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LA CROIX D'OR.
Mcrcredi 17 Mars 1875.
annee.
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Le Journal parail lc Mercredi el Ie Samedi.
Les réclames, dans le corps du journal, se paient 30 centimes la ligne.Un numéro du journal, pris au Bureau, 13 centimes.
Les numéros supplémeniaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 20 fr. les 100 exemplaires.
Les insertions coütent 13 centimes la ligne
II JE M I H E» 15 F K St.
LES IMMORTELS PRINCIPES.
La liberté est le droit de faire lout ce
que Ion veut, du moment quele procu-
reur du Roi n'a pas a y redire. C'est la
definition libérale par excellence, l'antilhése
de la réalilé, le mot qui iue la chose. Vous
élonneriez beaucoup les adeples, si vous
osiez emellre I'avis que la liberté est le
droit de faire li brement le bien.
Qu'un alhée précoce effraie le monde par
un horrible sacrilége, la presse de tous les
étages lui aura procure bien lot son bill
d'indemnité, le grave journal réduisant le
fait aux proportions d'une gamineriele
pamphlet du Irotioir Irouvant des sarcasmes
inconnus, des blasphemes plus révoltants
les uns que les aulres pour couvrir le scan-
dale dc la profanation.
Et si vous vous permeltez de ne pas admi
rer Ie régime sous lequel ces choses-la
peuvenl se produire impunément, de ne
pas y voir un idéal, d'une commune voix
on vous proclame ultramonlain, ennemi des
immorlels principes de 89 el incapable d'at-
tachement aux institutions de votre pays. II
est bien entendu que d'aulres, plus dignes
que vous, seront toujours prêls a prendre en
main la direction des affaires.
Voila commenl se comprennent la liberté
des cubes el la liberté de la presse, dans ces
regions libérales off Ton a I'habilude de
laisser passer lous les exces de la licence
sous Ie manteau des franchises constitution-
nelles.
L'enseignemen! nous offre un exemple
non moins inslruclif des applications que la
fameuse conquète de 89 est susceptible de
recevoir. Impuissanl a lutier sur le terrain
de la liberté inème, le faux libéralisme a fait
one guerre sourde et implacable aux institu
tions fibres el calholiques. En [irésence des
bons résultals que produit depuis plus de
trenle ans le système Iransactionnel en vi-
gueur ponr ('instruction primaire, il a cher-
ché obstinément, mais sans pouvoir y réus-
sir, le moyen de vaincrc les resistances de
l'opinion publique el de ba 11 re en brèche la
loi de 1842, pour y suhslituer le régime
étouffant du monopolc officiel. E'enseigne-
ment obligatoire serail l'expression suprème
de la liberlé selon son cceur, de sa liberté a
lui, espèce do pandemonium oü il aime a
réunir les depouiIles opimes de Ia liberlé
des aulres. Ici encore il attend de sa patien
ce el de son habileté ce que la légalité lui
refuse.
Après bien des années de preparation il
pensail enfin toucher au but, quand le coup
de vigueur de 1870 l'a arrèlé dans son cen-
vre de centralisation et de secularisation a
outrance; il a fallu alors ponr longtemps
ajourner la realisation de ses rêves. Mais les
armes extra-légales et anti-cléricales sont
toujours a sa disposition dans les localités oü
il domine, et de divers cótés on signale une
recrudescence de la propagande qui a pour
objet d'altérer l'atmosphére religieuse de
l'école.
Ne l'oublions pas: la guerre a l'Eglise est
le mot d'ordre hautcment avoué dc quel-
ques uns sur lequel les diverses nuances
du libéralisme se.mettent Ie plus facilement
d'aecord: l'Eglise est ponr el les ïe.nnami
séculaire de la Belgic/ue. Arrachez-lui les
ames, s'écriait naguère encore le fougueux
seclaire de qui l'on a dit un jour qu'il re-
présentait le libéralisme parfaitement el a
lous les litres. Et quand il jetait aux siens
ce sinistre appel, c'était de l'école qu'il par-
lail!
Ah! l'cspril du désordre ne s'esl pas trom-
pé dans sa haine. II sail bien que l'Etat chré-
tien serait frappé au cceur si la voix du divin
Maitre appelant a lui les pelits enfants pou
vait ne plus être écoutée. L'école, c'est tout
l'avenir; c'est la société se recrulanl chaque
jour. Nous savons que Ic jeune homme sor-
lira de la croyant ou libre-peaseur, homme
de la familie et du sacrifice ou égoïste séïde
de la morale indépendante, soldal de l'Eglise
ou soldat de la loge, ciloyenou révolution-
naire. Et puisque nous savons, nous devons
vouloir, nous devoris défendre énergique-
ment la généralion que l'on menace et se
conder de lous nos efforts Taction civilisa-
trice dc l'Eglise. II y va de nolre bonneur el
de nolre sécurité.
AVON'S NOUS
LA LIBERTÉ D'ENSEIGNEMENT?
On nous parle sans cesse de nos libertés
conslitutionnelles; on les vanle, on les
exalte:
Mais nous, calholiques, en jouissons-notis
comme nons devrions légalernent el équila-
blement en jouir?
Peut-on dire par exemple que nous avons
la liberté d'enseignement?
Notre pays est en possession d'un ensei-
gnement libéral organisé par l'Etat, pour
lequel le gouvernement, la province et la
commune puisent a pleines mains dansles
caisses publiques.
Si nous possédions les élémenls nécessai
res pour faire le rclevé de tout ce qui se
dépense en Belgique en faveur de l'ensei-
gnemenl officiel qui, d'après les pretentions
libérales subies par le ministère actuel, doit
être un enseignement sans-Dieu, nous arri-
verions a un total effrayant.
Peut-on dire qu'ayanl a lui Ier contre un
adversaire de celte laille, Tenseignemenl
privé est fibre dans notre pays?
Evidemmenl ceux qui le prolégent et le
soutiennent succomberaient dans cetle gi-
gantesque lutte, si Ton potivail leur repro-
eber comme aux libéraux d'etre des pingres.
Non-seulement, ils doivenl donner, don-
ner largernenl, donner toujours pour fonder
et enlrelenir des écoles, des colléges, une
nniversité qui ne recoivenl pas de l'Etat un
cenlime de subside: mais il faul encore que
malgré eux, ils conlribuenl au moyen de
l'impót a l'enseignement anti - religieux
qu'ils réprouvent.
El l'on dit qu'ils sont fibres! On admire
le beau régime qui leur octroie Tinsigne
faveur de réparer avec leurs écus le mal que
d'aulres font a l'aide dos impöts, dont ils
fournissent peut-être la plus grande part.
Supposons que le gouvernement fasse en
faveur de la presse libérale ce qu'il fait en
faveur de Tenseignemenl libéral, c'esl a-dire
qu il prenne chaque année une sotnme con-
sidérable dans le Irésor alimenlé par les con-
Iribuables, pour créer, soutenir et répandre
des journaux libéraux; que ces mèmes jotir-
naux soient subsidiés par la province et la
commune, dirait-on que la presse calholique
est libre
Eh bien! la 1 iberlé-dont clle jouirail sous
ce régime est prócisément celle dont Ten
seignemenl privé jonit en Belgique, mème
sous un gouvernement conservaleur.
Singuliére liberté que celle-la!
Autant voudrait dire que Tbonnête hom
me aux prises avec un hcrculeqni a soulagé
ses poches, est libre de se mouvoir et d'agir
a son gré.
UNE FEDERATION LIBÉRALE.
La Fédéralion des Cercfes calholiques est
pour les libéraux un sujet de continuelle
alarme. Ses progrès les effraient, ses succes
les troublent. Serrés en un puissant faisceau
dont Tamour de l'Eglise et le vrai patrïolis
me forment Ie lien commun, les Cercles ca
lholiques, éparpillés par tout le pays, sont
comme autant de camps retranchés d'oü
sortent, a l'heure du combat, les vaillanles
milices de la Vérité et du Droit. En même
temps, reliés entre eux par une sainte con-
fraternilé d'armes, par l'union des cceurs et
Taccord des volontés, ils sont comme la ligne
de defense extérieure qui protégé conlre les
altaques el les surprises du Libéralisme la
same doctrine et la fidélilé aux principes.
Ces positions,si formidables qu'elles soient,
nous avons le devoir de les forlifier encore
et surtout de les compléter. Car ici, en éten -
dant ses lignes, on ne s'affaiblil point. Bien
au contraire: plus le front de ba la i I le sera
développé et moins on laissera de prise a
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Yn tJ j n)U(:k' 7 13> 12'2S> 4'17' 7-13. - Hazebrouck Poperingl.e Ypres, 8-38, 10-00, 4 10, 8-28.
Rn Z-/to;ihrs' -2», 0-43. - Haulers- Ypres, H-23, 1-80. 7-30.
19 r"o nlw' "34-I -13(L. I» 60), 7-30, (iMiö. Lichi'orv.'i Lic.lnorv .-ThöuroiU, 4-2B ni. Bruges- Homers y 8-"2d,
Yhl .ft LïelilorvoldeCourlrai, 6-25 m. 9 01, 1,30, 3,37 7.2! ZorleM.em Tkourout8-40. 1,05, 5,14, 6,58.
Ywa n 3-34,9-49,1 1-18,2-33,8-28. Courlrai- tyres, 8-08,11-02.2-50,8-40,8 44.
pis tow out, 7 -13, 12 00, 0 20, (le Samedi a 5-30 du mul i n jusqu'a Langhemaruk). Thouroul-Ypres, 8-40, 1-10, 7-00,
(lebamedi a 0-20 do matin do Langhnmarck a Ypres). J
omuies- Va melon l.e I ouquet-Iluuplinos-Ametóores, 0 00, 10,13, 12-00, 6-40,— A rmeotières- Houpl i nes Le Touqfuct-War-
rv 7 - "L50, 4-10, 8-40. Comines- Wurnèlon 8 40, m 9-3os. Warnêion-Comines 5-36, 9-30,
D,. 1 rai u.ruPes> 8-03, 11-00, 12-38, (I,. 8-15), ff-83. (9-00 s. (LielUerv.)Bruges-Courlrai8-25, 12-50, 5-00, 6-42.
Kés 3 48n83' li 7-23,11 04,2-80,7-38. - (bassin) 7-31,11 -10,2-50,7-41 (exp.) - Heyst, Blankenberghe,
'T.^oTL'-T7-6 5-15, 9-41, 2-15. Ingelmunster-Deynze, 0 08 2" cl7-13. Gand-Deynze-Ingelmunsler, 6-88,
4-46,7-21. Deynze Ingelmunsler7,31 1-00.
Dgelmun«(eM-»M^Aew, 6-03, 12-10, 0-15. Ausegimn-Ingelmunster, 7-42, 2-20, 7-45.
Q aV- iUde s el Dunkerke, 6-30, 9-08, 1-35, 7-58. ZWeWce-Furnes-Dixmude et Lichlervelde, 6-45, 11 10,
o-4-U, o-OO.
Dixmude-Meupori, 9-85,2-20,8-40. Nieup-Z)ia:w,(ville)7-40.11-53,4-25.
lde-4-W' 9"l3> 1"ri0' 8-°»- - Ostende-Thouroul, 7-55, 10-10, 12 23, 6-13.
elzaele-Eecloo, 9-03, 1-28, 8-23. Eecloo-Se/zaete, 5-38, 10 15,4-22.
Gand-7^erneuzen, (station) 8-17, 12-18, 7,28. (porle d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-45. Terneuzen-Oand, 6 00, 10-30,4-40.
Selmele-EoAeren, 9 04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-Se/zuete, 0 00, 10-25, 4 45. (le Mardi, 9,30.)
CORRKSPOnrDAWCBS.
C0URTRAÏ, BRUXELLES.
Courlrai dep. 0,37 10,53 12,33
Bruxelles arr. 8,30 1,85 2,23
COURT RAI, T0URNA1LILLE.
Courlrai dép. 0.37 10,56 2,54 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 0,39 9,41.
Lille 7,38 12,08 4,00 0,35 10,00.
COUIlTRAI, GAND.
Courlrai dép. 6,42 9,49 12,31
Guild arr. 8,01 11,05 1,51
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
BRUXELLES, COUIlTRAI.
3,47 6,35. I Bruxelles dép. 5,22 8,28 12,21 5,35 6,47.
0,14 8,54. Courlrai arr. 8,02 10,40 2,44 7,56 8,44.
LILLE, TOURNAI, COURT11AI.
Lille dép. 8,15 8,22 11,08 2,22 4,48 5,20 8,00.
Tournai arr. 5,42 8,86 11,29 2,40 5,30 8,38.
Courlrai 6,42 0.49 12,31 3,44 6,40 0-33.
GAND, C0URTRA1.
3,44 6,40. I Gand dép. 5,13 9,38 1,28 4,24 7,21.
5,04 7,50. I Courlrai arr. 0,37 10,56 2,54 8,34 8,47.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruges d. 4-39 exp.G,49exp.7-04,9-39,12,34,3-43,ex.2,52,3-89exp. 6,43.1 Bruxelles dép. 7-20exp. 8,14exp 11,06 3,12 8,58. exp.
Gand a. 5-31, 7,34, 9,15.10-54,1,49 4,28, 4-07,6.52 7,58. Gand arr. 8,29 9,41 1,12 4,217,17.
Bruxelles 6 28, 8,50, 10-35,12-39,4 00,6,14, 7-35,8,44, 9-31.|Bruges 9,23 10,34 2,38 3,118,38.
Suite. Voir le N° précédent.
Albert us snivil nne longue avenue de lilleuls,
arriva dans nne com- garnie de mousse et monta
le vaste escalier de 1 habitation, qui lui parui être
line demeiire a la I'ois rielie et severe, el quelque
pen sembialile aux chateaux fanlasiiques des cou-
tes de madame de Heaumonl
Lh'erbe putissail en lonffes ahondantes aiitour
du manoir de Unix House. En anglais, holy -
house signifie sainte maison.
Les mors étaieul iioirs el roil verts de lierre. de
bonbon de chevre feudle odorant; les croisées,
taillées en ogives, étaient enloiirëes de priëlaire,
de gohéas. el d'aulres planles parasites. Eo
penei ra nl danser rhèleau Ie jeune voyagrur ent
romine le seerel pressentiment que quelque cbose
d elrange allait lui arriver.
Djila lui condiiile a la-rune, el Alberliis ne tar
da pas a réperer srs forces par un souper fort
appétissant qui lm fut immédialement servi, avec
nil rcspecliieiix silence et une courtoisie excessive.
L'élranger remarqua un certain air de mystère
el de mélancolie dans eeüe maison, et quand il
demanda cbez qui il était, on fut quelque temps
a le satisfaire, quoique cede question fut excessi-
vement naturelle. Un domeslique, espèce d'inlen-
dant, lui répondit enfin en lui parlant presque
bas el sur un ton mystérieux qui lui parut extra
ordinaire:
Vous êies duns lechatyau dc sir William
Duringhton.
Bommc Albcrtiis nc connaissait niillcmcnl son
bote, son nom ne fit sur. lui auriine des impres
sions que les gens de la maison paraissaient en
attendee. Quant a lui, il prêta pen attention aux
chueliottemenis des domestiques, el a leur air
sombre et embarrassé,
C'est poiirquoi il fit demander a sir Duringhton
la permission de se présenter a lui.
Un niomrnt après, l'intendanl du chateau revïril
et I invita 'a le suivre, toujours avec les marques
de la plus profonde polilesse.
De la salie oü il avail soupé. il passa dans une
autre plus grande et qui formait le triangle, en-
suite il traversa plnsieurs appartements qui lui
paruren! d une grande magnificence, et enfin l'in-
lenrlant ouvril précanlionneiisemenl vine porie, et
Altiertus se trouva dans Ie cabinet du chalelain.
C'élait une chambre parfaitement meublée, dans
le meilleur goüt. Entrc aulres objets, on reniar-
quail un magnifique bureau, des cadres el des ta
bleaux, des corbrilles de. fleurs el une vaste ehe-
minée. dans le sein de laquelle pélilbtil un feu qui
faisail plaisir a voir; le tout éclairé par lain-
mière voilée et detni-claire que répandait une
iampe d'or.
Au coin de la chemibée, dans nn large fauteuil,
était sir William Duringhton, qui paraissait occu-
pé a se chauffer au coin de l'alre.
Sir William Duringhton pouvait avoir soixante-
dix ans; ses cheveux lowi blancs el les rides pro-
fondes de son visage le prouvaient assez: mais ce
qu'il y avail d'exlraordinaire sur sa noble el virile
figure, e'etait un certain air de verdenr qui, lia-
bituellement, nest pas Ie compagnon (le la vieil-
lesse. Ses yeux remarquablement beaux el vifs,
n'avaient pas non puis celte teinle ptilc et douleu-
se que Tage domie souvent et qui llie le regard;
ils étaient, au contraire, d un bleu foncé et brd-
laient d'un admirable feu. D'ailleurs les rides de
sou visage paraissaient anlicipées, el ses traits,
nets, ma.es disiingués, irancli.iient élmngement
sur son front soucieiix. II était grand el bien fait,
encore droit Une certaine teinte de mélancolie
était répaudue sur lotile sa personne, mais ne lui
donnait point un aspect dur comme on le pourrait
snpposer. Loin de ia. Son extérieur était affable,
sa parole donee, docile et hicnveillante. -On
pon va it deviner un cceur resté |cune el nne ;1ine
demeurée forte, dans ct tie enveloppe tool a la
fois ii'sée et pleine de sève.
Lorsqne Alberliis entra, sir William se leva,
alia a lui, el dil avec douceur, en anglais:
Soyez le liienvenu, Monsieur.
Tuis i! ajouta en frangais:
Je vois que je me suis trompé, vous êles
Frangais.
C'est nil beau pays que la France! fil-il en-
suite en soupirant.
Après quoi. il dil: J ai parcouni la France
avec le plus vif intérêl. Je suis flotlé de Toecasion
que vous me donnez aujourd'hai de parler celte
plus belle des langues.
II était buit heures du soir: le vieillard fit as-
seoir Albertus auprès de lui et leur conversation
devint animée.
Sir Duringhton déplova une grande richessc de
pensées et une vigueur de sentiments remarquable
pour sun age. Albertus était un jeune homme de
bon sens; il charma le vieillard, qui aimail en lui
crlle franchise el cel abandon dr la jrnnesse. Al
bertus. de son cóté, 'se sen-tail involoniairement
entrainé vers ce mystérieux personnage. par ses
manières engageanles, son Ion d'une polilesse en-
jouée, sa faconde éloquente, sa dblinetion pleine
d'aisance. loutes cboses qui atlirent et caplivenl
invincihlement.
Une chose pourtant Tintriguait, c'était la mé-
lancolie répandue dans le chateau de Holy House,
d'après.ce qu'il en avail pn juger jusque la par les
apparences. El ensuite il trouva étonnanl de ne
voir aulour de sou hóle ni parents, ui amis; de n'y
renconlrer que des serviteurs dont pas un n'était
ancien, puisqu'ils étaient tons jeunes.
QuelleA que fussent cependaril ses apprehen
sions il se gai'da bien de monlrer a sir Duringh
ton la moindre curio-ité sur la vie relirée qu'il
lui supposail rnener. Ils parlèrent de la France,
de TAmériqiic, de TAngleterre, et Albertus ra-
eonta a son hóle qu'il avail voulii voyager pour
passer son temps.
Le temps, répliqua gravement alors le vieil
lard, est peut être un des plus facheux dons du
ciel, el pourtant, comme on est heurciix de se
sentir riche d'avenir. d'etre jeune, d'aspirer lar
gernenl la vie!... Hélas! les années perdues ue se
rattrappent pas, et c'est grande folie de jeter au
vent les qnelqiies-unes que Dien nous a dommes
d'une manière si extraordinaire et sans que nous
en sachions le nombre. L'économie du temps est
une des grandes sciences dc la pensee humaine,
et s'ii y a quelque sagesse a otiblier les hein es de
désespoir el de hitte, il v en a beaucoup aussi a
ne pas dissiper le présent, puisque demain le pré
sent s'appellera hier, el que l'avenir sera le présent;
aussi Thomrne ne doit jamnis dire: demain, mais
bien accoiwplir a l'instanl même les actions qu'il
médile. D'un autre eóté. il ne faut pas se pressor
de vivre. car alors la vie qui, sagemenl conduite,
serait longue el friictueuse, se résumé en quelques
heures de juies el de larmes.
Ce langago ne peut vous scmblcr étrange, mon
jeune ami, dans la hoiiebe d'un vieillard. Oh! si
vous saviez, en effet. eombien le regret snit la
fante, eombien en ce monde Ie repende suil Ie
plaisir! Mais c'esl seulement quand les cheveux
sont blancs et le cocur dessëché que Thomme peut
envisager froidement et sagemenl la légèreté de
ses actions, c'est alors.qu'il regrette et pleure. mais
iuutilement. A peine a l il regu les premiers bai-
sers dc sa mère qu'il s'éieint lassé, blasé trahi ou
désabusé; il échange Irs roses de son délicienx
priutemps contre Irs frrmas dr Tliiver, les joies de
son présent pour les dégoüts el les dó hoi ros de
l'avenir; il seietlrdans les lourmenls d'une vie
agïtée; il hate ses derniers moments; tout cela
pour s'enivrer et se goi ger de bonheiirs faclices.
Et quand il a donné sa couionnede flours conlre
une couronne depines, qnarid, ra va gé par ie
temps, il n'a plus de désirs, si ce n'cst do recom-
mencer sa vie, il regrette el s'apergoit eombien il
est fa nés et dépnuilié des sentiments et de Ia jeu
nesse qui faisaient sa force.
A CONTIjyUEIl.