable coup de massue et
une consternation générale. Ma plume serait
incapable de décrire ce qui se passait dans
nos coeurs. Cette journée est restée dans la
mémoire de tous.
Et la triste nouvelle, comme la nouvelle
d'une catastrophe, se répandait lentement a
travers la ville.
Tout le monde souffrait pour lui, car... déja
tout le monde l'aimait.
II ne m'appartient pas de rechercher la
cause de cette injustice, due probablement a
une influence politique dont malheureusement
Ypres a toujours été la victime.
Albert ne faisait pas de politique.
Albeit faisait de la musique, mais... cela ne
pouvait probablement suffire a certains.
Tout en reconnaissant sa valeur artistique
heureusement Albert ne devait pas
Atre I'homme qu'il fallait et cette valeur était
sacrifiée au détriment même de toute une ville.
Mais... n'était ce pas la l'éternelle histoire
d'Ypres II fallait conserver l'habitude...
Cette injustice le fit aimer davantage encore
Dans toutes les classes de la société, aux
nuances politiques les plus diverses, Albert ne
comptait plus que des amis.
Cette injustice sans nom n'a fait que hater
la consécration de sa renommée qui devait lui
rester jusqu'a sa mort et graver son nom en
lettres d'or sur le livre de l'histoire.
Albert n'avait jamais vu dans cette nomina
tion probable une question pécuniaire, car
nous savons trup bien, même en ce moment
encore, que les émoluments de directeur de
l'école de musique sont mesurés au compte
goutte par des hommes qui certainement sont
loin de se rendre compte des connaissances
a posséder, du travail a effectuer et du seivice
a rendre.
Non, Albert ne voyait dans cette nomina
tion qu'un essor nouveau qu'il aurait pü
donner a son activité débordante, qu'une pos-
sibilité de réorganisation, nécessaire a l'amé-
lioration de cette école oü lui-même avait eu
les premières notions, qu'un épanchement
plus grand encore de son ame d'artiste dont
ïl voulait faire profiter tout le monde.
Un autre aurait été abattu. C'est avec son
sourire habituel qu'il a calmé notre colère
bien légitime et.sans un éclat dans sa voix,.
sans le moindre reproche..., il a, dans sa sim-
plicité immense, continué sa vie comme si rien
ne s'était passé.
Et les concerts reprenaient...
La salie devenait trop petite. On ne parlait
plus que des concerts Van Egroo.
La symphonie, giace a son chef infatigable,
se faisait une torte renommée.
C'était inévitable
Et devant ces succès, devant ce talent indis
cutable, ceux qui, un jour, avaient méconnu
le grand maitre, ne demandaient qu'a réparer
l'erreur commise.
Albert fut nommé chef de l'Harmonie
communale.
La encore son talent inépuisable trouvait
une source nouvelle en même temps qu'une
tache aride. Immédiatement, le même Dut y
était a nouveau poursuivi.
Le premier concert donné sous sa direction
comportait également au programme une
ceuvre classique.
je me rappelle ses paroles quand je lui
demandais si une pareille bardiesse ne lui
faisait peur. «Le puDlic l'aimera, ce classique,
disait il, paree que j'ai des hommes qui savent
le jouer
II oubliait simplement d'ajouter et paree-
qu'ils ont un chef qui sait les diriger
Toujours la même modestie
Et comme il était aimé et admiré pour sa
symphonie au bout de peu de temps il
était aimé et admiré pour son harmonie
Et c'était une marche lente et certaine vers
le résultat désiré
Et, pour Albert, une marche lente vers la
gloire
La guerre, hélas, vint anéantir en une jour
née, ce travail de si longue haleine.
Son coeur était meurtri par la destruction
compléte de sa ville natale, par la dispersion
et la disparition de tous ses amis et nom-
breuxélèves.
Comme tous les autres il avait pris le che-
min de l'exil.
Dieppe fut sa nouvelle résidence, oü, en
quelques mois, il se fit connaitre, aimer et
admirer.
Ses succès en France ne furent pas moin-
dres que les précédents, au point que la
municipalité de Dieppe, dans un geste de
reconnaissance, n'hésita pas a demander au
gouvernement Franpais une récompense digne
de lui.
Les palmes d'officier d'académie furent le
couronnement de son activité, de son dévoue-
ment et surtout de son talent.
Albert s'était fait a Dieppe une situation
brillante qu'il n'a pas hésité d'abandonner
quand il fut appelé, un peu tard hélas a la
tête de cette même école de musique dont la
direction lui avait été refusée précédemment.
Ypres sortait de ses cendres, il fallait passer
l'éponge sur le passé. Cela valait mieux.
Ce qu'il fit par la suite Vous le savez tous.
Toujours infatigable, au détriment même
de sa santé, il a continué son ceuvre d'avant-
guerre, oeuvre d'éducateur de la foule qu'il
entrainait avec lui.
Hélas la mort vient de l'enlever en pleine
activité.
Sa disparition a été si foudroyante, le
dénouement a été si brutal qu'il nous est
difficile de nous rendre a l'évidence.
Et cependant II faut s'incliner devant
l'irréparable.
Ypres a pleuré Tous les Yprois ont pleuré
Ypres a su montrer combien il avait été
aimé.
Dans un élan touchant et spontar.é, toute
la population, sans distinction, les bras lour-
dement chargés de fleurs, est accourue pour
rendre un dernier hommage a celui qui nous
manquera tant a l'avenir.
Devant la dépouille du grand maitre tout
le monde s'est incliné profondément, tout le
monde a versé des larmes, tout le monde a
senti la perte irréparable du maitre et ami
tant aimé.
Tout le monde, pendant ces tristes moments
au moins, a mieux senti encore, au dessus
des-jalousies et antipathies passagères, les
liens d'affection et de solidarité qui devraient
tous nous unir.
Affection et solidarité c'était sa devise.
Albert n'est plus Hélas Le travail l'a tué.
Son nom restera a jamais immortel dans
l'histoire de la Ville d'Ypres
Nous le pleurerons toujours.
Le grand maitre est disparu mais ses
ceuvres doivent rester, je n'en doute nulle-
ment.
Combien y en a til Qui pourrait le dire
L'avenir nous le montrera.
C'est la modestie d'Albert, modestie sans
bornes, qui a empêché la publication du fruit
de ses longues études et de son inlassable
travail.
Ses oeuvres seront le miroir fidéle de son
coeur et de son ame et laisseront certainement
a ceux qui les écouteront un jour, comme une
douceur immense, une joie sans égale, cette
même douceur, cette même joie, dont il savait
nous environner etnous charmer.
Ce sera le dernier précieux souvenir qui
nous restera du grand musicien, du fidéle ami,
a moinsqu'un jour on veuille se rendre
compte qu'il mérite plus... a moins qu'un
jour la ville d'Ypres n'ait la fierté bien légi
time de laisser a la postérité l'image fidéle de
son cher enfant.
II l'a réellement bien mérité F. H.
Le marché continue a faire preuve de
soutien, malgré la pénurie d'affaires. On
s'achemine lentement vers un mieux certain.
II faut toujours avoir recours aux mêmes
explications pour tenter de justifier le flotte-
ment des cours dans cette atmosphère ultra
sensible qu'est la Bourse, dont. le sentiment
est nettement meilleur indécision politique
franqaise et incertitude monétaire en Angle-
terre.
Cette semaine nous permettra, non plus de
supposer, mais de constater que la formule
Poincaré sera celle qu'adoptera la France.
Les craintes, en ce qui concerne le marché
anglais, s'évanouissent peu a peu et les grands
organes financiers d'Outre Manche n'émettent
plus les craintes dont leurs colonnes étaient
remplies il y a quelques semaines.
A Bruxelles, le marché, trop anémié pour
faire preuve d'initiative personnelle attend la
conclusion de ces éléments incertains pour
aller de l'avant.
Ouant aux tarifs douaniers américains dont
il a été fait état, on annonce une opposition
chez eux a l'application des mesures draco*
niennes envisagées.
La Hydro Securities reste ferme. On a dit
de cette valeur qu'elle est le prototype d'une
campagne pour faire courir l'élément baissier.
C'est également mon sentiment. Aux cours
actuels la valeur qui n'a peut-ètre pas épuisé
sa marge de hausse, est dangereuse. Que se
passerait-il en effet, si l'on annongait un jour
qu'on a émis un million de titres nouveaux
Cela viendra, mais quand
La Buenos A ires est ferme et le papier change
de mains. On dit a son sujet qu'il est question
de changement de nationalité pour des motifs
fiscaux et financiers. En tous cas, elle n'est
pas chère et l'on est d'accord pour prévoir
beaucoup mieux.
Quant a la Barcelona, il va de soi que l'ex-
position en cours est favorable au développe-
ment de l'affaire et ceux qui ont visité récem-
ment cette entreprise, en disent merveille.
Le dividende est susceptible d'une augmenta
tion sensible et l'affaire proprtment dite a
devant elle un avenir immense. Elle est autre-
ment intéressante que la Brazilian Traction
dont le nombre de titres est considérable et
pour laquelle on a envisagé les résultats a
venir dans quelques années.
Faut il signaler que toutes ces perspectives
se réalisant, la Sidro verra des cours meilleurs.
Les valeurs Caoutchoutières prennent le
départ un peu plus tót que je ne l'avais pensé.
II faut noter que Londres reprend la maitrise
du marché que la matière est toujours plus
chère a Londres qu'a New York. On a fait état
d'une note d'une maison spécialisée dans cette
branche. Sans doute doit-on voir des prix
supéri urs en matière, mais il est dangereux
de batir sur des possibilités futures de con-
sommation. Pour le portefeuille patient, il
apparait que la prise d'un intérêt reste une
opération intéressante.
La Cregeco souffre toujours de l'augmenta-
tion projetée. La Kasai suit, comme la Tanga,
l'ambiance du groupe colonial. Les observa-
teurs auront noté la grande fermeté de la
capital Kasai au comptant. Ce titre ne devant
jamais recevoir que i5 frs de revenu, ne peut
justifier son mouvement de reprise que si
II m'est agréable de signaler la marche trés
prospère des Brasseries du Katanga, dont le
cours ne reflète pas et de trés loin, la vitalité
de cette affaire. La progression des résultats
bénéficiaires pour les 5 premiers mois de 1929
dépasse ceux des g premiers mois de 1928.
Or, a partir de Juin, commence la période oü
l'on consomme d'ordinaire leplus au Katanga.
L'augmentation de capital a été décidée et
l'on souscrira Titre pour Titre a mille francs
mais la libération se fera a raison de 20% a
la souscription et le solde par appels successifs
Cette décision est trés judicieuse et il ne faut
pas être grand clerc pour penser que le cours
actuel de 2.000 frs sera largement dépassé
rapidement. II m'apparait qu'une opération
intéressante est a faire pour le portefeuille et
je me tiens a la disposition de mes clients a ce
sujet.
Notons au passage l'entrée dans le Conseil
d'Administration de la Simkat de l'administra-
teur Directeur de I'Union Minière. II parait
que certains hommes chiffres se livrant a des
calculs de prestidigitation estiment la Dividen
de Simkat trop chère comparée a la Capital.
Leur erreur consiste a supposer l'affaire en
liquidation ou a imaginer que tout développe-
ment ultérieur est impossible. Je n'en dirai pas
davantage aujourd'hui, mais je pense que
loi squ'il y a une disproportion entre la capi
tal et la dividende supérieure a celle existant
ordinairement que l'arbitrage est intéressant.
Et s'il y avait par hasard une unification de
titres Si l'on se livrait d'ailleurs a de tels
calculs pour de nombreuses valeurs, quelle
déception
A l'assemblée de 1'Union Minière, M. Jadot
a déclaré que les prix du cuivre se stabilise-
raient aux cours actuels et que l'élément im
portant consistait dans la demande plus con
sidérable du métal rouge.
II est question d'une augmentation de
coupon en Tanganyika, et conséquemment en
Zambeêia. A supposer quel'échéance de Juillet
ne donne pas raison a cette prévision, il est
certain d'autre part que cette heureuse éven-
tualité se confirmera en Janvier prochain, a.
l'époque du coupon intérimaire.
J'ai déja dit, je crois, que nos grandsétablis-
sements bancaires ont pris la décision de faire
le moins possible appel aux poches du public.
Néanmoins, on parle de la possibilité dans
quelques mois d'une augmentation nouvelle
en Electricité et Traction, de grosses affaires
nouvëlles étant sous roche.
II va de soi que notre Industrie va de plus