Le Last Post
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La Suppression
du Tribunal des Dommages de Guerre
cas oil le travail fourni et l'emploi des fonds
avancés donnent satisfaction, l'Etat pouirait
renouveler l'envoi de fonds après épuisement
de la première avance.
Tous les délégués se rallient cette pro
position, et la réunion charge M. le député
Brutsaert de la soumettre M. le Ministre
Houtart. M. Brutsaert promet d'user de toute
son influence pour obtenir la réalisation de
cette proposition qui, si elle pouvait rencon-
trer l'adhésion de M. le Ministre, constituerait
enfin une solution définitive et avantageuse
de cette question si embarrassante des abris.
M. le Président en vient ensuite a la ques
tion de la suppression de notre tribunal des
dommages de guerre. Tous les employés de
ce service ont été avisés que leurs fonctions
cessent le ir Janvier prochain, et déja on s'est
informé pour savoir combien de tapissières
il faudrait et combien cela coüterait approxi-
mativement pour envoyer tous les dossiers
d'Ypres a Bruxelles. Tout cela prouve que
labas on reste décidé a maintenir malgré
tout la décision prise.
Une fois que le Tribunal sera installé a
Bruxelles, les sinistrés d'ici seront obligés
alors de se déplacer jusque la quand ils auront
a parler a leur commissaire d'Etat. Sur deux
voyages ils auront peut-être la chance de
trouver une fois le commissaire, et encore ils
auront k l'aire a un étranger qui ne connait
absolument rien de la situation des sinistrés
d'ici. Le jugement leur sera done trés coüteux
et de plus ne leur donnera aucunément satis
faction.
Cette décision est done inadmissible et
nous devons tout faire pour que le Tribunal
reste maintenu a Ypres. Si l'on veut réelle-
ment hater la liquidation des dommages de
guerre, le meilleur moyen c'est de laisser
continuer notre Tribunal k travailler comme
il le fait maintenant. Les dossiers qui restent
encore a traiter concernent pour la plupart
des affaires litigieuses et embrouillées, et le
personnel attaché au Tribunal d'Ypres, qui a
l'expérience de ce genre d'affaires, arrivera a
les traiter beaucoup plus rapidement que ne
pourrait le faire celui de Bruxelles. De plus, le
déménagement occasionnerait déja a lui tout
seul un énorme retard, car il faudra certaine-
ment 3 a 4 mois de temps pour classer a
nouveau tous ces dossiers, si encore il ne s'en
égare pas. L'Etat a done tout avantage a
laisser subsis er le Tribunal d'Ypres jusqu'a
épuisement complet des dossiers a traiter.
M. le député Brutsaert oajecte a Cette argu
mentation que, lors ae l'enïrevus avec M.
'erhaeghe, la question a été piésentée sous
un lout autre aspect et qu'eile u'a pas laissé
ette mauvaise impression sur ,es délégués
qui y assislè ent. il n'y a pas été uit que tes
sinistiés sfeaient obligéi ct'allrr a BiLxelLs,
mats s. uiement qu'cn couformite av e la loi
une caainuie speciale, s'occupant exclusive-
ineiit tits aflanes de dommages tie ^uerre,
seratt joime au 1 ribun;.] de 1' instance.
Tous les déleguéa étaient satisfdi's d-s
<lécLratioiis de »v»Vtrhaeghe, qui étaient
«daires t Jormelles. Le Tm unal des öomma
ges de guerre n'é ait qu'un organisme excep
lionnel, et s'il sera suppiimé maintènat.t ce
n'est ur iquement que pour revenir a la situa
tion normale. Ce ïegime ne p.u; durer et la loi
un bien qu'aptèi un certain no more d'années
les dommages de guerre seraient de la com
pétence du Tribunal civil.
M. le Dr Brutsaert reconnait cependant
qu'il y a une certaine contra liction entrc les
déclarations de M. Verhaeghe et les agisse-
ments du Département, signalés par M. le
Président, et tl déclare qu'il s'opposera éner-
giquement au transleit des dossiers.
Quant aux .fonctionnaires qui ont tous été
remerciés pour le i' Janvier et dont le p éavis
n'a pas encore été retiré, M. Vermeulen dit
que Mle Directeur général a bien déclaré
qu'a cette date une selection serait fatte et
que les meilleurs éléinents seraient conservés
pour terminer l'examen des dossiers qui
restent encore a laire.
M. le Président annonce encore que dès
maintenant déja le Tribunal re^oit des con
elusions prises par des commissaires d'Etat
de Bruxelles, sans que les intéressés aient
été entendus ou consultés. Un cas typique
entre tous s'est présenté dernièrement, notam-
ment pour les archives de la ville d'Ypres, les
plus riches du pays, malheureusement détrui-
tes pendant la guerre. Lcs conclusions du
commissaire d'Etat disaient entr' autres que
les archives d'une petite ville comme Ypres
n'offraient que trés peu d'intérêt historique et
l'indemnité proposée par lui était dérisoire.
Ce qu'il faut pour tranquilliser nos sinistrés
d'ici c'est une déclaration formelle du minis
tére que nos commissaires d'Etat et notre
service du Remploi restent maintenus a Ypres,
tels qu'ils sont.
M. le Président dit qu'il écrira a M. Ver
haegbe afin d'obtenir cette Certitude, et M. le
député Brutsaert promet de demander le
maintien a M. le Ministre Houtart. Nous
n'avons pas, dit- il, autant d'intérêt a nous
opposer au transfert du Tribun 1 des domma
ges de guerre au Tribunal civil. Si les com
missaires restent maintenus dans leu;s fonc
tions et que les sinistrés- ne sont pas obligés
de courir a Bruxelles, cela importe peu. Maïs
ce transfert ne sera pour l'Etat aucune écono
mie et causera beaucoup de retard.
Les délégués présents se déclarent d'accord
avec ces démarches qui seront faites et
espèrent pouvoir en attendre le meilleur
résultat.
La réunion décide finalement, sur la propo
sition de '4. Ie Président, de porter a l'ordre
du jour de la prochain? assem'dée la question
du paiement par l'Etat aux communes des
expropriations faites pour l'élargissem-nt ou
l'alignement de la voirie.
La séance est levée a 16 heures.
Suite a la délibération prise lors de la
réunion de la Fédération, M. Ie Président a
envoyé a M. le Directeur général Verhaeghe
la lettre suivante
Ypres, le 10 Novembre ig3o.
Monsieur le Directeur Général,
A l'assemblée mensuelle d'hier, les délégués
ont été surpris de m'entendre déclarer qu'au
cun commissaire d'Etat r.i de Remploi n'a
encore été avisé de ce que l'avis, concernant
la cessation de leur emploi. était retiré. Bien
plus, je leur ai appris que des mesures se
préparaient pour le transport a Bruxelles de
nos dossiers, par tapissières, et que, dans
beaucoup d'affaires, les conclusions étaient
déja prises pardes commissaires de Bruxelles-
Soit dit en passant, ces conclusions, prises
la bas sans connaissance de notre passé ni de
nos besoins, et sans pourparlers préalables
avec les intéressés, ont démontré combien les
droits des sinistrés seraient injustement mé-
connus, si les bureaux d'Etat et de Remploi
ne restaient pas fonctionner ici, sur place.
Un malentendu me semble évident. Dans la
réunion u'ily a un mois, vous avez bi?n voulu
dónner a notre délégation l'assurance que
rien ne serait changé en ce qui concerne nos
commissariats. Vous avez au contraire an
noncé que le seul changement cons^sterait a
saisir le Tribunal de ie Instance d'Ypres du
-oin de rendre les jugernents. Ce dernier point
n'a pas grande importance au point de vue des
sinistrés. Permettez-moi cependant d'observer
que ce changement ne constituera aucune
économie et sera au contraire une cause d?
complications et de grands retards. Mieux
vauc laisser r.otre organisation telle quelle est.
En effet, tant que la besogne existe, il faut
la faire, et nul ne la fera mieux ni plus vite, et
par conséquent plus économiquement, qu« le
personnel expérimenté que nous avons. Lui
seul est capable d'en finir en 1 ou 2 ans. et
dans l'intervalle rien n'empêche de le reduire
au fur et 1 mesure de la diminution des aftai
res. Vous n'ignomz pas du reste que se sb'nt
précisément les affaires les plus difficiles et les
plus compliquées qui restent encore a in-
struire.
L'assemblée d'hier m'a done chargé de
vous signaler d'urgence la contradiction qu'il
y a entre vos vues exprimées il y a un mois, et
les mesures préparatoires a la suppression
qui se prennent sans doute a votre insu. Je
vous demande done, pour elle, de vouloi- bien
nous donner l'assurance que nos services de
dommages de guerre et nos commissariats
continueront a résider et a fonctionner a
Ypres comme par le passé, et que vos instruc
tions seront renouvelées en conséquence.
Ce malentendu dissipé, notre population
n'aura plus a s'alarmer.
En attendant que vous nous fassiez l'hon-
neur de nous rassurer, je vous prie d'agréer,
Monsieur le Directeur Général, l'expression
de mes sentiments les plus dévoués.
(s) Arth. Butaye.
Président.
A Monsieur Verhaeghe,
Directeur Général au Ministère des Finances.
Nous avons déja d maintes reprises en l'occa-
sion de parler ici de l'émouvante cérémonie du
Last Post sonvê tous les soirs sous la voiite
du Memorial grandiose de la Porte de Menin
et de dire combien profondémevt nos amis Bri-
tanriques sont touchés par eet hommage quotidien
rendu a leurs chers disparus et combien ils
apprècient ce beau geste du souvenirné sponta-
néme.ht de la reconnaissance des Yprois envers
les dcfenseurs de leur chère cité.
Le Mardi 11 Novembre dernier12' anniver-
saire de 1'armistice, cette sonnerie du Last
Post suivie de celle du Reveille a été
diffusie par le mondt entieret, d cette occasion
la revue de Radio Belgique, du Q Novembre
iq3oa donné, comme a'iiclc de fond, un bel
apergu historique sur notre Last Post que
nous nous faisons un plaisir de reproduire en
entier ci dessous
Onze novembre. II y a douze ans, dans le
train spécial du Maréchal Foch stationnant a
Rethoi des. prés de Compiègne. la délégation
allemande acceptait l'ultimatum des gouver-
neiaents alliés et, a onze heures du matin,
l'armistice entraii en vigueur, mettant fin au
plus grand drame de tous les temps minute
profon.cément émouvante qu'il coiivient de
célébrer avec fervtur. 4
Mais ce jour anniversaire doit être 'surtouc
celui du souvenir. Que notre pensée se r« porte
done sur tous ceux qui sont tombés pendant
la grande tourmenie, et notamm-nt sur ces
soldats qui, fauchés en plei.ue vie ar<ie> te,
dorment a jamais dans cette terre des Flan-
dres pour la défense de laquelle ils ont tuut
sacrifié leur jtunesse, Lur force et toutes
leurs espérances
Parmi toutes les cérémonies du Souvenir
qui se dérouleront mardi prochain, celle qui
aura lieu a Ypres et qui sera iadiodiffusée
par Radio Belgique et par la British, broad
casting Corporation sera certes l'une des plus
impressionnantes. A 22 heures i5 précises
seront sonnés, devant le Menin Gaie Memo
rial le Last Post et le Reveille Et
par le miracle de la T S. F., ces sonneries
traverseront l'éther et seront enten lues par
tous ceux qui seront a l'écou e, jusque dans
les plus lointaines colonies anglaises.
C'est le 28 juillet 1927 que fut inauguré, en
présence du R01 Albert, du .Vlaréchal Sir
Douglas Haig et de plus de vingt-cinq miile
Anglais et avec le concours de plusieurs
évêques anglais catholiques et anglicans, le
Mémorial britannique él- vé a v pres a la
mémoire des tommies morts Hi BMgiqué
Ce monument qui occupe exac ement rem
placement de l'ancienne Porie dé Menin, est
entouré par les hauts remparts et le trés large
fossé des vieilles fortifications. Tant a cause
de ce site pittoresque que par le caractèra-
vraiment grandiose de son architecture, il est
sans doute le monument commémoratif le plus
impressionnant de tous ceux qui ont été con-
struits depuis la guerre. De grandes inscrip
tions rappellent a l'extérieur qu'il fut érigé
par l'Empire britannique a la mémoire des
soldats tombés pour la défense du saillant
d'fp es et auxquels le sort de la guerre a
refu.-é une sépulture connue. Sur les murs
intérieurs sont aussi gra\és les noms des
cinquante-sept mille soldats morts dans les
environs et dont les corps n'ont pu être
retiouvés ou identifiés.
Quelques jours npiès cette inauguration,
M. Pieiré Vanden braam tmssche, commissaire
de police de la Ville d'Ypres, eut la trés belle
pensée: qu'il conviendrait que la Cité rendit
tous les soirs un dernier hommage aux tom
mies morts pour sa défense. Ce projet ren-
cojitra un grand succes et, dès le tr juillet
1928 jusqu'au ir octobre suivant, tous les
soirs a neuf heures, trois clairons sonnèrent
sous le Mémorial le Last Post la sonne
rie militaire anglaise qui retentit au soir des
batail'es, après l'appel des survivants, a la
mémoire des mauquants, et qui est aussi celle
du couvre feu dans les garnisons britanniques.
Ce magnifique geste de la population
yproise fut évidemment apprécié a sa valeur
par les centaines de pèlerins anglais qui
v cnaient assister chaque soir a l'émouvante
sonnerie. Ausst celle-ci fut-elle reprise le ir
mai suivant et, depuis lors, elle retentit tous
les soirs sous les voütes du monument.
Le ióseptembre 1929, lord Granville, am
bassadeur de Grande-Bretagne a Bruxelles,
alla officiellement offrir aux clairons du Last
Post quatre magnifiques bugles d'argent,
don des résidents anglais de Bruxelles et
d'An vers, instruments qui, depuis lors, ser-
vent pour la sonnerie.