JOURNAL CYPRES ET BE t'ABRONOÏSSEKIËNT.
YPRES, Dimanche.
PHESilÊRE AJKIÏÉE. Ui» 11.
26 juillet 1868.
Le Journal parait le dhnanche de ehaque semaine.
Laissez dire, laissez-vous bklmer, mais publiez voire pensee.
ÏPEES, «O jullie* «863,
L'Etat cl la Liberlé d'eiiseignemeiil.
Nous assistonS a utie nouvelle evolution du parti
catholique sur la question de l'enseignement pri
maire. Battu sur le terrain des principes constitu
tionals, justement ému du mouvement d'opinion
qui se prononce chaque jour plus énergiquement en
faveur de la revision de la loi de 1842, prévoyant la
ruine prochaine et compléte du régime de pr'ivilége
sur lequel il avait assis la domination du clergé dans
l'école; il change brusquement de front et tourne
eontre l'enseignement donné par l'Etat, ses armes
devenues impuissantes a sauvegarder ses positions
actuelles.
Aussi longtemps que le prêtre a règné dans nos
écoles en maitre absolu, aussi longtemps que le
gouvernement a fermé les yeux sur l'outrecuidance
toujours croissante de ses prétentions, le parti clé-
rical s'est bien gardé de contester a l'Etat le droit
d'enscigner. II était le premier, au contraire, a pro-
clamer la nécessité d'une vaste et forte organisation
de l'enseignement primaire aux frais du trésor pu
blic. Que voulez-vous, on était plein d'illusionsOu
occupait depuis douze ans toutes les avenues du
pouvoir et Ton croyait fermement que les portes de
l'enler ne prévaudraient jamais eontre une forteresse
si bien gardée. Que craindre, en effet, d'un parti qui
nc eomptait, en 1842, qu'unedouzaine de voix dans
la Chambre
Mais les tempssont bien changés depuis.Cette in-
lime minorité dont on se raillait, avec laquelle il n'y
avait pas a compter, elle a grandi et tellemen't
grandi, que toute illusion est devenue impossible;
l'édifice del842 craque de toutes parts. Leministère
résiste encore, ilestvrai, mais faiblement; on sent
qu'il ne demanae pas mieux que d'avoir un peu la
main forcée. Le moment est proche, belasou il
faudra déloger de l'école et céder la place au pou
voir civil, trop longtemps humilié et méconnu.
C'est alors, pour la première l'ois depuis trente
ans, que fori songe a contester a l'Etat la légitimité
de son intervention dans l'enseignement primaire.
Le mot d'ordre est donné a toute la presse eléricale
et de toutes parts surgissent des protestations éner-
giques eontre la pretention audacieuse de l'Etat qui
s'arroge le droit d'organiser et de défrayer des
écoles publiques, au détriment de la liberté. Vous
êtes incompétent en matièred'enseignement, dit-on
a l'Etat. Vous n'avez ni le droit ni le moyen moral
d'enseigner. Votre enseignement officie! a pu avoir
sa raison d'etre autrefois (lisez quand nous étions
au pouvoir), mais a l'époque ob nous sommes, il
fau t avoir M dans ja liberté laissez faire la li
berté, vive la liberté et plus d'écoles publiques
La liberté! Lc prestige de ce mot est puissant
chez nous. Quiconque l'invoque; a propos den'im-
porte quoi, est a pen prés sur d'etre écouté. Mal-
hcureusement pour le parti clerical, il a fait de ee
mot magique, surtout depuis quelque temps, un si
deplorable abus, qu'il aura bien de la peine, cette
Ibis, a prendre l'opinion publique au nouveau piége
qu'il vient de lui dresser. Liberté de la ebarité, li
berté de la mort, liberté de la chaire, liberté de
l'enseignement, c'est par trop de liberté» en cinq
ou six ans. M. Frère-Orban a raison on ne vous
eroira plus.
Le piége, d'ailleurs, est par trop grossier a qui
fera-t-on croire que l'enseignement donné par l'Etat
est contraire a la liberté constitutionnelle de l'en
seignement, alors que lemême article de la Consti
tution qui proclame la liberté absolue de l'enseigne-
ment stipule qu'il v aura un enseignement organisé
et défrayé par l'Etat? Admettant mème que l'Etat ne
soit pas rigoureusement oblige de donner l'ensei-
gnement,toujours est-il certain que c'est une faculté'
dont il a le droit d'user ët qu'en usant de cette fa
culté, il ne porte aucune atteinte au principe consti
tutioneel de Ia liberté de l'enseignement.
Vos écoles de la liberté, nous les connaissons. Ce
sont vos écoles de petits frères ignorantins et de
petites sceurs, dont vous avez couvert la surface
du pays; ce sont vos innombrables colléges de Jé-
suites et de Joséphites, vos centaines de pension-
nats de jcunes fdles, vos écoles normales, vos sé-
minaires, petits et grands, et par dessus cette im
mense machine, votre université catholique de Lou-
vain. Vous avez tué l'enseignement laïque privé;
vous songez maintenant a tuer l'enseignement de
l'Etat et quand vous serez resté seul maitre du ter
rain, vous vous écrierez a la bonne heure, au
moins nous voilh libres
Encore si les écoles du clergé avaient a souffrir
de la concurrence de l'EtatMais non, ces écoles
sont vivantes, prospères et le nombre en augmente
chaque année dans une proportion considerable.
Que 1'on soit fier d'un pareil état de prospérité, que
Ton en tire la preuve qu'on a pour soi laconfiance
de tons les pères de familie catholiques, rien de plus
juste, de plus légitime. Seulement on ést en droit
de se demander, en presence d'un état de choses
aussi satisfaisant pour le parti catholique, de quoi
il peut avoir a se plaindre?
Tous les pères de familie catholiques envoient
leurs enfants dans ces écoles; il I'affirmë et il s'en
fait gloire. Les écoles de l'Etat ne sont done fré-
quentées que par les enfants des citoyens qui n'ai-
ment pas l'enseignement donné par le clergé. Sup-
primer les écoles de l'Etat, c'est placer ces citoyens
dans l'altcrnative de priver leurs enfants de toute
espèce d'enscignemcnt ou bien d'en accepter un qui
n'est pas de leur goüt. Est-ce la la liberté que le
parti catholique réserve a ses adversaires!
Faites eomrne nous, nous dira-t-on; nous fondons
des écoles catholiques, fondez des écoles laïques.
Mais nous ne sommes pas dans des conditions éga-
les pour entreprendre une semblable latte et c'est
préeisément a cause de cette immense inégalité de
forces que l'Etat est oblige d'intervenir pour assu
rer la liberté des pères de familie qui ne se soucient
pas de vous confier l'avenir de leurs enfants, Vous
avez pour vous tous les autres que vous faut-il de
plus?
La latte d'individu a individu, voila la liberté.
Est-ce que le clergé, lui, n'est qu'un individu? II
compte pour quatre ou cinq millions dans le budget
de l'Etat, sans compter line foule de subsides. II est
organisé en une vaste hiërarchie dont la base cou-
vre lesol de la Belgique tout entière. Sa puissance
morale est immense et l'on sait par cxpérience s'il
est a-vare d'en user chaque l'ois qu'il s'agit d'abattre
ceux qui le gênent. Et c'est au nom de la liberté
qu'un pareil adversaire prétend défier de simples
particulier® dans le champs closdc la concurrence?
Le piége, nous le répétons, est par trop grossier.
Voulez-vous,'.Messieurs du clergé, que l'on cröie
en la sincérité de votre amour subit de la liberté?
Commencez par renoncer a vos traitements et avos
subsides, car n'est-ce pas une chose contraire a
toute liberté que d'obliger lesimpies,les hérétiques,
eommé vous les appelez, a contribuer .de leurs de
niers a votre entretien et ii celui de vos églises?
Vous me direz que la Constitution le veutainsi.Mais
remarquez cependant que si la Constitution fait un
devoir a l'Etat de vous reconnaïtre un traitement,
elle ne vous en fait pas un, h vous, de le recevoir et
que vous êtes parfaitement libre de le- refuser. On
pourrait, d'ailleurs, pour sauvegarder le texte de la
Constitution, vous reduire a très-peu de chose, a
deux ou trois mille francs en tout, -ee qu'il vous
faut pour vos aumönes. Pour le surplus, vous au-
riez a vous adresser a la liberté, qui vous est si
chère, et a la confiance des pères de familie dont
vous vous parez avec tant d'ostentation. A ce prix,
mais a ce prix seulement, nous consentirons a des-
cendre avec vous dans l'arêne de 1'enseignement et
nous joindrons nos instances aux vötres pour en
gager l'Etat a nous faire de la place.
Des barrières et de leur aboüliou.
II
Nous avons en Belgique sur les routes de
l'Etat875 barrières.
Sur les routes provinciales 289
Sur les routes concédées et
ponts a péages245
Sur les chemins vicinaux de
grande communication et de pe
tite vicinalité624
Sur les passages d'eau exploi-
tés au profit du trésor 164
Total. 2,194 barrières.
Qui ont rapporté, en 1860, les sommes suivantes
Sur les routes de l'Etat. 1,601,708 fr.
provinciales. 368,605
concédées 471,696
vicinalcs. 255,196 -—
Sur les voies d'eau 74,212
Total. 2,768,417 fr.
Dans Ia Flandre occidentale il n'y a aucune route
concédée qui pefeoivc un péage. Dans cette pro
vince les routes de l'Etat rapportèrent dans le cou-
rantdefannée 1860,pour 1321ieues fr. 187,895
Lesroutesprovinc.pour361ieues 42,930
Les chemins vicinaux a péages pour
69 lieues 85/000 4-6,126 56
Les passages d'eau655
Total.fr. 277,606 56
Nous n'avons pu nous procurer les rapports
exacts des demières années; c'est pourquoi nous
avons été forcés de donner ceux de 1860. Mais de
puis lors il y a cu peu de changements.
L'abolition des barrières est aujourd'hui généra-
lement demandée. On a fait valoir de nombreux et
plausibles griefs eontre cette taxe qui a pris nais-
sance sous la féodalité et qui supprimée dans la plu
part des pays de l'Europe continue a exister dans
un état qui a aboli tous les droits féodaux, et dans
lequel toutes les libertés modernes sont proelamées
et raises en pratique.
Dans un rapport communiqué a la Chambre des
représentants, le 2 lëvrier 1861, rapport ne nonte
nant aucune conclusion formelle, on s'exprimait
ainsi
Si l'on s'en rapporte aux opinions défavorables
a la taxe des barrières, elle est. vexatoire, oné-
reuse, odieusc, altentatoire a la liberté. Elle prête
a la fraude, elle n'est pas proportionnée aux re-
venus et aux capitaux. Elle pèse presque toute
entière sur les habitants des campagnes. C'est un
vestige de la féodalité qui met obstacle aux liai-
sons,' établit une separation entre les villes et les
campagnes, et entrave le développement du com-
merce, de l'industrie et surtout de l'agriculture.
Enfin, la nécessité de supprimer les barrières ré-
suite des changements que les chemins de fer ont
apportés h la circulation.
Le résumé qui précède est celui de l'opinion que
nous eroyons la plus vraie. Les barrières causent
On sabonne a Vpres au bureau d* Journal ehez Felix Limbin, imprimeur-libraire, rue de Dixmude, no33,eta Bruxelles Chez I'éditeur.— Prix d'abonnementpour la Belgique 8 fr. par an; 4fr. 50 c. par somcslre; pour
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