Conference donrée par M. R. Glorie, aux Amitiés Franqaises d'Ypres,le 29 Décembre 1926 (Suite) Les princes du commerce et de 1'industrie devinrent bien vite des gros capitalistes, des richesses considerables furent acquises. Les economies furent placées en acquisitions de propriétés, si bien que les grosmarchands de vinrent de grands propriétaires terriens et naturellement eux seuls allaient pouvoir prétendre a l'administration des villes, dont les charges absorbantes étaient toutes gra- tuites. Aussi, devenus les patriciens, ils s'isolèrent bien vite ducommun, des plébéiens, lis portèrent d'autres costumes et affectèrent d'autres moeurs, alhchèrent un esprit de caste, qui devait plus tard être mal supporté, mais qui, s'il ne se justifie jamais, s'explique. parce qu'en general ces patriciens se montrèrent hommes de valeur, dotant leurs communes d'un système financier, militaire et adminis- tratif, qui perdurèrent jusqu'a la fin du moyen- age. Pour Ypres, nos Halles mémorables ont durant des siècles témoigné de la grandeur et de la fécondité de l'administration patricienne. Mais ce régime patricien était un gouverne ment de classe, il en avait les quahtés mais aussi les défaüts. Bientöt les pouvóirs restaient entre les mains de quelques uns, la grande bourgeoisie ne voulut rien abandonner de ses prerogati ves et les communs restaient écartés de toutes les fonctions. D'oü mócontentement, qui devait devenir d'autant plus vif que les patriciens déterm - naient seuls les salaires, car ils étaient fixés par les échevins qui étaient recrutés parmi les patriciens. Bientót les plaintes se firent nombreuses, car les ouvriers n'étaient pas isolés. En effet, pour la facilité et la surveillance du travail, les patriciens les avaient répartis en groupes distincts appelés métiers ou ambachten, placés sous le controle d'un marchand de la gilde mais malgré ce controle, des besoins com muns avaient créé entre tous les ouvriers une solidarité puissante, préte et désireuse a affronter la lutte contre les patriciens. Line révolution était inévitable Ettoujours suivant M. Pirenne Artisans opprimés par des règlements impitoyables, marchands et drapiers exclus de la gilde, contribuables exaspérés par l'augmentation constante des impóts s'allièrent contre l'ennemi commun. Alors pour la première fois les villes flaman- des furent témoins de ces combats de rue qui devaient se répéter si fréquemment, au XIVe siècle. Cette situation ne pouvait pas laisser indif férent le Comte de Flandre,Guy de Dampierre, car lui, non plus n'aimait pas ces patriciens qui avaient détróné les nobles, tout en les imitant, et qui ne permettaient plus a ses bail- lis, de contröler leur gestion. Aussi, quand les plébéiens s'adressèrent a lui pour diminuer les prérogatives des patriciens, immédiate- ment il le leur accorda car en diminuant l'autorité des autres, il pouvait raffermir la sienne. Mais, comme il montra trop vite, qu'il n'était intervenu en somme que pour res- treindre a son profit l'autonomie urbaine, des bourgeois qui avaient fait cause commune avec le peuple, pour renverser les patriciens, se rapprochèrent bien vite des anciens magis- trats, leur idéal républicain s'opposait a l'idéal monarchique du prince, et pour le combattre ils firent appel au Roi de France. Estimant qu'ils visaient une annexion a la France, des historiens les ont considérés comme des traitres on les désigna avec mé pris sous le nom de Leliaerts alors que loin d'avoir voulu sacrifier leur indépendance, ils voulaient briser les liens qui les attachaient a leur prince. Mais c'était une grave erreur, une erreur semblable a celle commise par les activistes qui escomptaient obtenir de l'Allemagne, qui ne rêvait que domination, l'indépendance de la Flandre Car Philippe le Bel supprimait les communes en France, et certainement il allait faire de même en blandre. Le Roi de France supportait mal la trop grande puis sance du Comte dé Flandre, aussi allait-il vo- lontiers intervenir pour la diminuer. Aussi les forces a opposer étaient elles prêtes, elles n'avaient qu'a se rencontrer. Le peuple flamand est divisé les Klauwaerts de la Flandre occidentale, car le reste de la Flan dre était restée assez indifférente, anéantiront les patriciens, avec l'aide des Namurois et du Comte de Flandre et de ses nobles, qui tous avaient requ une éducation franqaise et ne connaissaient pas le fiamand, et les Leliaerts lutteront pour leur indépendance avec l'aide du Roi de France. Tandis que Guy de Dam pierre et Philippe le Bel, eux, indifférents l'un comme l'autre au sort de leurs protégés, ta cheront mutuellement de faire prévaloir leur predominance. Et voila comment la bataille de Groeninghe en i3o2 fut, avant tout, une lutte de Flamands entre eux, poussés les uns contre les auties, par des désaccords sur des questions sociales, lutte sur laqaelle est venue accessoirement se greffer une compétition entre deux princes. Si done la bataille des Eperons d'Or a marqué une page de notre histoire, oü nous pouvons avec fierté admirer la bravoure et l'héroïsme de nos ancètres, a l'envisager d'une faqon générale, nous devons regretter que nos pères en soient venus aux mains, par suite de n'avoir pu se mettre d'accord, faute d'une législalion manquant de souplesse, sur les problèmes de la vie sociale et politiques qui les divisaient. Maisil est doncfoncièrement inexact d'afhr- mer que la bataille des Eperons d'Or, fut le résultat d'un conlfit de race ou de langue. Et je pense, comme toutes les conditions sociales dans lesquelles se trouvaient les peu- ples au XIIF et XIVe siècles, se sont évapo- rées depuis longtemps, sans pouvoir revivre jamais, qu'il est pour le moins inutile, si pas néfaste, d'évoquer un faitencore en le déna- turant oü iln'y avait même aucun sentiment unanime qui règnait entre flamands, dirigé contre une France qui n'est plus celle d'au- jourd'hui alors qu'on peut évoquer, un fait non moins glorieux, qui, loin d'avoir été amené par un désaccord entre des gens d'une même race, a consacré la fusion, en une seule nation libre et indépendante, de deux races, qui, mal gré la diversité de leur langue, avaient depuis les temps les plus reculés de l'histoire, vécu d'une seule et même vie. En i83o, Wallons et Flamands, poussés par un même sentiment d'indépendance, refoulè- rent les Hollandais, trop protestants pour les Flamands, trop Néerlandais pour les Wal Ions, et, après avoir vécu durant des siècles sous la férule de tant de peuples étrangers, ils purent enfin chanter dans un même trans port d'allégresse Après des siècles d'esclavage, Le Beige sorti dn tombeau, A reconquis par son courage, Son nom, ses droits et son drapeau. Et donnant en même temps aux générations a venir le plus salutaire des conseils, ils adop- tèrent comme devise nationale, ce qui avait valu l'indépendance si longtemps convoitée L'Union fait la Force Cette union a été maintenue, malgré toutes les divergences d'opinions qui se sont mani- festées en toute liberté et parfois non sans véhémence sur les questions sociales qui pou- vaient diviser les Beiges entre eux. Mais il a suffi que la nation elle-même fut mise en péril, pour que, oubliant toutes leurs querelles, les Beiges se dressassent comme un seul homme devant l'envahisseur. L'unité nationale s'est manifestée d'une faqon éclatante. Les colossales armées Boches n'ont pu la réduire, pas plus que les menées activistes durant l'occupation et, ce qu'ils n'ont pu obtenir avec l'interventio.n de l'enne mi qui teija.it le pays sous sonj0 ils l'espérer, grace aux laisser' peuple induit en erreur aire d> Qu'ils craignent le verdict 1 tous ceux qui voudraient, Cons non, contribuer a amener l'a Belo bord du fossé mais qu'ils le s^h la Belgique ne consentira. au suicid^ Après la guerre, il y eut une cris'' - il fallait remanier complètement f genéblt l'Europe, les Etats devaient Se 1 Carted d'après des principes nouveaux p C°nStitl|( trés simple devait prédominer la Pnnc'! vait seule déterminer les nations Ce1^ lisme linguistique devait bien vite 6 natl0tl partisans en Flandre. Au sujet de la langue, qu'on avait commence arèo"lPl<>1(i la guerre, il restait des griefs a red Incontestablementle gouvernement a et doit encore donner des satisfacti' sont demandées et qui s'imposent en Mais celles ci peuvent être aisemen?!]1 nées dans le cadre de l'unité de la n t en respectant la liberté de chacrm. ne,! Si le flamand, et principalement le flam cathobque, qui après la révolution de ,si avait lui même banni la langue flam parce qu'elle ressemblait trop au néerlad' la langue des hollandais Protestants'111 lesquels des flamands catholiques n'ont ia31" et ne sauraient faire bon ménage de aujourd'hui son émancipation compléte* exclusive en flamand, e'est son droit - ce qui est son devoir, e'est de respecter'! droit égal de ceux qui, même en Flandre,™ a toujours été bilingue, veulent puiser da) la connaissai.ee de deux langues, dont 1'®» mondiale, des avantages qu'une seule saurait fournir. Ernest Renan, le grand philologueell torien franqais, né a Tréguier (Cótes-du Nori en i823 et mort a Paris en 1892, dans» conférence faite en Sorbonne le ir Mars® disait Cette considération exclusive de la langui J) a, comme l'attention trop forte donnéeala race, ses dai gers, ses inconvénients. Quand on y met de l'exagération on se rentenat dans une culture déterminée, tenue pon nationale on se limite, on se claquemc On quitte le grand air qu'on respire dank vaste champ de l'humanité pour s'enferit! dans des conventicules de compatriot!, Rien de plus mauvais pour l'e? prit. Rien de plus facheux pour la civilisation. N'abat donnons pas ce principe fondamental qm l'hemme est un être raisonnable et moral] avant d'être parqué dans une telle ou telt langue, avant d'être membre de telle ot telle race. Avant la culture francaise, la culture allemande, la culture italienne,ily a la culture humaine. Voyez les grands hommes de la Renaissance, ils n'étaientffl Franqais, ni Italiens, ni Allemands. ft avaient retrouvé par leur commerce avec l'antiquité, le secret de l'éducation véritable de l'esprit humain, et ils s'y dévouaient corps et ame, comme ils firent bien. Pour se rendre compte, que ce n'est pas'' langue qui puisse déterminer les nations,i- suffit de se rappeler que les Etats IW d'Amérique se sont insurgés contre l'Ant" terre malgré qu'ils parient la même lang» Q)ue de même les colonies de 1'AmériquQ1 Sud qui parient l'Espagnol se sont s^Pare|| de l'Espagne, que par contre l'Alleman Franqais et l'Italien forment trés bon menag ensemble en Suisse. ja A plaisir on exagère l'importance e langue.y Ce ne sont pas les mots, mal^|s idéés, les sentiments qui sont essen'](lS Voyons l'effet de cette distinction dans eP petit des états, dans un ménage. femme ne parient que le flamand,et un na littéraire, mais pour mille et une rais0^nfj. ne s'entendent pas. II y a des disputes nuelles dans le ménage. Non seu ®m^jentót mots, mais les gros mots pleuvent, e'est la rupture et le divorce. Dans eet autre ménage, le mari fla®a -s épousé une wallonne. De leurs cosUrj et il échappent des déclarations que le rna n'en revient pas lui meme, balbutie qais, et auxquelles la femme répon baiser donné en flamand, la comfflu sentiments fait régner le bonheur. jeS Pourrait-il durer, si, sans c0,?ceS^gr leut époux voulaient mutuellement s 1111P jeS do- langue Sans tolérance dans ®a'5 maines, non seulcment pas de bon stllVyt.) pas de ménage possible.

HISTORISCHE KRANTEN

Het Ypersche (1925-1929) | 1927 | | pagina 4