Samedi 29 Octobre 1898.
10 centimes ie IV0,
S38 Année. N° 3387
m
FRANCE
La révision en cassation
Le complot
Angleterre
Le bétail hollandais
Bruges Port de Mer
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La crise ministérielle en France n'a pas
encore de solution et n'eti aura qu'après le
prononcé de l'arrêt de la cour de cassation
dans l'affaire Dreyfus.
Cette circonstance n'empêche pas cepen-
dant l'éclosion de toutes sortes de combinai-
sons e est ainsi que Ton donne un certain
succès a une liste ministérielle donl voici les
noms principaux MM. Dupuy, président du
conseilDelcassé, affaires étrangères
Ribot, finances Bourgeois, instruction pu
blique Gonstans, justice. M. Leygues par
ticiperait la combinaison.
Ajoutons cependant que, dans les milieux
politiques, on dit que M. F. Faure ne tient
pas k avoir un cabinet Dupuy, bien que
celui-ci ait été désigné comme pouvant for
mer un ministère de concentration ayant
quelque chance de vie.
Dans tous les cas, les pourparlers conti-
nuent et on conpoit qu'ils soient laborieux,
étant donné le caractère hétéroclite de la
majorité qui a renversé le cabinet Brisson
et qui ne peut fournir les éléments d'un
gouvernement.
G'est hier qu'k commencé devant la cour
de cassation l'examen de cette obsédante
affaire. Toute l'audience a été consacrée k la
lecture du rapport de M. Bard, qui a fait
l'historique de la question et rappelé les di-
verses teutatives faites pour la revision du
procés.
Mm' Dreyfus soutient que le bordereau
n'est pas de son mari.
Examinant le rapport des experts, M.
Bard dit que le faux du colonel Henry ne
saurait être un prétexte k revision, raais
c'esl sa deposition qui a été surtout acca-
blante pour Dreyfus.
M. Bard dn que la Cour de cassation est
saisie régulièrement et qu'elle devra voir si
elle peut se prononcer pour une enquête sup-
plémentaire.
M. Bard donne lecture du rapport du colo
nel du Paty de Clam sur l'arrestation de
Dreyfus par M. Goehefert, chef de laSureté.
II insiste sur les interrogatoires que du
Paty de Glam fit subir k Dreyfus et sur les
lettres qu'il dicta k celui-ci
Dreyfus a toujours protesté de son inno
cence.
Après une suspension d'audience, M. Bard
passe k la question des avr ux attribués h
Dreyfus.
II s'oecupe tout particulièrement de la dé-
position du capitaine Lebrun-Renault, dépo-
sition faite trois ans après l'événemeat.
Dreyfus s'est reconnu coupable d' amor-
t?age et non de trahisorj.
Le rapporteur aborée ensuite l'affaire du
petit bleu tombé aux mains du colonel
Picquart et ne veut pas l'examiner, Picquart
étant poursuivi.
Après seire occupé encore des documents
saisis par M. Berthulus cbez Esterbazy, M.
Bard proteste contre la non communication
k l'accusé des documents qui l'ont fait con-
damner.
II y a eu, dit-il, l'emploi d'un procédé qui
ne saurait être assez i éprouvé et qui consti-
tue une violation flagrante du droit public
franpais de 1789.
Gependant le ministre de la guerre inter-
rogé par le ministre de la justice, lui écri-
vait le 11 Septembre dernierJ'ai l'hon-
neur de vous faire connaftre qu'il n'y a pas
trace au ministère de la guerre de la com
munication d'un dossier secret aux membres
du conseil do guerre de 4894. Le lieutenant-
colonel Picquart ayant éié invité k préciser
par le ministre de la justice, a indiqué quel-
les étaient toutes les personnes au ministère
de la guerre qui avaient eu connaissance de
cette communication.
II ne sait pas d'ailleurs, mais c'est un
point k élucider auprès des membres du
conseil de guerre, par qui le pli contenant le
dossier secret k été apporté. Lui même a ap-
porté plusieurs plis et il ne saurait- dire le-
quel des ces plis contenait le dossier.
La lecture du rapport de M. Bard a été
interrompue k ce moment
L'audience k été levée, il était 5 h. 4/2.
La presse parisienne.
Les journaux qui ont fait campagne en fa
veur de Dreyfus triomphent ce matin Ven-
dredi et portent, en mancbette des titres dans
le genre de celui-ci Le triomphe de la
vérité, Dreyfus innocent.
D'autre part, certains journaux comme
Vlntransigeanl traitent M. Bard de roenteur»;
ils assurent que jamais le colonel Henry n'a
avoué avoir remis iui-même le bordereau au
général Gonse.
L'Agenee Havas dit que dans les cercles
politiques on estmne que la cour de cassation
ne prononcera ni la revision avec enquête
ni l'annulation, ces deux procédures devant
entrainer des conséquences sur lesquelles il
n'est pas besoin d'insister.
Pour les éviter, la cour de cassation déci-
derait que, dans les conditions oü la cause
se présente, il n'y a pas de crime de tfabison
et que par suite la condanination prononcée
contre Dreyfus ne peut pas subsister.
La conspiration des généraux imagi-
née par la presse dreyfusarde pour affoler
l'opinion publique en France, ayant obtenu
un immense succès d'incrédulilé gognenar-
de, les organes du syndicat sont bien forcés
de recourir k une autre invention, destinée
k atteindre le même but.
Telle est sans doute l'explication d'une
stupéfiante correspondance romaine, publiée
hier par l'Indépendance beige,ei dans laquelle
le Vatican est dénoncé comme le foyer d'un
vaste complot monarchico-clérical dont Son
Eminence le cardinal Rampolla, ministre
d'Etat de S. S. Léon XIII, serait le chef.
Le libretto de la pièce est conforme k tou
tes les régies de l'art mélodramatique. Bien
entendu, les jésuites sont de l'affaire. M. le
lieutenant-colonel du Paty de Clam, particu
lièrement en butte k la haine des dreyfu-
sards, est chargé d'un des principaux róles.
On nous le montre se rendant secrètement k
Rome, pour préparer le coup décisif. Natu-
rellement aussi, une dame mystérieuse appa-
rait dans le complot, etc., etc.
Nous ne ferons pas k cette salade romaine
l'honneur de la secouer. L'invraisemblance
du récit forgé par le correspondant de l'Indé
pendance saute aux yeux.
II est acquis, en eftet, qu'k l'époque oü la
presse dreyfusarde annonpait la fuite de M.
du Paty de Glam et son passage a Rome, cet
officier se trouvait a Brest avec son jeune
fils, qui venait s'y engager dans la marine
franpaise.
Bien plus, on ne nous dit pas au profit de
quelle monarchie, napoléonienne ou orléa-
niste, se tramerait l'initrigue ourdie au Vati
can, et personne n'ignore que la politique
pontificale en France, loin d'être favorable k
une restauration monarchique quelconque,
pousse, au contraire, au ralliement k la Ré-
publique.
Mais qu'important aux condottieri de plume
de la presse maponnique les invraisemblan-
ces et les impossibilités Ils ont une confian-
ce absolue dans la crédulité de la badauderie
anticléricale et, pour susciter des préven-
tions et des haines contre l'Eglise, toutes les
armes leur sont bonnes.
L'Indépendance a voulu, sans doute, par-
ticiper, dans la mesure de ses forces, k la
campagne anticatholique dont l'affaire Drey
fus n'a jamais été que le prétexte et dont M.
Brisson devait être le général en chef.
Malheureusement pour ce journal, le ca
binet Brisson est tombé, on sait de quelle peu
glorieuse fapon, le jour même oü partait de
Rome l'abracadabrante correspondance qui
devait dénoncer k la France et k l'Europe le
terrible complot.—On ne manque pas mieux
son coup. Besogne inutile Besogne perdue
Entrée triomphale
Douvres, 27 Octobre.
Le sirdar Kitchener est arrivé, cet après-
midi, k 2 h. 4/4, k Douvres. II a été repu
par le maire de la ville et une députation
d'autorités. Après un lunch offert dans le
grand hall de l'Hótel de Ville, le sirdar est
parti, k 5 heures, pour Londres, oü il a été
repu par lord Salisbury.
Une foule immense a collaboré avec
enthousiasme k cette rentrée triomphale.
Les Hollandais commencent k s'aper-
cevoir eux -mêmes que la grande fraude
pratiquée sur la frontière est nuisible
aux intérits de l'agriculture et du
commerce de la Hollande. Voici, a ce
sujet, une correspondance de ce pays:
Malgré l'ouverture, k certains jours déter-
minés et sous certaines conditions, de la
frontière beige 4u bétail hollandais, la fraude
continue k être pratiquée sur une grande é-
chelle. La conséquence en est, écrit on de
Zuiddorpe au Vlissengsche Courant, que la
mesure ne profite guère ni au petit cultiva-
teur ni au petit marchani de bétail beige
de lk uue recrudescence de la fraude, qui
introduit nous en fümes témoins le
bétail en Belgique par troupeaux de douze k
quinze têtes.
Le même journal ajoute La levée de Ia
prohibition d'introduire des vaches laitières
en Belgique, est uniquement k l'avantage des
grands marchands de bétail, qui importent
le bétail hollandais k faire déborder leurs
étableset puis, arrivé k ce point, on ne
manquera de découvrir, que l'une ou l'autre
béte, venue de Hollande, est atteinte de sto-
matite aphteusequi rógne actuellement en
Belgique— et naturellement alors la
frontière sera de nouveau fermée.
Et voilk pourquoi se perpétue la fraude
qui, elle, dispense au moins l'importateur de
la quarantaine de 10 jours qui lui est impo-
sée' et des frais afférants.
Tout est bien qui fluit bien.
Voici ce qu'e'crit la Patrie, et nous
la croyons bien informée
M. le Ministre des finances a adhéré par
écrit k toutes les clauses de la convention k
intervenir entre la ville de Bruges et le gou
vernement relativement aux installations
maritimes, aux extensions de territoire, au
déplacement de la gare, k l'aménagement des
remparts et généralement k tous les points
débattus depuis plus d'un an.
La convention sera soumise k l'approba-
tion du conseil communal en séance publique
demain Samedi.
Cette assemblée se prononcera probable-
ment sur-le-champ, attendu que toutes les
clauses du contrat ont déjk été discutées en
séance k huis-clos et qu'elles ont été portées
k la connaissance du public par la voie de la
presse locale et du dehors.
II est évident que si Bruges approu-
ve la convention et que le gouverne-