Parce que vous saviez que celui-la ne se proster-
nerait pas a vos pieds et qu'ils n'encenserait jamais
votre vanité.
Voila ce que vaut votre énergie vous ne l'em-
ployez qu'a vous faire des créatures.
Votre «indulgence», votre bienveillance elles
sont du rnême acabit. L'orsqu'un de vos amis, un de
ceux que vous aviez le plus chaudement appuyés,
foulant aux pieds les engagements les plus sacrés,
tendit une main sacrilege aux cléricaux dans ce
rnême conseil provincial afin de satisfaire son ambi
tion ridicule, vous ne trouvates pas un mot pour
flétrir cette conduite et a l'occasion vous n'aurez
pas assez d'éloges pour exalter les verlus politi-
ques de eet homme.
G'est qu'il appartient a une familie nombreuse
et vous avez peur.
Lorsque les traitres au parti libéral furent publi-
quernent signalés au mois de juin de l'année dernière,
1 jrsque des conseillers communaux sollicitèrent ou-
vertement l'appui du clergé et ne durent leur triom-
phe qu'a son intervention, pas un mot de protestation
ne fut imprimé dans vos colonnes.
Quelques mois plus tard, ces hommes recevaient la
récompense de leurs défections ils étaient échevins.
G'est que ces hommes sont puissants dans leur vil
lage ou tout au moins vous le croyez et vous
avez peur. Votre bieiiveillance s'appelle couurdise.
Jusqu'aujourd'hui vos amis ne cesseut de nouer et
de renouer leurs intrigues dans tous les coins de l'ar-
rondissement,en prévision des prochaines élections,el
un avenir prochain ajoutera sans doule quelques
épisodes de plus a la chronique politique si scanda-
leuse déja des dernières années. Protestez-vous au
moins? Non vous couvrez ces menées de votre si-
fence.
Vous revendiquez les nombreux défenseurs du
drapeau libéral que les conseils de vos communes
rurales comptent parmi leurs membres et vous
vous en faites une auréole. Nous attribuons, nous, ce
résultat bien plus a ['intelligence des élections. Mais,
si nous nous réjouissons de voir qutlques-unes
de nos communes rurales marcher dans la voie du
libéralisme, nous n'avons pas oublié, et nos lec-
teurs non plus, avec quelle bonne foi et quelle sé-
curité vous escomptiez vos victoires du mois d'oc-
tobre, ni les observations que, dans l'intérêt de la
vérité, nous fümes obligés de faire alors.
En nous voyant écrire [.'arrondissement d'Ypres
est aujourd'hui représenté au Sénat et a la Cham-
bre par trois libéraux et revendiquer eet heu-
reux résultat comme un succès pour votre politique,
ne dirait-on pas que nos efforts incessants ont été
en faveur de la lutle? Avez-vous done oublié la
déplorable transaction qui fait aujourd'hui rougir
ses auteurs et laissa pendant neuf ans croupir notre
bel arrondissement sous l'etreinte cléricale Avez-
vous oublie que eet arrondissement, enchainé par
des conventions privées et que ne justifiait pas
móme l'acquiescemeni des partis, humilié dans son
libéralisme, découragé, était représenté pendant ces
neuf ans au Sénat et a la Chambre par trois clé
ricaux
Vous êtes-vous jamais élevé contre eet élat de
choses? Loin de la, le jour oü quelques-uns de ceux
que vous appelez avancés vinrent dénoncer ce
pacte et dtmander instamment la lutte, la colère,
la rage éclatèrent dans les rangs de vos amis, les
injures et les calomnies dans vos propres colonnes.
Eten 1863, prêchiez-vous la lutte au moins? Le
10 mai, un mois avant l'èlection, vous écriviez
L'Opinion veut la lutte pour la lutte, la lutte sans
candidat, la lutte impossible. Pendant que vous
vous efforciez d'endormir ainsi l'esprit public, vos
patrons guides par leurs rancunes, inspires par leur
haine implacable, faisaient les démarches les plus
actives pour empêcher la lutte, rejetant systéma-
tiquement toutes les candidatures indiquées par la
situation et épiant sans doule le moment propice
pour produire celles qu'ils liennent en réserve.
Malgré tous ces efforts, la volonté du corps électo-
ral l'emporta et la lutte eut lieu. Le résultat, quelque
imposant qu'il fut, ne répondit malheureusemenl pas
a tous nos desirs. Nous savons aujourd'hui a qui en
incomble la responsabilité. II nous serait facile de
meltre en regard les paroles et les actes et d'exposer
les démenlis que les demarches donnèrent aux pro
messes. Cela nous mènerait trop loin et nous préfé-
rons y revenir une autre fois a loisir.
Voila done, Progrès, ce que vaut cette a politique
ferme et modérée, tant prónée par vous.
Votre politique, dont vous chantez les louanges, a
été de tout temps et est encore une politique d'expé-
dients, dont l'intérêt personnel est le véritable mo
bile.
Eh quoil vous nous accusez d'exploiter de mes-
quines rancunes, vous dont loute la polémique a été
inspiree par la vengeance et la haine l Abandonnez
une bonne fois ces accusations stupides qui ne nui-
sent qu'a vous-même personae n'y croit plus.
Nousattaquons, dites-vous, lesadministrations
et les hommes les plus dévoués au parti libéral.
Autant de contre-véritts que de mots. Jamais YOpi
nion n'a attaqué systématiquement aucun homme,
ni aucune administration bien au contraire, elle
s'est toujours montrée heureuse de pouvoir rendre
justice a qui de droit.
Si, depuis quelque temps, nous avons été for-
cés, a notre grand regret, de blêmer certains actes,
c'est parce que ces actes étaient des faiblesses et
des concessions peu dignes aux exigences de nos
adversaires comrnuns ces actes, vous n'avez
pas rnême essayé de les justifier. L'Opinion n'ad-
met pas d'ailleurs qu'un seul homme politique,
quel qu'il soit, puisse raisonnablement se croire
irresponsable et indiscutable et i! y a mille fois
plus de courage a son avis, plus de dignité, plus
de vrai libéralisme a dire la vérité, rnême a ses
amis, a les avertir, si c'est possible, sur la pente
fatale oü ils sont entralnés, qu'a se prosterner de-
vant eux et a leur servir de thuriferaires. Nous
croyons avoir toujours consciencieusemenl rempli
ce devoir nous continuerons a le remplir dans
l'avenir, et, quels que puissent être a eet égard
les désirs du Progrès, l'Opinion ne mourra pas
pour lui être agréable.
Partout oü il y aura un abus a signaler, une in
trigue a dévoiler, un masque a arracher, nous n'y
faiilirons pas; en rnême temps, dans l'ordre matériel,
nous pousserons a une protection sérieuse et efïicace
de toutes les tentatives qui voudraient se produire.
Nous sommes intimement convaincus que l'industrie
seule peut donner a la ville d'Ypres la plénitude de
son développement et, en lui rendant une compléte
indépendance, l'arracher a l'influence absorbante de
quelques privilégiés.
Que nous importe après cela que le Progrès nous
accuse de donner la main aux calholiques et d'avoir
des aspirations ou qu'il nous appelle lout sim-
plement des libéraux fourvoyès, nous ne nous
arrêtons pas aux cancans, et nous espérons, le temps
et la réflexion aidant, voir le bon sens reprendre de
l'empire sur son esprit et l'arnener a nous rendre jus
tice. Mais ce journal, en se figurant que nous l'avons
provoqué a engager une polémique avec nous,
se trompe étrangement. La résolution qu'il prendra
a eet égard nous est de médiocre importance.
Nous lui avons simplement adressé une question a
laquelle il n'a pas jugéa propos de rèpondre jusqu'a
présent. Nous la lui rappelons aujourd'hui et s'il
s'obstine dans son silence, force nous sera bien de
rèpondre pour lui.
Les Variétés du FKOI'AGATElIt.
Nous l'avouons sans detouren publiant nos ar
ticles a propos des conférences litléraires, nous vou-
lions encourager nos autorités communales a persé-
vérer dans la voie oü elles étaient entrées et qui nous
semble la bonne, nousétions heureux a l'idée de pen-
ser que notre ville serait douée, comme tant d'autres,
d'une institution que nous persistons a croire utile.
Exclusivement préoccupes de ces idéés, nous ne
songions guère au Propagateur en ce moment. Plus
d'une fois nous avions eu l'occasion d'entendre l'ex-
posé des thèses clericales et lui-même avait eu soin
de faire connaitre, avant la conférence du 31 décem-
bre, son jugement anticipé sur la matière. Get article
ct beaucoup d'autres que les journaux catholiques se
passent en confrères complaisants, qu'ils impriment
tous a la fois, au rnême jour, a Ia même heure, nous
feraient peut-être soupconner l'existence de quelque
manufacture centrale pour ['exportation des idees clé-
ricales, si l'esprit et le talent original de notre con-
tradicteur ne nous était particulièrement connu.
On le voit done, les catholiques ont ceci de parti
culier que lorsque l'un d'eux a parlé, on devineaisé-
ment ce que les autres vont direleur lyre n'a qu'une
corde, leur chanson tient du mirliton c'est invaria-
blement le même air. Peut-être bien est-ce dans cette
circonstance qu'il faut chercher Ia cause du peu d'at-
lenlion que nous avions prêtó au Propagateur. Quoi-
qu'il en soit, eet oubh irrévérencieux de notre part
ne faisait pas son compte. II veut que l'on sache qu'il
est la il tient'a faire preuve d'existence. Comment',
s'est-il dit, on nous négligé! Remuons-nousCrions
haut et fort et que la vigueur de nos poumons nous
tienne lieu de logique I Aussilöt les avocats de la
sainte Eglise romaine se mirent a la besogne et, sous
Ie titre de Variétésils donnèrent le jour a une rap
sodie fort peu variée dont 1 'Opinion faisait tous les
frais. Loué soit Dieu 1 la religion était sauvée I 1
Débrouiller ce tissu de contradictions etdejphrases
inintelligibles serait fastidieux pour le lecteur. Aban-
donnons au Propagateur lui-même, et pour nous ser
vir de son expression élégante, le soin de remuer
sa salade. Prenons au hasard quelques-uns des
méfaits qu'il nous reproche.
L'Opinion, interprêtant une phrase d'après le sens
que l'on est généraleuient convenu de donner aux
mots, avait prié le Progagateur de lui apprendre dans
quelle chaire de France M. Bancel avail pu prêcher
ses doctrines subversives? Est-elle naïve, cette
Opinion? Quand le Propagateur parle d'enseignements,
il est bien enlendu qu'il s'agit de celui qui n'a jamais
enseigné, c'est simplement pour varier l'expres-
sion; il vise a la littérature. Nous prenons bonne
note de sa déclaratiou et nous le prèvenons que cette
petite prétention que son passé était loin de nous faire
soupconner, nous donne pour l'avenir le droit d'être
sévère. Enfin, il n'en reste pas moins évident que
1 'Opinion devait cracher sur les catholiques, les
t> tourner, a propos d'un mot, en calomuiateurs, et
les rouer comme tels. Et voila ce que plein
d'indulgence, le Progagateur appelle de la chicane.
Grande serait notre envie de faire quelques petites
observations encore. Comme, par exemple, lorsque le
Progagateur nous appreud que Bancel fut banni
comme Ledru-Rollin, Proudhon, Louis Blanc, Pierre
i) Leroux, le même jour peut-être que MM. Thiers et
Lamoricière, mais pour des causes infiniment con-
traires, nous serions bien tentés sans doute
quelquediable nous poussant de lui conseilier d'ou-
vrir son histoire contemporaine et d'v apprendre ce
qu'un tout petit enfant d'uno candide ignorance
peut ignorer, mais qu'un adolescent saitdéja;
lorsqu'il nous montre l'empereur balayant les so-
cialisies hors de France, nous sommes cho-
qués qu'un journal religieux ose représenter le fils
ainé de l'Eglise, l'élu de la Providence dans une
fonction si peu impériale, nous sommes choques et
nous avons peine a ne pas le lui dire. Inutile 1 le
Propagateur nous répondrail qu'il varie ses images
comme ses expressions et nous nous trouverions a
court.
Mieux vaut ne pas nous exposer a ce danger.
Passons a autre chose.
Nous avions rappelé précédemment que le coup-
d'Etat qui avait exile de France M. Bancel n'avait pas
même épargué les défenseurs du pape. Ge souvenir
met le Propagateur fort mal a l'aise et il s'efforce de
se relrancher derrière une subtile distinction.
Jusqu'a présent nous avions eu la simplicité de
croire qu'arracher un députe de son siége était une
violence hautement condamnable, abstraction faite
des opinions de ce député. Le Propagateurcomme le
Médecin de Molière, a changé tout cela et il n'y a
qu'un sophiste, y trouvant la satisfaction de ses
intéréts, qui puisse insinuer un rapprochement
entre les champions du droit et les novateurs so-
cialistes.
Très-bien. Voila qui est puissamment raisonné et
comme on est bien venu après cela a exalter sur tous
les tons la libertè et l'égalitéNous ne désespérous
pas, du reste, de voir les amis du Propagateur, deve-
nus les maitres, réaliser ces belles théories et parquer
a leur tour la libre Belgique eu deux camps dans
l'un, les champions du droit, c'est-a-dire, tous
ceux qui partagent leurs idéés; dans l'autre, les
novateurs dangereux. s Avis aux électeurs.
VOpinion avait dit que, pour condamner les con
ferences, il fallait qu'elles fussent blamables et elle
avait mis le Propagateur au défi d'y trouver un mot
blessant pour les croyances calholiques. Mis en de-
meure de se prouoncer, ce journal repond aujour
d'hui qu'il n'a jamais dit que ce fut dans une Confé
rence littéraire el encore moins a Ypres qu'avait été
tenu le langage qui le surexcite si vivement il n'eu
continue pas moins a aliirmer que Bancel est venu
prêcher en Belgique ['abolition des dogmes chré-
tiens, une guerre éternelle a l'Eglise, voire même
le nivellement des fortunes. Et la preuve, oü la
trouve t-il? Probablement dans quelque ouvrage de