DU 7 AOUT 1910
A propos de blasphemes
du I'rogrès»
Penéées diverges
Encore une douche
Quel monotone rouleau plionographique
que celui qui nous répèterait les maledic
tions, les blasphemes et les murmures qui
b'élèvent quotidiennement a propos du
ti mps Invariablément, on trouve celui-ci
L op cbaud, trop froid, trop humide, obstiné.
rv,e.nt sec, malencontreusement pluvieux, etc.
Jamais il n'est au goui do tous, jamais a
s'uhait.
Et pas u a des comtempleurs du Mai ti e
des saisons ne voit plus loin qua son nez et
r;b semble se douter que si le ciel exau^ait
sos voeux, ce serait a la fois una calamité
pour lui et pour tout le genre hitmain,
Oh 1 comme le Psalmiste a raison de bénir
la Providence a propós de chacuue de ces
iotempéries tant maudites
Imber et ros, ignis et cestus, gelu et fri-
gusgiacies etnivesfulgura et nubes, bene-
dl cite Domino
Da fait, il n'est pas uue saulu de ces mani
festations métóorologiques qui n'ait sa
raison d'être et soa impérieuse nécessité.
Prenons, par example, los cyclones et les
anticyclones, ces deux grands mouvements
atmosptiériques qui determinent les diffé
rents états du ciel.
Les cyclones, mais ce sont les balais de
l'atmosphère.Ce sont de véritables vacuum
cleaners qui nous débarrassent des impu-
r tés et des nuisances microbiennes et rem-
p'acent par l'air salubre de l'océan, des
regions montagneuses, das forêts et des
campagnes, l'air vicié de nos villes.Sans eux,
d'ailleura, pas de precipitations aqueuses
rans eux pas d'orages —ces terribles et pour-
cant si préeieux cyclones locaux, puissants
laboratoires d'ozone et régénórateurs de la
vio animale et vógétale.
Sans les orages, fhomme succomberait
aux cffots insupportables du beau temps,
mênaedans nos régions tempérées.
Les anticyclones, de leur cöté, nous ap-
portent, après le coup de balai et la douche,
l'air pur des hautes régions ils rassérènent
le ciel et nous procurent des séries do beaux
jours cal mes.
Ces deux grands régimes atmosphériques
sont succsssifs et complémentaires l'un de
l'autre. Nous nous plaignons ici de la pluie 1
Mais la-bas il y a le beau temps. Sans cette
dualilé, co serait pour nous tous ou le beau
ou le mauvais temps ininterrompu. Et ia*
quelle do c de ces deux calamitós serait la
pi re 1
C'est ét re a la fois égoïste et malavisé que
de se plaindre de tel ou tel état du temps.
Les vicissitudes du temps nous rappellent
constamment la loi de solidarité bumaine.
L'annéo est mauvaise pour nous C'est la
vaeko maigre de ia Bible. Ailieurs c'est la
vache grasse.
Un cataclysme boulevéfse-til un point du
globe Aux escapes du monde entier a y re-
médier, en attendant leur tour. Tons pour
un, un pour tous.
Criera-t-on a rimperfi.ctiou de l'oeuvre du
Créateur 'foute la climatologie eüt-elle dü
être organisée de telle manière que ce fftt
partout, en même temps, !a parfaits distri
bution des phéaoaaènes météorologiquos,
favorisant au maximum et sans accrocs le
développement de la vie phenologique,... en
même temps que les Tours de Flaodre ou
de Belgique
Si nous notions qua des animaux, peut-
être bieii la Créateur efit-il ordonné lea cho
ses de la sorte. Mais notre vie supérieure
exigeait manifestemeflt la situation actuelle.
La grande voix du Créateur se fait entendra
p'us efficacement h notre libre entendement
dans Ie grondement de forage, dans le siffle-
ment de la tempête, dans les iotempéries et
les vicissitudes climatériques diverges. Et,
une preuve k l'appui de cette conclusion,
c'est que les climats les plus favot-isés
au sens courant, ne sont généralement pas
ceux ofi la vie morale se révèle la plus ar-
faite et laplus intense, dans i'ensemble de la
population. Les beaux climats méditerra-
néens ont pu élever les conceptions esthéti-
ques, mais ils n'ont pas empêehé les pires
decadences morales.
Et eet aphorisme du saint curé d'Ars
trouve ici sa confirmation Ce que le corps
perd, 1 aura le prend, et ce que le corps
prend, l'ame le perd.
Comme le dit le P. Bisscuoff, la bourras-
qua rend l'air plus pur et plus calme, et les
sombres nuages répandent les béaédictions
du Seigneur, ainsi les s'óuffrances et les
luttes intérieures purifient et amoliorent les
enfants de Ia terre et leur apprennent it pro-
duire de meilleures oeuvres.
Mais ces caaapaguards,excellents Chre
tiens, qui du fait les imtempéries subissent
de gros do mm ages Mais ces méeréants, ces
blasphéinateurs des villes qui sont épar-
gnés
Ah c'est ici que se révèle !a main du
Seigneur qui frappe ou qui épargne avec, uu
égal amour. La prospérifé et l'impunité
momentatée des méchauts n'est le plus sou
vent qu'u-i efïet de la Justice et dis Ia Bonté
divines de même que les tribulations des
bons sont pour ceux-ci l'épreuve saluta're et
Ia grdce pat fois décisive. Diligentibus Deum
omnia cooperantur in bonum (S. Paul).
C'est notre étroitesse de conception, c'est
notre iudécrottable égoïsme, c'est notre
ignorance religieuse qui nous font voir tou-
tes choses a rebours.L'ignorance en matière
scientifique y est pour beaucoup aussi Com
me disent Zuercher et Margollé, les prévi-
sions du temp" qui de plus en plus permet-
tront da prendre les precautions propres a
amoiadrir les ravages produits par lea gran-
des perturbations de l'atmosphère, et l'ob-
servation raisonnée de ces perturbations,
conduirout sans doute a ne plus les consi lé-
rer seulement sous leur aspect désastreux
On verra rnieux le role utile et bionfaisant
qu'elles remplissent dans l'économie de la
nature qui ne fait rien en vain, et dans la j
quelle, comme l'a dit si justement St-Augus-
tin, toutes choses tendent a la paix.
Terminons par ce mot de Jansen La
formidable apparition de3 trombes et des
cyclones fait trembler la terre et remplit
d'effroi le coeur de 1'bomme. C'est pour lui
cependant qu'au milieu de ces bouleverse»
ments 1'Amour veille et la Providence agit.»
Dieu ne frappe que par amour et il n'ote
que pour donner. Ii faut l'aclorer et se taire.
Les charmes trotapeurs de la. prospérité
font perir plus d ames que tous les fléaux de
l'adversité. S.Bernard
Le veritable savant est le seul homme qui
soupQonne combien est au dessus, non pas
seulement de la connaissaace humains, mais
de toute conception hum line, la puissance
universelle dont la Nature, la Vie et la Pen-
séé sont des manifes'ntions.
Hubert Spencer
Le soleil, de fardcur fécande de ses feux
Garesse l'épi mür aussi bien que l'ivraie,
Et si la grêle fond sur la moisson dorée,
L'ivraie et l'épi mür tombent hachés tous
[deux.
Qu'importe a l'Eternel la cbute d'un brin
[d'herbe
Que sont pour lui les jours des bons et des
[raécbants
11 entend la blaspheme, il écoute les chants
Da l'humble qui l'implore, et se rit du su-
[perbe.
Le temps, ce pdle éclaire, dure a peioe un
[moment.
Puis l'heure sonnera du sombre jugement
Oü Dieu séparera lesjustes des impies.
Maurice Van der Houdelingen
La Providence gouverne du moin3 en
partie les hommes par les hommes il y a
toujouis des hommes providentiels, seule
ment ils vienuenl pour le ebdtiment ou pour
la miséricorde.
L. Veuillot
I)é'idémeat, les blasphémateurs qui, dans
les colonnes du Progrès, se gaussent de la
Providence, sont douches, comme il faut, de
la main de l'éminent jutisconsulte Edmond
Picard, rédacteur extraordinaire a la Chro-
nique
Avec sa franchise habituelle et quoique
anticlerical, il n'essaie pas, lui, de semer le
doute et de nier la Providence. II regrette,
au contraire, ce qu'ont d'assujettissant et
d'absorbant nos exigeantes occupations
sociales, abondantes en alarmes et si doulou-
reusement efficaces pour nous masquer le
divin travail de l'infatigable grand Pan.))
Et au cours de tout un long article, il
rabroue ceux qui médisent sans cesse de
notre climat Oui, l'heureux pays de qua-
tre saisons Et pourtant, calomniant la
majesté évoluante du drame des météores, on
n'entend parmi nous que des imprécations
contre les pluies, les vents, les brumes, les
orages, les gels, les neiges. Nul n'admet
qu'il fait beau ce qui devrait se dire dès qu'il
y a de la Beauté, (même triste ou persécu-
trice) si ce n'est quand le soleil brille. Et
encore faut-il qu'il ne soit pas trop chaud I»
Et plus loin Quand j'entre chez le
citoyen alerte qui me rase et que, fidéle a la
tradition, il me dit, paree qu'il pluvine ou
qu'il neigeote Quel mauvais tempsje
me mets en colère et je riposte Vous trou-
vez-ca, vous? Et parfois j'explique mes
theories barométriques au brave savonneur
ahuri. Je crois cette propagande, destinée a
lui faire apparaitre l'ambiance moins maus-
sade, a le rendre participant a la vie totale qui
l'enveloppe, a diminuer ses impressions cha-
grines, aussi utile que si je pontifiais Bur les
choses et les machins de la Poöoóolitique.
Probablement, que je n'aboutis qu'a aug-
menter ma reputation d'exlravagance dans
!e cerveau de ce simple.
Edmond Picard termine par une der-
nière affirmation des harmonies de la crea
tion, que les vacances nous laissent le temps
d'admirer
Un souffle de fraternité sort comme une
brise salutaire de ce compagnonnage avec les
cieux aux paisibles ou belliqueux nuages pas
sant en escadres, avec le paysage apaisant,
avec les fleurs et les arbres qui foment de
leurs fcotaniques broderies et de leurs gui
pures, avec les insectes, avec les oiseaux,
avec toute l'animalité obscure, avec ce prodi-
gieux ensemble cosmique qui nous pénètre,
nous traverse et nous fait vibrer a l'unisson.
Le Coeur n'est généreux, vaillant et sen
sible, fesprit n'est largement ouvert et prêt
pour les harmonies sociales, que lorsqu'il a
compris cette immense harmonie 1
Vivent les vacances
A bas les pénitences 1
SUPPLEMENT AU
D'YPRES
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