2 gèes et impeccableraent entretenues, le cortège se remet en marche pour se rendre a la Mairie, oil, dans la magnifique salie de réunions du Con- .spil Municipal, omee de deux immenses dra- peaux francais et beige, doit avoir lieu la séance commune avec notre conseil communal. M. le Bourgmestre Vanderghote remercie M. lp Maire, M" les adjoints et conseillers commu- naux de Paris-Plage pour l'accueil si sym- pathique qu'ils ont bien voulu réserver aux Yprois et leur remet, en souvenir de la visite d'aujourd'hui et aussi du séjour a Paris-Plage de tant de nos réfugiés Yprois, une collection de reproductions photographiques des peintures de la salie Pauwels, malheureusement détruite. M. le Maire répond a ces remerciements et dit qu'il remettra ces souvenirs a M. l'adjoint Cham pion, conservateur du musée de Paris-Plage et l'initiateur du Square d'Ypres, qui ne manquera pas de leur réserver la place d'honneur au musée. M. le Dr Pouget, maire de Touquet-Paris-Plage, déclare ensuite la séance ouverte et, d'une voix lente et forte, prononce le discours suivant Monsieur le Bourgmestre d'Ypres, Mes Chers Collègues, i Je vous demande de vous lever et d'observer une minute de silence la mémoire de Sa Majesté le Roi Albert Ir. le Roi Soldat. de M. le Bourgmestre R. Colaert et des édiles Yprois en fonctions pendant la guerre, des réfugiés Yprois qui reposent dans notre terre touquettoise, des soldats de Belgique et de France mórts vaillamment pour le salut de nos Pays. Le dimanche 23 février 1919, le Conseil Commuaal d'Ypres tenait en la Mairiedu Touquet-Paris-Plage une séance mémorable pour discuter de la reconsti- tution de la Ville d'Ypres et des batiments communaux. Ainsi, a peine vos faubourgs étaient-ils évacués, votre premier acte était un acte de foi dans les desti- nées de votre pays et de votre commune. Les édiles Yprois prouvaient une fois de plus que les injustices, les haines dévastatrices n'abattent pas les hommes mais stimulent leur énergie créatrice. Dans vos séances du temps de guerre dans notre ancien Hotel de Ville vous aviez sans doute parlé de la chute de vos édifices fameux, de vos foyers, vous aviez serré les poings, peut-être maudit, mais vous n'aviez jamais été résignés. Dés que l'heure du retour sonnait. vous vous dres- siez pour faire revivre la Ville célèbre pour ses monu ments et pour son histoire et chère a chacun de vous pour les souvenirs personnels et familiaux attachés a chaque carrefour, a chaque pavé des rues, a chaque pierre des maisons. Aujourd'hui je pense, non sans une émotion pro- fonde, a ceux qui tinrent le 23 février 1919 la fameuse séance qui dura de neuf heures du matin a sept heures du soir. Nous, qui avons admiré la résurrection d'Ypres, qui avons eu l'honneur a'être regus dans votre maison commune reconstruite, nous sommes fiers de recevoii: dans notre Nouvel Hótel de Ville, dans une séance commune, les successeurs de ceux qui partagèrent avec nos prédécesseurs la même salie de délibérations. Les hommes, comme les cités. comme les nations, sont toujours récompensés de leurs gestes ou de leurs actes généreux. II n'est pas vrai de dire que l'obliga- tion est un fardeau, et que l'obligé n'a qu'un désir d'oubli. L'hommage que nous avons voulu rendre a votre Ville, soeur de la nötre, et sceur d'autant plus chère qu'elle a souffert davantage, l'élan affectueux qui vous a fait accepter si chaleureusement notre témoignage de sympathie, prouvent que certains liens résistent aux assauts dissolvants du temps et de réloignement Dans nos archives municipales oü l'on recueille les événements heureux et malheureux, oil l'on relate les manifestations de nos pensées et de nos sentiments, oü l'on batit lentement ligne par ligne rhistoire de la cité, nous conservons comme un titre de noblesse la lettre émouvante que je vous demande d'entendre avec la même ferveur que j'ai mise a la lire et a la relire. c Paris-Plage, le 6 mars 1919 a Messieurs les Maire et Membres de la Municipalité du Touquet-Paris-Plage. Messieurs, Sur le point de quitter définitivement votre charmante ville, je réponds a un puissant besoin de mon coeur en venant vous exprimer toute ma reconnaissance pour les services que vous avez bien voulu rendre, pendant une période de quatre années, a mes compatriotes exilés comme aussi a rAdministration Communale d'Ypres et a moi- même. i Grace a votre bienveillante intervention, nóus avons pu loger trés convenablement nos écoles des deux sexes et procurer ainsi nos élèves beiges les bienfaits d'une éducation et d'une instruction qui n'ont rien laissé a désirer. Vous nous avez même aidé a trouver des champs de culture pour l'en- seignement agricole a donner a l'école moyenne. C'est une faveur dont notre jeunesse studieuse n'a joui nulle part ailleurs. Ai-je besoin de vous dire. Messieurs, combien nous vous sommes recon- naissants, et de vous assurer que le Gouvernement Beige partagera nos sentiments de gratitude Quand 1'Administration communale d'Ypres et nos écoles pourront, a leur tour. retourner dans la Ville d'Ypres et s'y installer définitivement dans quelques mois, je ne manquerai pas de signaler mes concitoyens tout ce que vous avez bien voulu faire pour rendre notre exil, non seulement tolérable, mais utile et même agréable. Le souvenir de notre séance du 23 février, tenue a la Mairie, au siège même de votre admi nistration gracieusement mis notre disposition, dira tous nos compatriotes, que c'est a Paris- Plage qu'une réunion d'un Conseil Communal Beige a pu, grace un arrèté-loi exceptionnel, se réunir sur les bords de la Canche si furieusement enviés, il y a quelques mois encore, par un ennemi cri- minel. Daignez agréer, Messieurs, avec l'expression de notre reconnaissance, l'assurance de notre parfaite considération. R. Colaart. 16 ans se sont écoulés et nos deux municipalités se trouvent de nouveau réunies dans une même salie pour affirmer leur solidarité dans le souvenir, dans l'espoir, pour puiser a la source des douloureux sacrifices com- muns les raisons de croire aux joies communes d'un renouveau pacifique. Comme pour mieux affirmer que rien n'était changé dans cette solidarité, que rien n'avaitirompu la con- tinuité de notre union administrative et sentimentale, nous avons demandé a celui qui fut notre Secrétaire de Mairie commun, dont le dévouement a ses conci toyens lui valut leur estime et dont le dévouement aux réfugiés Yprois lui valut la médaille du Roi Albert Ir, nous avons demandé a M. Butel de reprendre pour un jour sa place de Secrétaire de Séance. Ainsi un trait d'union de plus scellera notre entente. Monsieur le Bourgmestre d'Ypres, mes Chérs Col- lègues Yprois, vous êtesici les bienvenus. Hier, vous n'avez pas franchi de frontière. Notre ciel a été trop longtemps le vötre pour qu'il ait cessé de l'être. Notre terre a été foulée par trop des vötres pour qu'elle ne vous soit pas douce et hospitalière. C'est sans doute pourquoi plusieurs des vötres sont restés parmi nous. Peut-être pressentaient-ils qu'un jour ils auraient la mission de vous y accueillir. Et nous qui avons aujourd'hui l'honneur de vous adresser le salut du Touquet-Paris-Plage, nous préfé- rons considérer cette table, non pas comme une table solennelle autour de laquelle on délibère gravement. mais comme une table de familie autour de laquelle des frères sont revenus s'asseoir après une longue absence. Visiblement ému par les nombreuses marques de sympathie de la part de nos amis de Paris- Plage. M. le Bourgmestre répond ce qui suit Monsieur le Maire, Messieurs les Adjoints et Conseillers Municipaux, Dans quelques instants, aura lieu l'inauguration officielle du Jardin d'Ypres». Cette cérémonie per- p-'.uera en vos annales locales le souvenir de la vie commune que, pendant la guerre, prés de 1000 de nos réfugiés ont vécue ici en communion intime avec vos administrés. La séance, qui réunit en votre magnifique Mairie les membres du Conseil Municipal de Touquet-Paris- Plage et du conseil communal d'Ypres doit de son cóté perpétuer le souvenir de la première séance que le conseil communal d'Ypres tint après l'armistice en la Mairie du Touquet-Paris-Plage. Ie tiens, Messieurs, a vous féliciter de cette heu- reuse initiative. Elle me permet, en effet, de rappeler que \otre Municipalité n'a pas, en ces jours tragiques, borné sa sollicitude a soulager les misères indivi- duelles mais a réservé de surcroit a la Ville d'Ypres, en tant que pouvoir public, a ses services administra- tifs, a ses établissements d'enseignement un accueil cordial et empressé. II me plait, Messieurs, de rendre hommage a cette conception large et compléte de la notion de l'hospitalité telle qu'elle fut pratiquée par les mandataires publics de Touquet-Paris-Plage et de vous réitérer les sentiments de gratitude et de sym pathie qu'au moment de leur départ pour Ypres les mandataires Yprois vous ont manifestés. II m'est agréable de mettre cette occasion a profit pour fixer cette page de notre histoire locale et de vous en faire en quelque sorte comme il est de règle pour toutes les assemblées délibérantes le procés- verbal. Cette séance du Conseil Communal d'Ypres, tenue le 23 février 1919 au Touquet-Paris-Plage par autori- sation Royale du 3 février 1919, réunissait, sous la pré- sidence de notre regretté Bourgmestre Colaert, MM. Van den Bogaerde, Vanderghote Henri, D'Huvettere, Bouquet, Sobry, Lemahieu et Seys Valère. Qu'il me soit permis. Messieurs, de relever la présence en cette enceinte de MM. Lemahieu et Seys, qui respectivement en qualité d'Echevin et Conseiller Communal président encore aux destinées de notre chère Ville et de saluer avec émotion la mémoire de leurs collègues qui sont morts sans avoir pü terminer la noble tache qu'ils avaient assumée. Par un hasard étrange en cette séance historique, le Conseil Communal d'Ypres fut saisi de toute la gamme des incidents administratifs que beaucoup de Conseillers ne rencontrent qu'exceptionnellement au cours de leur mandat. Après un hommage a nos victimes civiles et aux Yprois tombés au champ d'honneur, après avoir entendu l'éloge funèbre de M. l'Echevin Fraeys de Veubeke et de M. le Conseiller Communal F,crs, le Conseil Communal eüt a prendre acte de la démission d'un Conseiller, procéda a l'élection d'échevin de M. Sobry, notre ancien Bourgmestre, que son grand age et son état de santé empêchent d'assister cette fête, prit acte de la démission du chef de bureau Boudry et procéda a son remplacement. Puis, Messieurs, on aborda le problème essentiel, le problème qui était l'objet des preoccupations tant des mandataires de la ville que du public Yprois qui assistait en grand nombre aux débatsle grand pro blème de la reconstruction de la Ville d'Ypres. Tous les aspects de ce vaste problème furent exa- minés avec soinla situation financière, la question dés Voies et Moyens, du Rapatriement des Réfugiés et des Services Administratifs, des Transports, des Réquisi- tions Militaires, de la Reconstruction, de la Restaura- tion agricole, questions complexes et difficiles qui toutes tendaient a faire naitre la Vie lè oü il n'y avait que ruines et dévastations. Ces délibérations, Messieurs. le procés-verbal de la séance en fait foi furent empreintes d'un es prit magnifique de foi et de confiance. Malgré l'immen- sité de leur tache, malgré les innombrables obstacles et entraves qui surgissaient de tous cótés, les membres du Conseil Communal d'Ypres ont le 23 février 1919 au Touquet-Paris-Plage affirmé leur foi dans les desti nées de leur Ville. Ils l'ont voulue rebatie, également belle, avec son beffroi orgueilleux, sa Cathédrale Majestueuse, ses demeures patriciennes, plantée la oü elle füt batie jadis par nos ancêtres, au milieu de nos campagnes fécondes, dans l'enceinte ruinée de ses remparts Vauban. Grèce a leur foi, a leur enthousiasme, a leur éner gie, ils ont pü mener a bien cette tache surhumaine. Monsieur le Maire, Messieurs, Quiconque confronte la situation de nos deux villes au lendemain de l'armistice est frappé par l'ana- logie qu'elles offrent. Nous n'oublions pas que si la guerre de 1914 1918 a rasé la Ville d'Ypres au point qu'il n'y restait pas pierre sur pierre, elle a pour vous et tout aussi brutalement sapé l'essor de votre station. Les sacri- Sces, que, depuis de longues années, les générations successives de votre population et votre Municipalité s'imposaient pour hisser le Touquet-Paris-Plage la tête des centres de villégiature de France, ont été compromis dans une trés large mesure et au lendemain de l'armistice vous vous êtes trouvés, comme nous, devant une tache ingrate et difflcile. Pas plus que nous vous n'avez douté de l'avenir. Comme nous, vous avez eu foi en la destinée de votre ville. Comme nous vous pouvez aujourd'hui vous réjouir de la résurrection et de l'essor de votre station embellie. Je suis heureux de pouvoir applaudir au couron- nement de vos efforts, au succès de votre travail, la ré- compense de cette foi, de cette même confiance que le Conseil Communal d'Ypres a affirmée ici même. Je suis heureux de pouvoir au nom de la Ville d'Ypres, au nom de mes collègues du Conseil Communal, former les voeux les plus sincères pour la prospérité de votre ville. Avant de clöturer la séance, et sur la proposi tion de M. le Maire de Paris-Plage, l'assistance est conviée a voter par acclamation la motion suivante Le Conseil Communal d'Ypres et le Conseil Muni cipal du Touquet-Paris-Plage. réunis le 30 juin 1935, sous la présidence de M. le Bourgmestre d'Ypres et de M. le Maire du Touquet-Paris-Plage, dans l'Hotel de Ville du Touquet - Paris - Plage, a l'occasion de l'inauguration du Jardin d'Ypresévoquent le souvenir des années de guerre 1914-1918 pendant les- quelles les habitants d'Ypres trouvèrent au Touquet- Paris-Plage un foyer d'exil et la Municipalité d'Ypres s'installa a l'Hotel de Ville du Touquet-Paris-Plage. Les deux Conseils affirment leur fidélité a leurs souvenirs communs, déclarent leurs deux villes unies dans une solide et cordiale amitié, souhaitent la con- stance des relations affectueuses entre leurs deux nations et adressent Leurs Majestés le Roi et la Reine des Beiges, et a M. le Président de la République Frangaise, l'hommage de leurs sentiments respectueux et dévoués. De bruyants et interminables bravos appuient cette proposition. Cette séance commune étant terminée, la somp- tueuse salle, qui vient d'être le témoin d'un fait, peut-être unique dans l'histoire de deux villes, se vide lentement. En se retirant, on ne se lasse pas d'admirer toutes les merveilles architectu- rales qui y sont accumulées, et qui font honneur au talent et de ceux qui les ont congues et de ceux qui les ont réalisées. Tout étant, pour ainsi dire, réglé au chrono- mètre, nous voila réunis dans la charmante et coquette église, cette même église oü, poür la première fois, aux sombres jours de 1914, nous sommes venus nous agenouiller et nous réconfor- ter dans la prière et le recueillement. Maintenant c'est l'allégresse des grapds jours. Le Révérend Chanoine Golliot, doyen d'Etaples, officie tandis que M. le Chanoine Deligny, Curé du Touquet, prononce après l'Evangile une courte allocution de circonstance au cours de laquelle il adresse quelques paroles de bienvenue aux hótes Yprois. La Messe est rehaussée par le concours de la Symphonie Ypriana qui, sous l'habile direction de M. Van Egroo, exéc'ute successivement le Largo d'Haendel, 1' Ave Verum de Mozart, l'air de Notre Dame de Thuyne pendant la Con- sécration, et la Marche Religieuse de Gluck. A Tissue de celle-ci a lieu l'inauguration offi cielle du Jardin d'Ypres M. le Docteur Pouget, Maire de Paris-Plage, monte a la tribune et y prononce lè discours suivant Monsieur le Bourgmestre, Mes Chers Collègues, Mesdames, Messieurs, En juillet 1914, Le Touquet-Paris-Plage vivait des jours splendides. Joie d'une saison magnifique, favo- risée d'un temps merveilleux Orgueil d'un essor qui s'affirmait et qui, d'un niveau médiocre, nous faisait bondir aux cimes A l'heure même oü nous nous grisions, un meurtre était commis dans les Balkans, la guerre dressait les nations les unes contre les autres, notre France, fidéle a ses engagements, mobilisait. Le jeu de sympathie, de la solidarité internationale jouait. Votre Nation, la Belgique, petite par l'exiguité de son territoire, mais grande par la grandeur de ses sentiments, et la grandeur de son esprit, était violentée et, malgré elle, subissait l'horreur d'une occupation, devenait un champ de bataille, répondait a l'appel de son Roi Héroïque, admiré et regretté, s'élevait au som met de la gloire par la grandeur de ses sacrifices et l'héroïsme de ses sujets. Habitants d'Ypres, vous avez dü fuir vos foyers menacés ou détruits. Vous avez demandé asile a notre Nation, et vous avez choisi Le Touquet pour oublier la tristesse de l'exil et attendre l'heure du retour. Pendant quatre ans, votre vie fut celle des nótres. Combien d'entre vous, en revoyant notre Ville, ont reconnu la Ville oü ils ont vécu, les bois et les dunes oü ils ont promené leurs pas, les bancs oü ils se sont assis, les centres de réunions quotidiennes oü ils se consolaient, ou s'encourageaient les uns les autres. Vos families avaient peu a peu noué des relations cordiales avec nos families, et par la force des nou- velles habitudes créées, vous avez connu peut-être un adoucissement a vos peines. Nous croyons vraiment que Le Touauet-Paris- Plage vous accueillit jadis comme il devait le faire, c'est-a-dire comme des frères malheureux. Nous pensons, aujourd'hui plus que jamais, avec fierté que nous avons acquis votre estime en vous ouvrant nos coeurs, nos demeures, notre cité, au moment oü, pour vous comme pour nous tous, tout semblait désespéré. Les grandes amitiés, les grandes affections se créent surtout dans le malheur, dans la misère. Nos malheurs, nos misères furent les mêmes, nous les avons associés. Ainsi, nous les avons mieux supportés, ainsi nous nous sommee mieux connus, mieux estimés et mieux aimés.

HISTORISCHE KRANTEN

Het Ypersch nieuws (1929-1971) | 1935 | | pagina 2