LA CROIX D OR.
ÜM1
9 "e année. N"s 920.
Samedi 24 Octob. 1874.
z
o
ca
In
>-
o
>-
22
Le Journal parail le Mercredi et le Samedi.
i on eontimes; la li'nte.Uii numéro du journal, pris au Bureau, 15 centime,s.
Les insertions coütent 15 centimes la ligne.Les réclames, dans le «orps du journal, se patent 3 a Claires
Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 20 li. .e>N'
C H E M 11\ S D E F E
LETTRE DE MGR L'ÉVÊQUE D'ORLÉANS
[Suite. Voir Ie N° précédent.)
II.
Eli bien! monsieur, voire bonne foi ne
vous permel pas de le nier, après de si
solennelles promesses, ce que les Piémonlais
apportaient a Rome el au Pape, étranges
I bérateurs! c'était Poppression, ia spoliation,
la rui ne.
En elfet, line fois ces precautions prises
devanl la légéreté de l'opinion publique, qui
se paie si faoilement de mols, el de-vant la
défaillance des consciences poliliques, qui
ne ilemandent qu'a êire trompées, on a mis
ia main a l'ceuvre, habilement, légèrement,
el on s'esl donné carrière.
La première chose que voire Chambredes
Dépuiés a faile. ca élé de volcr, el voire
Sénai a sanctionné, et voire Roi a promulgué
tine loi qui applique a Rome, et a loui le
nairiinoine de Si-Pierre, les lois des 7 Jmllel
1866, 16 Aoül 1867, 29 Juillel 1868, 11
A it'll 1870: c'esl a dire lout ce chef-d'oeuvre
de legislation spoliatrice qui enlève loute
propriété a l'Eglise, disperse son pairimoine
séculaire, coiifisque tons ses biens, auéaniil
ses corporations religieuses et ébranle sa
constitution elle-même.
Et iI a été insiiiué, par cetle mème. loi,
one junle dile liquidalrice, qui poursuit,
silencieusement, implacablement. I'oeuvre de
spol ia t ion par laquelle voire gouvernement
prélend répondre a l'atlente de I'Europe ct
a la confiance des catholiques.
Ainsi done, vous aviez promis de lout
respecter, de lout conserver, el les corps
moraüx ecclésiastiques, el leur organisation,
et leurs propriétés: el vousavez lout coiifis-
qtié, lout bouleversé, tout délruil.
El a l'heure qu'il est, que posséde l'Eglise
a Rome?
Rien: le Pape ne posséde en propre pas
mème Saint-Pierre ni le Vatican; pas mém e
la chambre oü il habile.
On avail dit: le Vatican el un jardin. On y
est arrivé. Et encore le Vatican et ses jardins
nesont pas au Pape, maisa vous. II en jouit
sous voire bon plaisir.
II est la commewn localaire et un étran-
ger, dans ce palais bati paries Papeset
plein encore de leur souveraineté séculaire.
Du reste, il ne pent plus mettre le pied
dans Rome. Ne dites pas que vos lois ne le
liiii inlerdisenl point. Voire presence a Rome
Ie lui interdit! Faul-il exposer sa personne
sacrée a des inanifeslalions. tumuilneuses,
comine celles dont nous avons é.lé lémoins
ces jours-ci mème, oil des cris de mort roten-
lissaient conlre lui, jusqu'au seuil du Vati
can?
Voila done la situation aetuelle du Pape et.
de l'Eglise dans ceile Rome oü vous aviez
pris fengagement de lout sauvegarder:
La personne du pape est enlre vos mains,
le Sacré Collége entre vos mains, le futur
conclave enlre vos mains;
Mais de plus:
Depuis leSonverain Pontife'jnsqn'au der
nier clerc de la dernière église de Rome, tout
e.At a voire merci; le pain quolidien de lout
le clergé depend de vous: Pape, cardinaux,
évéques, sonl pour leur substance malériel-
le, sous le jong de voire finance: une révo-
Iulionune guerre, un caprice de vos Cham
bres, et lont le clergé de Rome peut ètre tout
a coup réduit a la mendicité.
All! il déplail anx minislres ilaliens qu'on
appel le le grand fait de la liberation de Rome
une mam-mise du fisc italien sur l'Eglise!
rnais avouez, monsieur, que si je voulais
appeler les choses par leur nom, je devrais
me servir d'un ante mot.
On fail de lelles lois, on en arrive la, et on
ose déclarer que Ie patrimoine de l'Eglise
romaine demeurera enlier aux mains de
l'Eglise: II palrimonio delta Chiesa rornana
rimarra itilero alia Chiesa'.
Mgr d'Orléans parle ensuitedela suppres
sion des ordres religieux.
Hécalombe immense! des milliers de reli
gieux et de religieuses, en lialie, frappés
par vos lois, se sont vu arraeher de ces asiles
séculaires de la piélé, de la science et de la
charilè, qu'ils avaient fondés et oü ils avaient
droit de vivre el de mourir. A Rome seule-
meiii. 126 convents d hommes abrilaient
2.876 religieux, 90 couvenls de femmes,
2,183 religieuses; vos agents, vos soldats
out fait irruption dans ces asiles vénérables,
et Ie cri des proscriptions antiques a élé en-
tendu de nouveau:
El il n fallu parlir, s'arracber a la paix de
ces sandnaires, et lout vous abandonner. Et
les voila aujourd'htii, disperses, erranls,
abriiés comme ils peuvent dans les niaisons
oü la charité a bien voulu leur offrir un re
fuge.
Plus habiles que ne Ie fut autrefois la Ré-
volulion fiiiiicaise, vous avez mis, je lesais,
un tempérament a votre spoliation: ces reli
gieux, que vous avez jetés dans la rue, aprés
les avoir dépouiljés tie lout, vous vous èies
reeonnu a vous-mémes un devoir de justice
et d'honneur envers eux: Un debito digius-
tizia c d'tmore.
La justice et I'honneur! Grands mols et
grandes choses! Voyóns comment Ie gou
vernement iialien les a enlendus, et ce que
la justice el I honneur vous font donner pour
vivre a ceux que vous chassez de leurs mai-
sons, après leur avoir tout pris.
Aux profes des ordres mendianis, vous
donnez 260 fr.un pru plus de 60 cent, par
jour; el aux con vors des mèmes ordres, 144
fr., ou mème 96 fr., e'est a-dire 26 cent,
par jour, selon leur age.
En leur donnanl un secourssi cruellement
dérisoire, vous supposiez sans douie qu'ils
recourraient a la charité publique; mais voi
la qu'en mème temps vos lois de police leur
dafendent d'y recourir, et vous leur interdi-
séz la qcéte au nom de la moralité sociale:
abitudine dannosa nei rispetldelta mora-
litd sociale. Eli bien! au nom de la moraiilé
sociale, qu'ils meurent de faiin et s'en tirent
comme ils pourront!
Pour les convers des ordres qui ne men-
dient pas, il faudra que, selon leur age, avec
300 fr., 240 fr. et 200 fr., au milieu de la
cherté croissante de loute chose, ils vivcnl.
Quant aux religieux et aux religieuses de
choeur, s'ils ont soixanle ans el plus- ils rcce-
vront 600 fr. par an; s'ils onl de quarante a
soixanle ans, 480 fr.; et encore, quund ils
auronl aiteml soixanle ans, ile no rqcevront
pas davaniage; et s'ds ont moins de quarante
ans, pas mème 1 fr. par jour, 360 fr.
Autre énormilé. II y a a peu prés cent
gi évéques a qui on a tout enlevé: leur
maison, leurs lucns, el qui ne recoivent rien
de vous, pas mème la pension des religieux
convers. Le Pape leur fait une aumone:, 600
francs par mois. Certes, si quelque chose
devait cchappcr a voire liscalité, e'est ce
sccours qui vienl du denier de Saint-Pierre,
qui est deux fois uneaumönc, I'aumonedu
Pape et la notre. Eli bien! sur cette aumóiie
mème, chaque évêque doit vous payer un
im pöt.
Parmi ces religieux de lout ordrc. il y en
avail de vieux, d'infirmes, de malades, d'a-
vengle>; qu'en a-t-on fail? On a trouvé tin
moven ceonomiqne de les faire vivre, et j'ai
été lémoin a Rome d'un douloureux specla-
cie: c'esl dans la maisou des Cupucins, piés
du palais Barberini, que cela se passé. La,
on a réunielon voilenlassés lotis les vteil-
la ds, tous les infirmes de lous les anciens
convents de Rome; ils out élé arraches, en
pleurant, des maisons oü ils avaient vecu
sous une régie de leur choix et oü ils avaient
bien acheté, certes, le droit de mourir. par
toute une vie de labeur et de pénitence con-
suméela: non, ils mourront, tristes, désoles,
abandonnés, dans eet hópilal de voire in
vention, loin de tous ceux qui les aimcrent
et furent les compagnons de leur existence.
Voila ce que deviennent les personncs;
voyons ce que deviennent les choses.
La spoliation des ordres religieux est com
pléte, absolue; lout, maisons, jardins, cabi
nets, musées, bibliotbéques, archives, objets
rares, lous ces trésors de la religion, de la
science, de l'art, de l'anliquité, lout a été
enlevé aux monastéres. C'esl vous qui désor-
mais disposerez de lout.
N'y aura-t-il pas un jour oü, avec les
vieux calices et les vieux tableaux, le gou
vernement itahen, aux abois de plus en plus,
vendra tout aux Anglais?
Ainsi la religion, la poésie et l'art avaient
sanclifié tous les sommels, toules les vallées,
tous les sites radieux de celte belle Italic. Do
partout ia prière y montait vers Dieu en
accents ininterrompus. Dans ces solitudes
comme dans ces cilés, partoul, l'ame y avait
ses asiles pour la vie desinteresse el saintc,
pour l'étude tranquille, pour les dévoue-
ment de Papostolnt el de la charité. Toutes1
créalions de la foi calhoiique sur cette terre
chrétienne ont disparu on vont disparaitre;
on ne renverse pas encore lous ces murs!
mais l'ame n'y est plus! La vie n'y est plus!
rn
cn
o
CO
ye
O
C/3
•H
rc
rrj
CO
CC
O
C'j
m
S!'
—3
c*3
CO
30
•Po-
Poperinghe- Ypres, Ö-1 :>,V-2ti,9-30,10-t>8,2-l,r>-0t>,9-20Ypres-Poperinghe, 6-50,9-07,12-05,3-57,6 50,8-43,9-50.
pe.ringhe-Hazebrouck, 7 13, 12-23, 4-17, 7-13. Ilazebrouck-Poperinghe-Ypres, 8-35, 10 00, 4 10, 8-25.
Ypres-Ttow/ers, 7-30, 12-28, 6-43.Itoulers- Ypres, 9-23, 1-50, 7-80.
Rooiers-Pruges, 8-45,11-34,1-13, (L. 5 56), 7-36, (9-85. Lichterv.) Lichterv.-Thourgauk, 4-25 ui. Bruges-Kouters. 8-28,
12-30, 5-13, 6-42. Lichterveldo-Courtrai, 3-28 in. 9 01, 1,30, 5,45 7,21 Zedelgliem Tliouroul, 8-40. 1,05, 5,26, 6,58.
Ypres-Courtrai, 8-34,9-49,11-18,2-38,3-^5: Courtrai-Ypres, 8-08,11-02,2-56,8-40,8-49.
Ypres-Thouroul, 7-13, 12 06, 6 20, (le Samedi a 5-50 du malin jusqu'a Langhemarck). Tliouroul-Ypres, 9-00, 1-18, 7 48,
(le Sainedi a 6-20 du malin de Langhemarck a Ypres). t rp
Comines-Wnrnêton Le Touquet-llouplinos-A»v»e»/ières, 6 00, 10,15, 12-00, 6-40,Armentières-Houplines Le 1 ouquel- W ai -
nêton-Comities 7-23, 10,50, 4-10, 8-40. Comines -Warnèton 8-40, m 9-30 s. Warnêton-Comines 5-30, 9-80,
Courtrai Itruges, 8-03, 11-00, 12-38, (L. 8-13), 6-83. (9-00 s. (Lichterv.J—Bruges-CowWrai, 8-25, 12-50, :j-13,
vru/tu-, o-iöj V/-4-1, z-io. ïrigeiiiiiJMSM'.i'-L/eynze, o-ül
11-20,4-46. Deynze Ingel munster7,31 9-10 2'cl, 11.54 5,19, 8-20 s.
Ingelmunsier-Anseghem, 6-05, 12-10, 6-15. Ausegheiu-/?w/e7w(«zster, 7-42, 2-20, 7-45.
Lichiervelde-Dixir/ude-Furnes et Üunkerke, 6- 30, 9-08, 1-33, 7-35. DiMi/ierA'e-Furnes-Dixmude et Lichlervelde, 6-45, 11 t3,
3-45, 5-03.
Dixmude-ATie«po/<,9-53,1O,35,2-20,5,10 8-40. Nieup-/)t>»ï,(ville)7-40,12-00,4-24,5,56,9,30,(bains)7,30,11,30,4,15,5,50.
Tliouroul -Ostewde, 4-50, 9-13, 12,03, 1-30, 8-03. 10,15— Osiende-Thouroul, 7-53, 10-10, 12 25, 4,45. 6-15. 9,15.
Selzaete Eecloo, 9-08, 1-28, 8-23. Eecloo-.Se/-aefe, 8 33, 10-15,4-22
(land Temeuzon, (station) 8-17. 12-15-7,-25 (porie d'Ainvers) 8-3012-4;). 7_«.
SeliMu-Lokeren, 9 04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) - Luke.ieu-8tL.iKJe, o
c o ia II i: s I* O IV D 'V JV o
Ternouzen-Gand, 6-00, 10-30,4-40.
10-25, 4 48. (Ie Mardi, 9,30.)
COURTRAI, BRUXELLES.
Courtrai dép.
Bruxelles arr.
0,37
9,20
10,83
1,35
12,33
2,23
COURTRAI, TOURNAI, L1I.LE.
Courtrai (iep. 6,37 10,56 2,84
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48
Lille 7,37 12,08 4,00
COUllTRAI, GAND.
Courtrai dep. 6,42 12,31
Gand arr. 8,01 1,31
BRUGES, GANO, BRUXELLES.
3,47
6,14
5,34
6,29
6,32
3,44
3,04
0,33.
8,58.
8,47.
9,41.
9,83.
6,40.
7,36.
Bruxelles dép.
Courtrai arr.
BRUXELLES, COURTRAI.
5.22 8,28 12,21 8,35 6,47.
8,00 10,46 2,44 7,86 8,44.
Binges dép. 0,49 exp. 12.34 3,52 exp. 6,43 8,19 exp.
Gand arr. 7,34 1,49 4,42 7,58
Bruxelles 8,50 4,00 3,50 9,3! 10,-6.
Lille dép.
Tournai arr.
Courtrai
Gand dép.
Courtrai arr.
Bruxelles dép
Gand arr.
Bruges
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
8 20 8,2(5 11,03 2,18 8,20.
8,42 8,86 11,34 2,40 5,39.
6,34 9.47 12,26 3,38 6,33.
GAND, COURTRAI.
5 13 9,38 1,28 4,24 7,21.
6,34 10,31 2,49 3,31 8,42.
URUXELLES, GAND, BRUGES.
8,14 11,33 3,12 5,58.
.6,00 9,41 123 4,26 exp. 6,37 7,22.
7 20 10,34 2,38 5,11 /,2"2 8,58.
A M. MINGIIETTI,
sur /a spoliation de l'Eglise a Rome et en
Italië.
SPOLIATION DE l'ÉGLISE.
LIQUIDATION DE LA PR0PMÉTÉ ECCLÉSIAST1QUE.
All LECTEUR.
Un de mes amis, écrivam de bcancoup d'espril,
alia un jour chez son édileur: il le li ou'va vein
en Tore et coin-lie sur un divan lies-has, oil il
s occupait acliveineot de fuuier dans line 'grande
pipe tiirqne, lout en sougeanl an rnoyen ii pren
dre pour publier la seconde edition d'uii livre
avanl la preniière.
l. éerivain, ii la vite dTin Tnrc aussi niagiiifique
que soil édileur, cut honle de son maigre coslnine
europeen; il pi it néanmoins mie pipe el s'élen-
dil sur le divan, en se drapanl dans son palelot
d'une facon lout orieniale.
lis écliangèrent quelques bouffées dc fiiinee,
après quoi:
- Qu'y a-l-il? dit le Tore.
II v a, répondit l'Eiiropéen. qi'ie je désire
oblenir nil inslanl d'audieuce de la part de voire
Haulesse.
Parlez, Cl gracieusemcnt le musuiman.
J'ai envie d'écrire deux nouveaux volumes,
dit rhommc de Lettres, et je ne sais trop quel
sujet clinhir. Quel genre est le plus a la mode?
Faites-moi un voyage, répondit l'éditeur.
Bepuis que M. A. Dumas a inventé Ie beefleack
d ours el les lorrenis de vingt-cinq pieds qu'il fran.
chit avec la délicatesse d'un isard, le public adore
les voyages.
Je vous ferai un voyage en Orient.
I. Orient est un pen usé, dit l'édiieur.
Tuis il ajoula en sourianl aussi gracieusemcnt
que cela lui fut possible:
Mais une plume He talent a le moven de tont
rajeunir.
I,'auteur s'inclina.
J'y ajouterai. Gt-il. unerelachea Algeret
dans nos possessions d'Afrique; ce sera palpitant
d'inlérêt el d'actnalilé.
Quehpies jours après celle conversation, élant
allé cliez eet ami, je le lionvai en train de terminer
tine page de son livre, en haul de laquelle je lus
ce qui suil:
Un an de voyages dans l'Asie Mi'nelire. la Pa
lestine et I'A ra hie. avec une relache dans nos pos
sessions d'Afrique.
La nier élait loujoiirs aus
si courroucée, et les vagiies uo nacaienl a chaque
instant de nous englootir. Dans cette exlrémilé,
je dois le déclarer poor l'honiieur de la vërilé,
aueune pensée de erainle ne paivml ii se faire jour
dans moil ame, qui n'elaii frappée que du qi er til
de sublime qui s'offrail ii nos veiix.
Je fis alors observer, quoiqtie litimWement, a
l'aulenr:
1* Qu'il n'avait jamais élé en Orient.
2° Que n'ayanl jamais fail aiicnn voyage, il lui
serail assez difficile dt: donner au sien une couleur
locale qtieleouque.
A cela. il répondit:
1° Que s'il n'avait pas élé en Orient, il avail line
pipe qui en ven,ut el qu'il n'avait jamais fuiné que
du tabac du Levant.
Quant au seeond point, il se laissa ébranler par
mes raisons, et il répondit qu'il aviserailau moyen
SITUATION FAITE AUX REL1GIEUX ET AUX ÉVÉQUES.
lime mea sunt, veteres migrate cotoni!
VIII
du voyagér.
En eflet. il munla le lendemain dans tin omni
bus qui le fit voyager jusqu'a Meudon.
A son retour, il lermina son livre, qui eut un
grand succes. II y «-til un rliapitre sur la poliliqtic
extérieure des orienlanx qui mit toule la diplo
matie en émoi; d un autre in I i I ii Ié: Une venle
d'esclaves ii Smyrne, an sujel duqild les phi
lanthropes de Paris se mirenl sur les denls.
Si |'ai pris I» liberie grande d. cooler line his-
toire aussi s.uigrciliie, c'e<t pour les gens qui,
comme I'auleut donl je viens de purler, sunt assez
lieineiiseinent organises pour purler de Ionics
sui tes de choses indisliuclemenl, el plus parlicu-
lièreiuciil de celles qu ils n'onl jamais vues.
Comme il a pu m'arriver Ircqiieiiuiu nl de pur
ler, dans le conranl (le eel ouvrage.de la iner, des
oiséaux du vent, el d'une funic d'aulres choses, je
pense qu'il n'esl pas inutile de declarer, pour Irs
P.trisiens qui se sonl ii peine hasardés ii depasser
les barrières, que j elais assez poelé ii avoir sur
ma finêlre des fleuts malades, tnipiisoiinécs
dans des vases, el des oiseaux empaillés par M.
Gannal; s'ii lie m'avait élé personnellemenl dé-
monlré qu'il y a d'aulres (leurs que celles qui
meurenl de la poilrine dans nos serres, et d'au
lres oiseaux que ceux enfennés dans les cabinets
d'hisfoire naturelle ou dans le bois de Boulogne.
lei, comme aillcuis, loisque je parlerai d'un
Hot de ia mcr, d ime bouffée dc vent, de la coulcur
d une pa livre plante perdue dans une crevasse de
rocher, e'est que j'aurai été mouillé par ce flot,
j'aiirai senli le passage de ct-tle boufiee de vent dans
tnes cheveux, respire 1'arome de cetle plante soli-
taire. Car une parlie de mon enfance s'esl écoulée
dans des bruyères paisibles el inconnties oü je me
baignais dans le soieil, et si je suis it cette heure
bien loin de mon cher Eldorado, occnpé ii mettre
ces pages e» ordre, e'est que, dans lonte l'ëchelle
de la creation, en y comprenant la creature la
plus vaporeuse qui puisse éclorede la cervelle d'un
poète, je lie sais pas im êlre assez poétiqiiemeiit
doué pour se nourrir exclusivenient deludes et de
parfums.
A Madame***.
C'c-t pour vous, Madame, que je commence au-
jourd bui ce journal de bord. Ne vous effrayez
pas cependant ii ce debut; je ne prélcnds pas, le
inoius du monde, vous imposer l'obligation de
lire mon journal. Dien me préserve de vouloir
vous condamner a un récit forcé! Ce que j en
fais ce u'cst que pour ne pas manquer a cel enga
gement que j'ai pris envers vous, de noter. jour
par jour. sur quelques feuilles éparses ce que le
ciel, la terre, la nier ct i'inlêrieur de noti e navire,
pourraient nous offrir de plus remarquablc pen
dant notie traversé du Havre a Nevv-York.
J'ai done une excellente raison de ne pas
nëgliger d'amener ce journal a bonne fin; et
vuns voycz vous-nièmes que chacune de ses pages
est un anneau du charnon invisible et mystérieux
qui lie deux êlres l'un a l'aulre el que l'on appelle
une promesse.
Songuz ensuile a ceci. qu'il me faudra toujours
vous lac outer mon voyage d'une manière quel-
conque: demain si cc n'esl ahjourd'liui; de
vive voix, sinpn par écnl.
Avec les souvenirs iutimes, les impressions, its
PROFANATION ET DEVASTATION DES LIEUX SAf.RKS.
descriptions, les épisodes, etc., etc., mon rccit
poureait bien s'étendre au dcla des bornes les
moins raisonnables. Un nariateur une fois lancë
ne s'arrêle pas en cliemiii pour peu de chose; il
n'est guèie possible de I'lnteiTompre avec fruit; et
songez quel supplice ee serafl pour vous. s'il vous
arrivait, un soir, au coin de voire feu. de vuns
être exposée a une narration dont vous ne pour-
riez prévoir le li rme!
Ainsi, vous voyez que, a tout prendre, il vaut
beaucoup mieux que je rédigt: ii loisir. au courant
de la route, ee journal de voyage; vous pourrez le
lire feiiiile a fcuille, de loin en loin, selon que
vous en aurez envie. Bien mème ne voirs empé-
chera d'avoir envie de ne pas le lire (In lout, pour
pen que vous ayez quolque cho.-e de plus impor
tant a faire, comme tic visiter les pauvrcs, que
vous aimez liint.
Vous souvient-il, Madame, de ce qui s'esl passé
entre nous, lorsque j'eus I honneur de vous fane
nia visile d'adieu?.. Vous voulütes bien me faire
hommage d'une croix d or, et me dire, avec voire
bonté aeconlumée:
Prenez cetle croix, et gardez-la en mé-
moire de I'ainie de voire mere; cela vous portera
bonbeur.
Je vous ai cm, Madame; j'ai mis pieusement
sur ma poilrine ee talisman que vous vouiiez bien
me dormer. An.-sisi jamais jte public ce journal,
je lui donuerai pour litre la Croix dor. Je crois,
d ailleiirs, que ce bijoux vénérablc ne prut qu'a-
voir une iulluenee salulaire sur ma destinée.
A CONT1NUER.