LA CROIX D'OR.
/QuéJ*--* L' Aj^
^GtANc
Samedi 19 Décemb. 1874.
9me annee.
z
O
sa
-<
z
O
iiMi
&S
r°
>-
20
>-
-<
z
Le Journal parait le Mercredi el le Samedi. Les insertions coiitent 15 centimes la ligne.Les réclames, dans le corps du journal, se paient 30 centimes la ligne. In numéro du journal, pris au Bureau, 15 centimes.
Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coiitent 20 fr. les 100 exemplaires.
tMKiWIi\S he; f f k.
AYIS.
Los personnes qui prendront un
ABONNEMENT D UN AN pour
1875 recevront notre journal
gratis jusqu'au premier Janvier
j usqu au premier
prochain.
LA' PAROLE DE PIE IX.
l'ère nouvelle
Voici la traduction du magnifiqne discours
prononcè par Ie Pape Ie jour de l'lmmaculée
Conception devant une foulc de fidéles, par-
mi lesquelles de nobles dames romaines et
étrangéres qui venaienl ofTrir a Sa Sainlelé
des vètements sacrés pour les églises pau-
vres:
Aprés quelques brèves paroles (et je dis
bréves a cause de renrouement de ma
voix), je vous donnerai de lout cceur la
bónédiclion aposlolique.
II me suflil de vous rappeler comment,
au milieu ties mouvemenls qui accumulent
de nos jours tant de désordres el de ruines
sodales, les hommes qui ont réussi dans
leurs enlreprises injustes, qui sont par la
nième des instruments dans la main de
Dien pour punir la multitude des péchés,
ont lous promis aux peuples courbés tout
a coup sous leur joug une ere nouvelle. An-
noncant au monde entier l'arrivée de cette
ére nouvelle avec la morale restaurée, avec
le commerce étendu, avec ['administration
publique rajeunie, avec les préjuges anti-
ques et les vices des anciens gouverne-
ments detruils a jamais, ils se sont présen-
lés a ces peuples ébahis devant un tableau
si riant.
Ai-je besoin de dire si tout cela s'est réa-
lisé? Vous en jtigez vous mémes. Seule-
ment je dirai que vous et avec vous mille
ei mille aulres chrétiens s'emploieni a soti-
lager les misères du peuple, a snbvenir
aux splendeurs du culle qu'on voudrail
diminuer et anéantir.a pourvoir largement
a l'éducaton, aux maisons de refuge et a
lanl d'autres ceuvres pies. El tout cela vous
le faites pour rétablir ce qui élait et ce qui
n'est plus.
y II y a pire (sans parler des défeclions et
des apostasies qui sont deux fois pires en-
core), il y a pire: c'est de voir cerlaines
ames faibles, mal fondées sur les saines
doctrines, qui se sont laissé surprendre,
et, comme des roseaux fragiles, onl plié a
a lous les vents pour se plonger souvent
dans la boue. Les grands agilateurs en onl
liré ayanlage; ils onl vu se dilater Ie régne
de la matiére.
Mais déja plusieurs reconnaissent leurs
illusions, el je pourrais ciler sur ce point
des trails de leis el tels, qui avouent avoir
trouvé 1 age de fer la ott ils croyaient trou-
ver I age d'or. En attendant, je vous invite
a prier pour la diflicile conversion des pre-
miers et pour le retour des seconds.
El puisque j'ai parlé de l'ère nouvelle,
moi, moi- mème.je la signalerai au monde,
celte ere nouvelle, dont vous ètes, très-
chers enfants, une portion choisie.
N'est-ce pas une èrcnouvelleque eet élan
général de charilé qui vous consacrc a tant
d'ceuvres pieuses? Ne m'en fournissez-vous
pas aujourd'hui mème la preuve en me
présentant ces ornements sacrés, destines
a subvenir a la pauvreté de la maison de
Dieu?
Et vous n'êles pas senls: vous avez de
zélés coopérateurs el coopéralt ices sur tou-
te la face du monde calbolique.
Ere nouvelle'. Celte foule extraordinaire
qui remplii les temples saints pendant la
neuvaine préparatoire it la féie de l'lmma-
culée Conception de Marie que nous
célébrons aujoud'hui. Oui, les églises de
Rome sonl peuplées de fidéles écontant la
parole divine, implorant le secours de
Tt és- Ha utse pressant aulour des tables
eiichanstiqucs, afin que, forlifiés par la
nourrittire angéliqtie, ils disposent leur
ame a 1'acconiplissement de tous les
devoirs.
Ere nouvelle, ces pélerinages dévots;
ere nouvelle, celle fermelé sacerdolale
dans la resistance aux assauis des tyrans,
ces exemples de force donnés au troupeau
universel. Ere nouvelle, ces reslaurations
et construclions d'églises; ère nouvelle,
ces ceuvres de charilé si multiples, si
variées, mais loutes ayant pottr objet la
gloire de Dieu et la sauclificalion de l'ame
de chacun et de l'ame du prochain; ère
nouvelle, cel embrasseirient d'amour de
loul le monde catholique vers ce centre
d'unilé, vers cette cliaire de vérilé. All!
c'esl l'ère nouvelle qui réjouit les anges,
reconforle les hommes et devient le gage
d'un avenir meilleur.
Tout cela se prodttil au milieu des
contradictions el des abus. Et il ne faut
point s'élonner que, durant la luttecontre
l'Eglise et en des temps si troublés, on
ttouve tant d'ames plus enflaintuées que
jamais du feu de la charilé qui, aspiraut
au bien, se fortifient dans le bien et se
persuadenl que ce bien est tout en Dieu.
Je ne dirai rien de ce qui arriva de
y> semblable dans les siécles chrétiens; mais
je rnppellerai que Tübie el Esther, en des
temps encore plus anciens, et mille et
mille autres avec eux, resplendircnl de
saintes vertus, tandis qne la persecution,
l'esclavage et les édits des tyrans oppri-
maienl le peuple de Dieu.
Pour vous, je vous dis: Sic state in Do-
tnino, varrissimi. Demeurez fermes en vos
propos, car, bien que l'orage soit terrible
et éclate parfois avec fracas, souvenez-vous
que nous traversons un letups d'épreuve et
que nous devons nous exercer dans la con-
stance, dans la prière et dans la conliance
en Dieu.
Du haut des cieux, il vous contemple,
les anges vous environnent, Marie- Imtnacu-
lée vous couvre de son manteau, et la hé-
nédiclion du FiIs descend sur vous, sur
vos families, sur le peuple, pourdonner
assistance a tous et consolation a son Egli-
se qui pleure l'égaremenl de si nombreux
enfants, et se confie dans la bénédiction
de son divin fondateur.
Benedictio Dei, etc.
LES FINANCES ET LA LIBERTÉ
INDIVIDUELLE EN ITALIË.
Le gouvernement italiën a deux questions
qui le préoccupenl cl dont il aura beaucoup
de peine a se lirer. La première est la situa
tion financiére. On a beau alligner des chif-
fres, présenter comme des ressources bud-
gélaires des espérances non réalisées, mèlcr
les subventions recues des compagnies de
chemins de fer ou les sommes empruntées
avec les recettes de l'impót. II n'en est pas
moins certain que Ie budget du gouverne
ment italien se soldera par un déficit appro-
cbanl le clnlfre de 100 millions.
Mais ce n'est pas le seul point noir. Le libé
ralisme et l'onité n'ont pas empècbé les
bandits de pulluler dans le royaume du roi
galant homme. lis y ont méme largement
eonlribué. Ce ne sonl pas settlement les par-
liculiers qu'on dévalise et les gens riches
qu'on saisit comme ótages pour se faire
payer une rancon, le bandit italien a bien
d'autres audaces.
Comme, après tout, en dépouillant les
autres, il ne fait que suivre les exemples
venus de plus haut, il s'altaque aujourd'hui a
ceux qui osent l'arrêter dans l'exercice desa
profession. Les juges et les gendarmes ont
loujours été reconnus comme les ennemis
nés des bandits et des démagogues. A Paris,
les communards les fusillaient, les bandits
italiens les traquent avec la plus grande
énergie. Gare au magistrat qui instruit
l'affaire d'un frère en banditisme, son compte
sera bienlót réglé. Les juges tremblent, et
les jurés, peu soucieux de s'altirer une me
chanic affaire, acquillent réguliéremenl les
assassins pour conserver un pére a leurs
enfants.
Le gouvernement italien, connaissanl la
mauvaise impression que ces fails produisent
en Europe, a préparé un projet de loi dont
nous trouvons le résumé dans une correspon-
danee du Temps. II y serail dit dans l'article
l0r:
1° Les foclionnaires de l'Elat ne sont pas
protégés par les lois actuelles contre l'exci-
lalion au mépris, a la haine, etc.
2° Le juge d'instruction, dans le cours
de l'examen d'une cause criminelle, obtien-
drait la facultc que posséde le président des
assises, dc faire urrcter immédialement les
X
So
*3
s:
O
£-1
CO
O
3
-3
O
O
K
3
TJ
vc
o
rn
22
3
20
rr;
C/2
■H
20
ro
G
70
H
O
a
H
O
C/3
üC
O
n
ro
22
rn
CO
-3
50
IV
28,
48,
ar-
Poperinghe-Ypres, 5-t!i,'-25,9-30,10-58,2-18,8-05,9-20 Ypres-Poperinghe, 0-80,9-07,12-03,3-57,0 50,8-45,9-50.
peringhe-llazebmuok, 7 13, 12-'28, 4 17, 7-13. Hazebrouck-Poperinghe- Ypres, 8-33, 10 00, 4 10, 8-28.
Ypres-Routers, 7-50, 12-25., 0-45. Kouiers- Ypres, 9-25^ 1-50, 7-50.
Routers-Z?rw<)es, 8-48,11-34,1-13, (L. 8 86), 7-30, (9-88. Lrchterv.) Lichlorv.-Thouroul, 4-28 m. Bruges-Hunters, S-
12-80, 8-13, 0-42. Lichlervelile-Courtrai, 8-28 m. 9 01, 1,30, 8,48 7,21 Zedelghem TkoaruiU8 40. 1,08, 8,20, 6,88.
Ypres-Courtrai, 8-34,9-49,11-18,2-38,8-28. Courtrai -Ypres, 8-08,11-02,2-80,8-4o,8 40.
Y pres-hourout, 7-13, 12 00, 0 20, (le samedi a 8-SO du malin jusqu'a Langhqinarck). Tliouroui- Ypres, 9 00, 1-18, 7
(le Samedi a 0-20 du matin de Langheiiiarck a Ypres).
Comines-Warnèlon Le Touquet-IIoupliues-ilrmenlières, 6 00, 10,18, 12-00, 6-40,Arineiiiieres-llouplines Le Tnuquel-W
nólou-Cumines 7 -23, 10,80, 4-10, 8 -40. Comines- Warnêton 8 40, m 9-30 s. Wiarneion-CWrMies' 8-30, 9 80,
Courtrai Hruges, 8-08, 11-00, 12-38, (L. 8-18), 0-88. (9-00 s. (Licliterv.)— Hruges-CWtmi, 8-28, 12-80, 8-13, 0-42.
Bruges, Blankenberghe, Heyst, (Elal) 7-30,9 48,11 04,1,20,2 28,2-80,8 20(exp.) (S 8 80)7-38 (ex|j\)8-48. (bassin)7 00,7-36,
9-81,11-10.2-31,2 86,8 26(exp.)(S.8-80)7-41(exp.)8 81.— Heyst, Blankenberghe. Binges, 8-48.(L. 7-20) 8,30,11-28.1 28,2 48,
(exp.)4-l0,5-30,(D. 0 18)7-23. Blankenberg, Bruges, 6-10,(L. 7-42)8-85,11 85,1-48,3 08(exp.j4 30 G 00(1) 6 35) 7,007 48.
Ingelmijnster-Deynze Gand, 5-15, 9-412-15. lngelmunster-Z)ej/».:t\ 4 50 2' cl., 7 18. GandDey aio-Ingelmunsler0-58,
11-20,4-40. Devnze Ingelmunsler7,31 9-10 2'cl, 11,84 8,19,8 20 s.
IngehnunMer-Anseghem, 0-05, 12-10, 6-15. Anspghcm-Ingelmunsler, 7-42, 2-20, 7 45.
Liclitervelde-Dixirjade Furnes et lJunkerke, 6-30, 9-08, 1-33, 7-33. Z)«wAerA'e-Furnes-Dixmude et Lir.hterveldc6-45, II 18,
3-45, 5-05.
pixmude-Meupo?1,9-55,10,35,2-20,5,10 8-40. Nienp-Dia:»z,(ville)7-40.12-00,4-24,5,8G,9,30,(bnins)7,30,11,50,4,18,5,50.
1 hourout-Ostendc, 4-50, 9-13, 12,05, 1-50, 8-08. 10,18- Oslende-Thouroul, 7-88, 10-10, 12 25, 4,48. 0-15 9,13.
Selzaele Eecloo, 9-05, 1-25, 8-23. Eeeloo-Se/^ae/e, 38, 10 15,4-22.
Gand -Temguzen, (station) 8-17, 12-15, 7,25 (porie d Anvers) 8
Selzaele-Loiere/t, 9 04, 1-30, 8 30. (le Merer. 5 10 in.) Loker
30, 12-40. 7 43. Terneuzon Gand; 0 00, 10-30, 4
en Selzaele, 0 00, 10-25, 4 43. (le Mardi, 9,30.)
40.
c O R. R ESP o 1ST m> A. N C E 9
COURTRAI, BRUXfcLLES.
Courtrai dép. 0,37 10,03 1*2,33 3,47 0,35.
Bruxelies arr. 9,20 1,33 2,23 0,14 8,38,
COURTRAI, TOURNAI, LILLE.
Courtrai dep. 6.37 10,80 2,54 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 0,20 0,41.
Lille 7,37 12,03 4,00 0,32 9,53.
COURTRU, GANI).
Courtrai dep. 6.42 12.31
Gand arr. 8,01 1,81
RRUGES, GAND, BRUXEI.LES
3,44 6,40.
5,04 7,80.
Bruges dep. 0.49 exp. 12.34 3,52 exp. 0,43 8,19 exp.
Gand arr. 7 34 1,49 4,42 7,58
Bruxelles 8,50 4,00 3,50 0,31 10,20.
bruxeli.es, courtrai.
Bruxelles dep. 8,22 8,28 12,21 5,33 6,47.
Courtrai arr. 8,00 10,46 2,44 7,30 8,44.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
Lille dep. 5,20 8,25 11,03 '2,18 5,20.
Tournai arr. 8,42 8,80 11,34 2,40 5,39.
Courlrai 0,34 9.47 12,20 3,38 0,33.
GAND, COURTRAI.
Gand dep. 5,18 9,38 1,28 4,24 7,21.
Courtrai arr. 0,34 10,81 2,49 3,31 8,42.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruxelles dep. 8,14 11,53 3,12
Gand arr. 0,00 9,41 1 23 4,20 exp. 0
Bruges 7,20 10,34 2,38 3,11 7
8,83.
,37 7,22.
,22 8,38.
Suite. Voir lu N° précédent.
24 Aoüt.
Ce matin. les hommes de quart onl -ïgnaié une
vigie; on appeile aiusi, en langiie marilime un
rochcr a fleur d'eau.
Tont Ie monde esl mooté sur Ie pont; le eajii
tame a examine avec sa lunette d'approchr la rnassr
noire soupcouuée d'êlre un roelu r, el l'a reeouniie
pottr la carcasse de qiiehpte navire perdu t l depuis
longlemps abaudonné sur les uiers.
Le vent la poussait de nol re eölé; nous avons
bienlót pit l'exainincr alleuliveiueiil it très-pelile
dislance.
Je tie sais rien d un aspect plus désolé que ee
sqiielelic de navire. saus mals rl saus goiivrinail,
dont i'équipage a peut étre péri depuis des siè-
cles,
Ce qui retidail celle supposition probable, c'esl
que la forme de ee déhris flollanl anuoneail une
conslriiclion d'une dale lies aneienne. II élait
erilièreiiient couvert et lapissé de mousses verda-
tl'es el de fianes iiiariues. que l'on appeile. je crois,
machicoulis et raisins du tropique, el ipii pen-
düient le long de ses llancs.
Des algues avaienl pris racine parmi ees mous
ses, el des coquillages s'y élaienl inerusiés. I ne
bande d.' grands puissons hleus, au ventre folanc,
s agitait toul aulour el lui servail de corlége.
Le capitaine assure qu'iine pareille rencontre
n'est pas rare, surloiil dans Irs mors (IeTAmên-
q ne. B li'est pas uioins vrai que ee speclaele (toil
viveinenl émouvoir les esprits si impressioiinahles
des murins. Ou est saisi, inalgré soi, d'une terreur
vague el indéfinissable ii la vue de ces c.id rvi cs de
navtres, dont lame, ce-t a-due l'équipagc, a péri
depuis des siécles, sqiielelles effrayants ipii errenl
dans les solitudes de l'Océan. coiiiiue des fanlö-
mes, saus cesse balloltés par les vagues, et mar-
chenl jour el nuil. sans repos, vers uu hut incrin-
(iii qu'ils n'atteignent jamais.
Eu jetant les yeux devant nous, je viens d'aper-
cevoir a l'horizon une furêl iiiagniflque, une ville
aux domes audacieu.x, d'iuuneiises rorhers et des
montagiies dont la têle orgueilleuse se perd dans
le cicl
Al'approchant alors du capitaine. «ecupé a cau
ser avec le eomte de Hollenterre et Juan Alvarès:
Qu'esl-ce que vous nous disiez done, capi
taine, in'écriai-je, que nous étioos eu pleine mer;
vo(ez!
Et j'étendis la main vers ce qui m'avail frappé
tout a coup.
A'ous sommes en pleine mer, fit Ie capitaine
en souiiaut.
Et eetle superbe forél?
11 n'y a pas de superbe forêt.
iMe prenez-vous pour un pauvre avengle? Et
cette ville qui s'élance du sol avec ses edifices gi-
gautesques?
II n'y a pas dc ville, par consequent celte
viilc n a pas des édifices gigaulesques.
Voulez vous l'ti't'! Et ces rocbcrs forinidables
sur lesquels nous nous serious saus doute brisés si
je ne vous avais pas averil?
Je vous rrmerciede m'avoir averli, mais ce
n'élait pas la peine, attcndii qu'it n'y a pas la le
plus petit rocber.
Et ces montagncs soul done aussi des bille-
vesevs? demanda Georges a son tour, qui, comme
moi, voyail tont cela d'unc facon assez distiucte.
Messieurs, reprit le capitaine, je ne puis
dire que cela soit l'eff'rl de voire imagination, et
pourlaril vous voyez des choses qui (('existent
réellement pas.
Ati ca, mais si nous pouvons les voir, elles
existent, aulrenient nous ne les verrions pas.
Ceci est fort logique. II existe quelqur chosc
qui fait illusion ii vos yeux. Au resle tont va bien-
löl dispatailce, regardez;
En fffel, plus nous nous avancions, plus les
objets deveuaierit vaporeu.x, et ils finirent par s'é-
leindre.
Nous crumes pendant un moment étre chez re
lion M. Séraphin qui a fait si longleinps le bon-
beur de nos jeiines années.
Ce phénomène, nous dit le capitaine. s'ap-
pclle mirage. II se produit souvent en mer et
qiiclquefois niême sur la terre, dans les pays plats,
dans les plainrs. dans les déserts. La cause dilTère
selon qu'on est sur lelénient salé ou sur le plan-
cher des vacbes, mais 1'efTct est le même. II est
produit par les rayons du soleil qui dilatent la
couchede Gitmosplièrc qui se Irouve sur l'Océan.
It est uu autre phénouiciic qui tient aux mêmcs
causes, ajuiita le capitaine, mais qui est plus rare.
C'est le partlie on paraselene qui monlre double
le soleil ou la lune, soil a leur courtier, soit a leur
lever. Vous jureriez alors qu'it v a deux soleils ou
deux tunes.... Tout cela n'est qu'tine illusion
d'optiq ue.
28 Aoüt.
La brise avail cessé d'etre carabinée, c'esl-a-
dire forte. Après avoir viré de bord, nous filions
trots ou quatre noeuds h pen prés, le cap du Nord,
lorsque nous vimes un point noir paraitrea l'ho
rizon.
Comme ce point avancait sur nous, el que nous
avancions sur lui, nons ne lardames pas a le
distinguer ii travers la vapeur qui couvre parfois
la mer. C'clail un navire de guerre, un beau vais-
seau de ligue a trois ponts.
Le pavilion anglais fluilail au bout de sa
brigantine.
Quaud il fut arrivé a porlée, un des officiers du
vaisseau qui se trouvait sur Ie pont pril un porte-
voix et nous cria en anglais sur le ton le plus ira-
périeux:
ühé! dn navire! mettez-vous en panne!
Le capitaine Boin pril son porte-voix, a celte
iiijonction insolenle, et répondil du haut de ia du-
nette de la Maria:
Esl-ce que c'est vous qui commandez ici?
Meltez en panne! cria de nouveau l'oflicier.
mais cette fois en francais, comme M. Boni lui I
avail parlé.
Au nom de qui? reprit notre eapitaine.
Au nom du droit de visite!
Le capitaine laissa échapper un mot Irès énep-
gique qui n'eüt pas ravi certains de nos hommes
d'Elal; puis il mil en panne, ce qui signifie,
Madame, qu'il ohcit a l'Anglais en arrêlant le na
vire, manoeuvre que vous jugerez peu diflicile, ce
vieux trois-mals élant connu par vous comme un
voilier plus que médiocre.
Nous hissames ensuite le pavilion franyais; cl
nous attendimes que le canot qui s'étail détaebe
du vaisseau anglais vint nous accosler.
Deux officiers et buit matelots anglais ne tar-
dèrent pas ïi monter a bord.
Nous remarquêmes de suite que les deux offi
ciers élaienl ivres. Leurs manières nous déplu-
ren souveraineinenl; elles élaienl bien failes
ponr cela. Elles avaienl qtielque chose de provo
quant et de fier qui froissait au plus haut degré
notre orgueil national.
La première personne que les officiers aper-
yurent en grimpant sur le pont, ce fut notre
coq, c'est a-dire notre cuisinier. Ce brave homme
élait on ne peut pas plus nègre.
Qu'est-ce que tu fais la, macaque? lui de
manda l'un d'eux, en lui meltant brutalement la
main sur l'épaule.
I.a cuisine, Milord.
Combien l'a-t-on acheté, sagouin?
Je suis libre.
Tu n'es pas un compère? reprit l'Anglais
I'