ORGANE CATHOLIQUE DE L'A RRONDISSEMENT.
LA QUESTION DES JEÜX
MERCREDI 5 Mars 1879.
10 centimes le Numéro.
14e année. N° 1375.
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Résumé politique.
Les événements de France dominerit
la situation. Le ministère Waddington est
disloqué el, de I'aveu de tous, devenu im
possible.
M. de Marcère, ministre de l'intérieur, a
recu la juste recompense de ses palinodies.
11 est tombé sous le dédain de la Chambre
et sous les attaques de la Lcinterne, qu'il n'a
pas osé relever.
Le ministre des finances, M. Leon Say,
est rendu responsable d'une manoeuvre de
bourse qui a fait perdre plusieurs millions
a une foule de petits rentiers.
Le coup de la conversion restera célèbre
dans les tastes de la Bourse de Paris.
Le ministère Waddington sera remplacé
par des hommes pris dans la gauche plus
avancée. 11 se trouvera devant les mêmes
difticultés que celui qui fa précédé. A son
tour il sera renversé et on sera entre les
mains des hommes de la Commune.
En tous cas le faisceau des gaudies est
rompu, et les rapides progrès des radicaux
tendent a refouler le centre gauche vers la
droite, pour former une majorilé moins for
te numériquement, mais plas unie et sur-
tout plus rouge.
Quelle sera l'attitude des puissances
étrangères et surtout de la Prusse?
Nous recevons la note suivante qui oppo
se des considerations très-judicieuses et
très-hien déduites a la répétilion éventuelie
d'un scandale que nous avons eu déjii a dé-
plorer et flétrir fan dernier:
A OSTENDE.
Cetto question entièrefnent nouvelle est née
de la manière dontaété exploitéle nouveau Kur
saal pendent la saison de 1878.
Elle a pris une importance considérable tant
par les controverses dont le baccarat d'Ostende
a étó le sujet, que par les grosses sommes que
des entrepreneurs olïrent, dit-on, a la ville pour
avoir le privilege de tenir les salons dejeu du
Kursaal. Les uns ont vu, dans le jeu, la fortune
de la ville. D'autresn'y ont trouvéqu'un immense
scaridale.
Le moment est done venu d'examiner si c'est
un bien ou un mal.
Avant d'aborder cette question, il convient de
jeter un coup d teil en arrière et de voir ce qui
se passait naguère encore.
Autrefois, on ne jouait pas a Ostende. II y avait
bien a la Société Place d'Armes une table d'écarté,
Grosse question, qui ne présage pas un
avenir tranquille.
On annonce la mort de Shere-Ali. Son
Ills Yacouh-Khan a mis une célérité extraor
dinaire ii faire parvenir cette nouvelle au
gouvernement indien. Peut-être cette hate
témoigne-t-elle de sentiments pacifiques.
Le Parlement hulgare commence a se
mêler d'embrouiller les affaires orientales.
11 a adressé un memorandum aux puissances
signataires du traité de Berlin, pour ap-
puyer les reclamations unitaires de la Rou-
mélie.
II parait qu'un entente pourrait s'éta-
blir au parlement allemand entre les pro-
tectionnistes et les partisans du libre échan-
ge. On dégrèverait de 100 millions le bud
get particulier des Etats confédérés et la
majorité consentirait ii voter les droits lis-
caux, sur le pétrole et le tahac pour une
somme équivalente.
Le ministère espagnol est démission-
naire.
Une agitation insurrectionnelle règne
en Epire et en Thessalie.
On annonce une nouvelle conférence
européenne pourrégler ii nouveau la ques
tion d'Orient.
Ces affaires ld menacent de rester Ion?-
temps a l'état de question.
mais on ne pouvait y jouer qu'après avoir étó
inscrit sur un registre et présenté par deux
membres.
L'absence des jeux a Ostende, même quand ils
üorissaient a Spa, n'avait pas empéché notre vil
le de prospérer, et de voir s'accroitre cliaque
année le nombre de ses visiteurs. On compte
plusieurs saisons oü le nombre des étrangers
s'est élevé a 20,000 et au-dela. Chiffre qui n'a
guère été dépassé en 1878. On pourrait même
soutenir que c'est précisément a la sécurité que
présentait Ostende, sous le rapport du jeu et des
femmes, qu'étaitdü le patronage que des families
distinguóes lui accordaient et la préférence que
lui accordaient les chefs de familie, soucieux de
ne pas iritroduire leurs enfants dans line atmos
phere pernicieuse. Telle est la conviction d'un
grand nombre d'habitants et d'hóteliers qui doi
vent conuaitre le sentiment des étrangers a eet
égard, puisqu'ils sont en contact journalier avec
eux. En 1877, quelques personnes du meilleur
monde s'étaient réunies en un petit cercle très-
exclusif' pourjouer comme clles avaient l'habitu-
de de le faire dans leurs clubs de Bruxelles, de
Paris, etc.
II ne semble pas qu'il y eüt un grand mal a cela.
Nóanmoins, l'administration communale voulut
interdire les jeux de liasard dans les cercles et
ne les tolóra pas dans les lieux publics puisqu'el-
le fit défendre en iS7ü le jtu ditCourses de Sa
lon au Cercle des Bains le parquet s'en érnut
et une instruction fut même commencée par la
police judiciaire.
Le Guré de Warnêton.
Réponsc au Progrès.
Le Progrès paie d'audaee. 11 a menti et il
sait qu'il a menti it propos de 1'afFaire du
euré de Warnêton. Pour se justifier il nous
répond: Les menteurs! c'est vous.
Voici son langage
En réponse aux rédacteurs du Journal
d'Ypres, nousannonQonsque éndredider-
nier, 28 Février, au tribunal de police de
Messines, 1'afFaire de Louis Mahieu, curé
de Warnêton, contrevenantaux règlements
sur les chemins, fut appelce. 11 résulte
tant du procés-verbal que des déposi-
tions des témoins que le machiniste dut
renverser ses vapeurs et siffler de serrer
les freins, sans quoi curé et acolyte eus-
sent été écrasés. Le train n'était qu'a une
quinzaine de mètreó du curé quand celui-
ci quitta la voie. Après l'enquête et une
plaidoire d'un avocat d'Ypres, M. le juge
de paix condamné Louis Mahieu, curé a
Warnêton, ii une amende de dix florins et
subsidièrement ;j trois jours de prison et
aux frais.
Et, maintenant, nous demandons au
Journal d'Ypres oil sont les menteurs
Les lignes de cette feuille que nous rap-
portons ci-dessus retombent sur les nez
des petits vicaires rédacteurs de la devote
feuille.
0 Baziles
Et c'est cette même administration communale
qui patronne aujourd'hui et coiivre de son égide
les jeuxpublics qui se sorit instaliés au Kursaal
eu 1878.
Cependant dans un cercle restraint d'autant
plus difficile sur les admissions, qu'il est installé
dans une ville de bains oil affluent des étrangers
de tous les pays et dont on ne peut par conséquent
contróler l'bonorabilité le jeu ne présente pas
des inconvénients a comparer a ceux des salles
publiques. Les parties se font entre personnes
qui se connaissent, qui savent les sommes qu'el-
les peuvent respectivement exposer et cette
parl'aite connaissancequ'ont lesjoueurs de leurs
ressources respectives, exerce sur eux une es-
péce de contrainte.
D'un autre cötó, les bénéfices et les pertes sont
génóralement limités. Les joueurs heureuxont
appliquerons-nous ici ce mot la sagesse
de s'en aller. Ceux que poursuit la déveine ne
trouvent plus lloccasioo de prendre une revan
cheou de perdre de nouveau.
De sorte qu'au bout de deux ou trois semaiues,
les reunions eessent. Les membres du cercle,
appelés ailleurs, soit par leurs affaires, soit par
de nouveaux plaisirs, disparaissent successive-
ment, et flnalement le local se ferme, foute d'oc-
cu pants.
11 en est autrement dans les endroits ou le pu
blic a acces. La clientèle du tapis vert s'y renou-
velle tous les jours. L'appat se présenté a tous
sans restrictions; les enjeuxsont relativement
petits, et le collégien peut risquer sa pièce de
Oi'.nous recevons d'un liberal des environs
de Messines une leltre qui fait raison des
allegations mensongères du Progrès. Nous
ne pouvons résister au désir que nous
éprouvons de la communiquer it nos lec-
teurs
Monsieur le rédacteur dn Joukxal d'Ypuks.
L'auteur de cette lettre est uu libéral,
mais uu libéral qui place la loyauté au-
dessus de sou libéralisme. Veuillez lui don-
iiier, pour uue fois, l'hospitaliilé daus les
colonnes de votre journal.
.1 ai suivi la polémique qui a surgi entre
le Progrès et le Journal d'Ypres relative
ment a 1'afFaire du curé de Warnêton. Dans
l'intérêt de la vérité je dois vous avouer que
le Progrès se trompe.
Voici toute 1'afFaire telle que je l'ai com
prise ii l'audience du 28 Février, d'après
les depositions des lémoins et la plaidoirie
de M. I'avocat Colaert
Le curé de Warnêton était prévenu: 1°
d avoir circulé saus amorisaiion sur la voie
t'errée, 2" d avoir arrête le train malgré les
avertissements réitérés du machiniste.
Sur la première prevention le cure a été
condamné a 10 florins, sur la seconde il a
été acquitté.
II est ;i supposer que si la seconde pre
vention avait été établie, le curé eüt été
condamné a deux peines difFérentes.
Quant la première prevention,la dëfen-
se a soutenu la bonne foi du curé. Cette
bonne foi pouvait être admise me semble-t-
il. Car il était établi que le curé était dans
1 exercicc de soa ministère, qu'il devait ad-
ministrer une typhoïde qui était l'extrémi-
cinq francs. C'est le premier pas dans la passion
qui privera ses nuits de sommeil et lui enlèvera
ses ressources. Autour des tables dejeu, il trou
vera aussi un monde interlope qui lui fera faire
(l.'autres folies.
Le jeu commence tard, paree qu'on nose pas
s'y montrer avant que les honnêtes gens, que les
parents, que les tuteurs se soient retirés, se pro-
longe fort avant dans la nuit. Peut-être des hom
mes adroits profitent-ils alors de la lassitude, de
la somnolence de leurs adversairas?
\oila le tableau des tables de jeu du Kursaal
d'Ostende en 1878.
Nous pouvons dire, sanscrainte d'etre démen-
tis, qu'ony a vu, autour du tapis vert, des hom
mes d'une reputation douteused'autres dont
elle n'était que trop certaine, mêlós a des fem
me» de la pire espèce.
Nous pouvons ajouter que jamais de pareilles
gens n'auraient dü être admis dans un établisse
ment municipal, destine a être le rendez-vous de
la bonne société, et que l'administration com
munale, en se relaeliantde lasévéritéa eet égard,
a posé un précédent laclieux, contraire a ses
anciennes habitudes trcs-louables, disons-le,
bien que certaines personnes aient essayé de les
tourner en ridicule.
Nouscroyons que si les clioses continuent sur
ce pied, beaucoup de families déserteront le Kur
saal et même la ville.
On a déja recu des avertissements, auxquels
il est bon de préter l'oreille 1
(A con tinner.)
Journal d'"Ypres,