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LOUIS XVII.
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I3eannée.
Mcreredi 13 x\ovembre 1878
N" 1,343. w S^'?'
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p Journal parait Ie Mercredi el Ie Samedi. Les insertions coülent 15 ceniimes la ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paient 30 centimes la ligne. On traite d forfait pour les insertions par annee.
Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémentaires commandés pour articles. Réclames on- Annonces, content 10 fr. les 100 exemplaires.
IK E Jfl I X H B5 E F K SS.
LES LIBÉRAUX.
Que disenlils?
Vraiment si uos péres revenaient a la vie,
il leur serail bien difficile de reconnailre
leurs enfants! L'erreur libérale a exercé lanl
d'influences mauvaises sur les intelligences
et sur les cceurs, que la société est en proie
a unede ces crises redoutables oii l'on voil
sombrer les premières notions de la raison,
de la justice et de la verlu.
Que disent, en effel, a leurs beures de sin-
cérité, les chefs les plus aulorisés du libéra
lisme?
L'homme n'est plus un chef d'ceuvre des
mains divines: c'est un singe perfectionné,
qui doit au hasard d'avoir perdu sa queue
el développé son esprit. Simple animal, vil
comme ses aieux, i! parait sur la terre
pour disparaitre un jour et renlrer dans le
néanl du lombeau.
La loi morale n'existe plus: mensonge el
vérité, vice et verlu, bonne foi et déloyaulé,
honi eur et crime, v<iins mots que lout cela!
Et si, en public, fori vent parfois encore sau-
ver les apparences, du moins en particulier,
on peut s'affranchir de tout lien et ne craiu-
dre que la rigueur des lois.
Les éternelles espérances ne sont plus
qu'illusions el rêves insensés. Le ciel n'existe
pas et la vertu malheureuse ne doit attendre
qu'wi élernel oubli, sans ètre jamais vengée
du vice audacieux et triomphant.
La jouissance est l'unique aspiration de
rhuinanilé. Malheur a celui qui, viclime du
sort, ne irouve pas sa place au festin de la
vie: qu'il se dèbatle dans les angoisses de la
faim et Jes horreurs du désespoir, mais qu'il
se garde bien de trouhler dans leurs joies les
heureux et les repusdu monde.
Que veulenlils?
Allié, esclave ou fils de la franc maconne-
rie, le libéralisme veut la mine de la royauté,
la chute du tróne.
II veut que la religion disparaisse de la
socièlé et que le régne de Satan rernplace
celui de Jésus Christ.
II veut que l'Eglise catholique a force d'at-
taques déloyales, soit étouffée dans la boue.
II veut, pour réussir, que 1'enfance soit
élevée sans Dien et qu'elle apprenne a braver
les autorités les plus saintes.
II veut que lajeunesse, libre dans ses ar-
deurs, se vautre dans la jouissance pour
haïr d'aulant plus l'Eglise.
II veut que le prètre u'apparaisse plus pour
bénir le berceau, le manage, la tombe.
De quoi menacenl-tls
De bannir le prètre de l'école;
De supprimer le budget des cultes;
D'abolir le remplacement;
De conlraindre lous les Beiges a marcher
sous le drapeau;
D'exclure du droit de suffrageceux qui les
génent; ils l'ont fait en partie;
De rester au pouvoiroju d'exciler la invo
lution;
De créer des écoles moyenneset de faire
payer par les campagnes i'instruction des
villes;
Desmvreles exemples des perséculeurs;
De bannir du pays les religieux et les reli-
gieusés.
Que font-its''.
Ils lancent des pavés comme en 18b7;
lis oulragenl le Roi comme en 1871;
Ils cassent les testaments comme M. Bara;
lis destituent comme M. Rolin;
Ils ment Dieu comme M. Bergé;
Ils rossent les pélernis comme a Gand
Ils Iroublent les processions comme a
Liége;
Ils frappent du poignard comme a Malines;
Ils enierrenl civilement;
Ils appuient une presse infame qui souille
toul;
Ils votent servilemerrt comme Janson et
autres;
Ils endeltent les villes.
Lecleur de bonne foi, continuez vous-
mème cetle exposiUon, bélas! trop réelle el
trop incompléte, des tendances el des acles
du libéralisme et jugez l'arbre par ses fruits.
Impartial
UNE APOSTASIE.
Si nos adversaires sont divisés sur la ques
tion de la revision de la loi de 1842, ils ne
lesonl pas moins sur ta suppression de la
legation beige prés du Vatican. Les uns
veulenl pousser riutolérance el la haine reli-
gieuse jusqu'a l'excés; et non seulement sup
primer cette legation, mais empècher le Sl-
Père d'avoir un Nonce a Bruxelles, ce qui
serail impossible a réaliser sans organiser en
plein la proscription, Les autres voudraient
atleindre le rnème bul, mais en y inettanl
des formes; c'est, comme ehez Brid'óison,
la fooörme qui les préoecupe. N'allons pas
aux extrèmes, disent-ils; tachons de nou:; en
lenir aux choses pratiques.
Des premiers nous n'avons guére a nous
en occuper: ils mettraiént le feu aux quaire
coins du pays si l'incendie pouvait favoriser
leur projet hautemeul avoué d'écraser dé-
fiuilivement les calholiques. Mais leurs ex-
cés mémes nous préservem de l'effet de leurs
ressentiment? poliiiques. Nous le savons
bien, le gouvernement doit comple, avec
eux; mais il doit compter aussi avec la na
tion, qui abhorre toule violence, lout exces,
qui ces jours derniers encore a manifesté sa
profonde lépulsiou pour le sysléme decasse-
cou.
Celte repulsion grandira si, rompant avec
les traditions nalipnales, froiss.ant les senli-
menls religieux denos populations, le minis
tère déelare la guerre au Vatican, obéissanl
de la sorte a la queue de son parti.
Une declaration d'hoslilités au Sl-Siége
créerail toujours un grief formidable, appel-
lerail dans l'arène loules les grandes families
du pays; mais jamais l'mjure faiteaux calho
liques beiges neserail plus violemment res-
sentie qu'aujourd'hui, oü le tróne' pontifical
est occupé par S. S. Léon XIII, l'ancien Non
ce en B Igique, l'arni inlime de nolre pre
mier Roi. Celle brulalité aurait des consé-
quences que nos petits hommes d'Etat ne
sauraient ni prévoir ni comprimer.
Nous ne l'ignorons pas, le ministère sera
mis en demeure par la fraction radicale de
son parli de supprimer la légation beige prés
du Sl-Siége; mais nous savons aussi que cetle
mesure anli-nalionale donncra a l'opposilion
des armes redoutables, dont elle se servira
avec le succès qui le 29 Oclobre a couronné
notre lutte a Bruges.
GUEUSERIES.
La doctrine des gueux enseigne a mépri-
ser les prètrcs et l'Eglise, a se moquer de la
Religion. Aux yeux des gueux la Religion
n'est qu'nn tissu de faussetès. L'enfer, s'é-
crient-ils, c'est une coupabte invention des
prèlres.
Or voici qu'un polisson a voulu metlre en
pratique cel enseignement.
Heureusenienl il ne l'a pas fait gratis.
II y a un an, un miserable a insulté Ie
Sainl-Sacrement exposé dans l'église de St-
Jean a Gand, pendant ia nuit dc Noël. Ex-
pulsé du lieu saint, le gueux parvirit a ren
lrer et s'en alia, dans un but ignoble et sa
crilege, prendre place a la Ste-Table.
La semaine dernière le tribunal de Gand
l'a condamné a 18 jours de prison et 125 fr.
d'amende.
Voila a quelles infamies conduit l'ensei-
gnement gueux. Par bonbeur il y a encore
en Belgique honneur et justice.
Un sinislre farceur que les libéraux ont en
haute estime malgré ses fugues peu mililai-
res, un dröle qui a loules les sympathies du
libéral, en un mot, le triste sire écloppé qui
signe Garibaldi, écrivait, il y a quelques
jours, a un dépulé d'Ancöne:
Dignes du Parlement seraient les trois
actes suivanls:
La nation atmée;
L'impól unique;
Les prèlres a la charrue.
Voila dévoilés les projets des loges. Voila
le programme de l'avenir.
En Belgiqueaussi il y a des francs-macons;
et les francs-macons, vous le savez, lecleur,
ont vendu a la loge leurs opinions el leur
liberie.
La campagne des gueux conlre la liberté
de conscience continue.
Voici encore dit le Courrter de l'Es-
caul un pauvre agent de police, dont la
fille esi élevée par les religieuses, sans que le
pére doive payer une obole. En bien, ce
malheureux pére vieut d'etre soinmé de re-
tirer sa fiile ou de donner sa démission.
Est-ce assez odieux?
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Poperinghe- Ypres, 5,15 7,15 9,33 11,00 11,30 2,20 5,05 5,30 9,30. Ypres-Poperinghe, 0.20 9,07 10,05 12,07 2,45 3,57 6,47 8,45 9,50
Poperinghe-Hazebrouck, 6,40 12,25 7,04 Hazebrouck-Poperinghe-Ypres, 8,25 4,00 8,25.
Ypres-Roulers, 7,50 12,25 0,30. Roulers-Ypres, 9,10 1,50 7,50.
Roulors-Bruges, 8,45 11,34 1,15 5,16 7,20 (10,00 Tbourout.) Bruges - Routers, 8,05 12,40 5,05 6,12. Thourout - Gourtrai,
5,15 mat.
Ypres-Courtrai, 5,34 9,52 11,20 2,40 5,25. Courtrai-Ynres, 8,08 11,05 2,56 5,40 8,49.
Ypres-ïhourout, 7,20 12,06 6,07, (le Samedi a 5,50 du matin jusqu'a Langemarok.) Thourout-Ypres, 9,00 1,25 7,45 (le
Samedi a 6,20 du matin de Langemarck a Ypres).
Cornines-Warnêton-Le Touquet-Houplines-Armentières, 6,00 12,00 3,35. Arinentières-Houplines-Le Touquet- Warnêton-
Gomines, 7,25 2,00 4,45. Comines-AVarnèton, 8,45 mat. 9,30 soir, (te Lundi 6,30.) Warnêton-Gomines, 5,30 11,10 (le
Lundi6,50.)
- - - - - - Lille,
Gand-Terneuzen (station), 8-17,12-25, 8-05. (Porte d'Anvers) 8-30, 12-40, 8-25. Terneuzen-Gand 6-00 10-30 12,30 5,55
Selzaete-Lokeren, 9-04. 1,25, 9-03 (le Mercredi, 5-10 matin). Lokeren-Selzaete, 6-00, 10-25, 5-25 (le March, 10-09).
O O ïrt n 9 O W A N C B 8
COURTRAI, BRUXELLES. ERUXELI.ES, COURTRAI.
Comines-Belgique, Comines-France, Quesnoy-sur-Deüle, Wambrechies, la Madelaine, Lille, 7,20, 11,45, 6,43, 9,30.
la Madelaine, Wambrechies, Quesnoy-sur-Deüle, Comines-France, Gomines-Belgique, 5,55, 10,35,4,37, S,15.
o n; t l nn 49 Qn A Q7 O onir» /Thniipnnt ARrMinr»>M-P,.mn»trai rtri 49 zllï -x flr> H d9
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41.
Deynze-Ingelmunster, 12,00 8,20.
tngelmunster-Anseghem, 6,05 9,40 12,35 6,13. Anseghem-Ingelmunster, 7,42 11,20 2,20 7,45.
Liohtervelde-Dixmude-Furnes et Dunkerque, 7,10 9,08 1,35 7.50 Dunkerque-Furnes-Dixmude et Lichtervelde, 6,15
11,05 3,40 5,00.
Dixmude-Nieuport, 9,50 12,35 2,20 5,10 8,35 10,10. Nieunort-Dixmude, 7,15 11,55 4,20 5,56 6,50.
Thourout-Ostende, 4,50 9,15 1,50 8,05 10,15. Ostende-Thourout, 7-35, 10,16 12,20 6-15 9,15.
Selzaete-Eecloo, 9,05 1,25, 9,03. Eecloo-Selzaete, 5-35, 10-20, 5-05.
Gourtrai dép. 6,37 10,53 12,33 3,42 6,35.
Bruxelles arr. 9,20 1,35 2,25 6,10 8,54.
COURTRAI, TOURNA!, LILLE.
Gourtrai dép. 6,37 9-37 10,56 2,54 5.27 8,47.
Tournai arr. 7,28 10,15 11,47 3,4.3 6,39 9,41.
Lille 7,42 10-42 12,03 4,00 6,37 10,04.
Bruxelles dép. 5,22 8,28 12,21 5,35 6,47.
Courtrai arr. 8,00 10,46 2,46 7,56 8,44.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
Lille
Tournai
Gourtrai
dép. 5,10 8,12 11,05 2,21 4,10 8,10
i - 5,42 8,56 11,32. 2,40 5,21 8,50
li ari\ 6,34 9,17 12,2é 3,38 6,33 9,28
COURTRAI, GAND.
GAND, COURTRAI.
Courtrai dép.
Gand arr.
6,32
8,01
6,42
7,21
9,49
11,08
12,31,
1,51,
3,44
5,04
6,40 9-32.
3,00 10,20.
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
Gand dép. 5,15 8.45 9.24 1,28 4,14 7,21.
Gourtrai arr. 6,34 9,33 10,51 2,49 5,23 8,12.
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
Bruges d. 6,49 7,04 9,39 12,34 2,52 3,59 6,43 8,43 Bruxelles dép.ö,22 7,20 7,25 9,00 11,06 l,3o 3,02 4,d3 o,a;> 5,01,
Gand a. 7,34 8,19 10,54 1,49 4,07 4,44 7,58 9,23. Gand arr. 6,00 8,38 9,36 10,27 1,23 3,26 4,16 6,13 7.23 7,35.
Bruxelles 8,50 10,35 12,39 4,00 7,15 5,58 9,31 10,42. 1 Bruges 7,15 9,23 10,51 11,20 2,38 5,01 6,50 8,1a S.oO.
Suite. Voir le numéro précédent.
X. Les dernïers gardiens de Louis XVII.
Laurent, Gomin et Lasne.
Laurent avait compris qu'il avait k remplir
une mission de réparation. Dös le lendemain de
cette visite, it se mit a l'oeuvre. On bassinales
plaies de l'enfant; on le changea de lingeon lui
fit prendre un bain; on rendit un peu d'air et de
clarté a son cachot. Une vieille femme, appelée
par Laurent, coupa les cheveux du prisonniep;
un chirurgien soigna sa tête; un tailleur lui Ut un
vêlemen't neuf. L'enfant ne comprenait rien a ces
marques d'uu intérêt qu'on ne lui avait pas
tómoigné depuis un an. Une larme de recon
naissance brilla dans son ceil, et pen a peu, sous
l'inflnence des soins dont il était 1'objet, il sembla
qu'une lueur, a demi-éteinte, se rallumat dans
ses souvenirs.
Un jour, Laurent avait obtenu la permission
de le condoire sur la plate-forme do la tour. Le
prince humait, avec une sortie de joie sitencieuse,
ce grand air pnr qu'il u'avait pas respiré depuis
si longtemps. Tout a coup, il se baissa et ses
gardiens le virent cueillir quelques lleurs chóti-
ves et quelques brins d herbe, qui avaient triste-
ment poussé dans les lentes du pavement, Quand
jl redeseendit, il ralentit le pas et voulut s'arrc-
ier a la porte du troisicme étage. - Tu te trompes,
Charles, lui dit Laurent. Non, je ne me
t'Tompe pas, murmura 1 enfant. Et il laissa
t griiber son petit bouquet. Gette porte, c'ótait
celle du cachot de la reine; ces lleurs, c'était
comme le dernier hommage du fils a sa mére,
qu'il croyait encore captive, comme un dernier
parfum de ce joyeux bouquet, que, dans des
temps plus heureux, il lui portait a son réveil.
Gependant Laurent, lui aussi, lie tarda pas k
se lasser de ce régime d'isotèment auquel ou
n'avait pas craintde eondamner pendant plus de
six mois un pauvre enfant de neuf ans. 11 rappela
qu'on avait promis de lui donner un compagnou
de peine, et le 8 novembre 1794, Gomin fut ad-
joint a ia garde du Temple. Gomin était un brave
homme, caractère timide, mais excellent coeur
et sa nomination était due a des influences roya-
listes, caehées sous l'apparencc d'un républica-
nisme ardent. Gés son arrivée a ia tour, il monta
aq (Jeuxième étage pour visiter le prisonuier
dont la surveillance lui était conliée. En l'enten-
dant eiitrer, l'eqtgqt tourna la tête, mais ne dit
rien: i'apparition d'qqe i.oqyelle ligure produi-
sait toujours sur ce petit ètre, habitué aux souf-
franees, une impression de frayeur, qui le plon-
geait dans le mutisme. Mais au bout de quelque
temps, il reconnut ce qu'il y avait de bienveil-
lanee et de pitié cliez sou nouveau gardien et lui
témoigna non seulement de la gratitude, mais de
la connanee.
Gomin et Laurent s'instatlèrënt dans une salie
dq pez-de-chaussée, appelée salie du Conseil, et
qqi conbaflijit trois lits, deux pour eux, un pour
le commissaire dö gervice. Trop souvent ce
commissaire était un fpugueux et brutal jacobin
qui prenait plaisir a aggraver les squtfrances du
prisounier et a renouveler des scènes comme du
temps de Simon. Parfois aussi c'ótait un homme
eompatissant, comme ce Debierne, qui olfrait
lui-même des jouets ou des oiseaux au jeune
prince. Lorsque le municipal en titi-e était un de
ces braves cceurs, Laurent et Gomin en profl-
taient pour apporter quelques soulagóments a
la dure réclusion du captif. Taritöt ils mettaient
des lleurs sur sa table; tautöt et c'ótait surtout
Gomin car Laurent, depths qu'il avait un sup-
pléant, usait souvent de sa liberté pour sortir
tantöt ils jouaient aux dames ou aux cartes avec
lui; tantöt ils allutnaient plus tót le réverbóre,
alin que le malheureux fut moins longtemps
plongc dans l'ob.scuritótantót ils le conduisaient
sur la plate-formetantót même ils poussaient
l'audace jusqu'a lui permettre de desoendre dans
la salie du Conseil. C'ótait peu de chose sans
doute; mais ce peu de chose, qu'il fallait souvent
de peine pour robtenir, de precautions pour le
faire durer Les vaiuqueurs de thermidor n'a-
vaient pas plus que les vaincus l'intentioa de
reudre le petit prisoiinier du Temple a la liberté
ni a l'existence. Ge pale mouarque captif trou-
blait le somineil des maitres de Ia France són
num servait de drapeau aux ennemis de la Re
volution; il fallait que ce nom fut rayó du livre
des vivants. Gela ne pouvait tarder d'ailleurs;
Simon et la réclusion y avaient mis bon ordre.
La Convention ne l'ignorait pas, et si elle per-
mettait que le royal enfant fut traité avec plus
de clumeuco, c'est qu'elle savait bien qu'il était
frappé a mort et que la mort ne lacherait pas sa
proie.
Quels que fussent en effet la douceur et les
bons soins de ses gardiens, cette pauvre fleur
flétrie s'inclinait cliaque jour davautage sur sa
tige. Un jour ipeme.'le bruit se rópandit dans
Paris que le petit Gapet était mort. L'e Comité de
salut public s'en émut et députa trois de ses
membres pour s'assurer de l'état du prisonoier.
Les trois dólégués vinrent au Temple le 27 fóvrier.
lis trouverent le prince assis pres d'une petite
table sur laquelle des cartes a jouer étaieut ópar-
ses; il était affaissè sur lui-même, ia tête eufoncée
dans les épaules l'ceil a demi-éteint, les mains
et les jambes perdues du tumeurs. Quand les
commissaires lui adressérent la parole, il jeta
un regard de leur eótó, mais rcl'usa obstinómeiit
de répondre. Ge regard, a raeonté un dos dépu-
tés, Hal-mand (de la Meuse), avait un tel carac
tère de resignation et d'indifférenee, qu'il sem-
blait nous dire -. Que vous imports I Acheoez
voire victime
Un mois après cette visite, un municipal du
nom de Collot s'approcha du jeune prince et
l'examinant froidement: - Get enfant, dit-il, n'a
pas six décades a vivre. Et, comme Laurent et
Gomin cherchaienta le faire taire: - Je vous dis,
citoyens, reprit-il en criant plus fort, qu'il sera
imbéciie ou idiot avant six décades, s'il n'est pas
crevé.L'enfant ne ditrien; il ne rópondait plus
aux outrages; mais ce mot brutal lit sur lui une
impression cruelle, et, le soir, quand il fut seul
avec Gomin, une larme glissa de ses yeux - Je
n'ai pourtautiait de mal a personae,murmura-
t-il en soupirant.
Le 29 mars 4794, Laurent quitta le temple; il
fut remplacé.par Lasne. G'était un ancien garde-
francaise, devenu peintre en batiments: grand
liomme a la tenue militaire, a l'aspect sévère,
mais au cceur plein de bonté. A partir de l'arrivée
de ce nouveau gardien, Gonna f'ut plus particu-
lièrerqent attaché a Madame Royale, toujours
captive mais séparée do son frere Lasne, plus
spècialement chargé du jeune prince. Souvent
cependant, les deux surveillants se réunissaieut,
et, mettant leurs talents en comraun, s'ainusaient
k faire ensemble de la musique. Lasne chantait,
Gomin jouait du violon, et ces concerts, tout
médiocres qu'ils fussent, ramenaieut un sourire
sur les lèvres du prisounier.
Le pauvre enlant ne marchait plus qu'avec
peine. Lasne le trainait j usque sur la plate-forme,
et la, le tenant par les bras, hu l'aisait faire quel
ques pas en boilant. Le temps et la pluie avaient
creusé comme un petit bassin dans un coin de
cette plate-forme, et lorsqu'il était tombé de l'eau,
les oiseaux venaient boire dans ce bassin. Le
prince s'en approchait lentement, et a la fin les
rnoineaux étaient devenus si familiers qu'ils ne
s'effrayaient plus de sa presence et se laissaient
presque toucher par lui. C'était la une de ses
plus chères distractions. Quand le temps était
mauvais ct qu'il ne pouvait sortir, Lasne jouait
aux cartes avec lui ou lui chantait quelques
romances. L'enfant attëctionnait par dessus tout
l'air si connu dc Sedaiue O llichard6 mon roi!
Faisait-il un retour sur sa captivité ou se souve-
i.ait-il d'avoir eutendu ces paroles a ce banquet
des gardes du corps, qui avait étó le deruier
hommage de l'armée a la monarchie des Bour
bons D'autres fois, Lasne lui racontait des his-
toires et le pauvre petit prenait surtout plaisir
a écouter celles qui se rapportaient a ce régiment
d'enfants, dont nous avons parlé, le Royal-Dau-
phin. Un jour que Lasne avait vanté la bonne
tenue de ces petits soldats et de leur jeune
colonel - M'as-tu vu, dit le prince avec le male
sourire d'un descendant d'Henri IY, m'as-tu vu
avec mon épóe
Hélas 1 cette. épée, dont le souvenir allumait
dans. ses yeux un deruier éclair de fiertc, il ne
devait plus jamais La ceindre k son cöté.
(A continuer.)