Mercredi 31 Mai 1899 10 centimes ie N°. 34" Annêe. N° 3447
arth:
dehajsr
REVUE POLITIQUE
L'affaire Dreyfus
Autriche-Hongrie
Angleterre
Russie
Saint-Siège
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Paris, 30 Mai.
Malgré les mesures sévères arrètées
pour empécher l'affluenee du public,
la salie de la Cour de cassation, dont
les portes s'ouvrent, a 41 h. 30, est
bientöt, envahie par une foule com
pacte, Beaucoup d'officiers en bour
geois dans le public, mais pas un
uniforme, par ordre du ministère de
la guerre.
L'audience solennelle de la Cour
toutes chambres réunies est ouverte
a midi cinq minutes. M. Mazeau
préside.
M. le procureur général Manau
occupe le siè^e du ministère public.
Aussitót la Cour réunie, la parole
est donnée aM. Ballot-Beaupré pour
la lecture de son rapport sur l'enqué-
te ordonnée il y a trois mois par la
chambre criminelle de la Cour.
M. Ballot Beaupré rappelle les pour-
suites de 1894. 11 lit le bordereau et
les notes élogieuses pour Dreyfus
fournies pendant son passage a l'école
de guerre et pendant son stage a
rétat-major.
11 passé ensuite en revue les rap
ports contradictoires des experts, a
la suite desquels le général Mercier
désigna le lieutenant colonnel du
Paty de Clam pour insi-ruire l'affaire.
Le rapport mentionneles protestations
d'innocence de Dreyfus.
Le rapporteur passé ensuite aux
interrogatoires de Dreyfus par du
Paty. D'après ces interrogatoires,
Dreyfus a toujours présisté a nier.
Le rapporteur expose ensuite la
scène de la dictéc au ministère.
II lit le rapport d'Ormescheville
devant le conseil de guerre contre
lequel Dreyfus a opposé des dénéga-
tions absolues et a protesté de son
innocence.
Le rapport fait ressortir les pre
miers soupQons sur Dreyfus qui éma-
nèrent du colonel Fabier qui fut frap
pé de la similitude du mot artille
rie dans le bordereau avec un
feuillet écrit par Dreyfus. Le rapport
rend compte d'une conservation
d'Henry avec Dreyfus pendant son
transfert au Cherche-Midi, au sujet
d'accusations terribles portées contre
lui.
II affirmaa Henry que s'il avait eu
beaucoup de documents en main, il
n'avait jamais rien livré a personne.
Après la lecture du rapport d'Or
mescheville, le rapporteur dit que la
condamnation est irrévocable en
principe, mais que le code ^instruc
tion criminelle permet d'attaquer la
chose jugée et de faire bénéficier le
condamné de l'annulation ou de ia
révision. L'annulatiop est possible
quand l'arrètest rendu contrairement
a la loi. La révision suppose une
erreur judiciaire. II faut écarter l'an
nulation paree que le garde des
sceaux a seul qualité pour la réela-
mer et paree que les chambres réu
nies seraient incompétentes II s'agit
uniquement de la révision. 11 cite de
nombreux articles de la loi a l'appui
de sa thèse. C'est a vous, toutes cham
bres réunies, qu'il appartient de ré-
soudre la question, restée entière, de
savoir si la demande est recevable
dans la forme et est également rece
vable au fond.II examine longuement
cette question au point de vue juri-
dique.
M. Ballot-Beaupré examine ensuite
la question de droit, dans l'hypothèse
oü la demande est déclarée receva
ble en la forme et au fond. II cite la
requête de Mrae Dreyfus et la lettre du
mmistre de la justice saisissant la
Cour de Cassation en alléguant des
faits nouveaux.
M. Ballot-Beaupré, après avoir lon
guement examiné Ia question de la
recevabilité au point de vue juri
dique, parle de l'illégalité dont serait
entachée la décision du conseil de
guerre, par suite de la communica
tion de pièces secrètes.non communi
qués a la défense.
II expose ensuite, en détail, le mé-
moire de M. Mernard qui articule
que la révision doit être accordée
pour vice de témoignage d'Henry et
de du Paty, quoique ces officiers
n'aient pas été poursuivis pour faux
témoignage.
L'audience est levée a 6 h. sans
incident.
Un grand meeting catholique, qui
s'est tenu au grand cMusikverein-
saai» de Vienne,aadopté uneréso-
lution dans laqueile les assistants
protestent contre le jeu criminel
auquel se livrent certains agitateurs
avec les biens les plus précieux de
l'humanité, sans égard pour les
liens sacrés de la familie, de la foi et
de la patrie; contre les injures diri-
gées en Autriche et a l'étranger a
l'adresse de l'Eglise catholique, de
son chef et de ses institutions; contre
les tentatives de gens sans patrie pour
ébranler l'amour de la patrie de-
mandent la révision des lois qui ont
restreint les droits de la majorité ca
tholique de l'Autriche en faveur des
minorités; proclament leur attache-
ment inébranlable au Pape, a l'épis-
copatet au clergé, et jurent fldélité
a l'Empereur, a la dynastie et a la
patrie autrichienne.
Agitation religieuse
en Angleterre
Londres, 29 Mai,
Les ritualistes et les antiritualistes
se sont battus a coups de pierre ei a
coups decanne dans une rue de Bel
fast. Un grand nombre de devantures
de magasins ont été brisées
A Peckhalm-Hall.dans un des quar
ters de Londres, les protestants ont
attaqué une procesion catholique.
Des coups de poing et des coups de
canne ont été échangés.
Les catholiques se sont vigoureu-
semsnt défendus.
L'agitation révolutionuaire eu Rus
sie ne s'apaise pasla police de St-Pé-
tersbourg a arrêté dans plusieurs
fabriques la distribution de manifes-
tes révolutionnaires.
Une grande fermentation règne
parmi les ouvriers; le gouvernement
est disposé a prendre des mesures
énergiques pour éviter que des trou
bles se produisent.
L' Augsburger Postzeitung vient de
publier un important article intitule
l'Italie et le Saint-Siège dans le
quel ce journal met en lumière, pour
les contemporains et pour i'Histoire,
les trois faits désormais incoutestables
que voici
4° Le Saint-Siége n'a pas fait la
moindre démarche pour être invité a
la Conférence; il a toujours gardé le
calme digne de celui qui a pleinement
conscience de ses droits, de ses privi-
lèges
2® Le gouvernement russe a mani
festé a plusieurs reprises le désir de
faire inviter le Pape. C'est un fait
connu parfaitement dans les sphères
étrangères au Vatican
3* Le soupQon relatif a un appui
qui aurait été donné k I Itariie par la
chancellerie impériale de Berlin en
vue d'exclure le Pape de la Conféren
ce, s'est dissipé, et le gouvernement
italien reste seul responsable de ce qui
s'est passé.
Ce dernier point il est aisé de le
comprendre intéressait tout parti-
culièrement les catholiques ailemands.
L Augsburger Postzeitung menlionne
une note officieuse publiée sur ce su
jet par VAlgemeine Zeitung de Munich,
note qui avait tout spécialement pour
objet de tranquilliser les catholiques
bavarois.
En ce qui regarde l'Autricbe-Hon-
grie, on n'admet pas même le soup
Qon le plus lointain que cette Puissan
ce, par un excès de complaisanee sur
la base de le Triple Alliance, ait favo-
risé d'une manière quelconque la po
litique antipapale du gouvernement
italien. Les conventions de la Triple
Alliance n'obligent certainement pas
a se plier avec avec servilité aux ca
prices de l'un des contractants, sur-
tout dans des matières qui ne sont pas
indifférentes pour les autres nations et
pour la politique générale.
Augsburger Postzeitung conclut
ainsi son article
Le Czar s'est senti offenséle gou
vernement russe a ressenti une im
pression pénible, et il est certes assez
puissant pour infliger une lecon a qui
lui a déplu. II le fera peut-être bien-
tót en Chine sans compter que d'au-
tres Etats ont vu de mauvais ceil Tex-
clusion du Pape. Le succès de la Con
férence pour la paix est déja problé-
matique en lui-même, et l'Italie, par
ses bizarres prétentions, l'a encore
compromis, méritant ainsi le blême
sévère de toutes les personnes intelli-
géntes, de tous les gens de bien. Qu'y
a-t-elle gagné C'est que le monde
entier est amené, par Taction incohe
rente et discourtoise de la Consulta,
A