1 <B% UN DRA ME IipT GROTTE D'AZUR.O Samedi 14 Aout 1875. 10" année. N° 1,004. 2 3 e z h 5f 30 Le Journal parait le Mercredi et le Samedi. Les insertions coütent 18 eeniimes la ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paient 30 centimes la ligne. On traite a forfait pour les insertions par année. Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 20 fr. les 100 exetnplaires. C II K M. I i\ S 1) JE F K U. 17 Juillet. LE CENTENAIRE D'O'CONNELL. Les jotirnaux publiènt les deux lettres stti- vantes, que Mgr l'Evèque n'Orléansa adres- séesau lord-maire de Dublin et au cardinal Cullen, arclievéque de Dublin, pour s'excu- ser de n'avoir pu prendre part aux féles du centenaire d'O'Connell. My lord, Jeprouve en ce moment une amére dé- cepiion, ei qui me laissera d'éternels regrels. Je n'assisterai pas au centenaire d'O'Connell, je tie verrai pas les letes de l'lrlsnde, je n'ap- porlerai pas, par ma presence, le témoigna- ge de moti profoud amour pour le people irlandais el de mon admiration enlhousiaste pour voire grand bberateur. Au moment oü je me disposais a parür, les médecins rrt'in- lerdisent ce voyage, et, pendant ce temps, m'envoienl, aprés des crises graves, aux eaux d'Evian, pour un trailement déclaré urgent et nécessaire. Mais veuillez du moins me permellre do nièler de lom ma voix a celles qui voni s'é- lever a Dublin, en ces jours inémorables, pour acclamer O'Connell el l'lrlandé. L'lrlande, noble lerre, a qui son pa trio - tisine, ses malbeurs et ses vertus out l'ait une si belle aureole; I Irlande, si conslanle dans sa foi, si iiéroïque dans sa palience, si magnanime dans sa pauvreié, si toucbanle par ses longs espoirs, el par l'indomptable atlachemenl de tous ses enfanls pour leur chére et si longietnps malheureuse palrie; vaillante et brave cornme la nólre, et dont le sang s'est si souvent mèléau nólre sur les champs de batailie; si chére aux cceurs fran cais que nous l'appelons souvent notre sceur! Qu iI m'eül été doux d'en fouler enfin le sol, de me sentir au milieu de ses nobles enfanls, de sentir mon cceur baltre avec leurs cceurs, de voir ces généreuses popula tions dans leur vif et pur enthousiasme pour celui a qui I'lrlande, si dtiremerit opprimée, a dü enfin des jours tneilleurs, une justice trop longtemps refusée, et qui, il le faut espérer de la grande Angleterre, sera de plus en plus compléte, chassera pen a peu tons les vestiges de rancienne servitude, et raménera dans leschaumiéresirlandaises,oü I on a trop sottfferl et pleuré, le bien ètre et labondance avec la liberté! Oui, c'esl a O'Connell qu'est doe Tcenvre de la délivrance; c'est lui, ce grand chrétien, ce grand patriote, ce puissant orateur, eet infatigablechampion de Emancipation, qui, sans revolution ni sanglants combats, avec les seules armes que les Iibertés publiqües de l'Anglelerre lui mettaienl entre les mains, par une agitation légale et pacifique, par la force d'une incomparable éloqucnce, a su tenir debout tout un peuple potir la reven- dication de ses droits les plus sacrés, réveil- ler dans les consciences le sentiment de la justice, et ouvrir Tére meilleure oü l'lrlande est entrée, et qui doit lui apporter, grace a Dieu et aux lois réparalrtces qu'on ne lui refusera pas, tous les biens, loules les pros- pérités dont elle est digne. Fut-il jamais pour un homme plus noble lache et plus nobiement remplie, et couron- née d'un plus grand succes? Est-il une gloi- ro plus haute et plus pure que celle dont l'lrlande, que dis-je, dont le monde entier couronne voire O'Connell? Et combicn juste est replhousiasme d'un lel peuple pour un tel homme! Combien belles et digncs d'une nation chrétienne ces fètes par' lesquelles sonl réveillées dans loules les atnes les plus beaux sentiments qui peuvent agiler le cceur des hommes: la foi, le patriotisme, l'hon- neur, le courage, la reconnaissance, tout ce que rappellenl le nom el l'ceuvre d'O'Con nell, toutes les nobles fiertés pour le passé, loules les legitimes espérartces pour l'ave- nir! Je ne verrai pas ces fétes anxquelles ce- pendanl une courtoisie si gracieuse, el dont jeresterai a jamais reconnaissanl, avail bien voulu m'appeler; je ne les verrat pas, mais je les salue de loin, et lont mon cceur est avec vous, Irlandais! avec vous el avec O'Connell; O'Connell, dont j'aurais été si heureux moi-mème d'exalter au milten de vous la glotre; avec vous, Mylord, atiquel je dois l'hotmeur de cette invitation, et qui me prépariez a Dublin sous voire toil one hospi- talité dont, hélas! je ne puisjouir. C'esl a vous, Mylord. que j'adresse l'expression de mes regrels, en mème temps que ma grati tude, avec l'hommage de mes plus profon- des, de mes plus ardentes sympathies pour l'lrlande et son héros; et je vous prie de vouloir bien les transmettre a voire peuple. Veuillez agréer, Mylord, tous mes plus dévoués et respectueux hommages. -}• Felix, évêque d'Orléans. Monseigneur, J'ai déja écrit au lord-maire de Dublin et je dois redire a Voire Eminence la peine très- vive que je ressens de ne pouvoir faire le voyage d Irlande, comme je l'avais désiré. Au moment mème oü je ine disposais a par- tir, les médecins me I'interdisent absolument et, aprés plusieurs crises très-giaves, m'en voienl aux eattx d'Evian. Si quelque chose pouvait ajouter aux trés-grands regrets que j'en éprouve, ce serail assurémenl ce que Voire Eminence veut bien me dtre des sy - pathies du peuple irlandais et de Facetted bienveillant qu'il me réservait. Ces sympa thies, si je les mérite en quelque manière, ce ne peul ètre que potir les sentiments, hau- temenl proclamés, quej'ai moi-méme pour l'lrlande el les Irlandais. Car, qu'ai-je fait pour eux? J'ai parlé et qttêlé pour l'lrlande, a Paris, dans un momont de grande détres- se. Combien ils mén ont depuis récompensé! 1 Et combien de preuves j'ai recues déja de ce que je pourrais nommer la vurtu irlandaise, combien de preuves de leur irecormaissance? Oui, que n'onl pas fait pour mon diocése vos compatriotes pendant la derniéreguerre! Quel les généreuses offrandes j'en ai recues pour rtos blesses! Avec quelleusure ne m'ont- ils pas payé ma quêle de Saint Roeh! De ehaque village on m'écrivait«Vous ètes ven it a notre secours pendant la famine, aujourd'hui nous venons au vótre. El n'esl- ce pas vous, Monseigneur, ou un de vos col- légues, qui m'écriviez: Ils s'arracheraienl le pain de la bouche pour le donner a la France. Un souvenir plus personnel encore me re- vient.ici et je vous demande, Monseigneur, la permission de le rappeler, paree qu'il y a quelque chose de touchant dans sa simplt- cité, et qui peint bien un des cólés admira- bles de la nature irlandaise Lorsque nous revenions de Romeen 1862, peu de temps aprés le discours que tout a i'lieure je rappelais, élendu sur le pont du navire, malade et sans mouvement, je m'a- percus tout a coup que malgré la pluie qui tombaitavec force sur tout ce qui m'entou- rait, seul, je n'étais pas mouillé, et ayant le vé la tète pour en connailre la cause, j'aper- cus quelqu'un, un jeune prétre qui lenait tin voile étendu au-dessus de ma téte, et qui, avec un sourire que je n'oublierai jamais, me dit ce seul mot; Monseigneur, je suis Ir landais. Et que de traits je pourrais citer, si j'ou- vrais l'histoire, de leur générosité, de leur sympathie pour la France, comme de notre vieille et profonde sympathie pour eux! Oui, ils nous aimenl, et nous les aimons. Voila pourquoi j'aurais été si heureux de ne (tas mourir sans les voir, et d'èlre la surtout au moment de ces gruudes féles, si irlandaises, c'est-a-dire si teligicuses et si patriotiques, de ces grandes féles pour O'Connell Car la religion et le patriotisme, c'esl ia toute l'ame de l'lrlande. L'aiment-ils cette chére palrie, eux qui, quand ils sont forcés par leur détresse de chercher au loin l'exil, einportent avec eux une motte de la terre natale, un peu de gazon, pour les transpor ter au-dela des tners, les poser dans leur champ, aupres de leur habitation lointaine, el regarder quelquefois ce cher seuvenir de la palrie absente Mais avec quelle fidélité aussi ils out gardé la foi de leurs péres, la foi catholique! C'esl pour elle qu'ils ont tout sottfferl, mais rien n'a pu les en détacher; in- domplables dans la souffrance, ils ont été aussi indomptables dans la foi. L'lrlande a lout soulïert, lout, plutöt que de trabir l'E- vangile. C'esl pour cela que la foi et le patriotisme sonl si élroitemenl unis dans le cceur des Irlandais, et c'est pour cela, Monseigneur, que vous avez le bonheur, vous, évêque d'lrlande, ce devrait ètre, hélasaussi le nólre, de sentir que les Irlandais avec leurs évèques et leurs prêtres ne sonl qu'un; qu'entre le clergé d'lrlande et le peuple ir landais, c'est a jamais! c'est a la vie et a la mort, comme disail autrefois saint Paul Ad conoivendum et commoriendum. Ces deux grands sentiments enflammaient O'Connell et l'inspirérent dans sa longue et héroïque lulle pour rémancipation tie son pays et pour la liberté de l'Egiise! Acclamez ce grand catholique et ce grand citoyen, Irlandais, el que vos acclamations, passant les mers et retenlissant d'éehos en éehos jusqu'a nous, apprament a ceux qui, dans la Grande-lJretagne comme sur le continent, nous font l'injure d'en douter, que le foyer oü s'allume le plus pur, le plus généreux, le plus invincible palriotisme, c'est la reli gion, et que pariout et toujours les catlioli- ques les plus fidéles a leurs croyances seront aussi les plus fidéles a leur palrie. Ob! que ne m'est-il donné, Monseigneur, de voir l'lrlande, non-seulemènt ses mers, UZ O CS) z; O co co O r-n Q =5 3 3 T3 O SD M V ...-«r.'m'.'i'i'sii'.iiiiir- kO "O so T3 O oj i-4 5 o» 2! <t> O- —3 5 33 m C/2 S3 ra o G H O G H PJ CO P3 G o M ra S3 X O co CU O O PS 2 ra co "O >- S3 sa Poperinghe-Ypres, 8-15,7-00,9-30,10-33,2-13,3-05,9-20. Ypres-Poperinghe, 0-40,9-07,12-03,3-07,6 30,8-43,9-80. Po- peringhe-llazebrouck, 7 03, 12-23, 4-17, 7 13. Hazebroack Poperinghe-Ypres, 8-30, 9 30, 4 10, 8-28. Ypres-Routers, 7-80, 12-20, G-43. Haulers- Ypres, 9-28, 1-80, 7-50. Ron Iers-Bruges,'.1,44,8-43,11-34,1-13,4 39,7-36, (9-55. Liclitei v.) Lichterv.- ThotirouLA-iS m .versOsiende. Thonrout-LicAter velde 12-02venaal d'Ostende.— Bruges-/W/ers,7 20,3-28,12 80,8-00,6-42,8 43..—Lioliierv.-Co(trtra»,5-28m.9 01,1,30,8,377,21 Ypres-CourtraiS-31,9-49,11-13,2-33,8-28,7.13(mixte fel 2'cl.). Couitrai- Ypres,7,00(mixiefet2'cl.)8-08,l 1-02,2-36,3-40,8-49. Y pres-1hourout, 7-18, 12 06, 6 20, (le Samedi a 5-30 du malin jusqu'a Langtiemarck)Thouroul- Ypres, 8-40, 1-10, 7-00, (Ie Sainedi a 6-20 du matin de Langliemarck Ypres). Comines-Warnêtoii Ce rouqiiel-fb>uplines-.Ar'#ze?»fière«, 6 00, 10,13, 12-00, 6-23,Armentières-Houplines Le Touquel-War- nêton-Cötm'wes 7 -25, 10,80, 4-10, 8-40. Comines- Wqflinêlon 8 45, m 9-30 s. Wa rnê tu ri -Conline.s 8-30, 9-80, Courlrai Br^es, 8-08, 11-00, 12-35,4-05, 6-85. 9-00 s. (Licliierv.)— Bruges-Courtrot, 8-28, 12-80, 5-00, 6-42. Bruges, Blankenberghe, Heyst, (Slation) 0-80,7-25,9 20,(e*p. le Dim. seulem )9 80,11 08,2-23,2-50,8 35,(exp.)5-30,(exp. le Sam. seul)7-35,(exp )8 55. (bassin) 7-00,7-31,9-26,(le Dim. seul) 9 56,11 -14.2-31,2-56,8 41 (exp.)8-56, (exp. le Sam. seul.) 7 41, (exp.) 9-01 Heyst, Blankenb, Binges,8-45,7-15(exp. le Lundi )8,25,11-25,1 23,2 48(exp.)4-10.5-30,7-23(exp. le Dim.)7 33,8 45 Inge lm unster Deynze Gand5-00, 9-412-15. Ingelmunster-Dey/ize, 6 05 2* cl., 7-13. Gand-Do) mn-lngelinansler6-58, 11-20, 4-41. Deynze Ingelmwister, 1-00. 2" cl. 8 20. Ingelmiinster-zUtseg/iewi, 6-08, 12-83, 6-13. Anseghcm- Ingelmunster7-42, 2-20, 7-43. Liclitervelde-Dixmade lurnes et Dutikerke, 6 30, 9-08, 1-33, 8-00. DiznAerAe-Furnes-Dixmude et Lichtervelde6-33, 11-10, 3-40, 5-00. Dixmude-AYei/poM,9-50,2-20,8-48. Nieup-/)«>m,(bains)7-20,11-50,4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20. Thourout-Ostende, 4-50, 9-13; 1-50, 8-05. Ostendei-Thourout, 7-88, 10-10, 12 28, 6-15. Selzaele-Bec/oo, 9-05, 1-28, 8-28. Eecloo-Aefzaete, 3-33, 10 15,4-22. Gand-Terneuzen, (station) 8-17, 12-18. 7,23 (porie d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-Gand, 6-00, 10-30, 440.- Selzaete-LoAerff», 9 04, 1-30, 8-30. (le Merer. 8-10 m.) Lokeren-SaLraete, 6 00,10-25, 4 45. (Ie Mardi, 9,30.) c o h BHPOWDAifcr: COURTRAI, BRUXELLES. Courtrai dép. Bruxelles arr. 0,37 9,20 10,53 1,35 12,33 2,25 3,47 6,35. 6,14 8,54. COURTRAITOURNAI, LILLK. Courtrai dép. 6,37 10,56 2,54 8,34 8,47. Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 6,39 9,41. Lille 7,38 12,08 4,00 6,35 10,00. COURTRAI, GAND. Courtrai dép. Gand arr. 6,42 8,01 12,31 1,31 3,44 5,04 6,40. 7,36. BRUCES, GAKD, BRUXELLES. BRUXELLES, COURTRAI. Bruxelles dép. Courtrai arr. 5,22 8,02 8,28 10,46 12,21 2,44 3,33 7,56 6,47. 8,44. LILLE, TOURNAI, COURTRAI. 7 Lille dép. 5,15 8,22 11,05 2,22 3,20 Tournai 5,42 8,36 11,29 2,40 5,39 Courlrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33 OAND, COURTRAI. Gand dép. 3,13 9,38 1,28 4,24 7,21 Courlrai arr. 6,34 10,51 2,49 3,31 8,42 Bruges d. 6,49exp.12,34, 2,52, 3 43,ex. 6,49. Gand a. 7,34, 1,49 4 07, 4,28, 7,38. Bruxelles 8,50, 4 00, 6,02, 9-31. Bruxelles dép. 8,14 Gand arr. 6,00 9,41 Bruges 7,13 10,34 BRUXELLES, OAND, BRUGES. 11,33 3,12 exp. 4,39 exp. 3,33. 1.13 3,23 4,20 6 37 7,23. 2,38 4,37 3,11 7,22 8,38. DANS LA PAR AIMÉ RICK. V. QUE NE FAIT-ON AVEC DE LOR? II fut done decide que nous aborderions prés de la cabane du balelier. En dix minutes nous y fümes. Nous débarquJmes l'Anglais avec des pre cautions infinies. Un turieux détail. II prit sous son bras sa jam be coupée, dont il ne voulul se séparer a aiieun prix. Pouiquoi? Je ne devais le savoir que plus lard. Le batelier n'élait pas niané; ii vivait avec une vieille sceur qui commenga par jeter des cris de paon, en voyant transporter chez elle un blessé. Mais quand son frère lui ent laconic l'histoire des 40 napoléons, el qu'il ent fait britier a ses yeux la Ualtlornie qu'il introduisail ainsi dans sa cabane, la bonne femme devint ausstlót souple comine un gant... Dn piéparaau plus vite I'uuique liton cltercha de l'eau douce, on apporla une lamp'e, el un pelil garcon fut dcpêché au pas de course, pour acheler en ville les quelques médica- menls dont j'avais le plus grand besoin. Reproduction inierdiie. Exlrait du volume un Amour entre deux cercueils, etc, par Aimé Rick, in-12, de 238 pages, édilé par G Lebrocquy, 32, Chaussée-de Wavre, a helles En vnnle chez VAND ERG Hl SST E - FOSSE, a Ypres. Prix; 2 francs. Muis tout passe eri ce monde. Le temps passa aussi. Un jour vint, oü milord put s'essayer sin- des béquilles. On lui adapta une jambe de bois, en attendant la jambe perfectionnée qu'on devait lui envoyt r d'Angleterreet il put commcncer a marcher un peu. C'élait le moment des confidences... il ne me fit plus trop attendee. Un soit-, après notre léger diner, nous allümes au bord de la nier. Le soleil se conchait, un dernier icflet dorait de teinles magiques cette mer étein- celanle qui motu-ait a nos pieds. Les rochers Drilnis commengaient a se cotivrir de leur sombre manleati. Un silence, itilerrompu settlement par le lointain murmure des vagucs, régnail sur toute la nature... On était heureux de vivrc, de respirer, de marcher, d'aller de courir... Aussi ne pou- vais je me défendre d'un regard de compassion adressé ;i ce pauvre Anglais que je soutenais dans sa marche chancelanle... II était jeune encore, beau, fortvigoureux el pourtant je le voyais estropié pour toujours, et eela parsafaute, de son propre grél... sans qu'i| flit plus possible de lui porter attciin secours!... Milord sembla lire tont cela dans mes yeux... Je vous fais pil iédoclciirme dit tl avec un Iriste sourite, vous plaignez mon destin, ma folie peut être vous soufTi ez en cette heüre de joie, de vie, d'enivréiircntde voir un panvre jeune impo tent se trainer mi-érablemenl sur drs rorhers... Eb bien! néanmoins, je ne suis pas a plaindre... Non I je tie regrette pas cc que j'ai faitNi les souffniiues atroces, ni cede dure impotence ne me coütent comme un lourment... El si dem.iin c'élait ii recommeneerce serail avec joie que je donneraismon autrejambe... Ucla vous étonne?.,. Vous me croyez insensé?... Vous m'accablez d'une commiséralion cruelle?... Eb bien! asseyons nous iciéeoutez mon his- toire et, après l'avoir entendue si vous êles un homme de coeur, un homme qui avez jamais aimé, oh! ouivous comprendrez ce sacrifice qui vous parait si inexplicable en ce moment I... Nous nous assimes tons deux. L'Anglais médila un instant, comme pour se rappeler toutes les circonstances d'une histoire liigubre puis Je suis né en Écosse eommenga-t-ildans la petite ile de Eigg, qui appartenait presque entiè- rement a mes parents. Ma jeunesse se passa dans cette solitude. Mon père, ancien marin, avail selon son expression jeté l'ancre sur ce roeher, et il n'en voulait pius honger que pour aller visiter deux ou trois fois par an quelques amis, quelques camarades de bord quand ils croisaienl par ha- sard dans ces parages avec une (lotte anglaise. Ma mère, je l'avais perdue fort jeune. J'étais enfant unique. Aussi mon édiication fut-elle negli gee. Chaque malin, un vieux contre-inaitre que mon père gardail comine domestique, m'apprenait ii lire, a écrire, et a connailre la direction du vent. le point et I inclinaison de la boussole. Puis, on ouvrait ma cage j'étais libre jnsqn'aii soir, et je passais mon temps a ener de. roclier en roclier, tanlót a cheval, tanlót ii pied toujours seul. A CONT1NUER. Pendant ce temps j'observais mon Anglais. J'a vais beau me dire Get hommeest foil, je tie trou- vais absolument nueun indice extérieur de sa folie. II donnait ses ordres d'une voix faible, mais natu relle; son regard avail repris une expression de calmequi faisait plaisir a voir. Par moments, je don la is de lout, je doutais do moi-mème, et je me talais pour m'assiirer que je n'étais pas la dupe de quelqu'un de ces songes grossiers, dont le réveil se réd uit a un éclat de rire. La nnit se passa ainsi. Moil milord in'avait de- mandé de ne pas le quitter jusqu'a parfaile gué- rison. Je reslaidonc; ma clientèle n'était pas fort nombreuse en ce temps-lit a Naples, et j'avais fait prévcnir a l'höpital. Ee lendeniainIe malade ent une forte fièvre mais, les jours suivanls, ii alia inieux Cela dura deux mots ainsi. Mats, a la fin gtace ii mes soms, il en Ira en pleiue convalescence. Plus de gangrene a craindre plus d'béniot i bagie ii redout er I Nous étions maitres du mal l'Anglais marebait- si on peut employer ce tenue pour nu homme qui n a plus qu une jambe l'Anglais marebait vers la guérison. Ces deux moisMonsieur, ne furent cerles pas les plus ga is dé ma vie I Confirm dans celle cabane, n ayant pont compagnie qu un brave pêcheur matissade et une vieille femme aeariJtre, évidem- ment je ne m'amusais pas. St settlement nnloid mavait parlé de temps en temps I... C'était un homme distingue, au moins il sembiail l'être, et sa conversation devait en tons cas avoir plus de charmes que celle de la nature, laquelle peut ètre fort belle pour les poèteg, lnais n'offre que peu d'altraits pour les médecins. Mais l'Anglais semblait observer scrupuleitsc- ment beaucoup trop scrupuletisement mème, la recommandation de silence que je lui avais faite pendant les premiers jours... Aussi, je l'avoue aurais-je bien probablement planlé la moil original, malgré les inontagnes d or qu d m avail promises et I aurais-je eonfié it quel que Esculape médiocre des environs, st je n'avais été rclenu par un puissant motif de curiosité... Dés les premiers jours, le jugeant assez bien puur répoudre ii mes questions, et consultant tb- plus eu plus qu'il n'élait pas plus foil que vous el 1,101 i j'avais voulu rintonoger sur les motifs de cette liigtibre resolution et savoir pouiquoi il avait voulu a louleforce st: faire couper la jambe... Mais lui au premier mot m'avail répoiidw Doeteur a nil autre fois I... Atteiidrz que je sots complêteiöent guériet alots vous saurcz lout mais pas avaut I Etait ce pour piquer ma curiosité?... Était ce potir me couserver plus longtemps prés de lui?... je i'ignore. Tout ce que je sais, c'est que je passai deux mois et trois jours tout seul, dans celle cabane abundunnée, el que, sans mes livres d'étude, que j y avais fait venir de Naples, je serais mort d'ennui et de déplaisir, VI. LE RÉCIT.

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1875 | | pagina 1