L'OPINION, Journal d'Ypres. mon ami, lui répondis-je, je n'aurais pas eu la con science en paix. Mais, curé, reprit mon. jeune vi- caire, vous n'avez done pas lu le mandement de Monseigneur Le choix des moyens est line affaire tout a fait accessoire ga y est tout au long.Oui, mais le mandement ajoute pourvu qu'ils soient tou jour s honnêtes et lêgaux. Ah bah! dit-il dun ton leste qui me froissa vivement, honnêtes et légaux, e'est mis la pour les imbeciles, mais les gens d'es- prit savent ce que cela veut direquant a moi, je n'aurais pas été embarrassé de jurer.C'est possi ble, Monsieur le vicaire, répliquai-je vivement a c.e jeune écervclé, mais il est possible aussi que mes paroissiens ne se seraientpascontentbsdevotreser- ment. J'ai l'honneur d'être, Monseigneurde voire ex cellence, le très-humble et très-obéissant serviteur. m... curé li... Monsieur le rédacteur, Passé quelques semaines, vous avez vu comme moi les stations de chemin de fer grouiller de jeunes gens encore imberbes, vêtus de robes noires, aux manières généralement communes, au regard fier et arrogant, se livrant des conversations bruyantes et souvent des éclats de rire qui choquaient la bienséance a leurs bréviaires tout le monde recon- naissait les séminaristes en vacance. Cettejeunesse, presqueentièrement recrutée dans les fermes, ou poussée vers Bruges par la bourse de quelque ame charitable n'en peut rien, si son éducation première fut fort négligée, éloignée du monde, un peu par calcul beaucoup plus par goüt, elle passe le temps de repos a fumer force pipes, a boire force bière et jouer avec quelques vieilles dévotes force parties de cartes. Chacun sait que le jeune clergé frangais regoit une éducation plus en conformité avec Ia haute mission qu'il est appelé k remplir dans le monde, et que sous ce rapport comme sous beaucp d'autres il l'emporte considérablement sur la population de nosséminaires. Aussi la France ne nous donne-t-elle pas l'exemple de tant de pasteurs, vieux et jeunes, qui sous prétexte de répandre la parole de Dieu, jettent cliaque semaine a la face de leur aucfitoire de révoltantes. accusations, déshonorent la chaire par un langage de bas étage, couvrant de mépris ce que la commune possède de plus honorable, dé- versent leur bile contre tout ce que le monde ci- vilisé a depuis longtemps adopté dans ses moeurs, les spectacles, les concerts, les conférences litté- raires, les bals, les sociétés de musique, les fètes populaires, etc., et par dessus tout prêchent poli tique a une réunion de femmes et d'enfants qui n'y entendent pas plus que leurs fougueux pasteurs. II semble que les saints Evangiles ne sont plus dignes de passer sur les Ièvres de notre clergé? Ou bien la proposition inverse serait-elle plus vraie? Je ne veux citer aucun nom propre, mais en ap- prenant de toutes parts les extravangances et l'expression est trop faible auxqueïles nos prê- tres se livrent avec un déplorable ensemble, l'on se demande s'ils ont pris k tache d'éteindre dans le coeur de nos populations tout sentiment de respect pour la religion dont ils sont les ministres? Ils réussiront sans nul doute, car la violence qui nuit aux meilleures causes, ne saurait être utile a pro- pager les doctrines pacifiques et charitables du Christelle en est elle-même la négation. Dans la commune que j'habite le prédicateur après avoir pendant vingt minutes sans ménagerni les hommes, ni les choses, crié comme un éperdu, et frappé du poing comme un homme atteint de fo lie termina par cette péroraison Elisez les candi- dats de M. le curé, et vous aurez ici-bas l'avant goüt du bonheur qui vous attend dans l'autre monde. Dans la commune de R..., le curé dun ton mena- gant s'écria Prenez garde k voussi vous votez pour un libéral, Dieu vous refusera sur votre lit de mort les secours de la religion et votre ame k deviendra la proie des Hammes éternelles... C'est du délire, direz-vous, M. le rédacteur; oui c'est au moins cela. Cependant n'attendons rien de mieux pour l'avenir; car comme le disait votre jour nal propos du mandementle seandale vient d'en haut. Le clergé inférieur est au paroxisme de l'exaltation. C'est la guerre désespérée du fanatisme contre la société moderne, ses institutions, ses li- bertës, ses usages, ses moeurs; c'est l'esprit d'into- lérance puisant ses forces dans l'ignorance des masses et luttant contre la civilisation et les pro- grès du siècle. La lutte sera longue, nos campagnes surtout en souffriront beaucoup, mais la victoire est dans les destinées mêmes de l'humanité. Ce (}ue nous voyons a l'approche des elections en dehors de nos* églises n'est pas moins édifiant que ce qui se passe dans le temple. Les voitures pu- bliques, les convois, les gares sont encombrés de de prêtres au regard affairé, s'isolant dans un coin, ils se causent vivement k l'oreille, le plus souvent en latin; .leurs allures sont celles de dangereux conspirateurs; ils trainent a leur remorque un brave et vieux bourgmestre de village, un obscur influent de la campagne, ou quelque Monsieur St-Vincent Pauliste, des bulletins et des listes électorales ont pris la place du bréviaire; ils vont dans quelque club si déja ils n'en revieniient roulant dans leur cer- veau exalté les influences diversesüexercer sur les électeurs, combinant les calomnies k répandre dans telle familie, les menaces d'excommunication destinées pour telle autre, ils jettent autour d'eux des regards pleins de haine et de vengeance; cha cun les observe, ils observent toutle monde. Oh vous, ministre de Dieu, que n'êtes vous au chevet de vos malades, récitant les paroles saintes qui conduisent les ames dans le sein du Christ; que ne priez-vous pour vos brebis égarées; que ne mé- ditez-vous les grandeurs infondables de l'éternel? Yous seriez mille fois bénits si votre main tendait au pauvre les écus que vous dépensez follement en courses électoralesVotre nom serait prononcéavec respect, si au lieu de souffler la discorde, vous pré- pariez pour dimanche prochain un sermon de paix et d'amour. Allez vous vous êtes souillés au contact du monde, votre esprit passionné est devenu incapable de penser Dieu, votre coeur rempli de fiel ne con- nait plus l'amour du prochain. Vous n'êtes plus prê tres, vous avez apostasié pour devenir courtiers électoraux Le monde vous a jugés Pardon, M. le rédacteur, si mon sujet m'en- traineje ne dis pas la millième partie de ce qui est répandu dans nos populations Je m'arrêterai ce pendant, de peur d'abuser de la complaisance que j'ose réclamer de vous, en vous priant d'insérer ces lignes dans votre estimable journal. Agréez, etc. Nous avons aecueilli la lettre qui précède d'au- tant plus volontiers, que l'opinion émise par notre correspondant sur l'intervention du clergé dans les elections est pleinement confirmée par les magni- fiques paroles qui vont suivre Mandement de Me' Charles, évêque de Montpellier (IJ février 1844.) k Les luttes électorales, vous lesavez sans doute, Monsieur le curé, vont commencer au milieu de nous; elle seront ardentes, acharnées peut-être. Dans cette prévision, nous avons cru qu'il était de notre devoir de vous tracer d'avancela lignede con duite que vous avez a suivre, et de laquelle nous désirons que vous ne sortiez pas. Quelles que soient les opinions qui divisent le pays, les hommes qui les professent sont nosfrères, Nous avons la charge de leurs ames; nous les ché- rissons tous dans les entrailles du Sauveur. Comme l'Apötre, nous n'oublions pas que nous sommes les débiteurs de tous, et que, comme lui encore, nous sommes tous tous pour les gagner tous a J.-C. Ce que nous attendons de vousM. le curé, ce que nous vous recommandons expressément dans cette cir- constance c'est une stricte et sévère neutralité cette neutralité, k la sagesse de laquelle tous les partis, après le moment de la lutte et de la colère, sont obligés de rendre hommage, et que vous pres- crivent également les saints intéréts de notre minis tère, l'opinion de tous les hommes graves, et nous pourrions le dire, la conscience chrétienne en générale Ce n'est jamais sans danger que le prêtre descend dans i'arène de la politique, la charité en souffre, la dignité du sacerdoce y perd, la sainteté de la pa role divine est compromise. Une partie de son trou- peau s'éloigne du pasteur, et pleine contre luide colère, elle repousse son ministère'sacré; elle ne cesse de le poursuivre de ses accusations et de ses ven geances. Combicn parmi vos collègues, M. le curé, qui ne peuvent attribuer qua une cause pareille, les ennemis dont ils se plaignent, les embarras detoute espèce qu'on leur crée k chaque instantde la des maux incalculables la religion rendue solidaire de l'imprudence de quelques-uns de ses ministres, notre mission divine méconnue, et les ames se per- dant, paree quelle ne voientplus en nous les repré- sentants seulement de J.-C. Ahne soyons jamais des hommes de parti; restons dans notre sanctuaire au pied de la croix, c'est ld quil faut attendre nos frères, les appeler autour du divin maltre, pour les apaisser, les réconcilier entre eux leur parler de Dieu et de leurs ames, des des tinées de ces ames auprès desquelles les plus gran- des choses d'ici-bas et les destinées mêmes des em pires, sont si peu de chose en réalilé. Vous voudrez done, M. le curé, pendant la lutte qui s'engagera bientót, vous placer au-dessus de toutes les insinuations de quelque part qu'elles vous viennent, et demeurer entièrement neutre. Nous ne vous laisserons pas ignorer que tout ce qui serait fait par vous contrairement aux prescrip tions de notre présente circulaire, encourrait de notre part un blame d'autant plus sévère que nous ne saurions jamais comprendre autrementnos devoirs envers l'Eglise et envers le Roi, auxquels nous lient d'augustes et solennels serments, que nous devons et que nousvoulons gar der. M. le sénateur Van Wouwen et quelques autres libéraux de la même trempe ont constitué k Dix- mude une association cléricale, en prenant toujours le titre trompeur d'indépendants. Ils sont 12 mem bres, dont 5 ne sont pas électeursil y a un prési dent, un vice-président, deux secrétaires et deux trésoriers; restent done 6 membres non titrés.Dans leur première réunion, ils ont proclamé dl'manimité M. de Coninck, candidat libéral, indépendant aux prochaines élections. Dans une seconde réunion, ils se proposent de lui remettre un témoignage de leur estime... Que sera-ce?... Nous l'ignorons; mais, si nous avions voix au chapitre, nous proposerions... un masque d'honneur. Dans l'avant-dernière réunion de l'Association li bérale M. le président a rendu compte du résultat de la collecte faite en faveur d'une pauvre femme d'ouvrier qui venait de perdre son mari. Le produit en a été de fr. 48-48. L'auteur de la proposition, M. Eisenlofiel, a déclaré que sa demande avait un double butcharitable d'abord, politique ensuite. Elle devait démontrer a tous que la charité n'est pas l'apanage exclusif des cléricaux comme ils le pré tendent, mais que, pratiquée par tous les partis, elle est dans l'esprit de tous les peuples et de toutes les religions. C'était une éloquente réponse aux ca lomnies dont on ne cesse d'abreuver les libéraux. L'assemblée l'a compris et d'unanimes applaudisse- ments ont aecueilli les paroles de M. Eisenlofiel. Aetcs ofliciels. Chroniqne electorale. L'Impartial nous apprend que le parti catholique it Bruges portera comme candidats aux prochaines élections MM. So»- nens, avocat, Van Ockerhout et ltonse, avocats. VAssociation libérale et union constitutionnelle de Gand a tenu avant-hier, lundi, unc assemblee générale h reffel de choi- sir le candidat définitil'pour l'élection du 9 juin. Trois orateurs ont pris la parole, M. Metdepcnningen, vice-président de l'As sociation M. Ernest Vandenpeercboomreprésentant, et M. Ch. de Kerckhove-Delimon, bourgmestre de Gand, candidat proposé par les sous-comités. Le dépouillement du poll a con state que 709 membres ont ratiflé le choix. En conséquenco M. Ch. de Kerckhove-Delimon a été proclamé candidat de l'As sociation libérale. Le Bien public annonce que les cléricaux ont adopté pour candidat h la Chambre des représentants, en remplacement da M. Van de Woestyne, M. Evariste Cannaert, avocat. N'est-ce pas un canard? M. Cassiers, sénateur de l'arrondissement de St-Nicolas, a adressé au comité électoral catholique une circulaire dans la quelle, après avoir remercié les électeurs de leurs constantes sympathies, il déclare no plus pouvoir accepter le renouvelle- ment de son mandat. On annonce que M. de Schiervel, récemment envoyé au Sénat paries électeurs de l'arrondissement de Tongres, en remplace ment de M. de Renesse-Breidbaeh, décédé, se voit forcé, pour des motifs de santé, de ne pas accepter le renouvellement de son mandat. L'Association libérale deLiége, sur la proposition de M.For- geur, sénateur, a voté une adresse de felicitation h VAssocia tion libérale de Bruxelles, k propos de la convention votée la semaine dernière. L'Association libérale de Waremme s'est réunie lundi der nier pour son assemblée annuolle, et pour choisrr le candidat de l'opinion libérale dans l'arrondissement de YVaremme, pour l'élection d'un sénateur qui aura lieu le 9 juin prochain M. dc Sélis-Longchamps, président de l'association et sénateur sortant, a été acclamé h runanimiló. i .—mil X...> le 23 mai 1863. Par arrêté royal du 20 mai, un subside de 900 francs est alloué 4 la commission directrice de l'atelier d'apprentissage de Passchendaele pour contribuer aux dépenses de cette institution pendant I'année 1863. Une sornme de 881-73| est allouée sur les fonds provinciaux 4 l'elïet d'aidcr a exécuter quelques lravaux supplémentaires au pont dit Steen- straete sis au passage de la route provinciale d'Ypres a Dixmude, sur le canal d'Ypres.

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L’Opinion (1863-1873) | 1863 | | pagina 3