ORGANE CATHOLIQUE DE L' A RRONDISSEMENT.
SAMEDI 6 Septembre 1879.
10 centimes Ie numéro.
14e année. N0 1428.
On s'abonne rue au Beurre, 66, k Ypres, et k tous les bureaux de poste du royaume.
Résumé politique.
FRANCE. La manifestation des con-
seils généraux de France contre les projets
Ferry se compléte et s'accentue cliaque jour,
au désespoir des feuilles gouvernementales
qui ont si imprudemment demandécette «con
solation.» D'après le relevé de 1 'Univers, dès
ii présent la majorité est acquise aux adver-
saires de ces projets. Trente-huit conseils
généraux se sont prononcés contre et vingt-
neut' seulement pour. II ne reste plus h con-
naltre que la déeision de sept conseils. Onze
conseils se sont séparés sans exprimer leur
opinion; mais il est évident que cette opinion
doit être considérée comme défavorable, car
comme le remarque le Nord, pen suspect
de sympathies clérieales, ces assemblies,
dans lesquelles la majorité est républicaine,
n'auraient pas gardé le silence alors qu'elles
étaient si instamment sollicités par le minis-
tre de fintérieur et par la presse républicaine
de le rompre, si leur réserve n'avait pas été
la conséquence forcée de l'impossibilité oü
elles se trouvaient d'approuver le projet de
loi.
La campagne est done décidée et le gou
vernement battu. Les assemblées départemen-
tales donnent aux ennemis des lois Fèrry
l'appui énergique que la République fran-
caise réclamait impérieusement pour le minis
tère.
Cette grande manifestation ne peut que
confirmer le Sénat dans ses idéés de résis-
tancé contre ceux qui veulent supprimer la
liberté de fenseignement. Dès la reprise de
la session parlementaire, la crise ministériel-
le, encore latente, prendra nécessairement
une marche aiguë. Les jours du cabinet sont
comptés, et, pour toute oraison funèbre, amis
et ennemis lui diront: Tu l'as voulu, Dandin.
HOLLANDE. -Un télégramme d'At-
chin, envoyé le 28 aoüt par le gouverneur
général des Iudes néerlandaises au départe
ment des colonies des Pays-Bas, annonce
que les troupes de Selimoen sont retournées
a leurs campements habituels et ont rencoptré
sur tout leur parcours uue population pacill-
que. Les chefs insurgés, qui ont fait leur
soumission a Selimoen, ont tous prêté le
serment de lidélité it Kolta-Radja le 20 aoüt.
ALLEMAGNE. L'Empereur d'Alle-
magne et l'Empereur de Russie se sont ren
contrés it Alexandrovo, station du cltemin de
fer de Varsovie it Berlin, it la frontière qui
sépare la Pologne prussienne de la Pologne
russe. - On peut rapprocher le fait de cette
visite de la note publiée par la Gazette de
l'Allemagne du Nord, qu'une dépêche signa-
lait, et de laquelle il résulte que l'envoi du
fflaréchal de Manteulfel auprès de l'Empereur-
Alexandre a été ordonné par l'Empereur
Guillaume lui-même, sans le concours du
prince de Bismark. Une dépêche prouve qu'h
Berlin on croit it l'exactitude de ce renseigne-
ment importantdonné paria feuille oflicieuse.
De ces taits, il est permis de conclure que Ia
mission du maréchal était, dans la pensée de
l'Empereur d'Allemagne, une préparation it
l'entrevue de l'Empereur de Russie. On peut
également supposer que l'entrevue d'Alexan-
drovo, de même que la mission Mantcuffel,
est un pacte de la politique personnelle de
l'Empereur d'Allemagne, et qu'elle a pour
but de compenser, par l'excelience des rela
tions entre les deux souverains, ce qui peut
manquer, en fait de cordialité, dans les rap
ports entre les deux chanceliers.
AUTRICHE. -La visite du prince de
Montenegro it la cour de Vienne et au camp
de Bruck mérite également l'attention, de
même que la fapon dont elle est commentée
par les journaux autrichiens. Depuis la con
clusion du traité de Berlin, dit la Correspon-
daiice politique, e'est la première fois que le
chef des vaillantes populations monténégrines
quitte son pays. Et, circonstance significati
ve, ce n'est pas pour se rendre it Saint Pé-
tersböürg, mais pour se rendre it Vienne.
RUSSIE. Le lieutenant général ba
ron Frédériks, gouverneur général de la Si-
bérie oriëntale et commandant en chef des
troupes de Sibérie, vient d'être relevé de ses
fonctions. Cette destitution fait beaucoup de
bruit dans le monde militaire. 'S'il faut en
croire certains bruits, le baron Frédériks ne
se serait pas montré assez dur envers les ni-
hilistes et son dévouement ne semblait pas
assez ferme. Le baron Frédériks a regu un
congé de onze mois, congé qu'il doit passer
it fétranger. Ordre lui a été donné de ne pas
séjourner it St-Pétersbourg.
TURQUlE. Le gouvernement turc
vient de renforcer considérablement le nom-
bre des troupes en garnison dans le vilayet
d'Anlrinople. Elles seront placées sous le
commandement en chef de Fuad paclta. D'a
près des informations publiées par la Corres-
pondance politique, de Vienne, cette augmen
tation de troupes serait motivée pat' l'inten-
tion de la Porte d'occuper it un moment don
né la Roumélie orentale. La feuille viennoise
ajoute que si les événements amènent la Por
te h réaliser son dessein, ce ne sera pas la
milice roumélienne qui sera en état de s'y
opposer.
AFRIQUE AUSTRALE. Au Zoulou-
land, les chefs qui combattaient sous les or-
dres de Cetywayo entrent chaque jour en
pourparlers avec le commandant en chef des
forces anglaises, Sir Garnet Wolseley; puis,
au moment de faire définitivement leur sou
mission, ils disparaissent, sauf it se montrer
de nouveau it quelques kilomètres plus loin.
Cela constitue une situation difficile, ou tout
au moins embarrassante. Sir Garnet Wolseley
ne sait plus avec qui trailer. D'autre part, il
n'a point it sa disposition des troupes assez
nombreuses pour pouvoir occuper, même
approximativement, le pays tout entier. II
reste done it Ulundi, détachant autour de lui
des colonnes volantes qui battent chaque jour
quelques bandes de Zoulous, mais sans arri-
ver it un résultat décisif. Et pourtant il doit
avoir hate d'en avoir terminé avec Cetywayo
pour tourner son attention vers le Transvaal.
De ce cóté, en effet, la situation est mau-
vaise pour la Grande-Bretagne. Mécontents
de sa domination, les Roers se disposent it
partir en masse pour les possessions portu-
gaises. Or, TAngleterre n'a déjit pas assez de
blancs pour faire équilibre aux multitudes
noires qui environnent sa colonie; il est done
du plus grand intérêt pour elle d'empêcher ou
d'atténuer Immigration des Boers.
A Natal aussi, la situation ne laisse pas
que d'être assez délicate. 11 est grand temps,
parait-il, que sir Garnet Wolseley procédé it
une sérieuse réorganisation de cette colonnie.
On voit que la besogne ne lui manque pas et
qu'il est loin encore de pouvoir songer it se
reposer sur ses lauriers.
La peur bleue.
Les gouverneurs de province viennent de
transmettre aux administrations communales
de la province, aux commissionnaires d'ar-
rondissement et aux inquisiteurs de fensei
gnement primaire, la circulaire ci-après du
V.*. ministre de l'instruction publique:
Les gouverneurs out transmis également
aux administrations communales de la pro
vince une circulaire du V.-. ministre de la
justice, en date du 23 de ce mois, signalant
les abus qui pourraient résulter de l'affecta-
tion, pour le service des écoles privées, des
'presbytères, de l'église ou de tout local dé-
pendant de celle-ci
Bs appellent l'attention toute spéciale des
administrations sur l'objet de cette circulaire
et les prient de tenir la main ce que la loca
tion des biens appartenant aux fabriques
fasse toujours l'objet d'une adjudication pu
blique, conformément aux prescriptions de
la loi.
Cette circulaire est ainsi congue:
Journal
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Laffite, et C'e Bruxelles, 89, Marché aux Herbes, et a Paris, 8, Place de la Bourse.
Bruxelles, le 18 aoüt 1S79.
Monsieur le gouverneur,
Je vous prie de vouloir bien me signaler, au
fur et a mesure qu'elles vous seront connues, les
démissions des membres du personnel enseignant
des écoles primaires communales qui renon-
ceraient a leurs fonctions pour entrer dans Ven-
seignement privé.
Vous jugerez probablement utile d'inviter non-
seulement les administrations communales et
les commissaires d'arrondissement, mais encore
les inspecteurs de l'enseignement primaire, a
vous renseiyner exactement au sujet des nou-
velles fonctions que les instituteurs démission-
naires auraient acceptées.
Le ministre de l'instruction publique,
Van Humbeeck.
Bruxelles, le 23 aoüt 1879.
Monsieur le gouverneur,
J'ai été mis a même de constater par différentes
communications qui viennent de m'être adres-
sées, que des abus graves, auxquels il est indis
pensable de porter un prompt remède, sont prés
de se commettre dans 1 ailectation des immeubles
appartenant aux fabriques d'église.
II m'est revenu que, dans plusieurs iocalitós
les promoteurs de l'ceuvre des écoles orgartisóes
pour combattre Fenseignement primaire de l'Etat
comptent utiliser dans ce but soit le presbytèro,
soit ia sacristie, soit tout autre local dependant
de l'église, soit enfin le temple lui-même.
Je n'ai pas besoin de vous dire qu'aueune dis
position de loi ne justitie de semblables procédés
etnautorise les fabriques a détourner de leur
destination légale les immeubles que je viens
d indiquer pour les affecter a une oeuvre complé-
tement étrangëre au service public du culte
Ce sont la des abus flagrants sur lesquels j'ap-
pelle toute votre attention.
Je vous prie en conséquence, Monsieur le gou
verneur, de bien vouloir faire procédér a una
enquête immediate dans toutes les communes de
votre province, d'y relever celles oü des iliéga-
lités de 1 espèce existeraient déja ou seraient a
la veille de se commettre. Vous voudrez biert
rappeler les fabriques d'église a la stride execu
tion des obligations que la loi leur impose et
enjoindre a celles qui s'en seraient écartées
de fermer immédiatement les écoles déjd ouver-
tes. Quant aux autres, vous leur ferez defense
expresse de laisser donner l'enseignement pri
maire dans les locaux qui leur appartiennent et
qui sont principalement ou accessoirement des-
tiués au service du culte ou au logement de ses
ministres.
Veuillez, Monsieur le gouverneur, me faire
connaitre le résultat de vos investigations et des
instructions que vous aurez données en consé
quence.
J'appelle également votre attention sur un
autre point.
II peut arriver que la fabrique ait mis ou
compte mettre a la disposition des écoles libres
des immeubles auxquels aucune destination spé
ciale n est assignée. Dans ce cas, il importe de
vérilier s'il existe un bail régulier, c'est-a-dire
passé a la suite d'une adjudication publique.
Dans la négative, il convient de mettre la fabri
que en demeure de procóder a une location
réguliere et de tenir la main a ce que cette admi
nistration se conforme strictement aux pres
criptions de la loi.
II est inutile de vous faire remarquer que si
Féglise ou le presbytère sont la propriété de la
commune, celle-ci doit faire signifier défense
de tenir école dans ces batiments, sous peine des
mesures a prendre, si cette défense n'était pas
respectée.
Je vous serais obligé, Monsieur le gouverneur,
de veiller a ce que les instructions contenues
dans ia présente regoivent sans retard l'exécu-
tion qu'elles comportent.
Le ministre de la justice
Bara.