ORGAN L'ARROND FÊTE GYMNAST1QUE TELEPHONE 52 ..air 1 Mercredi 4 Juillet 1906 10 centimes le !VC Le Peuple Un nouveau radium Le suffrage universel L'Endroit Un s'abonne rue au Beurre, 36, a Ypres, et k tous les bureaux de poste du royaume. Le JOURNAL D'YPRES parait le Mercredi et le Samedi. Le prix de l'abonnement, payable par anticipation, est de 5 fr. 50 c. par an pour tout le pays pour l'étranger le port en sus. Les abonnements sont d'un an et se régularisent fin Dócembre. Les articles et communications doivent étre adressés franco de port a l'adresse ci-dessus. Les annonces coütent 15' centimes la ligr«. Les réclames dans le corps du journa coütent30 centimes la ligne. Les insertions judiciaires, 1 fracc la ligne. Lea numéros supplémentaires coütent 10 fratus les cent exemplaires. Pour les annonces de France et de Belgique (exceptó les deux Flandres) a'adresser a l'Agrewce Havas Bruxelles. ma d'Argent, n°34 et A Paris,8, Place de la Bourse. VILLE D'YPRES Le Dimanche 8 Juillet a, 5 heures au jardin du Cercle Calholique Grande avec le concours de l'harmonie et la Gilde Saint Michel. Ie plus Commer^ant du Monde Si Ton demandait a bon nombre de nos compatriotes quel est le peuple le plus co nmercant du monde, peut-être se trouve- laient ils assez embarassés. A cette question la réponse est cependant bien simple le peuple le plus commerijant du monde c'est le lelge lui-même. Nous sommes un petit peuple, mais sait on que nous venons en 5* place sur la liste des nations les plus commercantes du monde. I..e mouvement général de nos affaires par cxemple pour 1904, importations et exporta tion comprises,sechiffraitpar4.065 480.000. Kn consequence notre commerce équivaut a i 4/19 du commerce anglais il est sensi blement supérieur au i/3 du commerce «Demand il équivaut au 5/i3 du commerce des ?Etats-Unis il est plus de la moitié de celui de la France et dépasse le commerce de tcus les autres pays du monde. Ces chiffres sont éloquents et font déja ptévoir que le Beige est le peuple le plus ci mimergant du monde. Une petite remarque nous le fera comprendre mieux encore. Si, pour la même année 1904, nous dr. isons le cbiffre total d'affaires de chaque pays par le nombre d'habitants, et si nous lomparons les chiffres moyens d affaires par habitant ainsi obtenus pour chaque nation, nous voyons que les résultats se classent ami que suit le Beige, 714 francs l'An- plais, 555 francs l'Allemand, 244 francs le Francais, 23o francs l'Ame'ricain, 147 francs. Arrêtons-nous, car les chiffres, s'ils sont éloquents, fatiguent vite. Ce qui frappe, ptemière vue, c'est que la raison suffisante de cette grande extension commerciale ne lénde pas dans des circonstances climaté- nologiques ou autres, exceptionnellement favorables pour la Belgique. Sans doute nous avons un sous-sol piodigieusement riche, mais nous n'avons par exemple que quelques kilomètres de cbtes nous vivons sous un climat tempéré, et notre agriculture est assez généralement a I l'abri des cataclysmes de la nature, mais notre terre est vieille, elle a besoin d'etre constammtnt amendée, et elle est infiniment inférieure au sol de la France par exemple. La Belgique est done dans des circonstances naturelles si pas moyennes, insuffisantes tout au moins a expliquer le grand essor de son commerce. Mais ce qui fait comprendre cette grande p.ospérité, c'est l'excellencede notre outillage économique la situation de nos routes de nos cours d'eau, de nos chemins de fer, de tons nos moyens de transport en un mot C cst le merveilleux rouage de nos lois justes, tole'rantes, accordant protection au travail, encourageant l'effort, laissant vaquer chaque citoyen a ses affaires, sans l'inquiéter en rien, dès qu'il ne compromet pas la Lsécurité de son voisin. Voila la vraie raison pour laquelle le beige est le premier peuple commer$ant du monde et c'est a vingt-deux ans d'un gouvernement pacifique, d'un gouvernement d'affaires, comme on l'a appelé, que nous devons, en grande partie, cette prospérité. II est question, depuis quelque temps, d'une matière radio-active plus puissant que le radium, qu'aurait découverte un professeur de l Université de Pise, M. Batelli. On possède maintenant, dit 1 'Eclair, des détails sur cette découverte, qui avait beau- coup ému les milieux scientifiques. M. Bat- telli s'était appliqué, depuis un an, a l'étude des phénomènes lumineux que présentaient les eaux de San Guiliano a la suite de nombreuses experiences, il put établir que ces eaux étaient radio actives Ji un haut degré il pensa en consendenser les émanations. Pour procéder a cette condensation des produits des corps radio actifs, il suffit de les traiter comme le gaz, de les renfermer dans des tubes spéciaux, en les comprimant fortement. L'opération est trés coöteuse et c'est la plus grande difficuIté de ces nouvelles expériences de radio activité. Mais M. Battelli a pu parvenir son but. Des pompes a vapeur ont été mises en mouvement a San Guiliano pour extraire le gaz des eaux du sous sol en le poussant dans de larges gazometres. Le gaz ainsi extrait, après avoir été épuré, a été introduit dans de petits tubes, piongés dans Fair liquide et revêtus de sulfure de zinc. Ici les émanations, définitivement condensées, devenaient visibles elles colo- raient d'un vert éelatant le sulfure qui y était déposé. On ne peut pas encore dire quel est le corps d ou résultent ces émanations mais le fait d'avoir établi qu elles existent en quan- tité considerable dans le fond des eaux, est une découverte dont on ne pourrait pas nier la portee. d'après Emile Zola Le facheux est que la théorie du suffrage universel se détracque dès que Von passe a 1'application. Un peuple n'est pas uue addi tion dont tous les chiffres se valeut. Dès lors, en donnaut la même vaieur a chaque ci toyen, on introduit dans le total des causes d'erreurs énormes qui vicient l'opération tout entière. Ea un mot, du moment que les hommes interviennent avec leurs folies et leurs iufirmités, la logique mathématique du souffrage universel est détruite il ne reste qu'un gachis abominable. Ce n'est plus de la science, c'est de l'empirisme, et du plus trouble, du plus dangereux. Voilü pourquoi tous les esprits scientifi ques de ce siècle se sont montrés pleins d he sitation et de défiance dovant le suffrage universe!. Je parie de nos philosophes, de nos savants, de ceux qui procèdent par l'ob- servatiou et 1 expérimentatiou. Ils trouvent que l'égalité physiologique nexiste pas, qu'un homme n'en vaut pas un autre, qu'il y a une élimiuation continue et nécessaire de presque toute une moitié de l'humanité. Si bien que le suffrage universel n'est plus une réalité basée sur le vrai, mais quil devient une idéalité s'appuyant sur la con ception religieuse d'une égalité des ames. Voyez Littré, voyez M. Taine et M. Re- nan, voyez tous ceux qui ont tenté d'appli- quer la formule moderne de nos sciences a la politique ils refusent de se lancer dans un empirisme qui va droit au christianis- me(?) des médiocres et des ambitieux. Volla ce qu'il faut nettement établir le suffrage universel n'a rien encore de scientifique, il est tout empirique. Avec la masse considérable de nos élec- teurs illettrés, avec les honteux trahes sur la céquinerie des uns et la bêtise des autres, il est toujours impossible de savoir ce qui sortira du scrutin. Le total de l'opération est quand même falsfié, jamais le vrai ne sera obtenu, paree qu'il est le vrai. Les candidats qui méritent d'etre élus en sont réduits a descendre aux mêmes manoeuvres louches que les caudidats qui n'ont aucune bonne raison pour l'être. En un mot, le principe superbe de la souveraineté du peu ple disparait il ne reste que la cuisine malpropre d'un tas de gaillards qui se ser- vent du suffrage universel pour se partager le pays, comme on se sert d'un couteau pour déeouper un poulet. EMILE ZOLA (Lettre au Journal la Nation). C'était a l'époque oü le besoin s'était fait sentir de doDner aux fonctions de sacristain une physionomie plus élevée. L'école normale qui n'avait été jusque la qu'une fiction d'école normale, annexe du petit seminaire de Roulers venait d'etre transferee Thourout, et Pamphile Darion que je veux vous présenter aujourd'hui avait été l'un des premiere élèves de l'insti- tution transformée. Ces élèves de la première heure, presque tous morts aujourd'hui conservaient, une fois sortis de l'établissement oü ils avaient été formés, quelque chose du renouveau qui s'était opéré en eux. On les reconnaissait, mème quand ils étaient mêlés a la grande foule, soit a la coupe de leurs habits, soit a leur attitude que je n'ose pas dire suffisante, soit a leur fagon d'ètre et d'agir, soit a leur port uniformément impertinent de lunettes a grands carreaux de vitres ronds. Us avaient tous la figure rasée comme s'ils s étaient soudainemeut santi préposés la garde de l'antichambre du aacerdoce auquel leurs modestes et fort honorables fonctions les attachaient. Leurs moindres écarts auraient été remar- qués, tant leur type était frappant. Qui ne l'a remarqué d'ailleurs Etait ce bien, était-ae mal Je ne tranche pas, car je manque de compétence et je me contente de constater que les temps out marché et que les sacristains, aujourd'hai modernisés, portent moustache et n'en font pas moius bien leur service pour cela. Mais il s'agit ici de Pamphile Darion, un type de la vieille école, type que je voudrais bien vous depeindre. Entré done parmi les premiers dans l'ordre nouveau, il s'était donné le mérite de la clairvoyance, et ma foi, j'aurais mau- vaise grace a dire qu'il était béte. C'était un type, et puis voiÜ tout. Et quand il s'était trouvé porteur de l'un des premiers diplöines déliviés par l'école nouvelle, il s'était senti trés tier, un peu supérieur et pour Ie bien faire voir, il avait majestueusement nettoyé les verres de ses lunettes aux pans de sa veste neuve, le Jour oü Monseigneur de Bruges, par l'organe du directeur de la normale lui renseigna l'endroitoü il aurait a exercer désormais ses fonctions qu'il disait importante» sans en rien croire au fond. II fut désigné pour Schooreborne, pstit village perdu dans les plaines arides du Nord, mais le bon rendement cependant, pareeque petit peut être, car Dien sait relever et relève souvent tout ce qui sait se résoudre a rester petit. Son arrivée a Schooreborne fit sensation on admira la rondeur de ses verres de lunettes sous lesquelles petillaient deux petits yeux trés noir», malicieux. Pamphile Darion avait une belle voix de baryton, et, quoique le clavier des orguss de Schooreborne, ressemblat plutöt a la denture massacrée d'une mégère qui aurait perdu ses ivoires a casser du sucre sur le dos du prochain, il en tira des sons qui, s'harmonisaut avec sa voix puissante, fais- aient se retourner bien des têtes, mème en tourner quelques unes pour le bon motif. C'est ainsi qu'il tourna la tète de Marietta Dardenne, la fille du bourgmestre, et qu'il la maria malgré una opposition obstinie des parents. Ilélas, au début ce mariage ne fut pas heureux.Marietta était temme de chiffres et elle treuvait, un peu tard, que son mari, malgré ses lunettes rondes et sa belle voix, ne gagnalt pas assez dargent. Darion pourtant était un brave homme. II aimait sa femme sincèrement,robustement. Cette question de gros sous, toujours soulevée, jamais résolue, le hantait jour et nuit, une véritable obcessien. Lui, qui se serait contenté d'une tartine de pain noir et d'un eornichon cult a l'eau, i! devint ambitieux il aurait voulu être millionnaire, ah comben S'il avait connu Rotschild, il l'aurait jalousé. Il en rêva. Or un jour, son rève le mit devant un service funèbre dont on n'avait pas souvenir depuis bien longtemps. Beaucoup dargent a gagner II rêva tout haut, et sa femme, la sour- noise, l'écouta. Yoici sou rêve L'homme le plus cossu de l'endroit, toujours l'endroit,tait mort et l'enterrement aurait lieu avec un service de pvemière classe. Darion, dans son rêve se frotta les mains, tout en plagant des cierges d'une livre et deinie devant les statues des douze apolres qui tournaient le dos aux piliers de l'église et devant celles de tous les saints particulier» que l'on véuérait daus le petit sanctuaire campagnard. Cette besogne teminée, son rêve la porta vers la sortie de l'église, oü de nouveau il ie frotta les mains, quoique pourtant ce füt la qu'il eüt a compter avec la plus cruelle perplexité de sa vie. *'j£gP

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1906 | | pagina 1