LA CROIX D'OR.
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10me année. N03 962.
Samedi 20 Mars 187b.
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Le Journal parail le Mercredi et le Samedi. - Les insertions coülenl 15 centimes la ligne.- Les réclames, dans le corps du journal, se paient 30 centimes la ligne. Un numero du journal, pris au Bureau, lb centimes.
Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coutent 20 Ir. les 100 exempiaiies.
II i: M I S 1» K F E 11.
BREF ADRESSÉ A L'ÉPISCOPAT ALLEMAND.
Voici, d'aprés la traduction hollandaise
que vient d'en dormer le Tijd, la belle ré-
ponse du Sainl Père a la derniére protesta
tion des Evèques allemands, relative au
fulur Conclave:
PIE IX, PAPE.
Vénérables Fréres, salut el bénédiction
apostolique.
Celte admirable fermelé d'ame qui, dans
le combat pour la defense de la vérité, de la
justice el des droits de l'Eglise, n'a craint ni
la colère des puissants, ni leurs menaces, ni
la pene des biens, ni méme l'exil, la prison
el la mort et qui a été la gloire de l'Eglise
du Christ dans les siécles passés, est toujours
restée depuis lors son caraclère distinctif, et
la prcuve évidente que ce n'est qu'en Elle
seule que se trouve la vraie et noble liberlé
dont le nom relenlit aujourd'hui parlout,
mais qu'en réalité on ne rencontre nulle
part.
Celte gloire de l'Eglise, vous l'avez de
nouveau mainlenue, Vénérables Fréres, lors-
que vous avez enIrepris d'exposer le verita
ble sens des décrets du Concile du Vatican,
arlificieusemenl dénaturé dans une circu
laire qui a élé rendue publique, afin d'em-
pècher par la que les fidéles ne s'en forment
de fausses notions, et qu'une odieuse falsifi
cation ne donne occasion d'enlraver la liber
lé du chdix d'un nouveau Pontïfe
Voire declaration collective se distingue
tellemeril par sa clarté et son exactitude que
non-seulement elle no laisse rien a désirer,
mais qu'en oulre, elle n'aurait dü èlie pour
Nous que la cause d'une grande joie. Mais les
assertions mensongères de cerlaines feuilles
periodicjties exigent de nous un témoignage
plus solennel, alors qii'nfin demaintenir les
assertions par vous refutées, dans la susdite
circulaire, el les out eu I'audace de refuser
d'ajouter foi a vos explications, prélextant
que voire interprétation des décrets du Con
cile n'élait qu'une interpretation adoucie, et
ne répondant aucunement aux intentions de
ce Siége Apostolique.
Nour réprouvons de la maniére la plus
formelle cetle snpposition perfide et calom-
nieuse. Voire declaration donne la pure doc
trine catholique et, par conséquent, cel le du
sainl Concile et de ce Saint Siége, parfaite-
ment établie et clairement développée par
des arguments évidents et irréfulables, de
facon qu'elle démontre pour lout homme
de bonne foi que, dans les décrets incrimi-
nés, on ne trouve absolument rien qui soit
nouveau ou change quelque chose aux rela
tions ayanl existé jusqu'a présent, ou bien
encore qui pourrait fournir un prétexte pour
opprimer encore plus l'Eglise ou entraver
l'élection d'un nouveau ponlife.
En ce qui concerrie cc dernier point, vous
avez (Nous ne voulons point relenirce té
moignage) agi avec une prudence toule par-
ticulière, alors que, sans enlrer dans aucune
digression, vousdéclarez solennellement que
vous rojelez a l'avance lout ce qui pourrait
gêner en quelque maniére la libre élection
du clief de i'Egiise el vous affirmez netle-
ment que c'esl setilemeni a l'autorilé de l'E
glise qu'il apparlient de decider sur la vali-
dité de l'élection accomplie.
Cel le terrible tempèle qui, dans le monde
entier, at aque et accable l'Eglise, la mai-
tresse de la vérité, ne peut èire attribuée a
d'autres causes qu'aux erretirs que l'éternel
ennemi de Dieu el des hommes répand par-
toul afin de tout botileverser. Puisque ainsi,
c'est contre l'erreur, cetle source de tons les
manx, que nous devons diriger nos armes,
continuez done, Vénérables Fréres, de la
signaler et de la combattre, quel que soit le
masque sous lequel elle puisse se cacher,
comme vous l'avez déja fail par voire excel
lente déclaration.
II est impossible, en effel, que ceux dont
l'intention est droile, ne soient point éclairés
par les rayons de la vérité, alors surlout
que voire noble conslance leur donne un
nouvel éclat. L'erreur, au contraire, une fois
mise au jour et réfutée avec autant de force,
ne peut échapper a sa ruïne finale.
Puisse la divine miséricovde accorder
bieniöl celte grace a l'Eglise opprimée et au
monde; et puissiez-vous en Irouver un avant-
coureur dans la Bénédiction Apostolique que
Nous donlions, comme un gage de Notre
affection loule particuliere et du plus pro
fond de Notre cceur, a chaeun de vous, Vé
nérables Fréres, et a tuus vos diocésains.
Dönné a Rome, prés Sainl-Pierre, Ie 2
Mars de l'année 187b, la vingt-neuvième dé
Notre Pontifical.
PIE IX, PAPE.
PROPAGANDE SCOLAIRE-
Lesjotirnanxde laeapitale nousont apporté
Ic récil mdigné d'une ignoble mascarade or-
ganisé le Diinancliede la demi carême, par
la Ligue de l'Enscignemeni et l'Univeis de
Bruxelles, au profit du denier des éculus.
Le spectacle a été révoltanl et cela d'autant
plus, que la police de la capilale étail de ser
vice pour le protéger. Le dégout de la popu
lation honnète s'est soulevé a la vue de louies
ces ignominies si mdignement patronnées;
de nombreux sifffets out élé étouffés par l'es-
corte policière qui avail la un triste röle a
remplir; tous les détails que nous avons lus
sur celte orgie libérale sonl hideux etjusti-
fient les protestations que la presse de bon
lieu a fait unanimement entendre.
Mais c'est beaucoup moins de cetle sale
exhibition que nous voulons parler, que du
but prétendümenl humanitaire dans lequel
elle élait conduiie. II s'agissail done, dans
ces insulles prodiguées aux mail res cbréliens
de la jeunesse, de tirer quelques gros sous
hors des poches, en faveur des écoles rêvées
par la canaille progressiste de Rruxelles et
d'autres lieux. On n'a pas récoliégrand'chose,
pour la raison mille fois répétée que les libé-
rauxsonldurs a la détente. Pourleurs écoles,
ils vont puiser au budget et entendent l'ex-
ploiler dans toule sa profondeur. Mais de
leurs propres deniersils ne paient s'ils
ne l'oublienl point que la carte de leurs
pelits soupers, renouvclés des soirées de la
Régenee.
Pour ce qui est des frais de l'enseignement
lel qu'ils le voudraient faire, ils lendent leur
sébile et n'y mettent rien du leur. Mais dans
quelles repoussantes conditions out-ils fait
leur grand acte de mendicité par les rues de
BruxellesQuelle revelation est sortie de
dessous ces loques étalées si impudemment!
Gélait pour le denier des écoles
Quelles écoles, grand Dieu enlentl on
soudoyer avec l'argent ramassé dans cetle
bone? Et qn'est ce que cette ligue de l'en
seignement qui se moqne ainsi de I école
religieuse et de la foi chrélienne? Qu est-ce
que ce denier des écoles, tant pröné par la
presse libérale, et recueilli par ces dröles-la,
distribué par de telles mains, a des écoles
approuvées par de telles gens?
C'est done ainsi qu'ils font de la propa-
gande scolaire, ces affreux pelits rhéteurs,
qui ne parient qu'instruction et moralisation
du pauvre peuple? C'est en grisant le peuple
dans de parel lies bacchanales qu'on prétend
lui enseigner son alphabet et faire son edu
cation? Et l'argent tombé dans l'esearcelle
de ces mendianis masques servira a payer
quels maitres et quelles écoles? Et des hom
mes politiques, siégeant sur la basane par
lementaire, sont derrière ces viles pochades
et en exploilent le honteux bénéfice? C'est
vraimenl nauséabond!
Ah! l'enseignement est une grande et
sainte chose, a laquelle ne pourraient jamais
toucher des déigts qui onl palpé des choses
et des personnes aussi boueuses.
Que voyons-nous cependant Les
grands parleurs d'enseignement, les ta pa -
geurs de la multiplication des écoles, les
quêteurs traveslis dece fameux denier, sont
des èlres que nous n'osohs qualifier, crainle
de ne lc pouvoir en langage honnète.
La ligue de Fenseignemcnl! Mais il en est
une, la seule qui vailie, la seule qui fera du
bien et assurcra le bonheur du peuple, hue
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Poperinghe-y^es, 8-15,7-20,9-30,10-88,2-155,5-08,9-20. Ypres-Poperinyhe, 6-50,9-07,12-05,3-57,6 50,8-45,9-50. IV
peringlie-Hazebrouck, 7 13, 12-28, 4-I7, 7-13. IlazehroHck Pnpcringhc Ypres, 8-38, 10 00, 4-10, 8-28.
Ypres-Rouiers, 7-80, 12-28, 6-48. Kouiers- Ypres, 9-28, 1-80, 7-80.
Roulers-/2r«(/es, 8-48,11-34,1-13, (L. 8 86), 7-30, (9-88. Licliteiv.) Ibchterv.-Thouroul, 4-28 m. - Bruges-floaters, 8-28,
12-80, 3-00, 6-42. Liehtervelde-Courtrai, 8-25 m. 9 01, 1,30, 8,37 7,21 Zedefgliem Thouroul, 8-40. 1,03, 8,14, 0,88.
Ypres-Courlrai, 5-34,9-49,11-18,2-35,5-28. Courlrai-Y>res, 8-08,11-02,2-86,3-40,8 44.
Ypres-Thotirout, 7-13, l"2 00, 6 20, (le Snmedi a 5-50 du maiin jusqu'a Langhemarck)Thouroul- Ypres, 8-*0, 1-10, 7-00,
(Ie Samedi a 6-20 du maiin de Langhemarck a Ypres).
Comi.nes-Warnêton Le Touquel-Ilou.plines-Arwenft'dres, fi-00, 10,15, 12-00, 0-40,— Armen!ières-Houplincs-Le louquet-War-
nêAon-Comines 7 -25, 10,30, 4-10, 8 -40. Comines- Warnélon 8 40, m 9-30 s. W»riiêton-Co»i»«es 3-30, 9-80,
Courtrai Bruges, 8-08, 11-00, 12-33, (L. 5-13), 6-58. (9-00 s. (Lichterv.) Bruges-Courtrai, 8-23, 12-50, 5-00, 0-42
Bruges, Blnukenberglie, Heyst, (Elat) 7-28,11-04,2-50,7-33. (bassin) 7-31,11 -10,2-50,7-41 (exp.) lleyst, Blankenberghe,
Biuges, 5-45,8,38 11-28,8-30.
Ingelmunsler Deynze Gand, 8-15,9-41, 2-15. Ingelmunster-Deywze, 6-08 2" cl., 7-18. Gand-Deynze-/w(?e(OTMMS«er, 6-58,
11-20,4-40,7-21. Deynze Ingelmunsler, 7,31 1-00.
I igelmunsier-Anspghem, 0-08, I2-10, 6-15. kimtgiiem-Inge/munster7-42, 2-20, 7-45.
Lichte rvelde-Dixm-ade-Furnes et Dunkerke, 6-30, 9-08, 1-35, 7-55. Ditw/terAe-Furnes-Dixmude et Liehtervelde0-48, 11-10,
3-40, 5-00.
Dixmude-AY'eM/wt,9-53,2-20,8-40. Nieup-/)tóm,(ville)7-40.11-88,4-23.
1 lioiirout-Os/mde, 4-80, 9-15, 1-50, 8-05. Oslende-Thouroul, 7-33, 10-10, 12 25, 6-15.
belzaete -Eecloo, 9-08, 1-25, 8-23. Eecloo-Seteaete, 8-35, 10 15, 4-22.
GmA-Terneuzen, (station) 8-17, 12-15, 7,23. (porte d'Anvers) 8-30 12-40. 7-45. - Terneuzen-Gand, 0-00, 10-30, 4-40.
Selzaete-Lo/tere«, 9-04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-iaVtete, 6-00,
10-25, 4 45. (le Mardi, 9,30.)
O O T l Tl T-.Ï H X O rsr IT ./V. If C E s
COURTRAI, BRUXELLES.
Courtrai dép.
Bruxelles arr.
6,37
8,50
10,33
1,38
12,33
2,25
3,47
0,14
6,35.
8,54.
COURTRAI, T0URNA1, L1LLE.
Courtrai dép. 0,37 10,86 2,84 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 0,39 9,41.
Li lie 7,38 12,08 4,00 0,35 10,00.
COURTRAI, CANB.
Courtrai dép.
Gand arr.
0,42
8,01
9,49
11,05
12,31
1,81
3,44
5,04
6,40.
7,56.
BRUXELLES.
Bruges d.
Gand a.
Bruxelles
BRUGES, GAND
4-39 exp.6,49exp.7-04,9-39,12,34,3- 43,ex.2,82,S-59exp
5-31, 7,34, 9,15.10-54,1,49 4,28. 4-07.6 52
0-28, 8,50, 10-35,12-39,4 00,6,14,
4-07,6,52
7-35,8,44,
BRUXELLES, COURTRAI.
Bruxelles dép. 5,22 8,28 12,21 8,38 0,47.
Courtrai arr. 8,02 10,40 2,44 7,86 8,44.
LILLE, T0URNAI, COURTRAI.
Lille dép. 5,15 8,22 11,05 2,22 4,43 Ytlo 8,00.
Tournai arr. 8,42 8,86 11,29 2,40 8,30 8,38:
Courtrai 6,42 9.49 12,31 3,44 0,40 9-33.
GAND, COURTRAI.
Gand dép. 8,15 9,38 1,28 4,24 7,21.
Courtrai arr. 0,37 10,56 2,54 5,34 8,47.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
6,43.1 Bruxelles dép. 7-20exp. 8,14-exp 11,06 312 5,58. exp.
7,58. Gand arr. 8,29 9,41 1,12 4,2 7,17.
9-31.1 Bruges 9,23 10,34 2,38 8,11 8,38.
Suile.
Voir le IN- précédent.
Le vieillard élait sublime en parlant a ins ises
yeux élnienl ardenls; il parais.sait rajenni; je nc
sais quoi de celeste et de noble (loltail en cet in
stant sur son visage majestneusemenl beau.
Bien que tout ce que sir Duringhton venait de
dire parut fort jusle ii Aibertus, cela ne fit qti'aug-
nienter sa curiosilé. Elle devint méme insoutena-
ble, et il lui demanda timidement:
Voiis avez done bien a regrrlter, monsieur?
Petit être, lépondil sir William, dont le re
gard doux et profond parut vouloir pénétrer la
pensee d Aibertus, rhereher a savoir si c'élait
la simple curiosilé on l'inlérèl qui le questionnait.
il n y déeonvril, probablemenl, que le trndre
respect que loule sa personne étail faile pour
inspirer, et il reprit d'un son de voix doux et
engagranl:
Oui, j'ai bien ii regrrlter! Mais quel est
I homme qui, arrive au terme de sa carrière, n'a
pas honle et piiié de lui-méme en eXami riant sa
vie passée! Quel est celui qui n'en a laissc un lam-
beau chaque affection, ii chaque désir, eomme ii
cliaque obstacle qu'il a rencontre! El pour eelui
quia vu tomber autour de lui tontes ses affections
et s'évanouir tontes ses illusions, l'exislence n'est
plus qu'une habitude.... Et le plus grand bonheur
qui puisse lui arriver, e'est la fin de cette méme
existence. Si les vieillards donnaient aux jeunes
gens des avis sages et vraituetU prudents, mais
sa us Li l ii i té, sans rabacheries, sans discours cn-
iioycux, ceux-ci seraienl tm garde coiiti-e lus pré-
jugés du monde, ils vivraient plus liciircux, el ne
se haleraient pas de dépemuT leui (Sme et leurs
emotions. Mais au lieu de cela iIs se glorifient de
leur experience, eomme si elle venait de leur pro-
pre mérite, tandis qu'elle n'est que ia coOséquence
nécessaire de leur age el des perils dans lesquels
ils orit succonibé. Reinerciez le liasard, jeune ami,
qui vous a conduit dans ma mai-on; ear voire bon.
beur ii venir depend peut-étre des confidences que
je vous feraj. En vous raeonlant ma vie, je serai
deux fois salisfait: d'abord de vous légoer de bons
coiiseils et un trisle exemple qui peul salulaire-
ment infiuer sur vos drstmées a venir, ensuile ce
sera une consolation pour moi de revoir une fois
encore, avant de nieteindrc, les évènements qui
composent ma pauvre vie.
Aibertus s'appréta a écouleravec la plus gran
de attention I liisloire du passé de cel homme.
Le vieillard ordonna a tin domestique de prepa
rer le ilié et des tartines de gammon, arran
ges le bots dans la èlirminée, déeroisa ses jamlies,
et conanienQ'a ainsi:
Mon pére, sir Robert Diiringluonfut nn
des plus riches propriélaires des Elals-Uuis. II se
maria liès-jeiine ii ma mere, miss Mary Dauson-
liire; pauvre sainle. qui moiiriit en infe donnanl Ie
jour!... Depuis, mon pèrr fut sévère et tri-te dans
sou attitude; il pleura ma pauvre mère toute sa
vie; jamais il ne se consola de sa perte. Sa vie
fut depuis un long malheur, tin supplice constant
et d'autant plus douloureux qu'il étail sans espoir.
II vécut néanmoins; le coeur de l'homme est fait
pour la souflïancc; les angoisses, les tortures, les
blessures, les souvenirs amers ne luent pas!...
Je (iois vous dire que mon père, quoique fort
riehe, avail une aine charitable; il aimait ses <ein-
blahles et le bonhenr de l'hnmanité préoccnpait
son grand cceiie.
Ecpcndanl, je grandissais. et lont enfant, mon
caraclère, au grand déplaisir de mon père, étail
I otiillunl, irascible, emporté, pen patient, Ce
manque de patience conlrariail surlout mon père.
tl m'euvoya ii l'üniversité de New-York
j'avais alors dix ans. Dans un age aussi tendre il
y a de l'espoir,mais je vous jure que c'esl alors ou
jamais qu'il faul réprimer les penchants inauvais
el les inclinations contraires.
Je vous ai dii que j'éiais colère el impatient je
le devins bieu- davantagc au collége, si bien que
deux ans aprés, de guerre lasse les prolesseurs
me rendircnt ;i mon père. De retour il ia inai-
son, il ine donna nu précepteur. li me semblait
l'hoinme le pins rnnuyeux du globe, tl élait d'une
patteilce que je quaufiais d horrible, tt voulail
toujours mellre un frein a mon iriqiéluosité. II
n'avait peut êtrc pas lort je me finis trop sur les
qualités de mon cceur et-sur mon naturel, comme
si cela sulEisait pour ëlre hun rei»x
Vers ee lenips-lamon père, dont le caraclère
élait vifdont l'arne élait avide et briilatite comme
la mienne, se livra ii défaut d'aulre passion a la
science celte vie qui absorbe el dévore. II se mil
ii étudier l'astronomie el surlout la cliimie avec
une ardeur sans pareille, et bientOl. il devint, dans
celte dernière science surlout, d'une extréme ha-
bileté. II passait tons les jours et une partie des
nuits a travailler dans un laboratoire immense,
situé au foud du pare. Lail approfondissait les
prublcmes tie hi science, il en cherchait les mystè-
i esil s'en expiiquait les obscurités. Cetle vie
laboneuse cahuait ses douleurs morales en occu
pant sa pensee et en absorbant ses facnltés. II
s'y iivrail avec un acharnement tel que, piusieurs
fois, il ine lit craindre pour ses jours. Mais veilles
el fatigues le trouvaienl inébranlables. Je crus
deviner qu'il s'appliquait ii inventer quelque chose;
ee n'élait oerles pas la maniére de lont eouverlir
en oi'; ear, milhonnaire, il distribuait ses revenus
aux pauvres, il encourageait nobletnent l'agrieul-
lure, il donnait du pain it une foule d'ouvriers,
qu'il traitail sur le pied de la plus honorable fra-
ternité.
Souvent, il m'en souvient encore, il me disait
Toi, William, tu seras heuretix, car je tra-
vaille ponr ton bonheur
Rien que je ne devinasse nullement comment
mon bonheur dépendail do ces fourneaux, de ces
immeoses soullltls et de ces nombreiises holes,
complies de je ne sais quoi, je ne laissais pas que
de bien le remercier.
II était, comme vous voyez, possédé de celte
insatiable manie de découvrir. qui barcelle la plu
part des hommes qui se livrent a l'étude des
sciences abstraites. Quelquefois, il parlait seul;
il était incpiiet et agitéet il se disait a lui-même,
en se promenant a grands pas dans sou labora
toire
J'y arriveraij'y parviendraije finirai
par savoir....
Et tant d'autres lambeaux de phrases et d'idces
qui, it cetle époque, me paraissaient inintelligentes
el sans suite, et que, pour mon malheur, je com
pounds trop bien maintenant.
Mon père s'était mis dans la tele de m'apprern!re
ta cbirnie je m'y opposai formellement; il me
tourmenta pendant plus desix mois. Cependant
le danger de sa position se lit bientot sentir. Un
jour que, plus occupé sans doute que de coutume,
1 il élait resté trés avanl dans la nuil a travailler,
nouseiitendimcs dans la maison le bruit d'une forte
explosion. Le coeberqui par un heuretix hasard
élait occupé a surveiller le pausage d'un cheval
tnalade, se précipila dans le laboratoire, en bri
sant uric fenêtre. line vapour épaisse et fétide
s'élanca en tlocons dans fair, et au moment oil
j'arrivai moi-même, il se préeipila dans la salie oil
gisait le corps de mon pcre, élendu sans mouve
ment sur le carreau.
Nous le relevainesil n'élait qu'évanouiet il
recouvra counaissance. II pril sous son bras un
petit coll're en for lout garni d'acier poliet s'en
alia, soutenu dans mes bras et dans ccux de ses
gens.
II sc concha et demanda qu'on le laissat seul.
Jusqu'alors, ma vie s'était passée assez gaic-
ment. Je ne songeais qu a aller ii la chasse et qu a
monter it chcval exereiees pour lesquels j'avais
les plus grandes dispositions. Mais I'accident arrivé
ii mon père me lil réfléchir; je me promis, dès
lors, d'occuper plus sérieusement mon temps, et
de partager ses Iravaux.
Mon père garda le lit pendant toute lajournée
du lendemain, il avail la fièvre; sa respiration
était lente et creiise, lout armoucail une maladie
grave. Les médeeins les plus distingués furent
appelés. mais mon père refusa leurs soins, leur
disant que la science hamaine ne pouvait rien sur
son mal. a. continuer.