iVercredi 30 Novembre 1904
10 centimes le Nc
Année 39 N° 3899
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Le centenaire du eaz
Le
Ladentelle a la main
LA GUERRE
Le siège de Port-A rlhiir
Italië
En France
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Beurre
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bureaux de poste du rryaume.
gaz
Elections de \Iilan
Les affaires de delation
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Décembre.
Bien que, dès 1786, l'ingénieur et chimis-
te francais Philippe Lebon ait eu 1 'idee de
construire des thermolampes et d'utiliser,
pour l'e'clairage, le gaz produit par la distil
lation du charbon de terre et ait pris un bre
vet en 1799, il y a a peine un siècle qu'un
Allemand, nommé Winsor, donna ia formu.
le industrielle de l'invention francaise et
fonda, en Angleterre, une société pour
leclairage au gaz. Comme Lebon est mort le
jour du sacre de Napoléon 1", on a choisi
cette date pour commétnorer le centenaire du
gaz d'éclairage.
L'histoire a des ironies déconcertantes le
centenaire du sacre de Napoléon le Grand qui
devient le centenaire du gaz d'éclairage.
Quand tonnait le canon des Invalides et que
Napoléon, en son théatral costume d'apparat,
conduisait Joséphine a Léglise oü les atten-
dait le pape, qui eüt dit, qu'un pauvre chi
rr is te mort obscdrément cc jour-la, serait
glorifïé cent ans plus tard, tandis que l'em-
pereurne resterait plus qu a 1 étatde souvenir
épique a cöté de Roland, de Renaud, de
Montauban et du roi Arthur
Auguste Barbieravait tort quand il écrivait
dans ses Iarnbes que le peuple ne se souvient
que de l'homme qui tue avec le sabre et le
canon. Un jour bien procbe viendra oü les
tables de mémoire ne retiendront que le nom
des bienfaiteurs de Lhumanité.
L'autre jour, au banquet de la Société des
ingénieurs, M. Ernest Solvay, en prenant le
café, résumait son toast en trois mots «J'ai
voulu dire qu'un chimiste et un ingénieur
valent mieux qu'un avocat.Et voici qu'on
les honore plus qu'un conque'rant, plus que
celui qui fut un moment le maitre du monde.
II est vrai que Philippe Lebon n'a qu une
modeste statue a Chaumont, chef-lieu du
département de la Haute-Marne et que le
gros public connait surtout l'autre, Philippe-
le-Bon, ainsi nommé par antiphrase, le due
de Bourgogne, inventeur des banquets poli-
tiques qui, du premier coup, a de'passé toutes
les fanfaronades dont ces banquets devaient
dans l'avenir être le prétexte, quand il jura
sur un faisan d'aller délivrer le tombeau du
Christ Mais e'est que le public a étudié
malheureusement l'histoire dans les écoles
oü lenseignement, toujours routinier, passe
dédaigneux a cóté des progrès de la science,
pour suivre les soldats et la marche du tam
bour.
Demain, il n'en sera plus ainsi. L histoire
des sciences, des lettres et des arts, prendra
plus de place que celle des batailles et des
traités.
L'invention de Philippe Lebon, un instant
menacée par celle de la lumière électrique, a
cependant résisté a eet assaut, grfice au bec
Auer et elle est appelée a jouer un röle im
portant dans la conquête de l'air. A vrai dire,
il ne songeait, quant a lui, qua Leclairage,
bien qu il eüt pu assister aux premières ten-
tatives de Montgolfier, Pilatre de Rozier.etc.
Mais combien d inventions ont dépassé la
portee que leur assignaient les inventeurs!
Léclairage au gaz resta, pour son inven
teur, confiné dans le laboratoire. La naviga
tion aérienne est bien plus prés d'etre réali-
sée que ne l'était l'essai scientifique du chi
miste francais. Le centenaire du gaz, en
même temps qu'une commémoration, sera
peut-être une aurore. EUGÈNE TaRDIEU.
[La Conquête de Air
Le Temps nous apprend
M. Louis Vigouroux, député, a fait l'autre
soir, dans la salie de la Société de géographie
de France, une conférence sur la dentelle a
la main. C'est MBouquet, conseiller d Etat,
directeur de l'enseignement technique au
ministère du commerce, qui présidait. M.
Vigouroux montre d'abord la déche'ance qui
a frappé dans toute la France, la fabrication
autrefois si florissante et si honorable pour le
pays, de la dentelle a la main. II montre a
quelles causes est due cette déchéance. Et il
adresse un pressant appel a ses auditeurs
pour l'aider a rendre a eet art sa prospérité
de jadis.
Ce qu'il demande, c'est le concours des
initiatives particulières.
L'exemple de payr étrangers nous montre
ce que 1 initiative prive'e peut faire pour rele-
ver ou encourager la gracieuse industrie
dont la prospérité intéresse tant l'art et la
mode. Son action doit s'exercer dans trois
directions différentes
i° Organisation de l apprentissage et amé-
lioration de la condition des ouvrières pour
empêcher de tarir les sources mêmes de la
production
20 Amelioration des dessins et adaptation
aux variations de 1 art et de la mode, meil-
leure protection de la propriété des dessins
3° Emploi aussi large que possible de la
dentelle a la main dans la lingerie, l'ameu-
blement, pour le costume féminin, etc.
Le patronage de plusieurs reines, impéra-
trices et dames de la cour dans certains pays
étrangers montre la valeur des encourage
ments que des institutions similaires pour-
raient donner en France.
Plusieurs dames dont le concours serait
extrêmement pre'cieux ont déja manifesté
leur bonne volonté. M. Vigouroux rappelle
le succes de l'exposition du musée Galliéra,
il espère que tous ceux qui ont collaboré a
cette intéressante manifestation redoubleront
d'efforts et qu'ils réussiront a défendre contre
nos concurrents étrangers une industrie dont
la conservation en France est indispensable
au maintien de notre suprématie artistique
et du prestige de nos modes sur tous les mar-
chés du monde.
Nous pourrions en dire autant de la den
telle en Belgique. Aussi bien des voix auto-
risées.notamment MM.Carlier et Pierre Ver-
haegen, n'ont pas manqué de le faire. Et il
est a espérer que de la manifestation natio
nale que prépare pour Fan prochain la sec
tion dentellière a 1 Exposition de Liège,
naltra le renouveau de l'art dentellière en Bel
gique et une amélioration définitive de la
condition des modestes et vaillantes ouvri
ères dont les obscurs chefs d'ceuvre font la
réputation de Bruges et de mainte ville du
pays.
Le Progrès, le Weergalm et le Weekblad
s'étonnent du silence du Journal d' Ypres
autour de la question du gaz.
Le moniteur de l'Hötel de ville ne dit rien.
II y a done anguille sous roche
Nous n'avons pas la prétention d'etre un
journal officiel. Nous ne pouvons done dire
de la question du gaz que ce que nous en
entendons dire dans le public. Mais pour ne
pas nous exposer a faire, comme nos con
frères libéraux et radicaux, de la polémique
en l'air, nous nous taisons, en attendant que
la question soit discutée au conseil commu
nal.
M. le Bourgmestre ayant annoncé, dans
la séance du conseil communal du 26 No
vembre, que la question du gaz serait a
1 ordre du jour de la séance du Samedi 3
Décembre, nous nous ferons un devoir d'as-
sister a cette séance et d'en reproduire le
compte-rendu. Après cela, nous discuterons
avec le Progrès et consorts, s'il le faut.
En attendant, nous constatons qu'après
avoir combattu l'idée d'une intercommunale,
le Progrès demande si, en cas oü l'intercom-
.mrnale de.vrait prévaloir.on ne trouverait pas
aVpres, Poperinghe et Warneton assez de
capitalistes disposés a s'engager dans l'affaire?
Mais, confrère, si l'affaire est si mauvaise
que vous le dites...
II y a eu hier deux cents jours que
Port-Arthur est investi. Cette dure'e dépasse
déja celle de la grande majorité des sièges les
plus fameux. Depuis que l'artillerie joue un
röle important a la guerre, c'est-a-dire depuis
cent cinquante ans,on trouve peu d'exemples
d'une pareille résistance.
Pondichéry, en 1778, se rendit aux An
glais après 71 jours de siège, dont quarante
d attaque en règle.
Valenciennes, que la Convention déclara
avoir bien mérité de la patrie, capitula, en
1793, après 42 jours de bombardement.
La même année, Mayence, oü s'illustrèrent
les généraux Meusnier, d'Oyré, Aubert-Du-
hayez et Kléber, ainsi que les représentants
du peuple Rewbell et Merlin de Thionville,
ouvrit ses portes aux Prussiens après un siège
de io5 jours. En 179S, Bonaparte se rendit
maitre de Mantouc au bout de 24S jours
d'investissement.
Gênes, dont la défense est si justement
célèbre, capitula en 1700 après 60 jours de
blöcus. L'endurance des soldats fut aussi
remarquable que lenergie du chef; jamais
garnison ne subit d'aussi grandes privations.
Pendant la dernière quinzaine, la troupe
re^ut pour unique aliment quelques grammes
d'amidon quant aux habitants, ils durent
se nourrir avec des herbes bouillies. Massena
ne consentit a entrer en pourparlers avec
l'ennemi qu'après avoir tout épuisé, et il sut
cependant imposer ses conditions aux Autri-
chiens.
Saragosse subit deux siéges légendaires
le premier en 180S, dura 74 jours et se ter-
mina par la retraite des Francais le second,
de 72 jours, se termina par la prise de la ville,
le 20 février 1809.
Dantzig, en 1813se rendit, après un siège
de 334 jours. La résistance que le général
Rapp, a la tête de quelques débris de la
Grande Armée, opposa aux coalisés, fut ad
mirable elle méritait d'etre plus connue.
Sébastopol soutint les attaques de l'armée
franco-anglaise pendant 3qi jours il est vrai
que la place ne fut pas investie et put conti-
tinueilement recevoir des renforts en person
nel et en matériel..
Au cours de la guerre franco-allemande,
Paris fut assie'gé pendant 13 1 jours et Belfort
pendant 110.
Dimanche ont eu lieu a Milan les elections
supplémentaires pour le conseil municipal,
j Les catholiques et les modérés on fait al-
i liance et leur liste a triomphé avec 17,500
voix contre 14,500 données aux partis ex-
trèmes.
ft
Un officier retraite vient d'adresser a M.
Bourgueil, juge au tribunal de la Seine,
une lettre de provocation.
Le batonnier avocat de Nancy déclare
que M. Goutière de Vernolle, qui a envoyé
des fiches au ministère, n est pas inscrit au
j barreau de Nancy, dont les avocats répu-
dient toute solidarité avec les délateurs.
Les syndicats du commerce et de l'indu-
strie ont prononcé par 65 sur 72, la radia
tion de M. Blanchard, président honoraire,
en raison des fiches qu'il a envoyées.
La mouchardise est de'sormais devenue
officielle au pays de M. Combes. Le défro-
qué, par une circulaire aux préfets, vient
d'en faire un service public. Que pense le
Progrès du système cher a ses amis de Fran
ce
En attendant, voici comment Eclair,
journal liberal de Paris, apprécie ce régime
Non seulement les délateurs ne sont pas
frappe's mais la delation, déclarée vile et
misérable par quiconque a porté sur elle un
jugement public, vient d'etre réhabilitée par
le président du conseil mieux que réhabili
tée, officiellement sanctionnée, reconnue
comme une nécessité de l'Etat républicain,
élevée au rang d institution, transformée en
instrument de gouvernement. La circulaire
de M. Combes ne se borne pas a permettre
aux préfets de recueillir, par 1 intermédiaire
de particuliers choisis par eux, sans qu'ils
aient a rendre compte de leur choix, les
renseignements qu'il devront faire tenir au
gouvernement sur les fonctionnaires de tout
ordre elle le leur recommande.
Qu'est-ce a dire Les fabricants de fiches
secretes s'appelaient autrefois franc-macons
ils s'appelleront désormais délégués de
leur vrai nom, ce seront toujours des mou-
chards au lieu de faire passer leurs commu
nications scéle'rates par le canal du frère
Vadecard, ils les expédieront par les soins
des préfets devenus de simples agents de
transmission et d'ailleurs, place's eux-mêmes,
ainsi que tous les élus du suffrage universel,
sous la surveillance redoutable des corres-