Les manages d'inclinaison
Sainte Cécile
a un chroniqueur parisien la faritaisie
qu'on va lire
personnages. Mme Dublanc M. Dublanc
Catherine, cuisinière Un domestique
M. Dublanc en'runt furieux). Bon-
jour
Mme Dublanc lout en écrivanl). Bon-
jour bonjour!... Une seconde et je suis
h toi.
M. Dublanc. II ne s'agit pas d'une se
conde ni même d'un quart de seconde... II
s'agit que ma maison n'est plus tenable, que
je deviens fou et que, si cela doit durer en
core longtemps comme 5a...
Mme Dublanc. Ob mon cber ami, si iu
éprouves le besoin de crier... va crier ail-
leurs, je t'en supplie! J'ai du travail par
dessus la tête
M. Dublanc. Et moi je te prie de m'é-
couter. Ah! ca. est ce que cette vie ne va
pas bieniót cesser Crois-tu que je me suis
marié pour m'occuperdu ménage?... On me
présente maintenant le livre de la blanchis-
seuse... eest une plaisanterie Madame part
h neuf heures du matin, déjeune au Palais,
rentre h sept heures, s'enferrne et dine lors-
que les autres se couchent.
Mra0 Dublanc. De quoi as-tu h te plairi-
dre
M. Dublanc. Ah! non, ga, e'est le bou
quet De quoi Mais de toutDepuis que
la loi a été votée, depuis que tu es avocate
pour de bon, mon foyer est devenu un en-
fer... Ce matin j'ai failli être empoisonné,
ni plus ni moins.
Mrae Dnblanc. Par quoi par quoi
M. Dublanc. Par Catherine, parbleu
Par qui veux tu que ce soit? Elle me donne
de la viande dure comme du cheval, de la
salade qui empesie l'huile de lampe, bref...
M*'e Dublanc. Je vais la questionner.
Elle sonne).
M. Dublanc. Mais non, flanque-Ia h la
porte
M"19 Dublanc. Pas avant de l'avoir en-
tendue. {Au domestique). Faites entrer l'ac-
cu... Catherine.
Le domestique s'inclinantBien mai-
tsf.
M. Dublanc {cassant une poliche). Non,.,
non... ce n'est pas une existence
Mme Dublanc (froidement)Un peu de
silence, n'est-ce pas
Catherine. Le maitre rn'a fait deman-
der
M. Dublanc {en se promenant de long en
large, comme un fou). Ah malheur...
de malheur, va
M'"e Dublanc. Asseyez vous, Catherine.
Gather ine. Madame est bien aimable.
M. Dublanc. Ahga
Mrae Dublanc {après un silence). Cathe
rine Dubois a quarante-trois ans.
Catherine. Quarante-deux...
Mme Dublanc {furieusc). Mais taisez-
vous doneJe vous défends,triple sotte
Catherine {consternée). Ah
M. Dublanc{s'asseyant el les den's serrées).
C'est un peu violent
Mme Dublanc. Catherine Dubois a qua
rante-trois ans... Née en Champagne...
ah;! la Champagne, messieurs! ...elie
resta auprès de son père et de sa mère, de
braves paysans, jusqu'è» sa majorilé. Tendre,
afïeeiueuse, toujours prête h faire le bien, on
l'avait sumommée la Petite Sainte Or,
un beau matin, Catherine fit son paquet, prit
son parapluie rouge et quitta les vieux
quelle ne devait jamais revoir, hélas!
peur aller h Paris
M. Dublanc.Est-ce que cette plaisan
terie va durer longtemps
Mrae Dublanc. Elle débarqua... Que
faire? caller? it qui demander de la be
sogne? Telles furent les questions que cette
brave et honnête fille se posa dès qu'elle se
trouva sur le pavé parisien. Oui, honnête, je
le répète... et c'est ici que j'appelle toute
votre attention...
M. Dublanc. Eh bien! tu ne man-
ques pas de toupet, toi
Mrae Dublanc {sans se démonter). Elle
se présente dans des bureaux de placement.
On lui fit vjir la porte sous prétexte qu'elle
avail l'air ti©p gauche. Vous sentez le foin,
lui disait on,retournez dans vos campagnes.
Elle ne le fit pas. Elle n'eut pas le courage
d'écrireaux vieux qu'elle avait besoin d'eux,
qu'elle avait eu tort de les quitter pour ga
ll gner sa vie... Elle pria, supplia, et creva la
misère. Malgré tout, Catherine Dubois est
toujours restée une fille orgueilleuse etfière.
M. Dublanc (a mi-voix). Ah! ces co-
chons de sénateurs
M'°6 Dublanc. Or, tandis que Catheiine
pleurait h Paris... le père se mourait en
Champagne...
M. Dublanc {hors de lui). Et moi, je
meurs de faim, tonnerre de nom d'une pipe
II est buit heures
Mme Dublanc. Le père se mourait, dis-
je, et cela sans avoir la joie d'embrasser son
enfant avant de prendre le grand express
qui vous transporte sans accident de la T( rre
au Paradis...
Catherine {leslarmes auxyeux\ C'est-i'
Dieu possible?
M"e Dublanc. Catherine était alors uue
belle personne...
M. Dublanc. Comme je dirais un gros
mot si je ne me retenais pas
M"9 Dublanc. grasse, fraiche, allé-
chante... bref, elle respirait la santé. Un
homme survint... Vous entendez? Un
homme «Je serai ton maris'écria-
t-il.Catherine se contenta de hausser ses
larges épaules et répondit simplement Je
veux être cuisinière. Ah messieurs, je
vous en conjure, retenez bien ces mots, ces
mots exquis, naïfs et touchants la fois
Je veux être cuisinière Cette phrase
ne vous indique t elle pas clairement quelle
hme charmante est Catherine
Catherine sanglotantMad... mad...
amo
Mme Dublanc. Ne pleurez pas et relevcz
la tête!... «Catherine est une empoison-
neuse a dit le témoin h charge. Cathe
rine fait la salade avec de l'huile de lampe»,
a t il ajouté... Laissez moi rire, messieuis
Et cependarit non... car je me révolte et je
vous crie, et cela de toutes mes forces
Catherine n'est pas coupabie Catherine est
incapable d'exercer la moindre vengeance
sur qui que ce soitCatherine est une femme
decoeur! Catherine ne méritait pas d'être
assise sur le banc d'infamie Empoisson-
neuse Allons done C'est faux! Et cela,
je le jure sur Christ qui me regarde... et qui
regarde Catherine J'ai fini, messieurs
Justice Acquirement pur et simple, voilé
ce que j'attends de vous...
Catherine {la tête dans les mains).
Misère... de... misère
M. Dublanc {quis'était contenu). Fichez-
moi le camp dans votre cuisine Fichez-
moilecamp! je sens que je vais faire un
malheur Catherine sort en titubant.)
Quant toi, écoute bien ce que je vais te
dire La première fois que tu me tourneras
en ridicule devant nos domestiques, je bou-
clerai mes malles et j'irai habiter i'hótel
J'en ai assez j en ai assez j'en ai-as-sez
Assez de ta toge et de ta toque assez d'avoir
une femme déguisée en homme Au lieu de
défendre les pauvres bougres, défends mes
intérê's Car, enfin, n'est ce pas ridicule
Elle compte les poulets douze francs et les
épinards trois francs cinquante Ah! non,
ga dépasse les bornes
Mmc Dublanc {sonnant et tres calme.)
Mon devoir d'avocate était de prendre sa
cause en mains... (<4a domestique) Faites
venir Catherine.
M. Dublanc. Qu va recommencer
Mrae Dublanc. Les jugeraents se ren-
dent après les plaidoiries...
Cathérine. Madame rn'a fait demander...
{Elle essuie une dernière larme.
Mffle Dublanc. J'ai fait tout ce que j'ai pu
pour vous. Néanmoins, comme il est démon
tré que vous faites la salade avec de l'huile
de lampe et que vous êtes une voleuse, je
vous donne vos huit jours Sortez
Catherine {stupéfaite). Madame ma
chasse
Mmo Dublanc. Sortez
Catherine. Ah! ben non... celle-lè,
elle est raide {Elle sort).
Mme Dublanc. Et maintenant vient di
ner. II est huit heures et quart... j'ai assez
travaillé.
Pierre Wolff.
Chez la comtesseStéphanie Lonyay
Le céièbre poète hongrois Maurice Jokai
publie dans un journal de Budapest une rela
tion attachante d'une entrevue qu'il vient
d'avoir avec l'ex-archiduchesse Stéphanie.de-
venue Mme la comtesse Lonyay.
La fille du roi des Beiges se plait beaucoup
en Hongrie et a manifesté l'intention d'ache-
ter un ebdteau dans le voisioage de celui de
sa fille, l'archiduchesse Elisabeth. Je suis
heureuse comme femme hongroise, a t-elle
ajouté, non seulement paree que mon marj
est Hongrois,mais aussi commepetite-fille du
palatin Joseph. J'aime la nation hongroise,
qui est la plus fidéle et la plus chevaleresque
que je connaisse.
Lorsque le poète la complimenta pour sa
mine rayonnante de bonheur, Ia comtesse
lui dit Oui, je suis vraiment heureuse et
contente et j'espere que vous aussi vous pou-
vez en dire autant. Et comment ce porte Mme
Jokai
Disons, entre parenthèse, que Maurice
Jokai a contracté une union qu'on pourrait
qualifier de morganatique s'il était lui-même
prince ou archiduc. Sa femme ne possédant
aucun litre de noblesse et ne lui ayant ap-
porté que ses qualités du cceur, ce qui ne
compte plus guère notre époque—le pcète
ne cacha pas la grande joie que lui causa
cette attention.
Altesse, dil-il, cette question me rend
heureux. J'y trouve, en effet, un démenti au
bruit malveillant d'après lequel les cercles
de la noblesse m'auraient boycotté raison
de mon mariage.
C'est absurde, fit la comtesse Lonyay.
Personne ne voudra lecroireet votre mariage
n'a en rien diminué l'affection que nous vous
portions.
Mais le monde est ainsi fait, observa
Jokai. On peut pécher tant qu'on veut en
amour, sans se compromettre aux yeux du
monde. Mais dès qu'on sanctionne son amour
par le mariage, on est raiilé et boycotté
Ces paroles furent approuvées par la
comtesse, Comme vous dites vrai, dit elle.
Vous avez exprimé mapensée.Mais,dites moi
êtes vous heureux
Je commence revivre, répondit le
poète nous avons créé autour de nous un
petit monde, un petit cercle d'amis, qui nous
dédommage du dédain des autres...
Je suis dans le même cas de vous ob
serva la comtesse. Pour moi aussi mon petit
monde est le monde entier. A propos, que
dites-vous du mariage de Franz (II s'agit du
maiiage morganatique de l'archiduc héri-
lier Frangois Ferdinand avec la comtesse
Chotek.)
Le marinage vient d'être l'objet d'une
discussion parlementaire.
Ce n'est pas cela, interrompit la com
tesse. Je voudrais connatire votre opinion
personnelle.
Eh bien, répondit le poète, je dis que
les lois ducoeur sont au dessus de toutes les
autres lois écrites sur du parchemin ou gra-
vées dans la pierre, et celui qui fait ce que le
coeur lui commande ne commet pasd'injusti-
ce et est sur de la bénédiction du ciel.
Ne manquez pas, conclut l'ex archidu-
chesse, d'amener, lors de votre prochaine
visite, M0'9 Jokai, car je voudrais connaitre
la femme que vous aimez
A Ypres
II n'y a pas de jours de fête, plus univer-
sellement célébrés, que celui de la patronne
des musiciens. Du nord au sud, de l'orient
l'occident, dans tous les pays, depuis la
grande ville jusqu'au plus petit village, par-
tout, on n'entend en ce jour que chants, joy-
eux pas-redoublés, exécutions de musique
religieuse et profane, dans les temples, dans
les salles de fête, dans la rue.
Si le mot est vrai, qu'il n'y a pas de ker-
messe, ni de fête sans musique, plus forte
raison peut-on dire que la S" Cécile est un
jour de fête pour la contrée entière, une
kermesse générale.
De nos jours, on aurait de la peine trou-
ver encore une localité, si petite qu'elle soit,
qui n'ait sa société de choeurs, d'harmonie
ou de fanfares. Et cette société manquerait
k elle même si, pour fêtersa patronne, elle
ne faisait pas une exécution quelconque, si
elle ne profitait de t'occasion pour donner
une preuve de son savoir faire.
Dans notre bonne ville d'Ypres, si bien
partagée en fait de phalanges musicales de
tout genre, il en est naturellement ainsi.
Chaque société choisit son jour spécial.
Comme tous les ans, la grande Fanfare a
fait son exécution dimanche passé, soit le
premier dimanche qui suit le 22 Novembre.
A la Su Barbe ce sera le tour de l'Harmonie
Communale.
Done, pendant la messe dell 1/2 heures,
d'teh son intention, notre Fanfare a joué
deux morceaux de grande valeurUne mar-
che triomphale de Canivez Souvenir de
Geneveet une" Fantaisie sur l'opéra
VEtoile du Nord de Meyerbeer, arrangée
par M. Painparé.
L'exécution de ces deux beaux morceaux
a fait ressortir une fois de plus, toutes les
qualités de notre excellent corps de musique.
L'ensemble était admirable d'homogénité.
Tous les dessins, si variés, de la transcription
sur l'Etoile du Nord, ont été rendus avec
une véritable virtuosité. Les basses étaient
puissantes. Les bugles et autres instruments
chantants, pleins de charme. Le cuivre les
trompettes, cors et trombones aussi, ont été
la hauteur de leur lache, si ingrate souvent.
Dans la marche de Canivez surtout, les
trompettes et pistons, élèves pour la plupart
de M. Ern. Wenes, avaientun róle écrasant.
lis s'en sont tirés admirablement bien. Hon-
neur h eux comme h leur professeur!
Quand aux solistes: MM. Ern. Wenes,
Cam. D'haene, Gust. Verhaeghen et autres,
ils sont restés dignes de leur réputation ar-
tistique.
L'honneur de cette belle exécution re-
vient en premier lieu M. le Sénateur
Iweins d'Eeckhoutte, le dóvoué Président,
puis au chef si zélé, M. Gust. Wenes et h
M.Painparé.qui a mené notre belle phalange
musicale dans la voie de virtuosité qu'elle
suit de plus en plus, mais aussi aux exécu-
tants qui suivent avec tant de profit les
excellentes legons de leurs maitres
V