AFFAMÉS DES INDES.
Samedi 10 Juillct 1897. 10 centimes (e N°. 32* Année. N° 3261.
Pour les
Léon XIII et la Russie.
Les négociations
Gréco-Turques.
Au Conseil Provincial.
Les établissements d'aliénés.
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Listes précédenies 2517 fr. 58
Deridder-Poreye, Watou-Abeele 1
Sid. Hessel 1
L. Wallaert 1
M. Bouquet-Van Dromme 5
C. R. de D. 5
Emerence Winne 4
Cb. Verscbaeve 5
Anonyme 10
H. F. W. 25
Anonyme d'Ypres 50
En l'honneur du Sacré Cceur 20
La supérieure du couvent des
sceurs de charité de Roulers 20
Lorsque, en 1894. Léon XIII tratja au
clergé poloriais la ligne de conduite A suivre
envers le gouvernement russe, des voix s'éle-
vèrent, même parmi les catholiques, pour
blamer cette manifestation politique du
Souverain Pontife, qu'on disait imprudente,
borsde raison, et trop ostensiblement favo-
iable A i'autccrate, persécuteur des catholi
ques polonais. Le Pape, de son cöté, laissa
se calmer les ressentiments et, confiant dans
les résuliats de sa politique, ne devia pas
un instant de sa ligne de conduite. Les évé-
nerrents viennent de lui donner complète-
ment raison.
DéjA en 1895. Léon XlIIavait obtenu Ie
rétablissement de l'ambassade russe au Vati
can. A peine M Iswolski fut-il arrivé A
Rome, que les négociations en faveur des
catholiques polonais commencèreiit. II est
vrai, eiles tralnèrent en longueur, et l'on
pouvait constater bientêt que, grAce A des
influences bostiies qui se faisaient valoir au-
près du Tear, la conclusion d'un modus
vivendi n'était pas procho. Les intentions du
Tsar cependant étaient (les meilleures, et,
seule l'obstinalion du Saint Synode russe et
des hauls tor ctionnaires du gouvernement
impérial pouvaient expliquer ces retards.
Vint alors le rappe! de M Isvvolski. et
subitpnaent les choses cbangèr.ent de face.
M Tscharikow, successeur de M. Iswolski,
toy ba d'accord avec Léon XIII, dès le pre
mier mois de son séjour A Rome, pour la
nomination de sept évêques aux diocèses de
Wilna, Luzk, Zytonierits, Seyna, Piock,
Mohiloew et la Samogitie.
II est vrai que ce n'est IA que le prenaier
pas dans la voie des réformes, promise» par
Nicolas II, lors de son avènement.
Les catholiques ont trouvé d'ailleurs un
defenseur ardent dans le prince Uchtomski.
Bans son journal de St Pétersbourg, ii ne
cesse de défendre la cause des Polonais
catholiques. Se souciant bien peu des haines
pil suscite et des intrigues qu'il provoque,
e prince Uchtomski signale A Nicolas II,
Partout oü il les rencontre, les vexations et
es injustices dont souffrent les catholiques
e a part des fonctionnaires russes. U a fait
comprendre au Tsar qu'il est de l'intérêt
eme de l'empire de mettre fin A cetle per-
?ul!°n inhumaine dont souffrent depuis
s d un quart de siècle ces maiheureux
onais. toujours prêts A reconnaitre l'auto-
rité du Tsar et A Ia respecter, si l'on voulait
leur donner les droits dont jouissent les
autres sujets russes et si l'on voulait cesser
de les emprisonner, de les déporter et de
démolir leurs églises.
Ajoutons que Nicolas II soupponnait A
peine ces agissements des fonctionnaires.
Lorsque, A son avènement, il promit de
donner A son pays la liberté de conscience et
la liöerté des cultes, il était sincère.
Les orthodoxes et les bureaucrates russes
n'ont pas permis au Tsar de réaliser ses bon
nes intentions, lis ont élevé un véritable
rempart entre lui et ses sujets. Les Polonais
lui étaient représentés comme des rebelles
dangereux et, A force de l'entendre répéter,
il finit peut-être par le croire.
Or, tout ceia a changé, grAce aux efforts
du grand Pontife qui vient d'opérer le rap
prochement entre ie Tsar et les Polonais et
qui a ainsi puissamment contribué A la paci
fication de cette malheureuse Pologne, déso-
lée depuis tant d'années par les persécutions
religieuses.
On mande d'Alhènes au Times
II parait que l'occupation de Kalabanca
par les tures n'est pas une violation des ter-
mes de l'armistice, cette ville étant dans la
région assigriée aux tures, mais les habitants
ignorant ca fait ont voulu s'opposer A l'entrée
des troupes du Sultan.
On mande de Constantinople au Morning
Postau sujet de l'mdemnité, que les am
bassadeurs ont approuvé les conditions sui-
vantes proposées paria coraission financière:
La Grèce paiera une indemniié de 4 millions
de livres par annuités de 200.000 livres
avec intéréts A 4 °/«>- l 7» sera puélevé sur
cette somme pour constituer un fonds d'a-
mortissement.
Bans sa séance d'ouveriure le Conseil
provincial a procédé A la constitution de son
bureau qui est le même que pour l'année
derrnère.
Le discours de M. le Gouverneur a été
consacré A l'élude de la lot sur les règle-
ments d'atelier.
La conclusion de ce discours démontre
que la pensée inspiratrice de cette loi est une
pensée de conciliation industrieiie, c'est-A-
dire une pensée de paix et de progrès.
Les chefs d'entreprise, dit M. le Baron
Ruzette, ont généralement de bien lourdes
responsabilitésilsengagent dans l'induslrie
ou dans le commerce, leur avoir, leur tra
vail, leur honneur industrieiie ou de com-
merpants; ils sont comptables souvent de
capitaux étrangers engagés dans leurs affai
res ils ont des obligations A échéance fixe,
qu'ils soienten gain ou en perte ils sont
garants de la sécurité des ouvriers.
Ayant A supporter toutes ces responsabilités,
il est logique qu'on leur concède, en échan-
ge, la liberté d'organiser A leur gré leur
usine ou leur établissement commercial.
D'autre part, les ouvriers sont dans une
situation de dépendance qui ne leur permet
pas toujours de faire cboix 'de l'atelier
pressés par le besoin, et travaillant au jour
le jour, ils acceptent la besogne sans se ren-
dre un compte précis de l'élendue de leur
engagement. De IA naissent des méconten-
tements et des conflits. II est done équitable
d'assurer aux ouvriers des garanties de ju
stice et de sécurité.
La loi sur les règiements d'atelier tend A
établir l'harmonie entre les intéréts distincis,
quoique solidaires, des patrons et des
ouvrierselle laisse intacte l'autorité du pa
tron, mais elie procure aux ouvriers la sau-
vegarde-d'un règlement écrit. Cette loi con-
trbuera, sans aucun doute, au maintien de
de la paix sociale.
Séance de Mercredi
Le Conseil vote la prorogation, A l'année
1898, de ia perception de la taxe de 75 cen
times additionnels au principal de la patente
spéciale établie sur les bénéfices nets des
sociétés anonymes.
M. Albert Liebaert fait rapport au sujet
de la participation de la province A la société
internationale pour l'exploitation de chemin
de fcr vicinal de Bruges-Zwevezeele.
II conclut en demandant que la Députa-
tionpermanente insisteénergiquement auprès
des communes participantes afin qu'elles as-
surentAla province une légitime part d'in-
tervention dans l'exploitation de la dite ligne
vicinale.
Les conclusions du rapport de M. Liebaert
sont adoptées.
Dans la discussion du budget de la Justice,
A la Cbambre des représentants, M. De
Lantsbeero a fait. justice de la thèso socialiste
de la reprise des établissements d'aliénés
par l'Etat, dans un éloquent discours dont
nous reproduisons les principaux passages.
Je crois que la reprise par l'Etat ne servi
rait qu'un intérêtcelui de quelques fonction
naires, heureux de voir agrémenter de quelques
qualifications nouvelles les titres qu'ils portent
etdésireuxdevoiraugmenter leurs traitements.
Elle servirait en second lieu, l'intérêt delafoule
toujours croissante des aspirants aux fonctions
publiques, qui, du coup, seraient multipliées
au dela de toute prévision et au grand détri
ment des finances publiques. La reprise servi
rait,enfin, l'intérêt d'un certain fiombre de mé-
decins sans clientèle qui, ne trouvarit sur qui
expérimenter leur ignorance, voudraient, par
autorité du gouvernement ét en qualité de fonc
tionnaires publics, se voir investis du droit de
trailer sinon de maitraiter, aux frais du trésor,
les pauvres aliénés dont le soin leur serait confié.
(Riresetmarquesd'approbation.) VoiiA,
messieurs, les intéréts que l'on servirait
Quant A l'intérêt des aliénés eux-mêmes, la
reprise par l'Etat ne produirait aucun résultat
dont on puisse se féliciter. L'Etat,en cette ma-
tière plus qu'en toute autre, s'est toujours mon-
tré d'une impuissance et d'une incapacilé qui
n'a d'égale que la fécondité et les succes de
rinitiative individuelle. Un regard sur le passé
vous le montrera. Depuis la revolution francaise
jusqu'cn 1815, de 1815 A 1830, de 1830 A 1850,
en Belgique comme en France, qu'a fait l'Etat
pour les aliénés Quelles lois a-t-il édictées
Quels établissements a-t-il créés? Quels servi
ces a-t-il organises
Ecoutez un homme qui porte un nom illustre
parmi les savants qui se sontoccupés des mala-
die mentales. Je veux parler d'Esquirol. Voici
l'extrait d'un rapport qu'en 1818 il adressait au
ministre de l'intérieur de France, A la suite
d'une inspection dont il avait été chargé
Les aliénés, disait-il, sont chez nous plus
maltraités que des criminels et réduits A une
condition pirequecelle des animaux. Je les ai
vus nus, couverts de haillons. n'ayant que de la
paille pour se garantir de la froide humidité du
pavé sur Iequel ils sont étendus je les ai vus
grossièrement nourris, privés d'air pour respi-
rer, d'eau pour étancher leur solf et des pre
miers besoins de la vie. Je les ai vus livrés A
de véritables geöliers.abandonnés a leur brutale
surveillance... Je les ai vus dans des réduits
infects, sales, sans air, sans lumière, enchainés
dans des antres oü l'on craindrait derenfermer
les bêtes féroces que le luxe des gouvernements
entretient a grands frais dans les capitales.
Cela se passait en France en 1818.
Ecoutez maintenant qu'elle était Ia situation
en Belgique en 1852. C'esl M. Ducpétiaux, dont
personne ne contestera la competence,qui parle
des asiles qu'il a visités
Quelques-uns de ces réduits sont épouvan-
tables, sans air, sans lumière, humides, étroits,
pavés A la manière des rues, et quelquefois plus
bas que le sol, dans des espècesde souterrains,
comme dans l'hospice des femmes A Liège.
Partout d'énormes verroux, des barreaux de
fer, des guichets presque partout I'aspect re-
poussant des anciennes prisons.
L'Etat cependant, dès 1791, dans Ia déclara-
tion des droits de rhomme et dans la constitu
tion, avait fait inscrire cette maximeLes
secours publics sont une dette sacrée. On l'a
répété, sous des formes variées, plus pompeu-
ses les unes que les autres, dans la déclarations
de droits et les constitutions qui se succèdent.
La conclusion pratique, elle découle de soi
Que l'Etat, qui assume toute la dette, prenne
aussi tous les biens Et de IA la mainmise de
l'Etat sur eet immense patrimoine créé par la
charité au cours de dix siécles.
VoilA bien l'idéal rêvé l'Etat en possession
de tous les biens, l'Etat gérant du bien des pau
vres, l'Etat dispensateur dc tous les secours.Or,
l'Etat a fait honteusenient banqueroute. Les
pauvres ont été laissés sans secours, les biens
ont été dilapidés et, de l'immense patrimoine
des pauvres, il n'est resté, au bout de peu de
mois, que quelque poignés d'assignatsLa
convention elle-mêmc dut reculer devant son
oeuvre.
Fort heureusement pour la Belgique, la con-
quête ne fut accomplie que lorsque déja le mal
avait été reconnu et e'est A cette circonstance
que nous devons d'avoir pu, mieux qu'en
France, conserver une partie du moins du pa
trimoine charitable fondé par nos pères.
Et cependant qu'a fait l'Etat pour les pauvres,
pour les malades, qu'a-t-il fait spécialement
pour les aliénés
La convention, le directoire, le consulat, l'em
pire ont passé, la restauration est venue, nous
sommes en 1818 et vous venez entendre Esqui-
rol vous dire quelle était la situation des maisons
d'aliénés. Nous sommes en Belgique, le régime
hollandais a passé et, en 1832, M. Ducpétiaux
vous apprend combien était lamentable la si
tuation dans notre pays.
Qui s'est levé alors L'Etat s'est-il réveillé
S'est-il souvenu de la dette sacrée Non, c'est
la charité chrétienne quia surgi du milieu des
ruines, toujours féconde, toujours inépuisable.
Cestelle qui partout a élevé ces établissements
magnihques qui vous arrachaient, il y a un
moment,eet aveu ils sont mieux maintenant!
Out, ils sont mieux maintenant Ils sont mieux
maintenant précisément paree qu'ils sont aux
mains de la charité et que l'Etat a déserté une
tache qu'il se sentait impuissant a accomplir.
Est-ce l'État, par hasard, qui a créé elle in
comparable institution, sans rivale au monde,
que l'on appelle la colonie de Gheel? Elle est
düe lout entière A l'inspiration chrétienne
chaque rnaison y est un petit asile d'aliénës.
Elle a traversé les siècles, paree que l'Élatn'a
pas fait peser sur elle sa lourde main. Elle a
vécu de religion et de liberté.