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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
YPRES, Dimanche.
I'su iiiiju: twi i:. a
16 aoüt 1861
Le Journal parait le dimanche de chaque semaine.
Laissez dire, laissez-vous blamer, mais publiez votre pensée-
1PIU5S, 16 aoüt 1863,
De l'éilucation de la femme.
De l'éducation de la femmepeuvent dépendre le
salut ou la perte de la société. Cette rigoureuse vé-
rité nous prescrit, comme l'un de nos premiers de
voirs, de travailler k ce que cette éducation soit di-
rigée dans le sens de la droiture, de la justice, de
la vérité.
Au rebours de ce principe qui consacre l'impor-
iance de la femme dans l'état social, il estgénéra-
ïèment admis que la femme n'est qu'un être passif
sans influence qui lui soit propre, un complément
indispensable a la vie purement matérielle ou, tout
au plus, un frivole ornement dont la grace fait tout
le mérite, comme une fleur inutile, mais qui plait
par son parfum. Certes, nul de nos contemporains
iiayouera pareille chose;, mais chacun dans son for
intérieur sera forcé de constater avec nous que s'il
existe un abus social, c'est celui qui consiste a ran
ger la femme parmi les pauvres de Intelligence;
ii y a la dedans uil peude despotisme et surtout une
profonde injustice.
II est vrai qu'il y a progrès. Dans l'antiquité, la
femme était un objet, un meuble qu'on nous par-
donne cette expression. Au moyen age un con-
cile discutant gravement la question de savoir si la
femme avait une ame, il ne s'en l'allut que de quel
ques suffrages que la négative ne fut mise en arti
cle de foi. Depuis lors, il est admis et reconnu que
la femme est un être doué d'une ame immortelle,
mais it la condition de ne pas s'en servir, comme les
enfants que l'on gratifie d'une pièce dargent neuve.
Tout porte a croire que, dans un temps donné, la
pièce d'argent s'en ira en gros sous sans qu'on y
prenne garde, et qu'il flnira par n'en rien rester. La
position morale de la femme n'est done pas senle-
ment le fruit d'une injustice, mais elle constitue, en
outre, une erreur des plus maladroites, dont les ré-
sultats sont a prévoir et surtout il éviter.
On nous répondra que la femme est un être trop
faible pour qu'on puisse lui confier sa propre res
ponsabilité:Cercle vicieux.Tant que vous nour-
rirez de mets fades un estomae bien conformé, vous
n'aurez qu'un être débile et malingre, vous ne pro-
duirez qu'une espèce d'avorton; a qui done vous en
prendre, si la femme morale est une créature faible
et chétive? L'est-elle par sa nature? Dans ce cas,
comment le savez-vous? Pour admettre Finfirmité
naturelle de la femme, ne faudrait-il pas d'abord
avoir pu la constater? Peut-on contester a un être
quelconqueune faculté dontl'exercice ne lui a jamais
été permis? Avant de déclarer la femme incapable
de se eonduire, mettez-la d'abord a l'oeuvre et puis
jugez.
Les dames chinoises ne peuvent pas marcher.
Pourquoi? paree qu'on les estropie. Qu'on ne les
mutile pas dès leur naissance, ct elles marcheront
Comme d'aiitres. Moralement, nous agissons comme-
les Chinois, puisque nous déclarons infirme la crea
ture que nous empêchons de nous prouver quelle
ne l'est pas.
Personne ne nous contestera Cette vérité; seule-
racpt et c'est ici lc point délicat 011 peut nous
demander, la femme étant rehabilitee, oü nous vou-
lons en venir et ce que nous voulons de plus pour
elle.
Ce que nous demandons aujourd'hui pour la
femme, ce n'est ni l'émancipation politique, ni
même l'émancipation civile; nous demandons a la
fois plus et moins que cela. Nous demandons
l'émancipation morale, que non-seulement elle a le
droit, d'exiger, mais qu'on ne peut lui refuser.
L'éducation k laquelle est soumise la femme est
fausse et insuffisantele but auquel on s'attache est
plutot frivole que sérieuxil consiste a inoulquer a
la femme moins des principes solides que des qua-
lités factices, propres a la faire briiler dans le
monde. Le prétexte perpétuel de ce travers est l'es-
prit même de la femme, que l'on s'obstine a croire
i'rivole paree qu'on ne l'exerceque sur des frivolités.
Que l'on applique l'esprit de la femme a quelque
chose de sérieux, et certaines qualités qui ne sont
pas dans la nature de l'homme, mais que la femme
possède a un éminent degré, rendront cette appli
cation féconde en résultats aussi précieux qu'inat-
tendus.
Certes nous ne prétendons pas qu'il faille astrein-
dre la femme aux laborieuses études théoriques qui
sont pour l'homme les conditions indispensables de
toute profession libérale. Nous ne dirons pas qu'il
faille nourrir la femme de grec, de latin et de ma-
thématiques; mais ce qu'il faut lui donner, au lieu d'un
semblant d'éducation, c'est un enseignement large
et surtout sincère, dépouillé de tous les artifices
dont on l'entoure pour maintenir la femme au des
sous du niveau moral auquel ses facultés l'appellent
a s'élever.
La base de ce svstème d'éducation est la sincérité
bistorique. Mettez'auxmainsdelajeunefillelelivrede
l'liistoire et n'en voilez au besoin que les ignomi
nies qui pourraient offenser la pudeur. Cette res
triction faite, gardez-vous bien de retrancher quoi
que ce soit, et si vous devez lui cacher certains dé-
bordements d'un Alexandre Borgia, prenez garde de
laisser considérer Philippe II comme un bon roi et
Guillaume-le-Taciturne comme un traltrefaites-lui
voir les choses sous leur vrai jour, pour que la
femme ait un jugement droit et ferme et quelle ne
puisse jamais, au nom de l'erreur, s'élever contre
la vérité.
Quand vous aurez entrepris l'éducation de la
jeune füle surcette base, il n'yaura plus ase préoc-
cuper des influences délétères de fausses doctrines
quelconques; Ia vérité tirée dupuits, rienne pourra
l'y faire rentrer, et la femme émancipée travaillera
a son tour a l'oeuvre sainte du progrès qu'a son insu
elle entrave aujourd'hui. La jeune fille, devenue
épouse et mère, apportera au foyer de la familie des
enseignements que ses enfants suceront avec le
lait, et e'en serafait de la superstition. Qu'une seule
génération entreprenne ce travail, et quelques an-
nées suffiront pour en assurer le succès. Elles fe-
ront plus pour le progrès qu'un siècle de boiteuses
réformes, incomplètes dans leurs moyens comme
dans leurs résultats.
La liberté de la presse.
Lapresse est libre.La Constitution, entre toutes
les libertés réclamées par l'esprit du siècle et par
l'éternelle raison, a distingué,pour la couvrir d'une
protection spéciale, cette liberté de la presse, qui
est la suprème garantie des principes proclamés par
le Congrès national.
La presse est libre. 11 y a dans ces quelques mots
plus que la solennelle reconnaissance d'un droit. En
déerétant cette liberté, le Congrès a compris qu'il
armait la conscience publique contre les séductions
des sophismes et qu'il reudait a jamais impossibles,
avec Ia restauralion des institutions condamnées du
passé, le retour de l'ancienne tyrannie appuyée sur
l'ignorance.
Oil la presse est libre, il n'y a pas de liberté qui
n'existe; oü elle estesclave, la force règne et le sen
timent se pervertit. Le despote n'a pas d'ennemi
plus redoutable que cette feuilleimprimée, qui s'ap-
pelle un journal et qui parle a la foule avec des ac
cents qui répondent la pensee secrète de tous.
Le Congrès national, en ordonnant que la presse
fut libre, s'étaitmontré particulièrement jaloux d'as-
surer l'indépendance de l'écrivain, l'affranchisse-
ment complet, absolu de la pensée. Pour atteindre
ce but, il avait organisé, en faveur de l'écrivain
tout un système de garanties spéciales Abolition
de la censure, suppression du cautionnement, irres-
ponsabilité de l'imprimeur, de l'éditeur et du distri
buteur quand l'auteur est connuet domicilie en Bel
gique, le jury pour juge souverain, telles étaient les
precautions principals qu'il avait cru devoir pren
dre pour mettre la presse k l'abri de toutes les at-
teintes et dégager la pensée de toutes les entraves.
Le Congrès national ne prévoyait certes pas qu'un
jour viendrait oii les tribunaux, armés de nous ne
savons quels textes du Code civil, souffïeraient sur
toutes ces garanties et les réduiraient a néant. Ils
ne soupponnaient pas qu'a vingt années de la, leur
oeuvre de grands législateurs serait détruite par
l'oeuvre des légistes.Et, cependant, qui oserait nier
en face de ce qui se passe journeliement sous nos
yeux, que la liberté de la presse n'est plus, en Bel
gique, ce qu'elle était jadis? Ne parions ni de la loi.
Faider, ni dela poursuite d'oflice, mais le-jury,cette
garantie suprème do l'écrivain, qu'est-il devenu?
Chaque jour,les tribunaux civils sontsaisisdeprocès
de presse;plus un seul,depuis dix ans,n'aété déféré
a la cour d'assises!
Le jury est supprimó.Encore un effort dé
MM.les juristes et la censure sera rétablie.DéjÜ l'on
pleide devant les tribunaux, et l'on trouve des ma-
gistrats pour appuyer cette thèse, que l'article de
la Constitution qui dégage l'éditeur et l'imprimeur
de toute responsabilité quand l'auteur est connu et
domicilié en Belgique, n'est applicable qu'en matièré
repressive seulement, mais que sa responsabilité
civile, pécuniaire, reste entière vis-ü-vis de la per
sonne lésée.Quand on aura trouvé des tribunaux
pour adopter cette manière d'interpréter la Consti
tution, et l'on en trouvera, n'en doutez pas, la cen
sure sera rétablie; non pas la censure du gouverne
ment, mais une censure mille fois pire, celie de l'im
primeur, qui se refusera naturellement a imprimer
ce qui lui paraitra de nature a compromettresa res
ponsabilité. Le cautionnement sera rétabli dumème
coup, car l'imprimeur exigera de l'écrivain un nan-
tissement d'argent, a l'effet de la garantir éventuel-
ment contre les poursuites dont il pourrait être
l'objet.
Suppression du jury, rétablissement indirect de
la censure et du cautionnement, voilü le régime qui
attend la presse dans peu d'années en Belgique.
Elle qui s'appelle volontiers le quatrième pouvoir,
nous verronsbien si elle aura celui d'empêcher qu'on
l'enchaine.
Tuyndag.
II.
Foule au concert, cela se comprend, cela estiné-
vitable lorsqu'on est certain d'y rencontrer une so
ciété d'élite, parsemée des fleurs les plus charman-
tes de la ville et des environs des artistes aimés
du public et un but charitable. Malgré les anathè-
mes lancés contre elle par ceux qui prétendent au
monopole de tout même des bonnes oeuvres
la philanthropie s'est implantée dans l'esprit de nos
populations.
Pour quelques-uns la charité ne peut être faite
méritoirement que par une main sacrée, comme la
morale ne peut être enseignée que par une bouche
spécialement ouverte dans ce but. Donnez votre au-
möne M. le vicaire ou faites un legs un couveut,
et le chemin du ciel s'ouvrira devant vous aussi
large que la grande allee du bois de la Cambre.
Dans le monde, oü l'on est moins exclusif, on pense
généralement que facte est méritoire au même
titre lorsqu'on répond k l'appel fait par des ar
tistes charitables au profit d'une familie pauvre.
L'artiste y paic de son talent, les spectateurs ap-
portent leur aumöne, la soiree est délieieuse pour
LOPIMON
On s ffbonne a Ypres au bureau du Journal cbez Felix Lutein impri
et^ge[ ?0IÏ ?n sus* num6ro 25 c. Prix des Annonces ct. P
Un traite a forfait pour les annonces souvent reproduces.
tréSrai^Te <U;?iX!nude' noSS' eU B>-uxelles chcz l'éditeur.-Prix d'a
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