YPRES, Dimanche. PKEHHüke amwée. Wo s». 8 novembre 1863.
Le Journal paralt le dimanche de chaque semaine. Laissez dire, laissez-vous btómer, mais publiez votre pensee.
Comééie cléricaie.
La presse cléricaie nous a révélé, ces jours der-
niers, le plan d'une abominable conspiration oui'die
contrela minorité parlementaire. Le Bienpublic en
communique aujourd'hui les détails a ses abonnés
dans la consternation.
Chacun sait que le ministère ne dispose a la Cham
bre des représentants que d'une majorité de sixvoix.
Six voix, e'est peu. Que faire avec six voix? Le mi
nistère voit l'abime ouvert devant lui. A tout prix,
s'il ne veut mourir lionteusemcntil faut qu'il par-
viqnne a renforcer la majorité. Dissoudre les Cliam-
bres, faire un nouvel appel au pays, il en a en un
moment la pensée. Bien lui en a pris de ne pas y
donner suite, car les elections communales, qui ont
eu lieu depuis, ont clairement démontré que le pays
veut un gouvernement catholique. Mais qu'importe
le voeu du pays a des hommes tels que MM. Frère,
Rogier et Vandenpeereboom? Le soin de leurs por
tefeuilles est leur seul et unique souci.
La dissolution écartée, nos ministres se sont ar-
retés a une autre combinaison,et c'est cette combi-
naison odieuse, machiavélique, que le Bien public
■dénonce a l'indignation de tous les honnêtes gens.
L'enquête sur les élections de Bruges est termi-
née. Le gouvernement avait espéré que cette en
quête révèlerait des faits honteux de corruption a
charge du parti clerical. Eh bien, pas du tout.Tous
les efforts d'une magistrature servile n'ont servi
qu'a rendre plus éclatante la pureté parfaite des
élections de Bruges.Vous voyez d'ici la déconvenue
du ministère, qui comptaitles faire annulerd'emblée
et rouvrir a M. Devaux les portes du Parlement.
Mais si amère que soit la deception qu'il éprouve,
il n'a pas renoncé a ses projets et voici la ruse qu'il
a imaginée et qui réussira, sans aucun doute, grace
a la complicité de la majorité libérale.
Les élections de Binant ont été, comme 011 sait,fa-
vorablesauparti clérical. La, co-mmea Bruges, comme
partout oü l'opinion catholique a triomphé, l'opi-
nion publique s'est prononcée librement, sans con-
trainte, mais quand un ministère dispose a son
gré d'une majorité complaisante et aveugle, il peut
tout oser impunément. On demandera done une
enquête sur- les élections de Dinant et comme,
en attendant les résnltats de cette enquête, les
deux députés catholiques ne pourront pas prendre
part aux délibérations de la Chambre, on profitera
de leur exclusion momentanée pour emporter de
vive force l'annulation des élections de Bruges.Ces
élections annulées, M. Devaux sera réélu, paree
que le gouvernement est décidé a user de tous les
moyens pour assurer son éleetion et, avec M. De
vaux, on aura une voix de plus pour faire annuler,
a leur tour, les élections de Dinant. La corruption
gouvërnementale réussira a Dinant comme a Bru
ges MM. de Liedekcrke et Thibaut seront rempla-
cés par des représentants libéraux, et grace a cette
ruse infame, Ja majorité libérale sera reconstituée
sur un pied qui permettra au ministère de conti-
nuer de plus belle la guerre qu'il a entreprise contre
la religion catholique.
li faut que la presse cléricaie soit bien convain-
eue de l'incurable bêtise de ses dévots abonnés pour
oser leur servir de pareilles billevesées. Un homme
de bon sens ne manquerait pas dc faire cette ré-
flexion que si le ministère peut disposer a son gré
ct pour tous ses desseins, quels qu'ils soient, des six
voix qui forment aujourd'hui sa majorité, il n'a be-
soin de rien de plus pour poursuivre l'achèvement
de son oeuvre et que, s'il ne peut pas Compter sur
ces six voix, il faudrait qu'il ent perdu la tête pour
oser demander a cette majorité chancelante une
chose aussi monstrueuse que l'annulation d'une
éleetion parfaitement librc ct réguliere. Mais les
journaux cléricaux, apparemment', n'ont a redouter
de leurs lecteurs aucune csgLco dc raisoupement, si
élémentaire qu'il soiti Cés bienbeureux lecteurs ont
la foi qui renverse les montagnes. Discuter, veri
fier, leur fait peur; ils préfèrent croire c'est plus
simple et plus sur.
Toutes ces sornettes imaginées par les journaux
catholiques ont d'ailleurs un but facile a saisir. On
cberche par la a discréditer d'avance les résultats
des enquêtes de Bruges et de Dinant, dont on a
peur. Bien qu'ils feignent une profonde tranquillité,
MM. les faiseurs de Bruges et de Dinant ne sont pas
sans éprouver de violentes inquiétudes, quant aux
révéiations qui pourraient surgir de ces enquêtes;
ils ne se sentent pas tellement immaculés qu'ils
riaient rien a redouter des sévérités de la justice
et du jugement de la Chambre. Pour venir a leur se-
cours, les journaux cléricaux n'ont trouvé rien de
mieux que de jeter tout l'odieux possible, et sur la
magistrature qui dirige ces enquêtes, et sur le mi
nistère qui les a ordonnées. fïatons-nous, se sont-
ils dit, de dénoncer ces enquêtes a l'indignation
publique. Crions bien haut et tous ensemble qu'elles
sont une oeuvre de rancune et de vengeance politi
que, une misérable intrigue ministérielle. Peut-être
la Chambre se laissera-t-elle prendre au piége et
reculera-t-elle devant i'explosion de nos menaces.
Que si elle n'en est pas arrêtée, si elle annule, mal-
gré nos cris et nos clameurs, les élections de Bru
ges et celles de Dinant, nous n'en aurons pas moins
protesté et cette protestation nous viendra en aide
dans les élections nouvelles. Quant a nos amis qui
auraient quelque compte a rendre a la justice, nous
les aurons d'avance posés en martyrs, comme d'ha-
bitude, et la vénération des fidèles, dont ils seront
entourés, compensera largement les tribulations
qu'ils auront endurées pour le service de Ia bonne
cause.
Tel est le secret de lacomédie jouée, depuisquel-
ques jours, par la presse cléricaie. Heureusement
pour elle, le public auquel elle s'adresse n'èst pas
difficile. 11 se contente do peu, pourvu que ce soit
de la haine.
La Reacties.
Hommes noirs, d'oü sortez-vous Nous sortons
de dessous terre.
Les hommes noirs d'aujourd'hui sont les mêmes
a qui Béranger adressait, il y aura bientöt un demi-
siècle, cette question, qui sera, nous le craignons,
posée plus d'une fois encore et qui recevra toujours
la même réponse.
Les hommes noirs d'aujourd'hui sont les mêmes
que ceux de la Restauration; laches, effarés, trem-
blants quand l'orage gronde; hardis, insolents
quand i! est passé.
Oü étaient-ils, en 1848, ces hommes qui s'agifent
si bruyamment autour de nous, qu'ils prétendent
gouverner, autour de nos libertés, qu'ils rêvent de
dètruire? On les croyait morts, disparus a jamais,
tant ils se i'aisaient petits et muets. Tandis que le
clergé frangais bénissait les arbres de la liberté,
priait pour les martyrs de la Révolution et saluait
de ses Te Deum la République naissante, le clergé
beige, se souvenant que son royaume n'estpas
de ce monde et voyant les affaires temporelies
en désordre, laissait aux libéraux le soin de les dé-
brouilleril renongait a la politique, sachant qu'il
était dangereux d'y touche? et qu'il se perdrait,avec
le pays, s'il s'obstinait dans des prétentions con-
damnées.
Prés de quinze années se sont écoulées depuis
cette époque la face de l'Europe a été changée.Les
républicains ont disparu. Partout une reaction vio
lente a détruit ies libertés du continent. Les hom
mes noirs se sont alors remontrés 011 les a rev us,
tels qu'ils étaient autrefois, emiemis du progrès,
défenseurs de l'intolérance, apötres de l'ignorance
et du mensonge. On les a revus dans la presse, in-
sultant a nos gloires nationales, jetant i'outrage a
nos grands hommes et s'attaquant, dans le délire
d'une rage impuissantg, aux plus beaux souvenirs
de notre bistoire. On les a vus dans les élections,
engagés dans de honteuses intrigues, recourant a
tous les moyens, a la corruption, a l'intimidation,
pour imposer leur volonté aux électeurs.
Le parti liberal n'a pas cessé de lutter contre les
hommes de la reaction; mais, il faut le dire, il a
manqué, en plus d'une circonstance, de cette har-
diesse, de cette resolution qui peuvent seules assu
rer son triomphé définitif. Sans doute, il ne faut rien
précipiter et nous avons devant nous la certitude
de l'avenir, mais a la condition que noussachions le
preparer dans ie présent. Le parti catholique, per-
sonne n'en est plus'convaincu que nous, ne parvien-
dra pas a faire de la Belgique ce qu'il a fait de l'Es-
pagne et des Etats remains, mais il la condamnera
pour longtemps a une agitation sterile. Que le parti
libéral combatte done, avec toute lenergie que ré-
clament les circonstances, la réaction cléricaie.
Qu'il réunisse toutes ses forces contre l'ennemi et
qu'il ne se donnede repos qu'il ne lait vaincu, dé-
sarmé, mis hors détat de rien entreprendre. S'il
veut présider aux destinées du pays, il en est temps
encore, mais qu'il se hate d'agir, qu'il agisse dès
aujourd'huidemain il sera peut-être trop tard.
Les élections communales en Belgique.
C'est un triomphé complet pour l'opinion libérale
que nous avons a célébr'er sur toute la face du
pays.
Le parti catholique a vu nos diverses communes
condamner forruellement les doctrines arriérées
que certains hommes avaient voulu faire prévaloir
au Congres de Malines.
Nous nous réjouissons de ce résultat pour la cause
de la liberté et du progrès.
Et la signification des élections communales est
plus grande encore, alors que Ton examine les ré
sultats de deux villes, Bruxelles et Liége, et d'une
commune, oü il n'y avait point de lutte avec le parti
catholique. La le corps électoral avait a se pro-
noncer entre 1c libéralisme tiède et exclusif de quel-
ques hommes et le libéralisme ferme et indépendant
de certains candidats. C'est le libéralisme progres-
sif qui l'a emporté, malgré toutes les influences
mises en oeuvre contre lui, malgré toutes les pres-
sions, malgré tous les ostracismes.
C'est un encouragement pour la grande opinion
libérale qu'elle s'affirme avec énergie, quelle ose
marcher en avant; elle sera suivie par le pays tout
entier.
Ce qui la compromet, ce sont les défailiances, l'es
hésitations, les transactions, les ménagements inu-
tiles ce qui l'affaiblit, ce sont les compromis; cc
qui la retarde ou la fait rétrograder, c'est la direc
tion nlolle ou onintelligente de quelques chefs; c'est
leur esprit autocratique qui ne veut rien concéder
au courant des idéés modernes. L'armée dépasse
les chefs.Que tombent les castes, et Faction sou-
veraine et spontanée des masses sera d'un élan ir
resistible. Bulletin du Dimanche.)
Nos amis de Roulers ont résolu de tirer de leur
brillante victoire tous les fruits qu'elle comporte.
Ï1 ne suffit pas, se disent-ils avec raison, que les
libéraux remportent un succès électoral, pour le
lendemain qu'ils se contentent de chanter victoire,
sans plus songer a l'avenir.
Après l'élection surtout alors le devoir re
commence. L'élection n'est que le champ de bataille
oü les deux opinions se mesurent. Celle qui s'en-
dort après la victoire se réveillera faible et inerte au
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YPI6ES, 8 novembre 38S3.
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