CH. MASSE
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Samedi 21 Mars 1896
10 centimes le N°.
31 Année. N° 3131.
mum
DERNiERES SEMAINES.
79, RUE DE LILLE,
YPRES.
La Commune de Paris
et la Lutte d'Ypres.
Légendes et eontes
des environs d'Ypres.
f
9 m
-
Ou s'abonn
e rue du
öeurre, 36, a Ypres, et a tous les bureaus, be paste ciu royauure.
PHOTOGRAPHIE AMÉRICAINE
M. Ch. Masse devanl qui tier Ypres darts
le courant du ntois d'Avril, prévient ses
clients qu'il u'acceptera plus de nouveaux
ordres après le 45 Avril.
Jusqu'k cette date les photographies
seront livrées comme k présent au tiers de
leur valeur réelle.
C'est une occasion exceptionnelle dont les
habitants d'Ypres feront bien de profiler.
Les journaux rouges se livrent k des paré-
gyriques effrénés en l'honneur du XXVe
an ni versa ire de la Commune de Paris.
En Belgique le Penple et le Vooruit exal-
tent le 48 Mars. C'est le premier chant du
coq de la Revolution, qui bienlöt réveiiiera
tous les travailleurs et donnera le signal de
I'affranchissement. Nous autres, beiges,
nous devons plus que jamais en ce jour
reporter nos souvenirs sur nos glorieux
ainés de 4871. Car depuis Novembre,
nous avons aussi nos Communes. Letor-
rent a ouvert le passage la nappe coule
dans la plaine, majestueuse et sereine...»
A Paris, Ie citoyen Clovis Hugues, dans
un banquet donné la veille de i'anniversaire,
boit it la Commune. 11 fait le procés de ces
officiers, les capilulés de la veilie, qui le
lendemain, siégeaient en conseil de guerre
pour massacrer les défenseurs de la Répu-
blique.
11 flétrit, en terminant, l'odieux petit Thiers,
Puis il lit une poésis qu'il a faite jadis sur la
Comutune et dom voici la première strophe
Salut, Commune! Quand tu vins,
La France agonissait, livrée
Par les rhéteurs subtils et vains.
Par les repus de la curée.
Les bourgeois monnayaient l'affront;
Les chefs criaientfeu sur qui bouge
Versailles riait, cette gouge
Toi tu pleurals, la honte au front;
Salut, grande vierge rouge!
La grande vierge rouge! Ou rouge de
sang, rouge du sang de mi Uiers d'innocents,
rouge du sang des étages, répandu paries
monstres que célèbrent les chefs de file du
socialisme beige.
La Lutte d'Ypres, qui a des susceptibilités
k raénager celles des doctrinaires, ses
alliés aux élections de Novembre ne
célèbre pas encore le grand ar.niversaire
mais elle s'évertue a juslifier ses amis les
communards.
Les hisioriens, dit-elle, ne sont pas
encore parvenus it jugfer invparlialement
la commune. Presque toujours, les pré-
ventions de parti out dicté leurs jugementa
et leur manière de présenter des laits
dont plusieurs étaïent encore irnpai faite-
ment connus.
Vraiment, Lutte de rnon coeur, les histo-
riens ont-ils besoiu de juger des laits qui se
sont passés sous nos yeux Est-ce que l'as-
sassinat au Présnient Carnot, par exemple,
aura besoirt d'être jugé par les hisioriens
El, n'en est il pas de même de la commune
de Paris,qui u'a éié qu'une suite d'incendies,
de pillages, de massacres
Jugé Mais loul cela est jugé, et l'histoire
n'a qua flétnr ceux qui s'en sont reudus cou-
pabtés, comme elle blamera et flétrira un
jour ceux qui glorifient ces faite,ei, espéroiis
Ie, ceux qui cberchent k les excuser, si non
k les justifier.
La Lutte aidera k rétahlir les faits Les
documents s'amissentdit-eiit. la vérité se
fait jour petit d petit. Et la consceur radicale
invoque l'opioion d'Henri Bauer, rédacteur
de 1 'Echo de Paris, qui fut déporté k dix-
huit ans pour participation k la commune.
C'est comme si pour écrire l'histoire d'un
assassinat, la Lutte se référait k la version
donnée par l'assassin. Combien de fois les
criminels avouent-ils leur culpabilité?
L 1 citoyeu Bauer la Lutte l'appelle M.
Henry Bauer a récemment raconté dans
ses mémoires d'un jeune homme, ce qu'il sait
des évènements de l'ano.ée 4874. C'est k
propos de eet ouvrage, ajoute La Lutte, que
M. Georges Lecomte a essayé, dans la sooi-
été nouvelle, de caractériser brièvement et
sans passion la période de la commune. Et
La LuLte reproduit quelques extraits de la
Ghronique, de M. G. Lecomte.
Inutile de dire que M. Lecomte tache d'in
nocenter la commune. Les grands coupables,
les assassins ce nesont pas les communards,
c'est Thiers, le petit homme, c'est le Gouver
nement el l'artnéd de Versailles qui sont les
seuls coupables.
Thiers eut pu sauver les ótages, mais sous
prétexte quun gouvernement régulier ne de-
vaitpas trailer avec insurrection, il préféra
les abandonner au délire sanguinaire de
quelques brutes...
Nous nous demandotis si La Lutte jouit
encore du sens commun 11 fallait done
composer avec les assassins 11 fallait faire
comme sont ooltgés de faire certains parents
dont les enfants sont tombés entre les mains
de brigands: envoyer la ranpon k l'endroit
indiqué li fallait passer par les conditions
des criminels qui avaient pillé, ravagé, in-
fendié Paris et massacré ses plus dignes en
fants
Mais n'insistons pas, c'est trop fort. Lais-
sons la Lutte savourer l'ariicle de Lecomte
et dire avec lui que la responsabilité Itisto-
rique de ce petit politicien M. Thiers
est lourde, et que la statue quon lui édifia
semble une provocation.
Petit politicien Ai; si pense done la Lutte,
puisqu'elle ne tait aueune réserve au sujet
des extraits de la Ghronique de Lecomte.
Qu'en pense le Progrès Quoiqu'it sorte
des mêmes presses que la Lutte, ce nest pas
un motif pour ne pas désavouer a l'occasion
sa grande politicienne, sa jeune soeur, qui
peut commettre impunément les plus grandes
baiouidises eu même letups que des fautes
éuormes.
Le devoir de la presse est de signaler
les opinions mauvaises et de combattre les
idéés per verses. Nous venons de le faire en
core une fois. Le Progrès se joindra-L il il
nous, uu fera t il comme il l'a tail récem
ment au sujet des héros beiges de 1830
se taire?
Tous les pays out leurs légendes, qu'on
racontait jadis au coin du feu, pendant les
veillées des longues soirées d'hiver, quand
le vent et la pluie taisaient rage au dehors
et que l'ouragan sifflail ses chants mélanco-
liquesentre les branchesdénudées des arbres
de la plaine.
Dans bien des contrées ces réeits extra-
ordinaires ou mystérieux out servi de sujet
aux romans ou uouvelles de beaucoup d'au-
teurs en renom. Ainst ceux de la Bretagne
out lait le fond de la plupart des romans de
Paul Féval comme l'Eoosse a été chantée par
Walter Scott.
Dans notre pays les contes' et uouvelles de
Marcelleis La Garde et autres ont eu pour
théaireles bordsde l'Amblève et de l'Ourthe.
11 nest pas nécessaire, eroyons nous, de citer
les nombreux ouvrages que notre grand
romancier H. Conscience a faits sur le pays
flamaud. Tous les connaissent et leur succès
se constate par ce fait qu'ils ont été tra
duits en plusieurs langues écrangères.
Mais on ignore généralement, eroyons
nous, que ia oontrée monta^neuse qui s'éteod
au sud de notre arrondissement possède
également ses légendes.
II y a k observer que le caractère de ces
contes varie d'après celui des populations.
En Bretagne se sont les nains ou Korri-
gands qui y jouent le röle principal.
En Eeosse les lairds, plusou moins bri
gands, dn temps de Stuarts; les Rob Roy,
les Robin Hood sont les héros de légendes,
dans lesquelles l'immortel Walter Scott a
chinté la brjvqu's et li vigueur de ce
peuple tnpmtageard. Eq AUetuagpece sont
les chevaliers du moyen kge et le» anciens
maapirs das borda du Rhip qui cn font les
t ra is
Dtus nos ooutrées ou dirait que nos voi-
sins du sud spui vssez enclius k ajouler foi
aux histoires de covenants, de sorcieps et
sorcières ou de trésors déeopverts par de
mystérieux moyens.
Un do nos a nis qui devait séjournqr quel
ques jours dias una des communes situées k
la fronttere IrinptUe, aviit pris son loge
ment daas uti! ferme Le soir après sa jour.
née de 1 itoeur et d'études, il prenait plafsir k
s'asseoir k la table commune, en compagnie
de la patriarcale f unfile du fermier, cora-
posée de ce derm sr. d e si tem ne et de ses
nombreux entanis, du vieux père, de la vieilte
mère et des ouvriers d s la ferme. Après le
souper, les enfants siutillaient autour de
l'aueieu, grinpiieut sur sas genoux et le
pria.ient iustammsm, le leur raconter une
belle nistoire comme il eu savait tant.
Notre brave vieux tirdii-, rarement long-
temps avant d'aeeéler aux instances de la
jeune géuérali i. Piusi-surs des réeits que
notre imi a en e i lus d s o s te 1 iq n nous ont
senoié asse/, ii é'em ns et aius ivoas cru
être agréable ea en fusaut part ft nos lec-
teurs et leetrices.
La première quo u >us d innous aujous'd'hui
nous aparude uiture tt prouver, une fois
de plus, l'uversion que les campagnards de
jadis avaient pour l is pliuements d'argent,
et le souei qu'iis avaient de laisser ignorer h
leurs voisins et memo a leurs intimes, les
épargnes qu'ils avaient faites.
J iequss, le conducteur charretier du fer
mier Nicolas, né de parents pauvres, avait
été placé dès son enfauca chez ce fermier
en qualité de gardien des bestiaux. Sa bonne
conduite et sin zèle lui avaient valu l'affec-
tion de son maitre a peu k peu il s'était
éievé en grad.e jusqu k devenir le domestique
principal de la terrae.
Mais Jacques avait de ['ambition.. II
voulait parvenir k posséder un jour une
posilio i iudépeudante et devenir fermier k
sou tour.
II faut dire que le bon gargon avail fait la
connaissance d'un beau brin de fille, qu'il
aimait k la folie. Malheureusement le père
de sa duluinée, un boutiquicr assez aisé du
village, était ce qu'on appelle un peu regar
dant et u aurait pas facileraent accordé son
unique héritière k Jacques, simple ouvrier
de ferme. Aussi notre araoureux, dont la
bourse n'était pas encore lort ronde jusque lk,
devait forcément se contenter de soppirer
de loin, sans oser s'approcher de trpp prés
de l'ardent objet de ses désirs.
Lé JOURNAL, D'YPRKS parait le Mercredi et la Samedi.
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