JOURNAL D'YPRES ET PE L'ARRONDISSEMENT. YPRES, Dimanche. i'isi hii:kb: aalijue. jüo 29 novembre 1898. Le Journal parait lc dimanche de chaquc semaine, - Laissez dire, laissez-vous blamer, mais publiez voire pensée. Les billets marqués. Lc jeu des influences, a dit M. Malou, est de l'es- sence mème du régime représentatif. Supprimez les influences et il n'y a plus d'élections. Rien n'est plus vrai. Dans un pays libre, oü le gouvernement des affaires publiques se règle sur le mouvement de l'opinion, le droit, l'intérêt, le devoir de chaeun, a l'époquè des élections surtout, c'est d'accepter sérieusement Taction politique que les institutions donnent et de ehercher, par tous les moyens qu'offre la liberté, a faire prévaloir ses sen timents, ses convictions. Mais s'il est des influences légitimes, il en est d'autres que la morale et l'inté rêt public réprouvent et dont Tusage doit être sévè- rement interdit. Au nombre des abus qui se sont révélés dans Texercice des droits électoraux, nous avons signalé, dans notreprécédent numéro, Tusage de plus en plus fréquent des billets marqués. On est parvenu, disait M. Taek, dans la séance de la Cliambre des représentants du 12 avril -1859, a organiser le système de Temploi des bulletins forcés d'une manière remarquable; on est arrivé a un degré de raffinement, un art tel qu'il est difficile de réclamercontre ces bulletins marqués.» La oü la pression s'exerce, ajoutait M. de ïheux, c'est dans le mode de désigner les candi- dats. C'est par le contenu du bulletin qu'on re- connait Télecteur. Le rapport de la section centrale chargée de l'exa- men du projet de loi sur la nouvelle repartition des membres de la Legislature n'est pas inoins affirma- tif: Aujourd'hui, y est-il dit, le controle des bulle- tins marqués désignant implicitement Télecteur se fait aisément, et pourpeu qu'on ait Texpérience de ce qui se passé dans les élections, on recori- nait saustrop 'de diflicultés,si pas toujours,quel a été Ie vote émis par chaque éleeteiir, du moins quels sont les suffrages donnés aux élus ou aux eandidats par les électeurs de certains cantons ou communes. Supposóns que Ton trouve un moyen de rendre impossible le controle des billets marqués, il est elair que ces billets disparaitront immédiatement mais,nous Tavons dit ce moyen n'a pas été trouvé jusqu'aujourd'hui et il est douteux qu'on le trouve jamais. Tout ce qu'il est possible de faire dans l'état actuel des choses, croyons-nous,c'est d'entourer ce controle de tant de difficultés et d'incertitude que Ton soit obligé d'y renoncerce qui est possible aussi, c'est de comminer des peines sévères contre ceux qui abusent de leur position ou de leur carac- tö're pour contraindre les électeurs a accepter des bulletins marqués. Les auteurs du projel de loi soumis en ce mo ment a la legislature ont reculé devant Temploi de ce dernier moven. II eüt été désirable, disent ic ils, de pouvoir punir les distributeurs de bulletins marqués, mais on a dü reculer et devant les diffi- cultés que, dans la pratique, entrainerait la re- clierche de pareils méfaits et devant la crainte de faire naitre des conllits entre les assemblees déli- bérantes et Tautorité judiciaire. 11 y a du vrai dans ces observations, mais il est remarquerqueles craintes qu'elles expriment n'ont cependant pas empèehé les auteurs du projet de loi de porter des peines sévères contre ceux qui vendent ou achètent des suffrages. Certes, l'achat ou la vente dun suffrage ne sera pas moins difficile a constater que la remise d'un billet marqué et les conllits que Ton redoute pourrqnt surgir dans un cas comme dans l'autre. Pourquoi, dès lors, cette difference? Serait-ce, par hasard que lefait de distribuer des billets marqués aurait paru, auxyeux des auteurs du projet de loi, moins répréhensiblè que le fait de vendre ou d'acbeter des suffrages? Quant a nous, l'un et l'autre nous inspirent une égale repulsion «t peut-uïre -trouverions-nous, au fond de notre coeur, plus d'indulgence pour le mal- heureux qui traflque de son droit electoral que pour l'infame qui, la menace a la bouche, oblige un élec- teur a déposer dans l'urne un bulletin marqué. Sans doutc, la recherchp d'un semblable méfait sera toujours difficilemais depuis quand la difficulté d'atteindre le coupable lui a-t-elle valu Timpunité de son crime? Et dut la menace de la loi rester sans execution, ne comprend-on pas quelle suffira pour rendre moins fréquentes les manoeuvres quelle a pour but de réprimer? Sur de Timpunité, on se livre aujourd'hui a ces manoeuvres, sans crainte, sans retenue et aveg d'autant plus d'abandon qu'elles semblent, hélas, être entrees dans nos moöurs elec torates mais quand on saura qu'il y va de la pri son, on y regardera a deux fois avant de s'aventu- rer dans une semblable entreprise et plus d'un, mcttant d'un cöté de la balance ses passions polili- ques, et de l'autre la crainte de Ja prison, trouvera prudent de s'abstenir. Nous demandons done, ct nousespéronsbien ren- contrer sur ce point l'assentiment de la presse tont entière, que la loi nouvelle contienne, en cequi con- cerne les distributeurs de billets marqués, une dis position analogue a celle qui réprime l'achat et la vente des suffrages. Mais il est, avons-nous dit, des moyens de rendre le controle des bulletins marqués tellement difficile, tellcment incertain, que ceux qui y ont recours au jourd'hui finiront par y renoncer d'eux-mêmes.Nous allons passer successivement ces différents moyens en revue. Et d'abord, qu'est-ce qu'un bulletin marqué? c'est un bulletin qui porte des énonciations propres a le faire recónnaitre a sa sortie de l'urne. Ces énoncia tions sont des plus variées et M. Tack a pu dire avec raison qu'on en est arrivé, sous ce rapport, a un degré de raffinement vraiment inouï. Cette va riété est cependant beaucoup plus apparente que réelle, et pour peu que Ton étudie les divers pro cédés mis en usage, on ne tarde pas a s'aperce- voir qu'il est facile de les ramener presque tous un procédé type, éternellement le même dans lesf variétés multiples qu'il affecte En definitive il n'y a qu'une seule manière de marquer un bulletin; c'est d'ajouter, aux énonciations indispensables1'une ou l'autre énonciation super flue qui aidèra a le faire recónnaitre.Cette énonciation superflue sera tantót un prénom de fantaisie joint a celui du candidat ou bien une qualification plus ou moins bizarre donnée a l'un des eandidats, ou bien encore un candidat imaginaire ajouté a la liste des eandidats sérieux. Quelquefois aussi, sans qu'il y eüt aucune énoncia tion superflue, le bulletin sera" reconnaissable a l'ar- rangement des noms, prénoms et qualités du candidat. Ainsi, par exemple, au lieu d'écrire M. Pierre X., bourgmestre a Z., on écrira M. X., bourgmestre, ou bien encore M. le bourgmestre Pierre X., a Z., etc. Supposons maintenant que la loi, indépendam- ment de la nullité dont elle frappe les bulletins mar qués, oblige le président du bureau a suivre un or- dre invariable et determine dans la lecture des énonciations nécessaires et lui interdise la lecture de toutes celles qui seront superllues, il nous pa rait manifeste que Ton aura, sinon tari la source du moins diminué dans une proportion considérable le nombre des billetsmarqués et, en tout cas, rendu leur controle extrêmement difficile. Quel inconve nient y aurait-il, par exemple, a ce que la loi or- donnat au président de lire d'abord le prénom du candidal, puis son nom,et enfin sa qualité, avec in terdiction de donner connaissance de toutes les autres énonciations? On enarriverait ainsi üuneuni- j formité qui enlèverait au controle toute certitude, au grand avantage de la liberté et de Tindépendance du vote. Ce controle, nous savons lous de quelle facon il est exercé un préposé, muni de la liste de tousles billets marqués, se place derrière le bureau et note ces billets au fur et a mesure de leur sortie de l'urne. Nous nous demandons pourquoi la loi nc pourrait pas accorder au président du bureau le droit d'empêcher ce travail de verification. La loi electorale a voulu que Taccès du bureau fut libre tous les électeurs et elle leur a permis de surveiller le dépouillement du scrutin. Mais lesgarantiesqu'ils trouvent dans cette sage disposition de la loi se- raient-elles diminuées s'il était permis au président d'interdire a un petit nombre d'individus de venir se placer derrière lui, le crayon la main, pour noter, un a un, les billets marqués sortant de l'urne Qu'est-ce que ce controle a de commun avec les ga ranties que la loi a voulü donner aux électeurs en stipulant que Taccès du bureau serait libre pendant le dépouillement du scrutin? Encore une fois, ces garanties seront-elles compromises paree que la loi aura autorisé le président a prendre les mesures nécessaires pour entraver ces indignes manoeuvres, évidemment attentatoires a la liberté, a la dignité des électeurs? Peut-on voir le droit, dans la per- sonne de ce préposé qui est la debout, derrière le bureau, guettant au passage les bulletins dequel- ques mafheureux, victimes d'une infame violence? Et qu'on ne nous dise pas que le président pour rait abuser de son pouvoir discrétionnaire pour ren dre impossible le controle des opérations éleetora- les. Placé sous l'oeil des électeurs, obligé d'inscrire dans son procés-verbal toutes les réclamations qui se produisent au sujet de l'élection, contrölé lui- même par les autres membres du bureau, nul arbi traire n'est a craindre de sa part et toutes les craintes qu'on pourrait élever a ce sujet sont pure- ment imaginaires. Dans un prochain numéro, nous nous occuperons du vote par ordre alphabétique et de l'idée émise par quelques publicistes de la eréation d'un papier electoral poingonné, a la manière du timbre, par le gouvernement. Après une amère critique de notre appréciation des dernières élections communales, critique parse- mée de quelques petites calomnies de sa fagon, le Progrès s'est subitement retranché dans le mutisme le plus complet. Nous savions bien qu'en indiquant Tesprit d'exclusivisme de la petite Eglise dont il est le Moniteur comme la véritable cause des échecs subis par ie parti libéral dans notre arrondissement, nous découvrions le défaut de la cuirasse, nous met- tions le fer dans la plaie; nous ne nous attendions pas cependant a voir notre confrère déserter si les- tcment le champ de la discussion. On n'écrit pas un article sur un ton si solenuellement doctrinal sans avoir les poches bourrées d'arguments pour écra- ser son contradicteur; pourtant cette fois il n'en était pas ainsi, parait-il, et la gravité magistrale du Progrès avait quelque affinité avec celle d'un fameux personnage de pantomime. Tant de bruit, tant d'efforts s'en vont en vaine fumée! En vérité, c'est dommage Nous ignorons, du reste, de quels prétextes Tes prit inventif de notre confrère pourrait colorer ce silence, mais nous sommes persuadé qu'il aura beaucoup de mal a y faire voir autre chose que ce qui est en réalité une retraite mal déguisée. CoiTespondaiice particulièrc de L'OPIMON Mille bruits divers continuent courir dans la presse étran- gère au sujet de l'invitation qui aurait été faite au roi des Bei ges d'assister au Congrès de Paris, mais c'est en vain qu'on in- terpelle le Moniteur lui seul a l'air de ne sedouterderien,de ne pas mêmo savoir ceque lonveut dire. Les journaux francais I.OPIMOY On s'abonne :t Ypres au bureau du Journal chez Féux Lumbw, imprimeur-libraire, rue de Dixmude, n» S3, et it Bruxelles chez l'éditeur.— I'rix d'abonnlsjontpour la Belgique 8 fr. par an; 4 fr. 50 c. par semestre; pour l'étranger le port en sus. ün numéro 25 c. Prix des Annonces et des Réclames -10 e. la petite ligne; corps flu journal 30 centimes le tout payable d'avance.' On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'argent doivent être adressés frunco au bureau du journal. YPRES, 99 no vein lire 186». (2° ARTICLE.) Bruxelles, le 27 noyembre 1863.

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L’Opinion (1863-1873) | 1863 | | pagina 1