LES NOMINATIONS de M. Cartor\. En publiant it y a quelques jours les no minations des Bourgmestres et Echevins, nous nous sommes promis de relever le ca- ractère d'exclusivisme libéral qui les distin gue. 11 est impossible, après avoir examine la situation antérieure, d'expliquer pour quel motif sérieux, cei tains echevins ou bourg mestres n'ont pas vu leur mandat renouvelé, ni de comprendre pourquoi on a préféré dans quelques communes, un homme ap- partenant h la minorité du conseil, pourquoi dans d'autres localités on n'a pas nommé celui qui par sa position ou le choix même du corps électoral était évidemment dési- gné. Certes ce ne sont pas les intéréts des communes qui ontdéterminé certains choix. Ce qui est arrivé dans d'autres arrondis- sements, arrive également dans le nótre.La politique est la force dirigeante. Ailleurs les propositions faites ofïicielle- ment par les commissaires d'arrondisse- ments ont été revues et corrigées par les associations libérales. Ici ou l'association libérale ne compte plus pour rien, M. Carton s'est chargé de sa besogne. 1! a soigné les intéréts du parti libéral avant tout. Foin de l'administration. De minimis non curat proctor. Le ministère catholique en 1872 suivait un principe tout opposé. 11 avait pris pour règle de confier un nouveau mandat ceux des fonctionnaires communaux qui avaient été réélus. II avait même exagéré ce princi pe dans quelques circonstances, et nommé des hommes qui appartenaient trop notoi- rement au parti libéral. Notre ministère de la defense nationale est guidé par d'autres idéés. Les catholi- ques sont desennetnis pour lui, et dès lors il faut les écarter tout prix. Ni les voeux du corps électoral, clairemênt et librement exprimés, ni les exigences d'une situation donnée, rien ne peut y faire, il faut que ministres ou subordonnés et surtout un Pa cha comme est notre charmant commissaire s'abandonnent h tous les excès de leur libé ralisme. Malgré les instructions exislantes au sujet des presentations de candidats, c'est l'esprit politique seul quia présidé aux nominations faites. Nous en fournirons facilement les preuves les plus palpables. Quelques-unes des nominations n'ont pas été faeiles. Jamais on n'a vu un pareil va et vient au Commissariat. Plus d'un des candi dats de M. Carton refusait de se prèter a des manigances inavouables, sentant com- bien les procédés employés étaient absur- des et choquants, en présence surtout du nombre de voix obtenu par ceux que Pacha Carton voulait écarter a tout prix. II a fallu partois employer les influences les plus étrangères et les promesses les moins btciles a tenir. On est même allé jusqu'a garantir a certains candidats que la besogne administrative qu ils avouaient ne pas con- nailre serait expédiée dans les bureaux du Commissariat. On a réussi quelquefois, au détriment des intéréts communaux et de la marche réguliére des affaires. Les nominations ne sont sorties que fort tard au mois de Janvier. M. Carton se per met avec sa hardiesse habituelle decrire qu'elles sont des premières parues, il n'e[1 est rien. Le Moniteur publiait les nomina, lions pour les provinces de Brabant et de Liége depuis plus de quatre semaines. Le Progrès trouve que tout est pour ]e mieux en fait de nominations et que du mo. ment oü les catholiques sont vexésilv, lieu pour M. le Commissaire d'étre satisfait L'opinion publique ne juge pas les fails de cette manière. Ce systéme d'exclusivisme et de brutalité ne peut produire que des froissements. Au lieu d'ètre vexés, nous aimons a voir M. Carton suivre pareilW ligne de conduite; elle méne droit au sou- lagement universel. Examinons les nominations de plus prés et entrons dans quelques détails. A Bas-Warnêtok, le sieur J. De Keerlej échevin sortant.est remplacé par un nomnrf Desmarets. Cependant celni-ci n'.obtient i Pélection que 27 voix, tandis que le sieur. Delveerle eu compte SOautant que le bourg- mestre. C'est la seconde fois que pareil fait st produil dans la commune et de la part dr M. Carton. II est inexplicable. A Becelaerele sieur Leroux, échevin, qu a rempli pendant trois arts les fonctionsds bourgmestre, n'est pas renommé. M. Carton y fait nommer le Chevalie: Bayart d'illustre mémoire, l'homme de I; lettre a Kinoo, qui en -1872 envoyait a l'aii torité supérieure des procès-verbanx d 1 election communale oü la signature d'i scrutateur avait ete raturee et surchargéej L'auteur de ce.grattage est resté incoum; mais ('enquête ordonnée par la Députatioi permanente a établi la réalité du fait. Ou avait voulu cacher que le bureau élec toral était eompösé en majorité de mem bres sortants, contrairement a la loi. L'élection fut cassée de ce chef. Gommes. Impossible de ne pas renoinme: M. Van Llslande aux fonctions de bourf mestre. M. Carton oublie de faire nonime un échevin. L'honorable M. d'Ennetiéres qu occupait ces fonctions est digne a tot égards d étre revètu d'un nouveau maudal Capable, intelligent, zélé et dé.voué a 1 chose publique, il pouvait s'attendre a ui peu d'ennui. M. Carton, qui n'a pas obtenu de la Got dappel la radiation de M. d'Ennetiéres dfc listes électorales, a voulu sans doute s donner le piaisir d'une vexation. C'est bie: rhomme. M. Laveleyè, président des Witte A7W hen, son plus graad titre de gloire, est nom mé Bourgmestre k Gheluveit. Voila bi® t une commune qui va marcher deprogr# en progrès. On a fèté a grands frais l'installation <1 ce haut et puissant seigneur. La caissf; communale est vide cependant et la com t mune saus ressources. Mais quand ofl 1 beur de posséder un bourgmestre auss rutilant que ne ferait-on pas? A Houthein, M. Carton a été vraimei* libéral. En remplacement du sieur Brevnt vcrnement compromet les plus cliers intéréts du pays et menace sun avenir. A l'union sur laquelle s'est fondée notre exis tence nationale, il substitue un régime d'antago- nisme etdediscorde. 11 exclut renseignement religieux de l'école primaire. 11 porte les attëintes les plus graves a l'auto- nomie communale. II tend a ruiner les écoles libres et a rendre illusoire, dans une de ses applications les plus importantes, le principe constitutionncl de la liberté d'enseignement. Dans ces graves conjonctures. un Comité cen tral oil sont représentées la droite parlementaire et les associations conservatrices des diverses provinces, s'est constituó a Bruxellesil croit devoir, sans tarder, signaler au pays les périls de la situation et faire appel au concours de tous les pères de familie. 11 ne s'agit pas ici des intéréts politiques de l'opinion conservatrice. Les intéréts compromis sont bien autrement graves. II s'agit de tout ce qui nous est cher, de tout ce qui a fait la Belgique ce qu'elle estnos convictions religieuses, nos libertés constitutionnelles, nos franchises com- munales. II s'agit de savoir si la morale religieuse ces sera d'etre la base de l'enseignement et si désor- rnais l'on ólèvera les j'eunés générations dans 1 ignorance de Dieu, dont le hom ne pourrait plus être prononeó que dans des lemons faculta- tives, données hors-d'heure, étrangères au pro- gramme de l'école et en quelque sorte frappées d'avance de discredit. La loi de 1842, votée a l'unanimité moins trois voix par la Chambre des Représentants et a l'unanimité par le Sénat, défendue jusqu'ici par tous les ministres qui se sont succédé au dépar tement de l'Intérieur, a produit les plus heureux résuitats; les témoignages des autorités civiles et ecclésiastiques, pendant trente-six ans, sont unammes a le constater. (Euvre d'u-n sage esprit de conciliation, éma- née d'hommes dont un grand nombre avait fait partie du Congres national, elle a fonctionné a l'entière satisfaction des pères de familie, des communes et du gouvernement. C'est cependant cette situation quo l'on pré- tend troubler. La loi de 1842 associé toutes les influences reli gieuses et civiles dans un grand intérèt social. La loi nouvelle aurait pour base une indifference apparente et une hÖBtiiité réolle envers tous les cultes, et i'ori peut dire que son but veritable n'est autre que i'organisation de cette hostilité. L'enseignement do la religion disparait du programme des études et i'atmosphére de l'école cesse d'etre religieuse. Désormais l'instituteur, qui h'enseigne cepen dant que comme le délégué du pére de familie, ne pourrait parler aux enfants de ce qui tient surtout acosur a Ia plupart des parents. Cela ne se peut. Non-seulement la religion doit faire partie de l'enseignement primaire, mais elle y doit occu- per le premier rang; il n'y a d'écoles dignes de ce nom que celles oü Dieu est en lionneur. Mal- beureuses les sociétés tombées assez bas pour i'oublier Mais ce n'est pas a eet égard seulement que le projet du gouvernement doit étre repoussé. Jusqu'ici l'indépendance de nos vieilles com munes n'avait été restreinte qu'avec prudence et par des mesures qui avaient mérité l'assenti- ment en quelque sorte unanime de la legislature. Désormais en matière d'enseignementcette indépendance serait remplacóe par un régime de contrainte que dans le passé aucun gouver nement n'a róussi a faire accepter. Sous le régime de la transaction conclue entre toutes les opinions en 18-42, les Communes peu- vent, suivant le cas, créer des écoles, s'en dis penser on adopter des écoles privées elles réglent le nombre des écoles, leur division en classes, le cadre des études, les méthodes d'en seignement, le nombre des instituteurs, l'établis- sement d'écoles gardiennes-ou do coursd'adultes. L Etat n intervient qu'avec réserve en raison des subsides qu il accorde. Les communes choisissent les instituteurs parmi les éléves de toutes les écoles normales, ou même, sous certaines con ditions, en dehors de celles-ci; elles ont le droit de les suspendre. En un motl'instituteur a 1 école est sous 1 autorité de la commune. Tout cela serait changé. A 1 Etat de determiner ie nombre des écoles communates, celui des classes, celui des insti tuteurs; a 1 Etat de régler les programmes et les méthodes; plus d'écoles adoptées; plus de compte aucun de l'enseignement privé si parfait, si flo rissant qu'il puisse être. Non-seulement la direction des écoles passe- rait aux mains du Gouvernement, mais lo droit de surveillance qu'on semble laisser aux com munes serait lui-même illusoire, car, sauf dans les grandes villes, une l'ois de plus privilégiées, la composition des comités scolaires dépendrait de l'arbitraire du ministre de l'instructioi. pu- blique. Les mesures proposées sont peut-ètre plus graves encore en ce qui concerne la nomination des instituteurs que les communes devraient choisir exclusivement parmi les éléves des éco les normales de l'Etat, écoles dirigées elles- rnèmes en dehors de toute idéé religieuse. C'est la une violation manifeste des principes de notre Constitution en matière d'enseignement. La liberté ne consiste pas seulement a pouvoir enseigner ce qu'on vent; elle consiste aussi et surtout dans le choix de l'école et dans l'accessi- bilité, a conditions ógales, a tous les emplois, des élöves de toutes les écoles. Telle est, dans ses dispositions principales, la loi qui vient d'etre proposée aux Chambre?; vous n'hósiterez pas a y voir avec nous facte le plus grave qui ait été tenté en Belgique depuis 1825. Et c'est a l'heure même oü tous les Gouver- nements devraient -s'alarmer du progrès des idéés subversives et comprèndre la nócessité d'ünir toutes les forces sociales pour y opposer une digue, que le Ministère juge opportun de semer dans toutle pays la lutteetla discorde! La droite parlementaire, il n'est pas besoin de le dire, combattra énergiquement le projet du Gouvernement.Mais pour que sa résistance puis se étre efflcace, elle a besoin de votre concours. Le Ministère, nous en sommes convaincus, I s'est mépris sur les véritables sentiments du pays. La destruction de la loi de 1842 r'est réola- mée que par une minorité bruyante. Nous ne pouvons croire que le parti libéral tont entier répudie aujourd'hui ce qu'ont dit et fait les plus écoutés de ses chefs, MM. Ch. de Brouckere, Lebeau, Rogier, Leclercq, Devaux, II. Rolin, J. Orts, Vanden Peereboom, Dolez, Pirmez et tant d'autres. Le pays ne veut pas que nos luttes politiques en vanissent jusqu'a l'école; il ne veut pas d'éco- le saus Dieu. Le moment est venu pour les pères de familie do l'alfirmer et de l'afflrnier bien haut. II depend d'eux de faire échouer cette tentati ve anti nationale; il dépend d'eux d'assurer a leurs enfants la conservation des bienfaits d'une éducation religieuse. Bruxelles, le 29 Janvier, 1879. Le Président Comte de Mérocle-Wester loo, sénateur. Les Vice-Présidents de Cannaert-d Hamale, sénateur. Prince E. de Caraman-Chimay. Les Membres du bureau J. Malou. représentant. V. Jacobs, repré sentant. Le Secrétaire Comte de Grunne. président de l'association catholique de Tongres. Baron d'Ariethan. sénateur. Comte d'Aspre- mont-Lynden, sénateur. Beernaert, repré sentant. A. de Burlet, avocat. J. ds Burlet, président de l'associat. conserv. de Ni velles. Casier de Hemptinne. sénateur. D. Casier.— Eug. de Cock de Boo. président du Conseil pro vincial de la Flandre-Oecidentale. Delcour, représentant. Max. Doreye président de l'Union catholique de Liége. Adolphe Drion, ancien représentant. Jules Houtart, prési dent de l'associat. conserv. do Charleroi. Baron Kervyn de Letteiihove, représentant. Jules Lammens. Comte de Limburg-Stirum, sénateur. Baron W. Del Marmol, président de l'associat. conserv. de Verviers. Malisoux, avocat. J. Nagels, vice-président du Conseil provincial du Limbourg. Alph. Nothomb représentant. Baron Ed. Osy. ancien séna teur. Baron Pycke de Peteghem, sénateur.— Comte Albert de Robiano. A. Bolans. prési dent de l'associat. conserv. d'Arlon. Solvyns, Sénateur. Baron Surmont de Volsberghe. sénateur. Thonissen. représentant. Baron de Thysebaert.— Van Hoorde, représentant.— Van Vreckem. sénateur. Eug. Van Willigen, sénateur. A. Wasseigereprésentant. Woeste, représentant.

HISTORISCHE KRANTEN

Journal d’Ypres (1874-1913) | 1879 | | pagina 2