Chronique musicale Correspondance l'improviste et pincèrent le gaillard dans un j cabaret du voisinage oü il était en train de rire avec des amis de la bonne blague jouée a la police. Suites terribles d'une zwanze II y a des gens qui n'admettent pas la plaisanterie. Un drame qui s'est passé hier dans le quartier de la rue des Tanneurs en est la preuve. Dans l'impasse du Corroyeur habitent ensemble deux beaux-frères dont l'un, J. V..., excite un peu la risée par son caractère maniaque. L'autre, nomméH. L..., n'admet pasqu'il en soit ainsi. Or, J. V... venait encore d'être tourné en dérision par un certain Frangois V..., connu pour un zwanzeur émérite. Les deux beaux- frères résolurent de se venger. lis se mirent k la recherche de Francois V..., et, l'ayant rencontré, le terrasèrent et l'assommèrent littéralement a coups de talon. La malheureuse victime, transportée k l'höpital St-Pierre, se trouve dans un état alarmant. La justice a ouvert une enquête. Pour éclairer Thémis.Tous les moyens sont bons pour éclairer la justice. Telle est du moins l'opinion qui prédomine chez la correcte Albion. Dernièrement un M. W. Carter, habitant un des faubourgs de Londres, faisait assi- gner sa voisine, pour obtenir qu'il lui fut fait interdiction de chanter. Le juge trouva excessive pareille requête et demanda k la dame si elle chantait beaucoup. line heure le matin et une heure le soir, fit celle-ci. Deux heures seulementdit le juge, de quoi vous plaignez vous done Le voisin protesta, fit valoir le supplice de ces deux heures,les digestions troublées, les attaques de nerfs, etc., et trouvant le juge inébranlable, déclara que le magistrat ne pouvait pas se prononcer avec justice s'il n'avait pas entendu la chose dont il se plai- gnait. Bref il insista pour que la femme cbantat. Le juge y consentit. La prévenue, aveu- gle sur ses mérites, comme tant d'autres, servit l'air demandé. Mais elle n'avait pas plutöt laché les pre mières mesures que le juge, pris de titulla- tion sur son siège, s'écria avec des gestes désespérés Assez, assez, la cause est entendue. Et il donna raison au plaignant. La musique et les musiciens beiges depuis les temps les plus reculés jusqu'ci nos jours. (suite) La vie musicale de Gossec fut singulière et tourmentée. Fils d'un artisan, il fut élevé dans le calme d'un temple, sous les yeux et la tutelledu clergé. Lancé plus tard dans le tourbillon du Paris de Louis XV, il fut l'ami et le protégé des grands seigneurs de sa cour. Dans la tourmente révolutionnaire, entrainé par les circonstances, il fut le com positeur officiel de la République, comme David en était le peintre et J. Chénier le poète. De ces diverses phases de son existence onpourrait conclure que l'illustre composi teur était dénué de sens moral, ou que Fin- gratitude, qu'on a appelée un jour l'indépen- dance du coeur, fut dans son système.Il n'en était rien. Les contradictions apparentes de sa vie prouvent tout simplement, que, dans une époque troublée comme ceile qui com- menpa k la fin du siècle dernier, nul ne saurait dire oü le conduira la route qu'il suit; tout est remis au hasard pour celui que n'en traine aucune passion politique.Artiste avant tout, Gossec se renferma dans l'exercice de sa profession, s'inquiétant autrement fort peu de la marche des évènements et mettant ainsi en pratique les legons de pbilosophie qu'il avait regues de Ramcau. Gossec ne fut ni royaliste ni révolutionnaire il fut musi- cien. Partant de ce principe, celui qui avait commencé sa réputation artistique k Paris par une messe, fut celui qui fit la musique, k la demande des hommes du gouvernement républicain du cbant du 14 Juillet Dieu du peuple et des rois de l'hymne k l'Êtrq suprème Père de l'Univers de l'hymne k l'humanité O mere des verlus de l'hymne k l'Egalité Divinité tutélaire de l'hymne funèbre aux manes dos députés de la Gironde des choeurs et chants pour les apothéosesde Voltaire et de J.J.Rousseau; de la musique pour les enterrements de Mirabeau et du Due de Montebello etc. etc. servant ainsi tour k tourleRoi, la Conven tion, le Directoire et l'Empereur. II n'empêche que pour diriger sa barque sur cette mer agitée des passions politiques, si intenses et si soupgonneuses en ces pre mières années de l'ère républicaine, il failait bien de l'aplomb et de la prudence. On y risquait souvent plus que la perte d'une car rière lucrative; la tête même était en jeu. Pour en donner une idéé, il advint une cir- constance qui risqua de faire perdre k Gos sec la popularité qu'il s'était acquise parmi les hommes du jour. L'Institut national de musique qu'il diri- geait avait été convoqué le 21 Janvier 1794, pour accompagner la convention k la place de la révolution, oü elle allait célébrer l'anni- versaire du supplice de Louis XVI. Quand les artistes furent introduits dans la salie des séances, Gossec, pour honorer la législature.fit jouer une de ses compositions, un air calme et doux, afin de ne pas trou- bler les discussions. Tout k coup des mur- mures s'élèvent et un membre demande avec force la parole. L'ayant obtenue, il s'élance k la tribune et demande si les musiciens, par le morceau qu'ils viennent d'exécuter, ont voulu déplorer la mort du tyran ou bien célébrer l'anniversaire de eet événement A ces mots une sainte indignation s'empare des artistes et Gossec est le plus animé de tous. Commenton a osé mettre en doute le civisme de l'Institut de musique, qui s'est si bien montré ert toute circoristance II va répondre k cette inculpation et l'orchestre se met k jouer de toutes ses forces les airs patriotiques les plus énergiques.Les membres de la convention sont réduits k se boucher les oreilles, tellement la justification des in- culpés est assourdissante, et Gossec vient aprés, expliquer k la barre le motif qui l'avait guidé dans le choix du premier morceau. C'est qu'en effet la musique jouait un róle des plus importants k cette époque. Quand Robespierre présent» k la convention le décret, par lequel le peuple frangais recon- naissait l'existence de l'Etre suprème, la musique fit parti du programme de's cérémo nies instituées a pour rappeler k l'homme la pensée de la Divinité et de la dignité de son être. D'un autre cóté, Barère après avoir rap- pelé les prodiges que la musique fit faire aux Grecs, sous l'inspiration de Tyrtée,manifesta le voeu que la jeunesse fut accoutumée de bonne heure k entendre et k répéter des chants faciles, expressifs et belliqueux. Aucun des compositeurs contemporains de Gossec n'eüt pu, comme lui, réaliserla pen sée de ceux qui avaient institué les fêtes patriotiques. Jusqu'alors les instruments k cordes avaient été le fondement k peu prés unique des orchestres leur emploi eüt été insuffisant pour ces fêtes qui se donnaient en plein air. Gossec ne se servit que d'in- struments k vent. Airisi, k la fête de l'Etre suprème, il fit exécuter l'hymne de Desor- gues Père de l'Univers que le comité de salut public avait préféré k l'hymne de Che- nier: source de vérité,par un choeur immense du peuple entier plus de 50 000 voix accompagné par un orchestre de seize cents instruments k vent. On voit qu'il n'y a rien de neuf sous le soleil, comme le dit l'adage, et que les exé- cutïorrs fai.es de nos jours, les cantates de -1000 k 1500 exécutants, tout compris, voix et orchestre, doiverit baisser pavilion devant cette execution de l'oeuvre de Gossec, fartte au champ de mars, le 8 Juin 1794, sous sa direction. Les Alkmands.auxquels on attribue l'hon- neur d'avoir les premiers congu ces exéou- tions immenses, ont done été précédés par un artiste Beige, qui fit entendre des sym phonies jouées par des milliers d'exécutants, et des choeurs chantés par tout un peuple. Comme cette fête de 1 'être suprème fut la principale de celles oü Gossec joua un róle prépondérant, j'endonnerai un couri apergu qui intéressera peut être ceux des lecteurs du Journal d'Ypres, ne connaissant qu'im- parfaitement l'histoire de la Révolution fran- gaise. Le 8 Juin 1794, un soleil resplendissant se leva sur Paris. Dès le matin les maisoris étaient pavoisées et décorées de guirlandes de fleurs et de teuillage. Des arbres étaient plantés devant les maisons. Lescitoyens re- vêtus de costumes déterminés d'avance, costumes proposés par David, se formaient en sections, pour se diriger vers les Tuile- ries, appelées alors jardin national. Quand la Convention eut occupée l'amphitéatre qui lui était destiné, son président Robespierre expliqua le but de la fête et invita le peuple k honorer l'Auteur de la nature. Après ce discours Gossec fit exécuter une nouvelle symphonie de sa composition, pendant la- quelle le président de la Convention armé d'une torche enflammée, s'approcha du mo nument représentant le monstre de l'athéisme, et y mit lefeu. Un instant après, un méca- nisme caché fit apparaitre l'image de la sagesse, debout sur les ruines fumanies. C'était Ik le prologue la pièce devait se jouer au Champ de Mars. Averti par un rou- lement de tambours, la foule se remit en marche, précédée par Gossec et ses musi ciens, que suivait la convention. Au champ de Mars, une vaste estrade en forme de montagne, et surmontée de l'arbre de la liberté, s'élevait devant l'autel de la Patrie. Dès que tous furent placés La re présentation nationale au hautde ('éminence; au milieu les musiciens sur les degrés infé rieurs des députations de vieillards,de mères de familie, de jeunes filles, d'adolescents et d'enfantsles chanteurs et les instrumen- tistes entonnèrent l'Hymne de Desorgues k l'Etre suprème. L'efïet de cette musique imposante fut tel, que le peuple put k peine contenir jusqu'k la fin son enthousiasme. Puis vint le tour des strophes de Chénier, destinées également k être chantées par des milliers de voix. La première était celle des vieillards et des adolescents sur ces paroles Dieu puissantd'un peuple intrépide C'est toi qui defends les remparls. Celle des femmes était congue ainsi Entends les vierges et les mères Auteur de la fécondité. Les hommes et les femmes reprenaient ensuite Guerriers offrez votre courage Jeunes fdles, offrez des fleurs. L'air choisi pour ces paroles par Gossec était l'hymne des Marseillais sur lequel il avait mis une harmonie remarquable par son élégance et sa vigueur. Des trompettes placées sur le haut d'une colonne élevée au pied de la montagne, don- nèient le ton au commencement dechaque strophe et indiquèrent le moment oü cin- quante mille voix k l'unisson devaient chan ter le refrain Avant de déposer nos glaives triomphants, Jurons d'anèantir le crime et les tyrans. On voit par ce qui précède, que cette harmonie saisissante, véritablement empoig- nante de l'air national frangais la Marseil laise et que tout musicien admire k bon droit, est une oeuvre de Gossec, le grand artiste beige du siècle dernier. Aucun compositeur ue jouit en France, pendant la période révolutionnaire d'une renommée pareille k la sienne. Gretry, lui éiait term k l'écart quand le calme revint, l'Institut de musique fut érigé en conserva toire sur la preposition de Chénier, inspiré évidemment par son ami Gossec. Ce dernier en fut nommé inspecteur avec Méhul et Cherubini. II occupa la chaire de composi tion, convaincu qu'il pouvait par lk rendre service aux jeunes, en les guidantdans les rudes sentiers de la science qu'il avait gravis sans aide jadis. 11 remplit ces forictions jus- qu'en 1814; alors agé de 81 ans il sentit le besoin de la retraite. Lors de la création de l'institut, sur les trois membres nommés pour former la classe de musique, il y eut deux artistes beiges, Gossec et Grétry. Quand Napoléon fonda l'ordre de la légion d'honneur, ces deux compositeurs furent du petit nombre de ceux auxquels l'Empereur accorda la décoration. De même que Gretry, Gossec alia finir en paix k la campagne le reste des jours nombreux qu'il plut k la Providence de lui accorder. Le 16 Février 1829, il s'éteignit doucement k Passy. Gossec est un exemple remarquable de ce que peuvent produire le travail et l'étude. Filsd'un laboureur, dénué des avantages de la fortune et du secours des maitres, il s'est formé seul, et s'est acheminé seul et sans appui presque, tragant même la voie par son exemple et ses doctes legons, aux générations suivantes, car on peut l'appeler le père et le créateur de l'école frangaise si puissante aujourd'hui, vers une route pure et classique, dont il était détourné par tout ce qui l'entourait, par la routine et les idéés raesquines de son époque. Placé dans une école imbue des préjugés les plus nuisi- bles, il a su se préserver de ses erreurs et a jeté les bases de la splendeur oü la composi tion musicale francaise est arrivée de nos jours. Comme nos lecteurs musiciens ontvu par sa vie, que j'ai décrite un peu trop longue- ment peut être, et dans ce cas, je les prie de mepardonner, eu égard au bijt que j'ai poursuivide réparer autant qu'il était en mon pouvoir, l'injuste ignorance dans la- quelle on a laissé le nom et l'histoire d'une des plus grandes gloires musicales com me nos lecteurs l'ont vu, dis je, Gossec est bien, ainsi que je l'écrivais en comroerigant, le plus puissant génie auquel la Belgique ait donné le jour avant l'époque acluelle. Remi Fasol. (d continuer) M. TOMS, pharmacien chimiste, 104, rue de la Loi, Bruxelles. Je suis réellement enchanté du résultat quemedorine votreexcellentBaurne Pectoral. Al la fleur de l'age je me voyais aban- donné, car aucun remède ne produisait d'effetaujourd'hui, je puis, grace k vous,

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1898 | | pagina 2