JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT
YPRESj Dimanche
Deuxième année.
N° 3.
17 Janvier 1864.
paraissant le Dimanche de chaque semaine.
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YPRES, 87 Janvier.
LA POLITIQUE SE TRANSACTION-
Les premières joie» du triomphe épanchées, Ie
perti clérical ne se trouve pas peu embarrassé de sa
victoire. Le cabinet libéral est renversé, les avenues
du pouvoir sont libres, il n'a pius qu'un pas a faire
pour s'en saisir; mais au mement d'a'lteindre le bul
suprème de ses désirs, le sentiment de son impo-
pularilé l'écrase, l'cxcès des engagements qu'il a
eontractés dans l'opposition l'épouvante et nous le
voyons, trouble et hesitant, chercher dans nous tie
savons queiles combinuisons tortueuses les moyens
de dénouer les dilficultés d'une situatiou qu'il ue
se sent pas 1 audace de dominer.
Quant a nous, libéraux, notre position est bien
nette et bien claire le parti caiholique a renversé
le ministère, c'est lui de pourvoir a son remplace
ment. Quels que soient les elioix auxquels il s'ar-
rète, nous n'avons pas d y interveuir ui k indiquer
nos préférertces. Vatncus, nous avons aecepté fran-
chement, loyalement notre défaite on ne peut
nous demander rien de plus.
Mais nos clérieaux n'entendent pas les choses de
eettefagon. Couva-ncus qu'un ministère catholique
pur, si modéré qu'il paraisse, n'a aucune chance de
duréc, ils tendent la main a leurs adversaires de la
veilleet s'offrent a composer avec eux te qu'iis ap-
pellent un ministère de modération, de conciliation
de transaction, Ie seul, disent its, qui convienne
la situation et qui soit dans les désirs du pays.
Ces avances, nous en sommes eonvaincus, seront
repoussées comme eiles mériient de l'ètre. Ce n'est
pas au lendemain du Congres de Malines, ce n'est
pas après les indignes calomnies dont le parti libe
ral a été abreuvé dans ces derniers temps, qu'on
trouveraparmi nousdes hommes assezfaibles,nous
allions dire assez lachespour accepter U main de
nos plus cruels ennemis.
Un ministère mixte, ose t-on dire, est dans les
vceux du pays.Mais oii, dans queiles circonstan-
ces le paysa-t-i! manifesté un pareil voeu? A aucune
époquede nos luttes parlementaires, les partis n'ont
été plus nettement tranchés que pendant les deux
dernières sessions. Sur toutes les questions poliii-
ques soulevées depuis deux ans, libéraux et catho-
ques se sont carrément divisés, sans laisser place a
aucune nuance intermédiaire. Si le pays, comma
on l'insinueaujourd'hui, est fatiguéde ces divisions,
il veut un gouvernement de transaction et de mo
dération, pourquoi n'a-t-il pas saisi l'occasion des
elections de juin dernier pour faire prévaioir sa vo-
lontó? Est-ce, par hasard, dans les élections d'An-
vers, qui ont porté un si rude coup au cabinet libe
ral, que l'on voudrait trouver la preuve que le pays
désire Ia pacification des partis? Et si vous objec-
tez que les élections d'Anvers ne sont qu'un acci
dent, nous vous défierons de nous citer le nom d'un
seul représentant arrivé a la Chambre par suite des
élections dernières qui représente ce prétendu
voeu du pays d'etre gouverné par un ministère
mixte.
Les ministères mixtes, nous les connaissons,
nous les avons vus a l'oeuvre. C'est eux que nous
avons dü la loi du fraciionne-nent, tombée depuis
sous le poids de la reprobation publique. Ce sont
eux qui nous ont ravi la plus préeieuse de nos liber-
tés communale», la nomination des bourgmestres
dans le sein du conseil. Ce sont eux qui, par leurs
coupables complaisances, ont mis l'enseignement
pubic aux mains du elergé et consacré sa puissance
politique. C'est sous un ministère m:xte, appuyé
par une majorité modérée, que la section centrale de
la Chambre des repré»entants votait l'unanimitê
l'adoptiou de la fameuse proposition Dubus Bra
bant; c'est ceite mème majorité modéréeeufin,
qui dans la riominaiion des jurys d'examen pour lt s
grades universitairesirahissait ses prél'érences
pour rUriiversité de Louvain par des choix qualifiés
plus tard de seandaleux par M. De Theux lui-
inème. De ces ministères, de ces majorités, le pays
n en veut plus et quiconqtie tentera de les lui faire
accepter est fatalernent condamué l'impuissance.
Le parti clérical se montre très-effrayé a l'idée
d'occuper seul le pouvoir. Pourquoi done ceite
frayeur? S'il n'a d'autre hut, comme il le soutient,
que le inainlien de la liberté religieuse, s'il n'as-
pire qu'a conserver intacte la liberté de l Eglise
catholique, que peul il avoir a redouier dans un
pays aussi profondément libéral et caiholique que
le nótre Qu'a-t il bcsoin du cancours des libéraux
dans une oeuvre aussi éminenament populaire? Lui
serioos-nous devenus tout a coup si chers qu'il
voulüt partager avec nous la gloire d'une semblable
entreprise? Nous avons peine le croire. II y a
done une autre raison a ces belles avances qu'on
rious fait aujourd'hui et cette raison n'est pas diffi
cile trouver on veut poursuivre l'oeuvre com-
mencée et se couvrir de l'adhésion de quelques li
béraux, aveugles ou traitres, comme d'un manteau
contre rimpopularité dont on se sent entonré. 1857
a laissé des souvenirs dans l'esprit de nos cléri
eaux ils comprennent qu'abandonnés eux-mê-
mes, livrés k leurs propres forces, ils n'ont d'autre
choix faire qu'entre l'inaction ou la certitude d'une
chute immediate. De lè, les efforts qu'iis font pour
nous compromettre avec eux dans leurs seerètes
menées et pour s'abriter derriere la popularité du
parti libéral. Efforts supei flus, vaines tentati -
ves Le parti libéral ne se divisera pas. Vaincu
par le scrutin, il cède la place k ses adversaires. A
ceux-ci de la prendre, s'ils l'osent, de la garder, s'ils
le peuvent.
CONFÉRENCE DE. 31, BANCEL
SUR
LA ÏONTAÏNE.
SiiIte. (Voir notre n* du 10 Janvier).
Si nous admettons ces allusions aux événement»
coniemporains, nous devons cependant reconnaitre
qu'elies présentent un écueil, surtoui pour M. Ban
cel qui n'est point professeur de littérature par vo
cation, mais qui l'estdevenu par nécessité. Avoeat,
homme politique avant tout, M. Bancel doit éviter
de se laisser entrainer par ses souvenirs et ses aspi
rations. Les digressions morales et politique» pui-
sées dans les événements contemporains doivent
évidemment se limiter aux nécessités de l'apprécia-
tion de l'auteur au point de vue élevé auquel M. Ban
cel l'étudie. En ami sincère nous signalons le dan
ger. Mais, hatons-nous de le dire, l'éminent pro-
lesseur n'a point commis cette faute.
En effet, si M. Bancel s'est surtout attaché La
Fontaine, philosophe sans le savoir, eomme moraliste
profond et défenseur du droit, il n'a pas négligé de
l'apprécier au point de vue du style et de la cornpo-
siiion. II a fait ressortir toutes les beautés de ce style
pur et varié, taniöt vif et étincelant, tantót maji-s-
tuenx et calme, toujours simple et naturel. II nous
a montré I'immense talent dufabuliste pliant l'apo-
logue tous les genres el lui faisant prendre tous
les tons; atteignant 1'odedans ces vers
maniani avec finesse la raillerie dans ceux ei
et dans ces autres oü, pariant de !a discorde k qui
l'on cherchait une demeure flxe el certaine, Ie fa-
buiiste dit
I! nous a fait admirer aussi dans La Fontaine le
peinlre au pinceau riche et délieat. rend int les ob-
jetsavec un naturel et une fidélité qu'aticun p<>g e
n'a égalés, peignant les meeurs et les caraetères avec
une vérité frappante et une remarquabie habi-
leté
Quoi de plus parfait que la description du com
bat dans la fable du Lion et le Moucheron? Le mou-
cheron, le zouave des insectes, comme. 1'a appelé
avec esprit M. Bancel, aussi fanfaron que l'autre,
le zouave de Magenta el de Solferino, qui
Comme cela est vif et piquant
D'autre part quel tableau fin et délieat que Ia
promenade du iapin k travers le thyrn et la rosée!
La Fontaineexcelle dans le portraitie chat dans
la fable du Cochet, le chat et le sour-iceau. n esl-il pas
Tartuffe peint de main de maitre?
Après avoir signalé toutes ces boautés,M. Bancel
s'est arrêté plus longtemps sur l'admirable fable
des deux Pigeons, un des chefs-d'oeuvre de l'écri-
vain. On retrouve La Fontaine tout culier dac»
OH NUMÉRO 23 CENTIMES.
[.'OPINION
IE TOOT PAYABLE I)'AVANCE.
Aurait-il imprimé sur le front des étoiles
Ce que la nuit des temps eoferme dans ses voiles?
(Liv. XI, f. Li).
Un mort s'en all,lit tristement
i S'empsrer de son dernier gite
Un curé s'en ollait gaiemept
Enterrer ce mort au plus rite.
Comme il nYtait alorsaucnn courent de Giles
On y trouva difficult^.
Sonne la vfetoire
Va partout l'annoncer et rencontre en ctiemin
L'embuscade d'une araiguée.
II y rencontre aussi sa fin.