1 m LES «LIBÊRÉS FORQATS.- VTjy (,<»- N° 1,190. Samedi 26 Mai 1877 annee. m >- |,e Journal parail le Mercredi et le Samedi. Les insertions coiitent 15 centimes ia ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paienl 30 centimes ia ligne. Oti trade a fotfail pour lei insertions par annee. Un numéro du journal, pris an Bureau, 10cenlirn.es. Les quméros siipplémentaires comrriandés pour articles, Réclames ou Annonces," content 10 fr. les 100 exemplaitcs. H K ]#I I It g r. 1) JK F JK 14. 1 Décembre. Ce memorable événement a été célébré undi dans divers diocéses du pays d'une lanière digne du saint jubilaire, digne des alholiqtres beiges. Leur atlachement dé- oué a l'Eglise et au Souverain Ponlife a clalé au grand jour, et partout des actions e graces et des felicitations enthousiasles nt retenli. Heureux peuple qui a su con- erver dans ces temps troublés sa foi el son ideur religieuseNul doule ou Dieu Pen écompensera, et au milieu des peuples en iroie aux maux les plus alïreux, II préser- era la Belgique dans l'avenir comme II a aigné la préserver dans le passé. A Bruxelles, a Anvers, a Gand el dans oules les localités oü la fêle se célébrait undi, les décorations et les illuminations nt été presque générales; a Gand les ex- itions étaient rares; ilyavait un élan lel ue peu de personnes y résistèrent. Nos ad- ersaires furëiit impuissants a le compri- ner, et avant-hior nous en lumes l'aveu dans ine feuille libérale ganloise, qui s'en pril aux actes illogiqucs que commeflenl lous les jours, un grand nombre de libéraux places a lous les degrés de l'éclielle socia le. Gette feuille se demanda pourquoi on illluminerait point pour le Pape, alors qu'on jouail au radical en ville, qu'on allait la messe a la campagne et qu'on se mariait 'égliseavec messe el autres accessoires. dans son dépit elle gourmanda les libé- aux qui mettent leurs enfanls dans les éco- T g etrwror Scènes de la Russie méridionale. les du clergé, qui font enterrer leurs parents a Mariakerke ou a Monl-St-Amand. Cedéfanl de logique exaSpére le journal gueux, mais sa colére ne produira pas plus d'effet que les attaques furibondes qu'il a dirigées contre la Religion, et nous ne dé- sespérons pas de voir revenir a nous beau coup des inconséquenls dont il médil. L'hom- me peut se passer de bien de choses, mais il ne saurait se pass r de religion, a moins qu'il ne tournea la brute. Le sentiment religieux s'empare souvent de lui malgré lui, et il a beau se roidir contre cetie influence, il la ressent alors qu'ils voudrail s'y soustraire. Au reste, e est un grand honneur et un plus grand bonheur pour noire pays d'avoir conservé le trésor de la foi el de proclamer en loute circonsiance son union inlime avec Rome, ou un veillard, abandonné de loutes les puissances du monde, tient en échec la révolution el préserve mérite dés atieintes de celle-ci les malheureux qui la serveiit. Nos journaux gueux auraient bien dti se mellre d'accord sur l'ap|)iéciaiion de la fète du 21 Mai, a Gand. Tandis que le Journal de Gand réduit la manifestation a quelquès rares drapeaux canaris et a quelques lampions mal allu- més, la Fldndre libérale avoue que mème une foule de libéraux, connus comme leis de lout le monde, out urné ou illuminé leurs maisons. Les manifestauts étaient de son aveu en majoriié considerable Elle est réduite a se refugier au quartier d'Akkergem pour conslater des abstentions Pourquoi ne pas eourir tout de suite aux prairies de la Bylokq?.... Le journal gueux, il est vrai, attribue la généralilé de la manifestation, a la« pression cléricale. Mais si les calholiques sont si impuissants en noire ville, comment pèuvent- iis exeréer une pression qui triomphe des influences nous sommes polis libérales et officielles Et puis la Flandre nous dira-t-elle quelle pression a pu forcer des membres mil- lionnaires de ['Association libérale a orner les facades de leurs maisons de banniéres el de drapeaux el comment on a pu voir, mème un conseiller communal, allacher a son bal- con l'écusson de Pie IX, surmonté de la Hare?... De son cólc le Précurseur d'Anvers publie une dépèehe de Gand conslatanl que« beau- coupde maisons étaient illuminèes el la Gazelle avoue que« Ié nombre des maisons illuminèes l'émportait do beaucoup sur le reste. A la messe pontificale qui a été chantée lundi malin en l'eglise collégiale des SS. Mi- cliel et Gudule, a Bruxelles, on remarquait dans lechoeur, qui élail comble comme tou. le reste, des représeut'auis des ordres reli gieux, beaucoup de membres dela Cfiambre, eulr'aulres MM. Ie baron Kervyn de Letten- hove, Victor Jacobs, Tack, Nothomb, etc., beaucoup de persónnages de distinction, parmi lesquels le pnnce et la prmcesse de Garaman Ctnmay, etc. MM. Malou, ministre desfinances, DeLanls- heere, ministre de la justice, et Beernaert, ministre des travaux publics, assislaient avcc leurs femmes a la cérémonie. Nous apprenons avec joie que les membres calholiques de ia Chambredes Représentants a l'exemple des membres calholiques de, la Chambre des Communes d'Angleterre. vien- nent d'envoyer au souverain Pontile nne adressede respeclueuses felicitations el de filial dévouement a l'occasion du jubilé épis- copal de Sa Sainlelé. (Bien Public). LE DÉPABT DU 606. La presse libérale est exaspérée. L'all'ilu- deénergique que vient de prendre le Marê- cbal de Mac-Mahon vis-a-vis de M.Jules Si mon, président du conseil des ministres, la met aux abois. En cela elle est logique; t l ceux qui étudient ses variations, ne sont pas élonnés de la voir protester, lorsque des me- sures d'ordre sont prises par un Chef d'Elat. Sa communaulé d'idées avec la presse ul tra-radicale lui en fail un devoir. Mais aussi, remarquous-le bien, celte attitude de la pres se liberale est un des symptömes les plus caractéi isliques de la decadence de ce qu'on élail convenu d'appeler jusqu'iei le libéra lisme. Autrefois, les libéraux pouvaient nier leurs relations avec la dèesse Raison, patronnedu Radicalisme, ear ils se contenlaient de luï dunner eu secret des gages de leur amour. lis ctaient justement honteux d'èlrc confon- dus dans la foule avec les fanaliques de cellc idolo de quatre-vingt treizc. Aujourd'hui, ils ne potirraienl plus nier leurs coupables sympathies; leur admiration dévergondée s'élale au grand jour. II en est de cela, comme d'aulres choses; quand la passion n'est relenue par aucun frein, les meilleures résoiulions n'ont nulle influence. Nous voyons depuis quelques anuées ce tris- le rapprochement s'effectuer entre le libéra lisme el le radicalisme; en ce moment, l'al- liance est consommée par un écoeurranl con cubinage politique! Que la presse libérale ne vienne pas dire le cqnlraire, car nous lui montrerions la bon- leuse communaulé qui i'unit a la démago gie. L'une et l'aulre puisent leur force dans les principes négatifs de la libre-pensée. Les aliments doul eltes se nourrisseut sont les mémes, leurs appétits égaux La guerre que les libéraux et lesradicaux font a l'Eglise n'a qu'un but, el les moyens qu'ils emploient sont idenliques; ni les uns ui les autres ue reculenl devanl le menson- ge et l'agitation. L'Eglise, la plus grande, la plus noble des institutions qu'il soit possible de présentera i'admiralion des hommes, l'Eglise qui a lant fait pour cux, qui les a lirés de la barbaric pour les rendre fibres, qui les a guides ver; la civilisation moderne dont ils sont si fierss l'Eglise, qui la première a prononec le mot de l'ralernilé, el indiqué, au monde sorti des ruines du paganisme, les moyens de prati- quer celte vertu, l'Eglise, enfin, dont les t V -IMi .till# nri rc o 7, 5C O 72 H O i P- si m r* m a rn O -T3 tn H "JZ ro 7 peringhe- Ypres, 5-15,7-00,'9-28,11-00,2-13,5-05,9-20. Ypres-Popëringhe, 0-30,9-07,1*2-07,3-07,0 50,8-4ö,9 «0 peringhe-Uaiebrouck, 6 53, 12-23,7-10. Hazebrouck-PbparingheJ Ypres, 8-23, 4 10, 8-25. ires-Routers, 7-30, 12-23, 6-43. Rooiers-Ypres, 9-25, 1-30, 7-50. ulers-IJrujes, 8-45, 11-34, 1-13,3,10, 7-30, (9-35. Lichtferv.) Lichterv-Thouroul, 4-25 m. vers Osteride. Brugess/lou- lers 8-23, 12-43, 5-05, 6-42. Lichterv.-Courlrai, 5-25 m. >res-Courlrai 3-34, 9-46, 11-20,2-35,5-23, Courtrai-Ypres, 8-08, 11-05,2-36,5-40,8-49. nes-Thouroul, 7-18, 12 06, 6-20, (le Samedi a 5-30 du matin jusqu'a Langhemarck). Thouroul-\pres, 9-00, 1-23, 7-43, (le Samedi 6-20 du matin de Langhemarck a Ypres). mines-Warnêton.Le Touquet-Houplines-/ir?»e»</dres, 6-00, 12-00, 3-35, Armentières-Houplines-Le l'ouquet-Wnrneton- Cotnines 7-2.5;, 2,00, 4-43. Comines- Warnêlon 8-45, m. 9-30 s. (le Lundi 6-30,) Warnêlon-Cowtnes 3-30, 11-10, (Ie Lundi 6,50.) lurtrai Bruges, 8-05,11-00, 12-33,4-40, (Inge!.) 0-55. 9-00 s. (Licliterv.) Bruges-Conrtrat, 8-25, 12-43, 3-03,6-42. •uges, Blankenb, Heyst, (Station) 7-23, f 1-08, 2-50, 7-33. (bassin 7-31,11-14,2-56, 7.41, Heyst, Blankenb, Bruges, 5-43,8,25, 11-23, 5-30. jelmunster Deynze-Crantf, 5-00, 9-41, 2-15. lngelmunsier-D«/?tze, 6-10 7-15. Gand-Deynze-Ingelmunster6-58, 11-20, 4 41,7-21. Deynze Ingelmunster, 1-00. gelmunsler-Anseghem, 6-05, 12-35, 6-13. Ansegliem-Ingelmunster7-42, 2-20, 7-43. chtervelde-Dixrriade-Furnes el Dunkerke6 30, 9-08, 1-35, 8-00. D^ttAlér/fö-Furnes-Dixmutfe el Lichtervelde 3-40, 3-00. ixmude-iYiew)0or2,9-50,2-20,8-43. Nieup-Dijcm, 7-30,12 00,4-20. Iiourout-Ofewdc, 4-50, 9-15, 1-30, 8-03. Ostende-Thouröut, 7-53, 10-10, 12 25, 6-15. Selzaeie isec/oo, 9-03, 1-25, 8-25. EecIoo-Se/sraete,3-35, 10-13. 4-22. ,/A Gand-Terneazen, (station) 8-17, 12-23, 7,3.0. (porto d'Anvers) 8-30, 12^0. .7-43. - Ierneuzori-6ra»d, 6-00, 10-30, \W. Selzaete-Lotóren, 9-04, 1-30, 8-30. (le Merer. 3-10 m.) Lo keren-Se/0 00, 10-23, 4 43. (Ie Mardi, W.3U.) O O It B. SI S X> O IV I> A- W CE 8 COURTRAI, BRUXELLES. BRUXELLBS, COURTRAI. Courtrai dép. Bruxelles arr. 6,37 8,30 10,53 1,35 12,33 2,23 3,42 0,10 6,33. 8,54. Bruxelles dép. Courtrai arr. 3,22 8,00 8,28 10,46 12,21 2,44 5,35 7,56 6,47. 8,44. COURTRAI, TOURNAILILLE. Courtrai dép. Tournai arr. Lille 6.37 7,28 7.38 10,56 11,47 12,08 2,34 3,48 4,00 3.34 8,47. 6,39 9,41. 6.35 10,00. LILLE, TOURNAI, COURTRAI. Lille dép. 5,15 8,22 11,03 2,22 4,45 Tournai 5,42 8,36 11,29 2,40 3,39 Courlrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33 COURTRAI, GAND. Courlrai dép. Gand arr. 6,42 8,01 9,49 11,08 12,31 1,31 3,44 3,04 6,40. 7,36. Gand dép. Courlrai arr. 5,15 6,37 GAND, COURTRAI. 1,28 2,34 9,38 10,56 4,24 5,34 7,21. 8,47 Binges d. Gand a. Bruxelles BRUGES, GAND, BRUXELLES. 6,49ex. 7,04 9,39 12,34, 2-52 ex. 6,43. 7,34 8,19 10,54 1,49 4,07, 7,58. 8,50 10,33 12,39 4-00, 7,13, 9-31. 9,31 10,40. Bruxelles dép Gin I Brtiges BRUXELLES, GAND, BRUGES 7,20 8,14 11,06 1,35 3,02 ex. 4,59 ex. 1.23 3,59 4,11 6 29 2,38 - 5,01 7,22 8,14 arr. 6,00 8,38 9,41 7,15 9,23 10,34 5.55 7,37 8,18 «SBB le jubilé Episcopal de pie ix. TG7T :i -.6JUyi>jUAI 1 t.J CaJjfKi.. (Extrait de la Revue. Générale). Suite. Voir le numéro précédent. Rien ne pent dépeindre le désespoir qui s'em- iara de la population israëlite en Pologne et cn iussie. Mais ce n'élait pas ce désespoir stupide |ui se lamente et croise honleusement les bras. ant que les petils gargons Vesteraient en Russie, loint de salut pour eux; car, par une exception )eut-être unique dans les fasles de eet empire, le ouble souverain, eet aulocrate de loules les Rus- ies, dont le pouvoir est au moins aussi absolu ]ue celui des Czars, semblail avoir perdu de sa oute puissance. Mais oil cachet' les enfanls En lutriche, en Prusse Ces deux Elats étaient alors nféodés au grand Nicolas au soutien dé ordre et ils faisaient a leurs frontières non- eulement leur propre police, mais encore célle de a Russie. Restait la Roumanie, pour unique Tien Ie refuge. Aussi s'organisa-t-il bienlót, le long du nilh, un mouvement mystérieux et sans relache. I s'élablit, ii travers les gouvernemenls de Podo- ie et de Bessarabie, des stations éöhelonnées de inq en cinq milles, étapes des réfraclaires fugitifs. 'endanl Ie jour, les pauvres petils reslaient ca- ihés; la nuit on les conduisait plus loin. Ordinai- 'ement, ils étaient enveloppés de drap ou d'autres tssus, dissimulés sous des céréales, transportés ous forme de ballots de marchandises. Lipka'ny tait la dernièrë station de Ia ligné de sauvetage; le la, on passait les réfugiés sur la rive moldave ,.v. oi-nioM If oü ils étaient recueiilis par tie pieux corcligion- naires qui prenaienl som tl'eux. ii Bien qu'ils fussenl des enfanls élrangers se hata d'ajouter Niissan, et bien qu'il y ait de gens plus riches de par le monde que les Juifs moldaves. Avoucz que nous no sommes pas les bétes méchantes, avares et intéressées que les Polonais font de nous. u A la longue conlinua Walerian sans s'émouvoir, les autorités russes finirent par s a- percevoir qu'une puissance occulte conlrecarrait leurs plans et enleva.l au Czar précisément le meitleür de sa proie. La divulgation du secret fut tuise ii pi ix. Je dois a la vérité de conslater qu'il ne se Irouva pas un seul traitre. Le mystère fut découvert par l'effet du hasard.... u Oui, ici tout prés, inleirompit I'iucor- rigible Reb Niissan, le conducteur s'appelait Roth- Moschele. Une nuit, cel homme suivait tranquil- lement la roule qui longe le Dniester. II avait der rière lui dix gat'Qons roulés dans des couvertures. Surviennent lout-a-coup trente cosaques. Qü'as-lu sur ta voiture? - Des couvertures de chevaux, répondit Moschele sans se iroubler ii Décharge-les. Moschele ne s'effraie pas, jelte dix ballots sur la route et attend. Aucun des enfanls ne bouge ils sont demi-morts de peur. Mais un maudit Cosaque perce de sa lance un des ballots, et Ie pauvre petit qui est dedans se met a crier borriblement avant do rend re I'ame. C'est ainsi que lout fut découvert. Le Russe tenait la piste et, un mois après, le sauvetage avait cessé. La prouesse de ce Cosaque précipila dans Ie mal heur vingt mille hommes: lesjeunes, on lesenvoya dans les régiments, et les vieux, en Sibérie. Je nc dis rien de leurs families. Vingt mille hommes u Ce'nombre est peut étre exagéré ii objecta tranquillement le Polonais. Cependant, les vicli- mes de celte découverte nocturne se coniptent par milliers. Et maintenant que tout espoir de salut était évanoui, maintenant que les plus audacieux et les [ilus habiles avaieut renonce a la luite, un caprice du soi t amena Ie danger sur la paisible maison de Naflali. Jusque-la, il n'avait eu qu'une part de compassion dans la détresse dc scs coreli- gionnaires, qu'il ne cessait de soulenir de ses con- st:jts et de ses dons généreux. Mais il n'avait rien eu a craindre pour son Ruben, avant eu soin de gagner 'a prix d or les bonnes graces du maitre de police et du commandant militaire de Relz. Tont a coup l'qflicier cbangëa de garnison, et le fonc- lionnaire, mis en prevention, perdit emploi et li- bèrté. Chez leurs successeurs, la crainte doniina la cupiditc. Le pauvre Richard tomba dans un sombre désespoir. Le danger grandissait sans eesse d'un jour a l'aulre, il s'altend'ait a se voir arracher son (ils unique, l'espérance de sa vieillesse. Lui-méme était aveugle et, parmi ses coreligion- naires, il ne se trouvait persoune qui eüt osé ten- Ier de faire passer Ruben en Moldavië. Pour tout l'or du monde, nul ne Teut entrepris. Alors Gittel prit son courage a deux mains el déclara a son père qti'elle sauverait Ruben. Ceci était une résolulion terrible pour une douce et timide jeune lille de dix-sept ans, aceou- tumée, dans ['opulente maison de son père, aux soins les plus tendres et les plus délicals. Non, l'a- mour filial, non, l'attachernent fraternel seuls ne peuvent expliquer lant d'héroïsme. Evidemment, elle avait la conviction que Dien lui-mème exigeait ce dévouement. ii Le vieillard résisla longlemps. Enfin, au com ble des alarmes, il consentit. Le jeune garcon fut caché sous des habits de fille. Ceci élail, selon la J I KI' loi juive, un pér,hé; mais ia fin sanclifie les moyens. ii Les deux enfanls se mirent en route. Souvent la malheureuse m'a raconlé les détails de ce terri ble voyage, en s'accusant amèi'ement d avoir man- qué de prudence. Je pense cependant qu elle ne se rend pas justice; car, d'après tout ce que j'ai appris d'elle, cettc enfant a fait prenveaü contraire dune grandeur d'Jme et d'une énergie qtie Ie moins enthousiaste ne peut s'empêcner de trouver sublimes. O Hélas, tant d'adtnirable abnégalion fut en pure perte Jusqu'a Lipkany, done jnsqiia la frontière, tout alia bien. Restait une rivière franchir.'En core un effort, c'était le salut; cl cel effort semblail aisé, car, a l'endroit oü se Irouyaicnt les fugiiifs, les bords marécageux du Prutb soul couverts d epaisses et discrètes oseraies. Mais les enfanls furent découverts avant de pouvoir quitter Lipkany, et cela par suite d'un élrange concours de oirconslances. Ils étaient arrivés le soil- et se proposaient de passer la rivière cette nuit-la mème. Ils descendirent dans une au- berge oü, reiirés dans leur chambre, ils adressé ren t a Dieu de fervenles prières, lui demandant de les proléger encore dans ce dernier péril de leur téméraire entreprise. Cette chambre était située au rez-de-chaussée de la maison. Un Russe, qui promenail paraventure sou désoeuvremenl de ce cölé, apercut ces deux jeunes filles qui priaient, et il remarqua que la plus jeune faisait les mémes mouvemeots que les Chassidim en prière. Elle se pencbait en avant, li droilc, a gauche, avec la ré- gularité d'une machine de précision. L'ainée ce pendant se tenait immobile, comme il est prescrit aux Juives cn prière. Le Russe se souvint des der- niers Oukases et des fortes l écompenses promises aux débiteurs, et il courut cbez le maiuede police. Une heure après, les deux enfants de Naflali étaient arrêtés. Le lendemain, Ruben parlait pour nne colonie militaire el Gitlel pour la Sibérie.... Le l'olonais se lut. Venez, vtnez, supplia Niissan, le so- leil baisse li l'horizon; dans irois beu res commence le Sabbat Mais j'avais encore une question sur le coenr. <i Ce n'esl pas vaine curiosité, Rani Walerian, dis-je en saisissanl et en serrant la main de lin- fortuné, mais, diles le moi, voire mariage a-Uil su vous consoler «.Consoler répondil il avec nn mélanco- lique sourirc. II n'est pas de consolation pour des souffrances comme les miennes et celles de ma femme. Nous sommes deux êires emprisonnés ensemble dans le mème cachot, et si nous ne nous entendons pas dans noire amour, du moins nous entendons- nous dans noti e haine. Ainsi marchons nous silencieux et sombres, cöte a cóle, vers la mort, sans que l'un sache ce qui vit dans la poi- li'ine de l'aulre; mais nous nous appliquons reli- gieusement a nous faire le moins de mal possible. Au reste, je suis malade et je ne crois pas avoir longlemps u vivre.... Nous nous quittanjes. Niissan ne ménagea pas les chevaux; nous bul lions la route. 11 ne pul résislcr pourlanl a l'envie de me faire un commenlaire complet du lécit de Pani Walerian mais je l'écoutais a peine mon cceiir élail gunfle d'une compassion aussi iinpuis- saiite que douloureuse. Au ci'épuscule, notis arrivèmes prés d'une mai son solitaire d'oii parlait une mince trainée de lumière. «i Voila l'auberge de Dellim, dit Niissan. Halte commandai-je.

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1877 | | pagina 1