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n
Mercredi 20 Juin 906
LA SEMAINE
Les fouiiles du Forum
et le tombeau de Trajan
Paille et Poutre
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La Semaine commencée nous réserve-t-
elle encore des débats parlementaires comme
ceux engages a la Douma russe et a la Cham-
bre francaise Des conflits sanglants de races
et de religions comme ceux dont les rues de
Bielostock viennent d'etre le theatre Des
querelles internationales nouvelles comme
celle qui a amend la rupture des relations
diplomatiques entre la Grèce et la Roumanie?
En fait de discussions parlementaires on
attend avec curiosité la suite de celles qui
sont entamées un peu partout, en France
aussi bien qu'en Russie, a Rome aussi bien
qu'a Vienne et qua Buda Pestb On suit
mëme avec attention le débat engage a la
Chambre des communes sur l'« Education
bill car, k la tournure qu'il prend, il peut
mettre le cabinet Campbell Bannerman en
tres mauvaise posture devant le pays si le
gouvernement anglais ne fait pas de nouvel
les concessions aux partisans de l'enseigne-
ment libre.
En ce qui concerne les cocflits interna-
tionaux, on ne s'attend pas, cette semaine, a
de grosses surprises ni du coté de Vienne et
de Buda-Pesth, ni du coté de Bucharest et
d'Athènes. II faut, en effet, du temps et
beaucoup de temps pour régler les multiples
questions d'ordre économique qu'examinent
en ce moment les cabinets Beck et Wekerlc.
Quant a la nouvelle querelle gréco-roumaine,
ce nest pas en vingt-quatre heures qu'on
parvient a l'apaiser, d'autant plus que la
surexcitation des esprits est tres grande chez
les sujets du roi Georges et chez ceux du roi
Karol.
Une affaire internationale dont on ne peut
non plus attendre le règlement final du jour
au lendemain, c'est celle du Maroc. Voila
des mois que l'acte d'Algésiras a été signé.
Voila des semaines que le représentant des
puissances, M. Malmusi, est arrivé a Fez, et
le sultan Abdul-el-Aziz n'a pas encore donné
formellement son adhesion a tous les projets
élaborés pour rétablir l'ordre et la tranquil-
lité dans ses Etats.
Estce a dire que Sa Majesté chérifienne
ne s'inclinera pas devant la volonté des qua-
torze puissances réunies l hiver dernier en
conférence Nuilement. Le Maroc, comme
la Turquie est un pays oü Ton pratique la
politique des lenteurs et des tergiversations.
Avant d'approuver quoi que ce soit, le
souverain de l'empire ultraméditerranéen
éprouve toujours le besoin de consulter le
Maghzen et celui ci a son tour a pour habi
tude de prendre l'avis du Conseil des Nota
bles. Tous ces conciliabules prenant du
temps, S. M. Abdul-el-Aziz n'a pu encore
donner sa réponse définitive a M. Malmusi,
mais on ne doute plus que cette réponse ne
soit favorable.
En attendant la ratification définitive de
l'acte d'Algésiras, on verra cette semaine
s'accomplir uu événement heureux dans un
pays du nord de l'Europe, qui était encore en
pleine agitation et en pleine crise ii y a un
an. II s'agit du couronnement d'HaakonVII,
le nouveau roi de Norwège, dans la cathé
drale deTrondhjem. Tout est bien qui finit
bien.
L'ordre est enfin rétabli a Bielostock, a
en croire les depêches de lundi matin. L'en
quête faite au sujet de ces troubles a démon-
tre' que la responsabilité en remontait aux
juifs. En Pologne, a Varsovie et a Lodz les
juifssont pris d'inquiétude ils craignent de
sanglantes représailles.
Iin'estrien de comparable a l'imposante
majesté des ruines du Forum romain, soit
qu'on les considère du baut de l'escalier du
Capitole, soit qu'on les contemple du som
met de la Velia oü se profile élégamment
l'arc de triomphe de Titus. Est-ce la magie
des souvenirs classiques qui prédispose a
l'admiration Est-ce l'effet prestigieux de la
lumière méridionale qui souvent donne aux
objets je ne sais quelle irréelle splendeur
Nul doute que ce double élément ne con-
coure a notre e'motion, puisque les jeux de
la lumière et de l'ombre contribuent a
l'intensité de la vision et qu'il se mêle
toujours a cette vision une part de nous-
mêmes, ce qui a fait dire justement qu'un
paysage est un état dame.
Le gouvernement italien, depuis son
installation a Rome, c'est une justice a >ui
rendre, n'a cessé de faire exécuter au Forum
les fouiiles les plus intelligentes et les plus
persévérantes. Elles ont remis a jour, sous
un amas de débris, des monuments primi-
tifs qui ont permis de fixer quelques points
obscurs de la Rome républicaine l'empla-
cement de la curie, des cornices, des rostres
et les fouiiles se poursuivent précise'ment
dans cette région nord qui est contigue au
forum des Césars. Mais le commandeur
Boni, préposé aux fouiiles, a résolu de porter
ses investigations au forum de Trajan, afin
d'essayer de retrouver le monument funéraire
de eet empereur.
Disons tout de suite que c'est le gouver
nement francais qui exécuta les premières
fouiiles dans ce forum durant l'occupation
impériale c'est lui qui, de 1812 a 1814, fit
démolir les constructions avoisinant la
colonne pour dégager la basilique TJ1 pia et
toute la partie de ce lorum aujourd'hui a
découvert.
On sait que l'empereur Trajan le fit ouvrir
pour mettre le quartier du Champ-de-Mars
en communication avec le forum d'Auguste
et les autres forum. Pour cela, il fallut nive-
ler le sol, car du coté nord selevaient les
dernières pentes du Quirinal, sur ce vaste
espace aplani, 1 architecte Apollodore de
Damas édifia la basilique, les bibiiothèques,
le temple, et la superbe colonne autour de
laquelle se déroulent en spirale les admira-
bles bas-reliefs commémorant la guerre de
Trajan contre les Daces.
G'était le plus somptueux monument de la
Rome impériale, disent les historiens con
temporains. Et Ammien, racontant la visite
qu'y fit Constantin après sa victoire du pont
Milvius, en 356, écrit que lorsqu'il fut
arrivé au forum de Trajan, ouvrage d'une
structure unique au monde, il s'arrêta stu-
péfait, promenant ses regards sur ces con
structions gigantcsques dont on ne saurait
décrire la beauté et que des mortels ne
pourraient refaire (Am. XVI, 10).
Trajan étant mort en 117, a Sehmonte,
en Cilicie, au retour d'une expédition contre
les Paithes, son successeur Hadrien ramena
sa de'pouille a Rome, et la déposa sous la
colonne. C'est l'hypogée oü elle fut placée
qua entrepris de retrouver M. Boni.
Tous les Romains suivent avec intérêt les
investigations de l'éminent archéologue. Et
voici l'intervieuw qu'a eue ces jours derniers
avec lui un rédacteur du Giornale di
Roma
Quelles raisons vous ont déterminé,
maitre, a revenir sur l'importante question
du sépulcre de Trajan
Depuis quelque temps, je prépare une
étude sur le Tribunal de Trajan Vous
comprendrez facilement ainsi comme la
question du tombeau de Trajan est devenue
intéressante pour moi. J'ai dü m'occuper du
bas relief antique qui a donné naissance It la
légende médiévale dont parle Dante dans le
chant X du Purgatoire Et c'est ainsi
que j'ai été amené a une autre étude La
Justice de Trajan qui comprendra vingt
reproductions marquant le développement de
la légende, du Moyen Age It la Renaissance.
La Nuova Antologia va publier incessam-
ment cette étude.
Avéz-vous espoir que votre hypothèse
au sujet du monument funéraire de Trajan
se vérifiera
Votre demande est quelque peu embar-
rassante, mais voici tout ce que je puis vous
dire pour donner satisfaction a tous ceux qui
s'intéressent a mes fouiiles. Le fondement de
mon hypothèse est trés sérieux, paree qu'il
s'appuye sur le témoignage des historiens de
l'antiquité. Sans doute, les archéologues mo-
dernes qui sont le mieux au courant de la
topographie de Rome, émettent des doutes
sur ce point. Et leurs doutes paraissent d'au
tant plus fondés qu'on n'apercoit pas les
traces apparentes ni d'un caveau ou d'un hy-
pogée, ni d'un escalier d'accès.
Nous allons faire des fouiiles en nous
conformant fidèlement a ce que di.sent les
historiens. J'ai la le témoignage de Dion
Cassius qui déclare que les os de Trajan
reposent sous la colonne qui porteson nom
II mentionne qu'en l'an 117 l'empereur
Hadrien rapporta solennellement a Rome les
restes de son magnanime prédécesseur et qu'il
les placa enfermés dans une urne d'or, con-
lata in urnam auream sous la colonne. II
ne peut done plus y avoir de doute le grand
empereur a reposé la. J'ai commencé exa
miner les traces de l'antique porte elles ne
sont pas faciles a découvrir, car celui qui fit
la porte actuelle rie se préoccupa guèra de
conserver les vestiges de l'antique porte a
deux battants. Et puis la porte moderne,
lorsqu'elle estouverte, masque le contour de
marbre de l'antique porte donnant acces
l'hypogée. Enfin je dois ajouter que les
vestiges de l'antiquité sont recouvertes de
crépissages modernes d'oü il faudra les déga
ger. Les portes intérieures devraient être,
elles aussi, ik double battant, de cette forme
que nous lont connaitre les urnes sépulcrales
et les sarcophages. Or, j'ai l'intention de
proposer au ministre de l'Instruction publi-
que de faire substituer une porte de forme
antique a la porte actuelle La couronne de
bronze sera placée sur l'antique muraille, au
fond du vestibule de l'intérieur de la colonne.
Je pense que dès les premières excavations
nous trouverous l'escalier qui donnait accès
a l'hypogée.
Avez vous espoir de trouver en bon état
encore aujourd hui eet hypogée
Ce serait une grande illusion, une folie
même, d'espérer trouver encore l'urne funé-
aire en or massif si l'on a pris tous les
objets de bronze, a plus forte raison tout ce
qui était en or. II nous suffira de trouver la
place qu'occupait cette urne funéraire, et
ainsi nous aurons démontré queTrajanabien
été depose sous la colonne et que ce n'est pas
la une légende.
II est ik souhaiter que les faits viennent
confirmer les inductions de M. Boni. On
comprendra mieux alors pourquoi, dans la
première période du moyen age, le souvenir
de Trajan se maintint vivant a Rome. Sans
doute les monuments grandioses qu'il avait
édifiés, les exemples de sa justice conservés
par les historiens durent contribuer a garder
sa me'moire mais si ses restes ont reposé
sous la colonne qui immortalise ses victoires,
au coeur de Rome, on s'explique alors les
nombreuses légendes qu'a inspirées son sou
venir.
D'après l'une d'elles, Grégoire le Grand,
dont la demeure patricienne était sur le Coe-
lius, traversait fréquemment le forum de la
république et le forum des empereurs. Un
soir qu'il s'était srrêté prés de la colonne
Trajane pour contempler la splendeur mélan
colique du coucher du soleil parmi ces ruines
encore merveilleuses, la pensee de Trajan
vint a son esprit. Au souvenir de ses nobles
qualités, de ses vertus, il fut pris d'une im
mense tristesse en songeant qu'un souverain-
si juste et si clément était peut être parmi les
damnés,ou du moins parmi ceux quierraient
dans d'éternelles limbes. II pria sur son
tombeau et l'ame de l'Empereur fut aussitot
délivrée.
C'est une légende du septième siècle que
Dante a insérée dans son «Purgatoire». Elle
atteste l'antiquité et la perpétuité de la tra
dition qui place sous la colonne majestueuse
du forum la sepulture du grand empereur.
{Temps).
Nous reproduisons pour l'édification de
nos lecteurs les lignes suivantes, extraites de
La Patrie de Bruges, en les faisant suivre
du post-criptum de la fameuse circulaire^
adressée par M. Merghelynck, commissaire
d'arrondissement d'Ypres, a ses nom-
breux fermiers, amis, connaissances et
camarades, lequel post-criptum, par une
erreur typographique, n'a pas été publié dans
notre numéro de Samedi dernier.
Ilien de plus curieux que le spectacle des
journaux libéraux se livrant en chceur a
d'interrninables variations sur l'air connu de
la pression éhontée, scandaleuse exercée
au nom de la religion prétendument mena-
cée, sur l'esprit des paysans catholiques.
Sans doute, nos amis ont employé tous
inoyens honnêtes, loyaux, légaux et persu-
asifs pour arriver a Qe beau résultat qu'est
le triomphe éclatant du 27 mai.
Mais le reconnaitre serait un trop gros
chagrin pour nos adversaires.
Ils préfèreut crier haro sur le baudet du
cléricalisme, oubliant qu'ils perdent tantet
de si précieuses occasions de se taire.
Car si nous voulions parler de la pression
exercée dans tel arrondissement flamand
par les potentats libéraux qui sont les
maitres de la région, il y aurait des pages
entières du journal a remplir. Bornons-nous