10' année.
Mercredi 20 Octobre 1875
Le Journal parait le Mercredi et le Samedi. L qs, insertions coütent 15 centimes la ligne. Les reclames et annonce s j u die i air es se paient 30 centimes la ligne. On traite d forfait pour les insertions par année.
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C IS K M a Ji' S U E V EE EI. l OCTOBRE.
DU CARACTÈRE RELIGIEUX DE NOS
LUTTES.
En Belgique, ia classification des partis
s'établit, pour ains, dire, exclusivement sur
la question religieuse.
En vent on la preuve?
Prenons, par exemple, la question mili
taire.
II y a des militarisles dans les rangs de la
droite, comrae il y a des militaristes, plus
nombreux, il est vrai, dans les rangs de Ia
gauche.
Prenons la question économique.
II y a eu, et il y a peut-être encore, des
partisans libéraux de la protection el il y a
aussi des défenseurs cathoiiques du libre
écbange.
Prenons la question des langues.
II y a des flamingants libéraux et il y a
des flamingants cathoiiques.
Prenons, enfin, n'importe quelle question
oü l'intérêt religieux ne soit pas en jeu et
nous verrons se fractionner et parfois mème
se confondre les partis qui divisent le pays.
Aussi, sur loules ces questions, le clergé
n'a pas d opinion officielle et collective. Son
ministère s'élend également a M. Thonissen
et a M. Coomans, si divisés sur la question
militaire, et nous défioos bien le Journal de
Gand de nous dire quel est l'avis de NN. SS.
les évèques sur la question militaire, sur la
lol Coremans, sur les mérites respeclifs du
libre échange et de la protection, etc., etc.
Nous nous rappelons mème a eet égard
une anecdote, parfailement autbentique, qui
remonte a quelque années.
Le ministère libéral venail de soiliciler des
C0MTESSE DE BASSANVILLE.
Reproduction interdite.)
I
Chambres de nouveaux crédits pour les for
tifications d'Anvers. On tenait fort, en très-
haut lieu, a ce que ces credits fussent volés
a une majorilé considérable. Un habile et
d'ailleurs trés-bienveillant émissaire fut done
dépêche chez l'un de nos prélals les plus
éminents pour prier celui-ci d'user de son
influence pour rallier au projet de loi les
dépulésassez revèches de sa ville épiscopale.
Qu'arriva-t-il?L'évèqne refusa, polimenl
mais absolument, son intervention. II donna
deux motifs de son refus: le premier, qu'il
ne voulait pas courir au-devarit d'un échec
certain; le second, trés-piquant et trés-juste,
qu'il ne voulait pas peser sur rindépendan-
ce du pouvoir civil.
Le clergé beige garde sur les questions
politiques la plus parfuile neulralilé recom-
mandée naguére aux prètres francais par
piusieurs prélats de France. Mais lui conseil-
ler cette même neutralité lorsque surgit la
question religieuse, lorsque sa propre indé-
pendance et sa dignité sont en jeu, c'est lui
faire injure, c'est le convier a l'abdication et
presque a l'apostasie! On reproclie au clergé
d'envaliir le terrain de la politique... Com me
si l'évidence des fails n'attestail point que
c'est la politique qui envahit le terrain reli
gieux!
Un journal qui cesserait detre anli-reli-
gieux cesserait par la mème d'être libéral.
Un candidal quelconque qui respecterail
seulemeni le sentiment religieux M. Jou-
i et vient de le déclarer serail aussitól sus
pect de modéranlisme el de cléricalisine.
Le parti libéral ne vit que de sa haine
contre l'Eglise, et son seul symboie, aujour-
d'hui reconnu par lous les libéraux, est ce
cri de brutale proscriptionA bas la ca
lotte!
La presse libérale dernande quelle est la
liberie caiholique a laquelle le libéralisme ait
jamais porlé atteinte
Nous répondons en demandant a notre
tour quelle est la liberté calholique que le
libéralisme ait respeclée
II a méconnu la liberté religieuseen faisant
de la pratique du catholiscisme une cause
d'exclusions des foncliotis ofiicielles.
II a profane systématiquement noscime-
tières.
II a violé les immunités ecclésiastiques par
ses lois de mil ice.
II a violé les bourses deludes fondées par
des cathoiiques el pour des cathoiiques.
II a atlenté a la liberlé de la parole sacer-
dolale.
II a vouhi confisquer le tempore! du culte,
et s'il a reculé devant la realisation compléte
de ce dessein, c'est sous le coup de la répro-
bation publique, et avec l'inlention avouée
de reprendre son oeuvre et de nous doter
plus tard d une constitution civile du clergé.
II est l'ennemi déclaré de l'exercice public
du culte et, mème aujourd'hui, il ose en
poursuivre la proscription par d'ignobles
connivences avec l'émeule.
II a accaparé l'enseignement ofiiciel dans
un bul visible depropagandeanti-chrétienne,
et maintenant encore, en attendant l'abroga-
tion de la lot de 1842, il se glisse dans l'école
primaire dans le but avoué Wurracher des
a/nes d CEylise.
II est enfin la Franc-maconnerie au pou-
voir, e'est-a-dire I'anti catholicisme incarné,
le complice de lous les perséculeurs, et l'ad-
mirateur de cetle lutte civilisatrice qui
multiplie, eu Allemagne et en Suisse, les
captifs el les proscrils.
En voila assez, croyons-nous, pour expli-
quer pourquels motifs les cathoiiques beiges,
unis a leur clergé, dociles a ses lecons et a
ses exemples, usent do leurs droits civiques
pour défendre leurs libertés religieuses. lis
veulent prévenir la restauralion du régime
tombé en 1870 el dont Ie néfaste souvenir
n'est pas elïacé; its veulent surtout préserver
leur patrie de eet odieux despotisme donl
beaucoup de libéraux proclament l'exemple
bon a imiler. (Bien public.)
LE LIBÉRALISME ET L'ÉLECTION.
Le libéralisme ses propres organes le
dèclarent ouverlement c'est la guerre a
l'Eglise. Les réserves hypocrites sur le ihème
de la religion de nos pères ne feront plus de
dupes; el les sont jugées sans retour. Et re-
marquons-le bien, celte guerre impie de-
vienl chaque jour plus acharnée, plus déplo-
rable en ses effels.
Le libéralisme, a dit le Journal de
Gand, est la libre-pensée ou il n'est rien;»
et du premier jusqu'au dernier les libéraux
ont dü courber la tète sous celte terrible de
finition.
Quand la conscience de l'homme a eu le
malheur de vouloir s'affranchir de l'obéis-
sance a la loi divine el d'abriter sa fausse
indépendance et son orgueil derrière les de-
hors absurdes de la libre pensée, les consé-
quences de la révolte ue lardent pas a se
produire. De la defection a la haine il n'y a
qu'nn pas, et le mal, qui trouve son compte
a la haine, déploie une incroyable activilé
lorsqu'il s'agit de passer a l'applicalion.
N'est-ce pas au nom des idéés libérales
qu'on nie les dogmes, qu'on bafoue les sa-
crements, que le blasphéme s'élale cynique-
tnent dans les colonnes d'une presse sans
pudeur, patronnée et propagée avec fureur
a cause de cela mème?
N'est-ce pas sous l'influence des mêmes
idéés qu'aprés avoir nié on refuse d'obéir,
et qu'on passé de la libre pensée a son corol-
laire direct la libre morale, cel le que chacua
se fait a soi-mème?
N'est-ce pas Ie libéralisme totijours qui in
spire les efforts de cetle propogande cffrénée
dont les ravages s'exercent par les Iivres et
les journaux, les étalages et le theatre déver-
gondé, lesYtribunes des conférenciers et les
chaires d'enseigncment?
Et si le prétre et Ie religieux sont moles-
tés dans la rue ou frappés dans leur hon-
neur, si des bandes de sauvages se ruenl, le
baton a la main, sur de paisibies proces
sions, si l'émeute gronde sur les places pu-
bliques et désbonore le pays, qu'est-ce
done aulre chose el toujours que la pratique
de la théorie libérale, avec les encourage-
mentsel les explications indulgentes de tout
le parti de la loge?
Nous avons vu lout cela quand la faction
se trouvait obligée de compter avec le senti
ment public. Que serait-ce done si elle pou-
vait, libre d'eutraves et maitressedu pou
voir, donner carrière a ses instincts et se
modeier enfin sur les pays oü sévil la persé-
culion religieuse, toute armee de vexations,
de spoliations, d'emprisonnements et d'exils!
Poperinghe-Ypres, 3-15,'7-00,9-30,10-!®:,2-15,5-03,9-20. Ypres-Poperinghe, 6-40,9-07,12-03,3-57,6 50,8-46,9-60. Po-
permghe-llazebrouck, 7 03, 12-25, 4-17, 713. Hazebrouck Poperinghe-Ypres, 8-35, 9 30, 4-10, 8-23.
Yppss'Roulers, 7-30, 12-23, 6-45. Roulers- Ypres, 9-23, 1-50, 7-50.
Roulers-Zinzgés, 8-45, 1 1-34, 1-13,5,13, 7-30, (9-33. Lichterv.) Lichterv.- Thourout, 4-25 mvers Ostenile. Bruges-Aou-
7 2S< 8-25, 12-50, 5-00, 6-42. Lichterv.-Courtrui, 5-23 m. 9 01, 1,30, 5.37 7,21.
Ypres-Courtrai 5-34, 9-49, 11-15, 2-35, 5-25, Courtrai-Ypres, 8-08, 11-02, 2-56, 5-40, 8 49.
Ypres-Thourout, 7-18, 12 00, 6 20, (le Samedi a 5-50 du malin jusqu'a Langhemarck). Thourout-Ypres, 9 00, 1-23, 7-45,
(Ie Samedi ii 0-20 du malin de I un irek Ypres).
Comines-Warnêton-Le Tutiqiiet- Armenti 'res, 6 00, 10,15, 12-00, 6-25,Armentières-llouplines Le Tmiquol-War-
nêion-Comines 7-23, 10,30, 41, (Joiniues- Warnêton 8 43, m 9-30 s. Wurnê ton - Comines 5-30, 9-30,
Courtrai Bruges, 8-03, I 1 -OU, 12-,, i, 1 40, 6-51. 9-00 s. (Liclilerv.)Bruges-CWrtrru, 8 25, 12-50, 3-00, 6-42.
Bruges, Bla lumber" he, lleyst, (Slation) 7-23, 11 08, 2-50, 7-35, (bassin) 7-31, 11-14, 2 50, 7 41. li cyst, Blankenb,Bt uges,
5-45, 8,25, 11-2,4
lagelmunster Dt-ynz- 5-00, 9-4 12-">. -gelmunster-Deynze, 6-10 2" cl., 7-13. Gand-Deynze-Ingebnunsfer, 6-58,
11-20, 4-41. Deynze b <jélmunster, 1-- 2" 8 20.
lngelmunster-Jnsegheta, 0-05, 12 3, 0-:3. Aw-Ingelmnnsler7-42, 2-20, 7-43.
Lichtervelde-Dixmade Funics et üankerke, 6 30, 9-08, 1-33, 8-00. Dimkerke-Furnes-Dixmude et LiclUervelde, 0-33, 11 10,
3-40, 3-00.
Dwmude-Nieuport,9-50,2-20,8-45. Nieup-Z)m», (bains) 10-43, 4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20.
Thourout-Os lende4-509-15, 1-50, 8-05. Oslonde-Thouroul, 7-55, 10-10, 12 23, 6-15.
Selzaete-iJectoo, 9-05, 1-25, 8-25. Eecloo-Selzaete, 5-35, 10 15,4-22.
Gand-Terneazen, (station) 8-17, 12-25, 7,30. (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-Gand, 6-00, 10-30, 440.-
Siiliiülü-Lokeren, 9 04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 in.) Lokeren-Selzaete, 6 00, 10-23, 4 43. (le Mardi, 9,30.)
C O Tt B. naFOWDANCBI
COURTRAI, BRUXELLES.
Courtrai dep. 6,37 10,53 12,33 3,47 6,33.
Bruxelles arr. 9,20 1,35 2,25 6,14 8,34.
BRUXELLES, COURTRAI.
Bruxelles dep.
Courtrai arr.
3,22
8,02
8,28
10,46
12,21
2,44
3,33
7,36
6,47.
8,44.
COURTRAI, T0URNA1LILLE.
Courtrai dep. 6,37 10,56 2,34 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 6,39 9,41.
Liile 7,38 12,08 4,00 6,33 10,00.
Lille dép.
Tournai
Courtrai arr.
Courtrai dép.
Gand arr.
COURTRAI, GAND.
6,42 I 1 3.44 6 4
5,04 7,jj.
S,u 1 1 ,.j I
C vi l dén.
Courtrai arr.
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
Bruges d. 6,49exp.l2,34, 2,32, 3 43,ex. 6,43.
Gand a. 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,38.
Bruxelles 8,50, 4-00, 6,02, 9-31.
Bruxelles dép.
Gand arr. 6,00
Bruges 7,13
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
5,15 8,22 11,08 2,22 3,20
5,42 8,36 11,29 2,40 5,39
6,34 9.47 12,20 3,38 0,33
GAND', COURTRAI.
5,13 9,38 1,28 4,24 7,21.
0,34 10,51 2,49 3,31 8,42.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
8,14 11,53 3,12 exp. 4,59 cxp. 5,28.
9,41 1,13 3,25 4,20 6.37 7,33.
10,34 2,38 4,37 5,1 1 7,22 8,55.
PAR L.\.
Par une froide matinee d'aulomne, tandis que
le vent inurmiiraii Iristement en soulevant les
feuiIles mortes donl la lerre est jonciiée a cette
époque, que les arbres déponillés gérnissaienl en
se coiirbant comtne pour rappeler a eux les der-
nières feuilles que Miltevoyea chantées, une femme
pauvre, seinblant, eile aussi, bien ballue des ora-
ges, bien froissée par les lempêtes de la vie, mar
ch, lil a pas lenlsdans un sender couvert de mousse
morle, mais humide, qui conduisail au village de
C..., ce village si coquet, si fleuri quand le soleil
joyeux du prmtemps brille a son bonzon, mais si
dépouillé, si Irisle quand la bise remplace la brise
dété toute ehargée,de parfums, et l'hiver la riante
saison des fleurs.
A prés él re nee dans une de ces oasis de la for
tune oü les plantes éclosent d'elles-mémes, jelée
dans une de ces terres ingrales oü Ie laboureur
meurt sur Ie siilon qn'il chercheen vain a fertiliser,
la pauvre femme avail voiilu revoir le joli pays oil
s'élaient écoulées ses jeunes années si pleines de
promesses démenties par l'évéuement, d espérances
trompeuscs belles années nu coiinaissaut d'aulres
ombres que celles du soleil caché p;ir les grands
arbres belles années donl pas un jour ne s'éveilla
ou ne s'éteignil sans un sourire
J'irai, s'étail-elle dit, chercher la du courage
pour comballre encore, puiser au bonheur passé
des forces contre le malheur présent, el relrt mpcr
mon ameen évoquant de chers souvenirs évanouis;
j'irai demander aux hois charmants qui ombra-
geaienl jadis mon front joyeux leur brise rafrai-
cliissarite, aux gentils oiseaux, moins babillards
que je ne l'étais alors, leur doux ramage, aux ruis-
seaux leur murmure mélodieux j'irai prier dans
la vieille église qui regut mes premiers vceux, aux
pieds de la Vierge sainte, confidenle de mes pre
miers désirs j'irai demander l'écho des rochers
lous ces noins qu autrefois enfant, je me plaisais a
pil faire redire noms aimés. lous rassemhlés jadis
aulourde moi et qu'aujonrd'hui la mort ou l'ab-
seoce out disperses a jamais! Oh! otii, lü je revi-
vrai, je renaiuai, je reprendrai des forces pour le
combat... de la resignation pour la douleur...
Partons..alions revoir cette terre bénie de Uien
oü se sont écoulées les plus belles années de ma
vie.
Et elle parlit humblement a pied, car ses faibles
ressources ne lui permetlaient pas de délourner
le moindre argent du maigre et sévère budget du
nécessaire.
Brisée par la douleur et la fatigue, eile suivait
done a pas lcnls le sentier qui longe la cloture rus-
tique de la commune de C... au dela élait son
village, sa maison Dans le ciel gris et brumeux
se découpail encore le clocher du hameau l'An-
gélus tinlail Icnlement.... c'élait bien la méme
cloche argentine qui, ail temps oü ses petites mains
commencaient a se joindre a peine, appelail déja
les coeurs pienx a la prière, mais alors frères et
soeurs se groupaienl pieusement aux genoux de
leur mère, donl la voix calme et pure apprenail
aux tévres dé ses enfants la prière daus laquelle
nous bénissons la Heine des cieux, pour qu'elle
nous bénisse a son tour. Le sou de la cloche n'avait
pas cliangé, mais, hélas! nullevoix de mère, nolle
voix d'enfant ne répondail a son appel aussi
chaque coup du belTroi faisail naitre un soupir,
arrachait une larme du coeur et des yeux de la
pauvre isolée.
La Iriste pélerine setait inise a genoux sur un
tertre de feuilles séehées, et, obéissant a la voix
d'airain qui vibrait daus l'air, elle éleva son coeur
vers le ciel. Plus calme après cetle courle prière,
eile reprit sa route; mais, quand elle voulut enlrer
dans le village, au bont du sentier qu elle parcou-
rait, une lorle barrière lui présenta un obstacle
imprévu.
Apercevantdansce moment un petit garcon qui,
le nez au vent, les cheveux en désordre, mordait
a belles dents dans un gros morceau de pain dur
et noir, tout en chassant de inaigres inoiHons de
vant lui, elle lui demanda pourquoi on avail mis
la cetle barrière nouvelle.
En entendaut celte question, le petit paysan se
graüa la têle d'un air niais.
C'le barrié, dit-il, dam, al clot I' champ a
Jean-Claude et parsonne n'pouvions I'ouvrir que
lui, ses gars el les gens riches d' la commune.
Et par oü passent les pauvres? demanda
humblement la tnste isolée.
L'infant monlra un sender sale et rocailleux, et
se sauva ii toutes jambes en appelant ses mu tons
après lui.
Coiunie les pauvres, la voyageuse pril le sender
rocailleux.
Hélas le sender du pauvre est apre et rude,
murmurail-elle Iristement. Tout ce qui pieure,
souü're et regrelle n'a-t-il pas droit au méme litre
Je suis done doublemciil ii ma place ici.
El, tuut en marchanl a grand'peine sur des ca il
ioux aigus, la pauvre femme cherchait a chasser
de sou coeur l'iinpression que lui avaient produite
et la cloclie solitaire et la barrière restée ciose ii
sou approche.
Ace moment, comuie pour lui venir en aide,
un pale layon de soleil enlr'ouvril les uuages gris
de l'horizou, le chant d'un oiseau se fit entendre
dowcement, enfin ces mille bruits légers de la na
ture qui s'élèvent des champs et des bois comme
un hymne au Seigneur, firent passer dans sou
coeur troublé un peu de ce calme et de ce repos
qui régnaienl au dehors.
Alors sa rêverie prit le caractère de l'espérance.
Encore un peu de lemps, lui murmurait
celte consolante fitte du ciel, el le loit de ton père
va se montrer a tes regards n'en connais-tu pas
loules les approches ne sonl-ce passes hautes
eheminées, ses ton relies, ses girouelles, et letoile
que Ui voyais de ta fenêtre
All reprenait la pauvre voyageuse, en se
laissant aller a son doux réve, je saurai bien pren-
CJ
dre sans guide le chcmin le plus court... sans peine
je franchirai le petit ruisseau, vaste mei' de mon
enfance je traverserai le bouquet de bois si par-
fumé de violeltes au printemps, violettes dont la
récolte nous était accoi dée coinme récompense
un moment je m'assoirai sous le grand hêlre, au
pied duqiiel le vieux berger venait avec mystère
nous prédire le temps du lendemain, quand quel
que gentil projet de promenade lointaine faisait
butlre nos jeunes coeurs d'espérance ct de désir.
Changer de place parait si charmant a l'enfance
Je parcourrai la pelonse, beau tapis de ver-
dure, theatre de nos jeux enfantins, de nos danses
joyeuses de jeunes lilies, oü nous formions ces
rondes folies, donl chaque anneau était une main
aimée puis, avanqant dans les hautes herbes, je
gagnerai les bosquets fleuris oü je me plaisais a
léver ii travers leurs branches dépoutllées je ver-
rai s'agiter la flamme de l'atre dans l'immense che-
ininée du salon oü se bloltissail jadis toute notre
jeune familie attentive aux récits toujours intéres
sants ct toujours nouveaux de notre bonne aïeule
aux blancs cheveux, mais a l'ésprit si jeune encore!
Hélas toutes ces personnes aimées out disparu,
mais je iron vera i des amis sous ce toit vénéré qui
m'a vue naitre. Arrière done le ruisseau, le bou
quet de hois, le grand hêlre, la pelonse el les bos
quets fleuris je cours pour te saluer au plus vite,
ma vieille maison, toi qui me gardes encore de si
doux souvenirs
(a continuer).