ORGANE C ATHOLIQUE DE L'A R RON DISSEMENT.
SAM EDI 3 Mai 1879.
10 centimes Ie numéro.
140 année. N° 1392.
On s'abonne rue au Beurre, 6(>, a Ypres, et a tous les bureaux de poste du royaume.
Résumé politique.
M. Depretis a déclaré devant plusieurs dé-
putés que toute manifestation de 1 'Italia irre
denta,de nature a troubler les relations de
l'Italie avec les pays voisins, serait poürsui-
vie, et que toute tentative de troubles serait
rigoureusement réprimée.
II serait inexact que l'Autriche eüt envoyé
une note au sujet du récent discours de Ga
ribaldi. 'fout se serait borné b quelques ob
servations verbales du chargé d'affaires Autri-
chien b Rome.
Nous cromprenons a merveille que le gou
vernement Italien veuille réprimer toute dé-
monstration hostile a TAutriche, qui risque-
rait de lui mettre cette puissance sur les bras,
ruais rintention ue sutlit pas, il s'agit de sa-
voir si on peut la mettre a cxécution. Or,
dans l'espèce, cette question ne laisse pas
que d'etre assez délicate. Le Roi Humbert et
ses ministres seraient-ils de force b arrêter
Garibaldi, s'il recommengait seséquipées?
Quant aux observations présentées par
l'Autriehe, elles ont un caractère sérieux,
alorsmême qu'elles n'auraient point revêtu la
forme d'une note. 11 ne faut pas oublier que
les deux nations ici en prësence sont de vieil-
les enneinies, séparées par des flots de sang
et, des siècles de haine.
Toute ditliculté entre elles présente done
une importance, une gravité exceptionnelle.
Le manifeste de Garibaldi est fort com-
menté dans la Péninsule. N'ous en avons sous
les yeux le texte complet.
Yoici en quels termes débute eet appel b
la démocratie
Le faisceau de la démocratie est formé.
Je me réjouis de ce que ce fait important et
si longtemps désiré s'est accompli sous mes
yeux dans la journée du 22 Avril.
B'illustres patriotes de toute classe, de no
bles caractères qui sont Thonneur de notre
pays et qui se sont illustrés en préparant et j
en formant l'unité Italienne depuis 1821 jus-
qu'h ce jour, militent dans le camp de la dé
mocratie et une jeunesse généreuse y milite
avec eux.
Et de même que la démocratie réussira a
répandre son influence au moyen de l'agita-
tion qu'elle va provoquer pour la revendica-
Gon et l'exercice efféctif de la souveraineté
nationale, pour le bien-être des déshérités
de la fortune, pour la justice sociale et pour
la liberté inviolable, de même une multi
tude de citoyens qui assistent défiantsetincré-
dules au gouvernement des minorités qui se
sont succédé et qui se sont épuisées vingt
ans durant, s'uniront certainement et rapide-
ment a ses phalanges.
Garibaldi constate que toutes les écoles de
la démocratie se sont unies pour marcher
ensemble au but commun, et qu'elles sont
tombées d'accord pour l'adoption du même
mode d'apostolat. Ce mode d'apostolat ce
sera, d'aprèsle manifeste, fagitationpublique,
si bien commencée d'ailleurs. Nous croyons
(jue l'on ne renoncera pas, néanmoiiis, aux
menées secrêtes et aux complots qui out si
bien profité jusqu'ici au parli de la Révolu-
tion, en Italië.
Garibaldi laisse entrevoir, du reste, <[ue
la ligue démocratique se réserve, en eas de
nécessité, l'emploi de moyens plus énergi-
ques et plus effieaces que I'agitation légale
Et puisque, dit-il en terminant, la ligue
de la démocratie a résolu de circonscrire sou
travail dans les limites du droit et par des
moyens pacifiques, ceux qui gouvernant 1 Ita
lië out b prendre note de ce fait que, si ce
droit était eontesté, empéchéou entravé d'une
tapon quelconque, la responsabilité devant la
nation et devant 1 bistoire retomberait sur
eux si, pour la protection ou la revendication
de son droit, la ligue de la démocratie, avec
la conscience de la légilime délense, était
obligée de recourir b d'autres moyens que
ceux qu'elle s'est fixés.
La menace est formelle. La logique révolu-
tionnaire poursuit sou oeuvre.
Qui l'ernportera en Russie, du gouver
nement légal ou du gouvernement occulte
Grave et. terrible question, b laquelle il est
impossible de répondre
'fout ce qu'on peut dire de certain, c'est
que des deux cötés la guerre continue, achar-
née, implacable: terreur pour terreur
Nul n'est assuré du lendemain la sécuri-
té personnelle n'est plus qu'une vaine appa-
rence dans les immenses possessions du Tsar.
Quelle autorité peut me protéger contre les
coups des assassins Qui peut me garan-
tir que je ne serai pas compris dans l'une des
arrestations en masse auxquelles selivre la
police
Le poignarddes assassins ou le mortel exil
en Sibérie, voilb maintenant les sujets de in
flexion les plus habituels des citoyens de
Moscou et de Saint-Pétersbourg.
Quant b Alexandre II, triste rapproche
ment il a plus b craindre pour ses jours
au milieu des splendeurs de sa capitale,
qu'Abdul-IIamid dans les ëtroites rues de
Stamboul.
Un procés qui s'est déroulé b Berlin a
établi qu'une étroite connexion existe entre
les nihilistes d'une part et de l'autre les socia-
listes allemands, les internationalistes et les
autres adeptes de la revolution cosmopolite.
Des documents et. pieces produits, il résulte
que des comités nihilistes fonctionnent b Lon-
dres, Paris et Gand.
Voilb done la Belgique entrainée dans le
courant révolutionnaire plus qu'on ne croyait.
La peste, qui sévissait en Russie, sein-
ble avoir dispara. Le cordon sanitaire est
levé partout et les quarantaines sont suppri-
mées.
On parle de l'avénement proehain d'un
nouveau ministère en France. Le centre gau
che reprendrait la direction des affaires.
II est permis d'en douter.
Ei Bourgmète dé Warnéton!
On nous écrit de cette ville:
Le Proqrès, qui s'est empressé d'annon-
noncer a l'arrondissement d'Ypres l'accueil
fait a la nomination de M. Desimpel comme
bourgmestre, oublie de parler de l'entrée so-
lennelle de ce personnage désormais fameux.
Permettez-moi de réparer eet oubli; le héros
de la fête en vaut la peine, et la fëte elle-
même est assez caractéristique pour étre
consignée dans les annales de l'arrondisse
ment.
Done, M. DesimpelLouis docteur en
droit! stagiaire b Bruxelles, nommé Bourg
mestre par la toute-puissante protection du
sérénissime M. Carton, a fait, le 15 Avril
dernier, son entrée triomphale dans notre
bonne ville.
L'exactitude, qui est la politesse des rois,
ne fut. pas celle du magistrat. 11 se fit longue-
ment désirer une demi heure durant. Enfin,
a 3 heures, un fiacre, trainé par une rossi-
nante et conduit par un électeur, cocher
de gala en service extraordinaire, deversa
notre illuslre maïeur devant le groupe qui
l'atlendait.
Ou connait l'bomme: taille rabougrie, jam
bes torses et trapues, visage labouré de rides,
cbeveux poussés au liasard et flottant au gré
des vents, col épais, épaules larges, regard
en dessous; un ensemble grincheux, grognon,
maussade et au besoin bouffon.
Ajoutez la toilette, petite tenue, chapeau
légendaire et veston qui a dü faire rêver.
Les compliments d'arrivée ne furent pas
longs: l'échevin resta court dans sa haran
gue;avait-il oublié ses lunettes ou... ses
lettres? line douzaine de gueux et de
francs-mapons d'Anvers ou de Bruxelles, un
quatrain de Messinois brailièrent quelques
Vive le Bourgmestre! et. puis on se disposait
b se mettre en marche. Conscient de son im-
popularité, accablé sous son passé, confus
du présent, embarrassé dans sa contenance,
M. Desimpel ne demandait pas mieux.
Mais hélas! on lui avait ménagé une sur
prise. II dut récevoir les félicitations de char-
mantes petites lilies, que quelques papas
tenaient sans doute b produire. L'une d'elles
offrit. avec une grace parfaite les clets de
fhötel-de-ville, richement enguirlandées sur
un plateau de cabaret. Mais qui avait compo-
sé le petit compliment débité par la lillette?
Impossible d'etre plus ironique et plus mor
dant. avec plus de candour et d'innocence.
Cbaque mot portail.
I n éclair de satisfaction illumina la face
livide du maïeur quand le cortége recut
l'ordre de s'ébranler.
La musique de Warneton marchait en tête.
Celle de Messines avait jugé bon de rester
cbez elle. Quelques sociétés ouvrières repré-
sentées, les unes par un cinquième, les au
tres par un dixième de leurs membres, la
plupart sans président ou conscil d'adminis-
tration, formaient la haie.
Le nouveau bourgmestre était flanqué
de son éclievin b droite, et du receveur coni
munal b gauche. Comme les ombres dans les
toiles des grands peintres, le menu fretin
qui suivait faisait l'essortir la splendeur de cc
trio. On distinguait dans la pénombre le frin-
gant Nestor et Ricquier l'illustre, une étoile
d'autrefois
Le Conseil communal, le Clergé, le Bu
reau de bienfaisance, la Commission de flios-
pice civil, le Conseil de fabrique, les institu-
teurs et institulrices s'étüient abstenus fe
paraitre.
Jamais plus niisérable cortége ne fut plus
péniblement réuni; jamais non plus, plus
grands efforts ne furent déployés pouréveil-
ler un peu d'enthousiasme. '1'ous les ressorts
ont été mis en jeu. Réclames, suppliques,
démarches oflicieuses, publications ofliciel-
les, ordres, prières, rien ne fut négligé, et
malgré tout, la bonne et loyale population
warnetoimoise est restée froide et indifféren
te. Elle salt apprécier les hommes. Fiére de
ses traditions catlioliques, soucieuse de sa
dignité, ja louse de sa liberté, elle ne con-
sentira jamais b courber la tête devant l'in-
dividu envoyé ici pour faire le métier que
vous savez.
Après la fête les largesses. On assure que
les petites lillettes ont regu ehacune une
orange. Un tonneau de bierrc, juste assez
pour se rincer la gu..le, disait un gueux, -
aurait été alloué aux sociétés ouvrières. Dix
frans aux pauvres pour se régaler, dit-on.
En avant la musique!
XXX.
Lc mouvement contre le projet
Van Humbeeck.
On nous écrit. de Poperinglie
11 y a deux mois, M.l'avocatPlancquaert,
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