E
Mercredi 7 Juin 1899
10 centimes Ie N°.
34fl Année. N0 8449
France
La cession des Carolines
La Conférence de la Paix
Au Transvaal
Le projet de loi électorale
en Section centrale
Duperie
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L'arrêt de la Cour de Cassation
Noslecteurs se rappelleront qu'après
l'arrestation et le suicide d'Henry, le
Journal d'Ypres a écrit que la revi
sion du procés Dreyfus s'imposait,
même dans l'hypothèse oü Ie condam-
né était coupable. Nous avons dit les
raisons de cette appreciation.
L'arrêt, que la Cour a rendu Samedi
et qui casse etannule la condamnation
de Dreyfus, ne nous étonne done pas.
La Cour se base d'abord sur ce que
la pièce secrète «cette canaille de D...»
avait été communiquée au eonseil de
guerre et, visaut Dreyfus, a pu pro-
duire de l'impression sur les juges
ensuite sur ce que le eonseil de guerre
a ignore que le papier du borde
reau et eelui de la letlre du 17 Aoüt
4894 présentaient la plus graude si
militude. Or la lettre du 17 Aoüt 1894
émane d'un autre officier que Dreyfus.
La Cour estinae que les propos te-
nus par Dreyfus le 5 Janvier 1895
devant le capitaine Lebrun-Renault
ne sont pas de nature a écarter les
conditions exigées par la loi pour qu'il
y ait lieu a revision, parce que.comrne
certains autres faits, ils sont posté
rieurs au jugement.
Cet arrêt nous semble bien rendu
en fait et en droit. L'affaire est ren-
voyée devant le conseil de guerre de
Rennes.
Dreyfus sera done jugé par ses
airs et cette fois, espérons-le, régu-
ièrement. Mais si le conseil de guerre
n'est pas saisi de nouvelles preuves
que celles résultants des pièces ci-des-
sus, il est a présumer que Dreyfus
sera acquitté.
Juif ou chrétien, Dreyfus a le droit
d'être jugé avec impartialité. S'il est
coupable, il doit être puni, s'il est in
nocent, son innocence doit être pro-
clamée bien haut et le chütiment ré
servé a ceux qui lont fait condamner
innocemment en 1894, s'il est établi
qu'ils ont agi de mauvaisefoi oh même
par imprudence ou négligence.
M. Dupuy, président du conseil en
1894 et qui occupe les mêmes func
tions aujourd'hui, pourrail bien sup
porter, avec le général Mercier, alors
ministre de la guerre, une partie des
respousabilités.
Qui vivra verra.
Les événements de France préoc-
cupent beaucoup les esprits.
Après l'aigarade d'Auteuil, le con
seil des ministres s'est réuni et les me-
sures qu'il a prises semblent faire ad-
mettre qu'il va user de représailles.
C'est sur des officiers supérieurs, plus
ou moins engagés daus l'affaire Drey
fus, que MM. Dupuy et Krantz dé-
chargent leur colère. Ce quine servira
qua jeter de l'huile sur le feu.
Zola est rentré Paris, vingt jours
avant que Dreyfus ne rentre en
France.
Tout cela fait présager une série de
journées trés chaudes.
La séance de Lundi, au Palais Bour-
bon, a été l echo des émotions de la
veille. Un député a encouru la censure
avec expulsiou. Et les radicaux, apeu-
rés, ont invité le gouvernement a
prendre des mesures énergiques con-
tre les «ennemis de ia République
Un peut déja s'attendre a voir ceux
qui ont été arrêtés Dirpapche soumis
a une longue détention préventive.
La Chambre a voté l'ajournement
des poursuites contre le général Mer
cier, en dépit des efforts de la gauche
socialiste pour les obtenir sur l'heure.
Elle a voté aussi l'affichage de l'arrêt
de la Cour de cassation dans l'affaire
Dreyfus.
Le discours du tróne, a Couverture
des Cortès espagnoles, rappelle les
douleurs, et les maux de la patrie,
dont il faut tirer expérience. Mais le
recueillement et le silence sont préfé-
rables aux plaintes. La Régente dit
qua la suite de vives difficultés parle-
meutaires et de changements minis-
tériels, elle a ratifié le traité de paix
selon Partiele 54 de la Constitution.
Le gouvernement antérieur a estimé
qu'il ne convenait pas de garder les
Carolines, les Palaos et le reste des
Mariannes. II a signé avec l'empereur
d'Allemagne une convention cédant
ces territoires.
Le projet sera soumis immédiate-
ineut aux Cortès.
Voila une nouvelle sensationnelle
qui certainement préoccupera vive-
ment les chancelleries. II y a quelques
mois, immédiatement après la guerre,
il avait, en effet, été question de pour
parlers entre l'AHemagne el l'Espagne
au sujet de la cession des Carolines
mais aucune confirmation officielle
u etant venue mettre cette question en
évidence, on n'y avait pas attaché une
extréme importance.
11 est évident que Cespagne, ruinée,
affaiblie, a tout intérêt a se défaire de
ce qui lui reste de colonies qui si pen
importantes soient-elles, nécessitent
des dépenses extraordinaires. L'AHe
magne, d'autre part, s'efforce depuis
plusieurs années d'acquérir un empire
colonial. Toute la politique allemande,
a l'beure actuelle, eonsiste a favoriser
l'expensioii coloniale qui, seule, peut
mettre l'Allemague sur un pied d ega-
lité absolue avec 1 Angleterre et la
France au point de vuede l'influence
extérieure. Cette vente des colonies
espagnoles est done logique.
La commission de l'arbitrage conti
nue la discussioji des projets russe et
anglais. 11 y a aussi un projet italien
mais ce n'estguère qu'un amendement
au projet russe. Ce dernier prévoit le
cas oü deux puissances s'engageront a
recojirir a l'arbitrage pour un cas
particulier ou l'ensemble de leurs
contestations possibles mais elles
choisiront des arbitres selon certaiues
régies édictées par le projet. Au con
traire, le projet anglais prévoit la
eréation d'un tribunal permanent
d'arbitrage ayant un bureau central
permanent qui conservera Torgani-
sation nécessaire pour que le tribunal
puisse se réunir dès qu'un litige se
produira entre des puissances ayant
contribué a ia constitution de ce tri
bunal. Chacune de ces puissances dé-
signera deux membres. On voit qu'il
n'y a pas de divergence essentielle
entre ces deux projets, celui des An
glais donnant un caractère plus pra
tique et plus réalisable aux principes
mis en avant par la Russie.
L'entrevue anglo-transvalienne
de Bloemfontein
On a fait courir veridredi des bruits alar-
mants sur la situation de l'Afrique du Sud.
On disait que pour appuyer d une force ma-
térielle l'autorité de son négociateur k la
conférence de Bloemfontein, l'Angleterre
avait ordonné une mobilisation de ses forces
dans la colonie du cap. Cette nouvelle a été
démentie. Aussi bien, comme des mouve-
ments de troupes considérables ne peuvent
pas passer inaperpus, si de tels mouvements
avaient eu lieu, on les aurait constatés sur
place. Or, aucune dépêche venant de l'Afri
que du Sud ne les a signalés.
La nouvelle de cette mobilisation a été
lancée seulement en Europe. 11 convierit
d'ajouter que l'Angleterre, si elle voulait agir
par la force, en ce moment, sur le Transvaal,
ne le pourrait pas. Elle n'a pas plus de dix
mille soldats dans le Sud-Afrique, et une
campagne contre le transvaal demanderait
au moins trente mille hommes.
L'annonce des préparatifs belliqueux de
l'Angleterre a eu pour contre-partie toute
naturelle la publication des moyens de défense
dont le Transvaal pourrait disposer. On a
écrit que quarante mille Afrikaanders venaient
d'offrir burs fusils h M. Krüger. Con me ces
quarante mille volontaires, s'ils existent,
sont éparpillés sur une étendue trois fois
grande comme celle de la France, comme
ils ne se sont pas réunis, comme ils ne se
sont pas concertés, ils n'ont pu rien offrir du
tout h M. Krüger et ilsseraient sans doute
bien étonnés d'apprendre que des nouvel-
lis.tes d'Europe ont si délibérément disposé
de leurs carabines.
Ces rumeurs contradictoires et tendan-
cieuses doivent être mises au panier des
fausses nouvelles. II n'y a qu'une chose de
positive, c'est que M. Krüger est en conver
sation dppuis vendredi avec sir Alfred Milner,
le haut commissaire britannique, et que l'ac-
ceptation par M. Krüger d'une telle entrevue
est une faute.
En effet, ou bien M. Krüger ne fera pas
plus de réformes après la conférence qu'il
n'a voulu en faire avant, el les impérialistes
anglais ne manqueront pas de dire Vous
voyez que le Transvaal est incorrigible.
Toute tentative de conciliation échoue. 11
n'y a rien h attendre que de la force. Ou
bien M. Krüger fera après les réformes qu'il
a refusées avant et il n'en aura pas le béné-
fice moral. On croira qu'il a cédé h la pres-
sion de l'agent britannique. C'est celui-ci qui
sera remercié.
C'est done une démarche dangereuse, quoi
qu'il ai^iye, qu'ou a fait faire h M. Krüger
eu l'envoyant h Bloemfontein. Les amis sin-
cères que le Transvaal compte en Europe
auront sans doute h en déplorer les résultats.
La section centrale a terminé Samedi ma-
tin sou examen du projet de loi électorale du
gouvernement.
La discussion générale a été reprise sur
les amendements de M. De Trooz, qui ont
été adoptés dans leur ensemble par 4 voix
(MM. Bilaut, Tack, Srioy et De Trooz) contr e
3 (MM. Woeste, Vandervelde et Helleputte).
La section a adppté ensuite par les mêmes
votes et sans longue discussion les autres ar
ticles du projet de loi.
(Dédié au Progrès)
Nous dédions au Progrès et h messieurs
les libéraux d'Ypres qui put voté le S. U. et
la R. P., l'article suivant que nouseraprun-
tons h La Liberté, une ancienne amie du
Journal doctrinaire yprois.
Sous peine de voir avorter leur campagne
contre le projetgouvernemental, les partis d'op-
position auraient dü se borner a combattre la
proposition gouvernementale. C'était l'occasion
ou jamais de mettre decóté ses aspirations parti-
culières, en vue d'unir ses efforts pour faire
échec au gouvernement.
i L'action protestataire, la résistance pour
être efficace et puissante, eut dü être une et elle