UN DRAME
t
GROTTE D'AZDR.O
A f\/£^
Samedi 21 Aout 1875
10e année
Le Journal parait le Mercredi et le Samedi. Les insertions coütent lb centimes la ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paient 30 centimes la ligne. On iraile a forfait pour les insertions par année.
Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémenlaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 10 fr. les 100 exemplaires.
C.' lï E M 1 UT S B9 E E E 16. 17 Juillet.
L'ÉDUCATION.
VERTU ET SCIENCE.
Notts sommes heureux de pouvoir publier
la belle allocution prononeée a la distribution
des prix du collége de la Trinilé a Louvain,
Ie 10 Aoüt 187b, par Mgr A.-J. Namèehe.
L'éminent recleurde Tuniversité calholique
s'est expritné comrne il suit:
Chers Éléves,
Je me reproche un peu de venir méler
aux joies, aux cotironnes, aux splendeurs de
cetle fèle, qnelques paroles trop sérieuses,
trop anslères peut-être. Prenez-vous-en a
voire excellent supérieur, a vos excellents
maitres: Cesont eux qui Pont ainsi vonlu.
Vous savez, chers éléves, vouséprouvez tous
les jours l'affeclion profonde et inlelligonle
qu'ils vous portent, l'ardeur dont ils brülent
pour vos progrés. Dans leurs mains habiles
et dévouées tont devient occasion ou moyen
d'éducation et d'enseignement. lis regrette-
raient de voir cette belle journée so terminer
sans qnelques conseils bienveillants, sans
quelques recommandations, qui en soient le
couronnement moral. Je n'ai su résister a
leur désir, et je m'exécute, en vous pro-
metlant, sinon de ne pas vous fatiguer, au
moins de ne vous retenir que le moins de
temps possible.
Tout le monde autrefois avail sa devise.
Dans les grandes families du moyeu age, cet
te devise se transmetlail de génération en gé-
nération, comme un glorieux hérilage. A
peine Cenfant élait-il capable de quelque
discernement, que eet adage, gravésur tout
ce qui Cenlourourait, répétésans cesse a ses
oreilles, pénélrait en lui par tous les sens,
et s'idenlifiail en quelque sorte avee sa vie.
C'était une régie de conduite et d'honrieur au
foyer domestique, une banniére aux jours
du combat, un encouragement plein d'espé-
rance ou de résignalion dans les moments
suprèmes.
Comme les preux de eet age d'héroïsme et
de foi, vous avez aussi voire devise, chers
éléves; c'est celle de cette maison, et, a dé-
faut de banniére. je la lis dans tous vos actes
et sur tous les fronts Veria et science: ces
deux mots résument toutes vos aspirations,
tous vos efforts, toutes vos cspérances. Con-
servez-la bien, cetle noble devise, chers élé
ves: soyez-en cbrétiennement fiers, ellrans-
metlez-la sans lache a ceux qui vous succè-
deront dans ces murs, oü s'écoulent vos
meilleures, vos plus belles années.
Veria! A ce mot, tout ce qui est pur et
sincére, tout ce qui est honnéte et juste, tout
ce qui est aimable et saint vienl se poser sous
le regard de l'arne.
Les arts, qtiand ils sont fidéles a leur mis
sion, élévent rhomme vers Dieu, qui est la
beauté infinie et par excellence. Sur la frise
d'un de nos grands monuments contempo
rains, un pinceau il lustre a déroulé la longue
procession des élus s'avancanl vers les de-
meures t te nell ;s. Voyez tous ces héros
de rhumanité, ces martyrs de la foi, qui
monlaient sur les échafauds avec plus d'en-
thousiasme que les conquérants sur leurs
chars de triomphe; ces solitaires, ces moines,
ces religieux, qui nous onl conservé les tré-
sors des lettres, qui ont défriché nos foréls,
bati nos cités, civilisé le monde; ces guer-
riers chréliens sans peur el sans reproche;
ces magistrals inlégres; ces missionnaires,
qui sedévouent pour lesalut de leurs frères;
ces vierges qui ont immolé leur jeunesse et
leur beauté au célesle époux; ces méres, ces
femmes fortes, a qui leurs enfants ont dü
souvent deux fois la vie, ia vie selon la natu
re et la vie selon Ia grace: quel admirable
cortége, quel ravissant, quel encourageant
spectacle pour des cceurs généreux comme
les vótres!
La vertu, chers éléves, est la source de
tons les biens, des plaisirs vrais, des joies
intimes, qui sont pour l ame une féle conti-
nuelle: plaisirs durables, plaisirs nobles el
délicals, qui s'associent si bien a nos aspira
tions les plus légitimes, a nosdevoirs sacrés,
an service de Dien et du prochain, a I'amour
vrai, aclif, désintéressé, de la familie et de
la patrie. Sans doule la vertil a ses lultcs
et ses dangers, ses épreuves et ses combats,
mais Dion en adoucit ramerlume nous pro
tégé de la force de son bras: il nous fail goü-
ter, dans les moments les plus durs, les plus
critiques, et a un degré bien supérieur, quel
que chose de ce qu'éprouve, sur le champ de
bataille, ie soldat qui expose sa vie, qui
verse son sang pour une grande cause, pour
la défense de sa patrie, pour I'bonneur de son
drapeau. Un coeur chrétien ne s'effraie ja
mais de cette lutle, et il répéle avec la poéle:
La vertu est aussi une source de progrés
elde lumiére. Elleéléve l'inlelligènce, enno-
blit le coeur, fait éclore les haules pensées,
les sentiments généreux, les nobles dévoue-
ments. Son action expansive, aprés avoir
harmonise toutesJes puissances inférieures,
rayonne au dehors, el communique au corps
aussi quelque chose de sa force et de sa
beauté. Aulant la paresse et les mauvaises
passions affaiblissenl, dévastenl cette partie
malérielle de nous-mèmes, aprés avoir déso-
lé toutes les puissances de l'ame, autanl la
vertu excite cliez toutes deux un élan mer-
veilleux d'énergie et d'aclivité.
La vertu unie a la science c'est le diamant
enchassé dans Por. Les anciens eux-mètnes
Pavaient remarqué. II résulle de eet accord,
dit Pun d'eux, quelque chose d'admirable
qui charme le regard. Mais cette science, il
faut que la Religion la consacre, l'agrandisse,
et cornmeun arome salutaire, Pempèche de
de se corrompre. Toute science est frivole
a ses yenx, qnand elle ne lonrne pas a Ta-
inélioration el au bonheur de l'immanilé.
Dans ce siècle oü Pon parte si volonliers de
progrés, qu'il me soit permis de redirc que
s'il estquelquecbosed'éminemment progres-
sif, c'est Pesprit chrétien: Soyez parfaits,
hous dit PEvangile, comme voire Père céles-
te est parfait. Quel encouragement, qui 11
noble et sainle emulation dans cette pensée,
par laquelle Tbomme esl mis sans cesse en
présence de Pincomparable ouvrier, qui a
fait toutes choses et qui a pu se rendre Pas
su ré lémoignage que tout était bien fait!
La vertu, la science, ces biens incompara-
bles, vous les conserverez, vous les accroi-
trez, chers éléves, par la piété et par le
travail. La piété souliendra voire faiblesse,
adoucira vos peines, doublera votre courage.
Sans elle, sans la crainle et I'amour de Dieu,
sans la prière, vous snccomberez infaillible-
ment dans une lutle trop inégale. Après la
piété, le travail. Pardonnez-moi de pronon-
cer ce mot, au moment mème oü vous allez
goüier un repos juslemeni acquis. Mais le
travail est si nécessaire a Phomme, que mè
me, au sein du repos, il ne doii jamais s'en
affranchir complélemcnt. Le travail esl un
devoir, une obligation rigoureuse, une ex
piation rigoureuse pour chacun de nous. Ta
mange ras Ion pain d la suew de ton front
c'est ia loi irrévocable du genre humain.
Celui qui rejetle ce joug providentiel en esl
bientöl punt mème dans Pordre puremcnt
jnatériel, rien tie grand, rien de durable ne
s'accomplit sans le travail. Le travail abaisse
tomes les barrières, franchit tous les obsta
cles. La sagesse antique Pa dit dopuis long-
temps; un travail opinialre vientaboulde
tout:
Une autorité plus haute, la parole du di-
vin Mailre nous apprend a son lour que sans
Teflon,sans le courage, sans des assauts
multipliés, on ne parvientpasa cetle royau-
lé des saints, a ces cotironnes de justice et
d'immorlalilé qu'il faut conquérir, et qui ri-
quièrent des coeurs fermes et des bras vail-
lants: regnum ceelorum vimpaliturel vio-
lenti rapiunl illud.
LA LIBRE DISCUSSION.
Cest un lieu commuii, devenu familier a
la presse libérale, que de représenter les ca-
tholiquas comme ennemis des lumiéres, de
la fibre discussion, du libre examen, etc.,
etc. Ce trail se retrouve sous la plume méme
do ceux qui ont des yeux pour ne point voir,
qui n'examinenl rien et qui sont incapables
de lier deux raisonnemeiils.
Quant au prélexte de la banale accusation
qui nous occupe, les libéraux le trouvent
dans la défense faite aux catholiques dé
fense, hélas! encore trop mal observéedo
lire, sans dispense et sans nécessité, les pu
blications hostiles au dogrne calholique ou
contraires aux bonnes mceurs. De bonne foi,
les journaux libéraux ne sont - ils pas tous
dans cette calégorie?..
Aux yeux de la raison el du coeur, cctle
intsrdiclion est mille fois justifiée, et ceuxla
mème qui la transgressent ne peuvent en
méconnaitre le fondement. S'ils ont conservé
la foi calholique, ils savenl qu'il y a des
péchés intellecluels et ils doivent s'avouer
qu'ils s'en rendcnl coupables par Tabsorp-
tion volontaire de Terreur; s'ilsont conservé
quelque amour de TEglise, leur conscience
Poperinghe-Ypres, 3-15,7-00,9-30,10-55,2-15,5-05,9-20. Ypres-Poperinghe, 6-40,9-07,12-03,3-37,6-80,8-43,9-80. Po-
peringhe-Hazebrouck, 7 03, 12-25, 4-17, 7-13. Hazebrouck-Poperinghe-Vpres, 8-35, 9 50, 4-10, 8-25.
Ypres - Houlers t 7-50, 12-25, 6-45. Rou Iers- Ypres, 9-25, 1-50, 7-50.
Kou Iers-Rruges, 3,44,8-48,11 -341-13,4 39,7-36, (9-55. Lichter v.)Liehlerv.- '/'/imwouL4-25,m. vers Oslende.— Thourout-Licftter
velde 12-02venant d'Ostende. Bruges-./iüit/ers,7 23,8-25,12-50,5-00,6-42,8-45. Liehlerv.-CW(rai,5-25m.9 01,1,30,8,377,21
Ypres-Courlraid-Si,9-49,11-18,2-38,8-28,718(mixte 1 "et 2"clCourtrai- Ypres,7,00(mixiel°el2ecl.)8-08,11 -02,2-86,5-40,8-49.
Ypres- Ihourout, 7-18, 12 06, 6 20, (le Samedi a 3-30 du matin jusqu'a Langhemarck). Thourout- Ypres, 8-40, 1-10, 7-00,
(Ie Samedi a 6-20 du matin de Langhemarck 4 Ypres).
Comines-NVarnêton-Le rouquet-IIoiiplines-/lrwe?itiëre.s, 6 00, 10,18, 12-00, 6-23, Armentières-Hnuplines Le Touquel-War-
neton-Comines 7 -23, 10,80, 4-10, 8-40. Comines- Warnêlon 8 48, m 9-30 s. Warnêton-CowïMtes 5-30, 9-50,
Lourtrai-IJruges, 8-03, 11-00, 12-33,4-03, 6-33. 9-00 s. (Lichterv.)Bruges-Cottrtmi, 8-28, 12-80, 5-00, 6-42.
Bruges, Blankenherghe, Heyst, (Station) 6-50,7-23,9 20,(exp. le Dim. seulem.)9- 50,11 08,2-23,2-50,5 35,(exp.)5-50,(exp. le Sam.
seul)7-35,(exp )8 85. (bassin) 7-00,7-31,9-26,(le Dim. seul) 9 56,11 -14.2-31,2 86,3 41 (exp )3 56, (exp. le Sam. seul.) 7 41,
(exp )9-0t Heyst, Blankenb, Bi uges,5-45,7-15(exp. le Lundi )8,28,11-25,1-23,2 45(exp.)4-10.8-30,7-25(exp. le Dim.)7-35,8 48
ngel munster Deynze ^rrtwd, 5-00, 9-41, 2-13. ltigelmiinster-De!/«ce, 6 05 2° cl., 7-13. Gand-Dey me-Ingelmunsler6-58,
11-20, 4-41. Deynze Ingelmunsler, 1-00. 2* cl. 8 20.
ngel m unster-A»se<//igTO, 6-08, 12-85, 6-13. Anseghem-Ingelmunsler7-42, 2-20, 7-45.
Liichtervelde-Dixrrjflde-Furnes et Dunkerke, 6 -30, 9-08, 1-33, 8-00. ZhwiA'erAe-Furnes-Dixmude et Lichtervelde, 6-38, 11-10,
3-40, 5-0.0.
Dixmude-M'ewporf,9-30,2-20,$-45. Nieup-Dtxw,(bains)7-20.11-50,4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20.
lliourout-Oslendc, 4-30, 9-15, 1-30, 8-03. Ostertde-Thouroul, 7-33, 10-10, 12 25, 0-15.
belzaete Eecloo, 9-05, 1-23, 8-25. Eecloo-S'etaele, 5-35, 10 15, 4-22.
Gand-Terneuzen, (station) 8-17, 12-13. 7,23. (porie d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-GaMd, 6-00, 10-30, 440.-
Selzaele-LoAerez», 9-04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-Se/caefe, 6 00,10-23, 4 43. (Ie Mardi, 9,30.;
CJ O TC IC E8POWDANCB8.
COURTRAI, BRUXELLES.
BRUXELLES, COURTRAI.
Courtrai dép.
Bruxelles arr.
6,37
9,20
10,53
1,35
12,33
2,23
3,47
6,14
6,33.
8,54.
Bruxelles dép.
Courtrai arr.
5,22
8,02
8,28
10,46
12,21
2,44
5,33
7,56
6,47.
8,44.
COURTRAI, TOURNA1LILLE.
Courtrai dép.
Tournai arr.
Lille
6.37
7,28
7.38
10,56
11,47
12,08
2,54
3,48
4,00
5.34 8,47.
6,39 9,41.
6.35 10,00.
COURTRAI, GAND.
Courtrai dép.
Gand arr.
6,42
6,01
12,31
1,51
3,44
5,04
6,40.
7,36.
LILLE, TOURNAI. COURTRAI.
Lille dép. 5,13 8,22 11,03 2,22 5,20
Tournai 5,42 8,56 11,29 2,40 8,39
Courtrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33
OAND, COURTRAI.
5,13 9,38 1,28 4,24 7,21.
6,34 10,51 2,49 3,31 8,42.
Gand dép.
Courtrai arr.
BRUGES, GANDBRUXELLES.
Bruges d. 6,49exp.12.3i, 2,32, 3 43,ex. 6,43.
Gand a 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,58.
Bruxelles 8,50, 4-00, 6,02, 9-31.
Bruxelles dép.
Gand arr. 6,00
Bruges 7,13
DANS LA
PAR AIMÉ RICK.
Suite. Voir le N° précédent.
Notre vaisseau dut rester en rade plusietirs
semaines. J'en profilai pour demander tine per.
mission et faire tine petite excursion dans l'ile.
De Citta Valetta, je longeais la cóte.a pied, mon
album sons le bras, a la recherche d im point de
vtie. Je passai par Zonzol. Thomas-S.-Pielro et
autres petits hameaux perdus sur le rivage, el
j étais en train de dessiner une charmante baie
tont au fond dn golfe de Marsa Sciroeco qnand
je m'enlendis tout a coup héler a grand cris.
Hola Monsieur le marin venez done icil...
Vous nous feriez un vrai plaisir en voulant bit n
partager avee nons un modeste diner...
Je levai les yeux. Trois jenncs gens du pavs,
mais parlant admirahlement l'anglais, se trou-
vaient a cheval devant moi.
Pardon, Monsieur I officier, me dit un d'enx,
en se découvrant, si nous vous arons parlé si brus-
quement, je n'avais pas vu que vous étiez de la
marine de guerre... Voudriez vous avoir l'ohli-
Heproduction interdile. Extrait du volume
on Amour enlre deux cercueils, etc, par Aimé
Bick, in-12, de 238 pages, édilé par G Lebrocquy,
32, Chaussée de Wavre, a Ixelles En vento chez
VANDERGHINSTE - FOSSÉ, a Ypres.
l'rix 2 francs.
geancede venir diuer avec nous? Nous demetirons
tout prés d'ici, dans le chateau de nolie mère. On
avail invilé quatorze convives; Tun d'eux viest
d'envoyer dire qu'il ne peut se rendre a notie
invitation... Notre mere est superstitiense. Treize
convives lui seraient désagréables a table. Nous
nous sommes done mis en route ponr trouver nu
quatorzième, voulez-vons l'étre
Nalurellement. j'acceptai avec plaisir, cornmeun
homme qui n'avail plus diné depnis Citta Valletta.
Ces Messieurs (irent avancer un cheval tenu en
laisse par nn domestique, je I'enfourrhai lesle-
menlet en route la cavalcade I...
I.a route ne fut pas longue. Dix minutes a peine
s'étaient écoulées que nous franchissions unt'
pelite monlagné sur Ie revers de laquelle se Iron
vait un chateau assez délérioré mais ayant
encore des resles dr grandeur. Cinq minutes après,
nous descendions de ehcval.
Ma mere, (lit gaiement Ie frère ainé, voici un
quatorzième... on ne pouvail pas mieux trouver...
e'est un officier de marine militaire.
Chacon s'inclina et s'approcha eurieusemcnt.
Pour hien comprendre ma position, il faut se
rappeler que jc n'avais que dix-sept ansaucun
usage du monde et une limidité phénoménale.
Enlrer dans ce salon inconnu devenir I'objet,
le pivot de la curiosilé uuivcrsellevoir tous les
les yeux hraqués sur moi. oh quel supplicel...
J'aurais voulu rentier sous terre. Je me mou-
chais, je me grattais la tètej'essuyais ma cas-
quette avec un enthousiasme des plus louables,
j'arrangeais ma cravate je raffermissais mon col,
A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire.
je tirais et relirais mes gants a les déehirer... bief,
aujotird'hui encore je ne puis m'empêchei' de rire
de hou coeuren pensant a la mine que je devais
faire alors. Qu'on est done béte i» dix-sept ans,
qu'on est doric héle!
VIII.
IDA.
La maitresse de la maison ent pitié de mon em-
barras. Après les premières salutations, elle me
pril aussilót a part et avee l'aisance d une femme
du monde, joinir, au sans-fagon d'une campagnar-
de, elle in'eul bienlót calmëel russuré un peu.
Quel est le liom de voire vaisseau? Y a-t-il
longletups que vous êtes a Malte? Et dans la
carrière? Avez-vous vos parents? Quel ace?
-Vous pldisez-vous dans la marine?...
Telles ftirenl les (jueslions qii'elle m'adressa tont
dabord. J y répondis de mon mieux, mais hien
mal uéanmojns. car si mon trouble élait passé, il
y avail inaintenaut uri autre point de mire qui
absorhait toutes mes facultés.
C'étail tine toule jeune fiiteassise nonchalam-
meul dans un coin, non loin de moi. et qui sem-
blait fort absorbée par la contemplation d on album
de gravures.
A peine Tens je regardée par hasard que
j'éprouvai comme un éblonissemenl. Elle élait
belle comme un réve, cette jeune (iile gracieuse,
souriante, poétique, a faire éclore des sonnets dans
le cerveau d'un agent de change.
Elle avail des cheveux d'un clièlain brillant de
reflets a faire mourir de jalousie la plus belle des
Labor omnia vincit
Improlius.
Véniliennes. Soil regard pétillail de malice et d'es-
pritajoutez-y des yeux bleu-foncédes lèvres
un peu épaisses, mais roses, et sous lesquelles
on entrevoyait des dents blanches et fines, quoi-
qu'un peu irréguliéresavec cola line oreille,
un pied!... Enfin, one vraie déesse, qnoi, une
nvmphe, si vous aimez mieux... et le plus adora
ble petit ncz a la Hoxalane qui jamais fut congu
par ('imagination ardenle d'uu staluairc
Je I'avais il peine cnlrevueque je ne savais
déja pins m'en detacher. Qui pouvait-elle hien
êlre?... Pourquoi se tenait-elle dans un coin?...
J'allais interroger la maitresse de la maison,
quand celle-ci
Ida, dil-elle tout-a-coup, va done voir si
nous sommes servies...
El cnsuile a moi
C'est ma fille, Monsieur, celle cnfant-la,
e'est mon Benjamin. Elie .i d i x - sept ans, depuis
hier. Elle vient de sortir ilu couvent.
En ce moment, on annongait le diner. Mon
embarras tevinl au galop. Et il atleignit presque
aussilót son paroxysine...
Penscz done! je me trouvais a table entre la
maitresse de la maison el sa belle Ida I
Pauvre malheureuxI Que dire? Comment en-
lamer Ie discours? Quel sujet de conversation
enlreprendre? J'en avais le frisson rien que d'y
prnscr I...
Mais, chose curieuse, elle pnraissail tout aussi
émue que moi. Tous deux vrais débulanls. Oh!
que e'est done sol d'etre timide
Ce fut cependant Ida qui, la première, prit la
parole et, selon l'inévitable coutume de tous les
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
8,14 11,53 3,12 exp. 4,59 exp. 3,53.
9,41 1.13 3,23 4,26 6 37 7,23.
10,34 2,38 4,37 5,11 7,22 8,38.
geus enbarrassés, elle cominenca par un
II fail bien chaud
Oui, Mademoiselle, mais il pourrait faire
plus chaud!... La glacé élait rompue. J'en suais
sang et eau I On se init a causer... Quelle voi.x,
rnon cher doeteur I et comme sous ce masque
timide se révélait une intelligence précoce
Elle n avail que dix-sept anscomme moi, el'e
venait de sorlir de pension et pourtant que d'ai-
sance que de genlillesse
J'étais comme éblouiJe ne vovais plus qu'elle
Ce fut mon soleil, dés le premier jour, dés la
première hettre. En me levant de table, j'en étais
fou, et je le devins chaque jour davantage.
En allant au jardin, j'appris le nom de la noble
familie qui m'hébergeail. C'était les Castro dclla
Itiviera une des plus illustres de l'ile. On y rece-
vait souvent, avec une hospilaliléfranche el ou verte.
Tons nos officiers y avaient passé. Tout uniforme
et celui dc la marine surtoul yétait toujours
bien accuelii.
Aussi, quand la nuit vintet que je parlai de
continuer ma route
Pourquoi nous quitter si tót? me dit la mère
d'Ida êtes-vous done si pressé?... Itestez cette
nuit. Iteposcz-vous. Deinaiu vous serez bien plus
dispos pour continuer votre route.
On ne pouvait m'ètre plus agréable. Rester prés
de mon idole? Mais c'était le paradis
Maintenant peut-être me trouverez vous un peu
ardent pour un froid habitant du Nord Maisj'a-
vais dix-sept ans d abord, et puis n'en étais je pas
a mon premier amour I... a continuer.