JOURNAL D'YPRES ET DE l/ARRONDISSEMENT
YPIVES, Dimanch^j Deuxième année. I\° 25. 19 Juin 1864.
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POUR LA RELGIQUE
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Un NumUro 35 Centimes.
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PARAISSANT LE DIMANCHE DE CHAQUE SEMAINE.
Laissez (lire, laissez-vous blémer, mais publiez voire pensée.
On s'abonne a Ypresnu bureau du journalchez Félix Lambin, imp.-bib.,
rue de Dixmude, 55.
On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres
ou envois d'argent doivent dtre adressés franco au bureau du journal.
\JOpinion vient d'adresser a M. le bourgmeslro
d'Ypres, la somme de 140 francs, montant de la
souseription ouverte dans ses bureaux au profit
des incendiés de Brielen et d'Ypres (extra-muros).
Ee suffrage universel.
Le parti clérieal, abandonné par la population éclai-
rée des villes, eherche un nouveau point d'appui dans
le suffrage universel. M. Dechamps, l'homme au pro-
gramme, a beau s'en dófendre le jour oü les ciloyens
payant dix francs de contributions auront le droit de
nommer des conseillcrs a la commune, ils réclameront
celui d'éliro leurs représentauts aux Chambres, et
quand ils l'auront obtenu, ce qui no tardera guère,
il n'y aura pas Ie dónier longtemps a ceux qui ne
paient rien du tout.
Les libéraux ne s'effraient pas outre mesure du
suffrage universel. MM. Frère, Rara, Orts, Vanhnm-
beek et généralement tous les oraleurs qui ont pris
part a la dernière discussion parlementaire, ont pro-
clamé sans détour le droit ógal de tous les citoyens
participer aux affaires publiques. A l'exercice de ce
droit, les libéraux ne meitent qu'une restriction, uno
seulc lis demandent quo los ciloyens pour qui l'on
réclame le droit d'élire leurs mandataires, soient re-
connus capables d'émeltre un volo éclairó et réüéchi.
L'homme ignorant, qui ne connait pas la valeur d'un
vote, qui ne connait pas les questions sur lesquelles
il est appelé a voter, qui n'a jamais lu un journal, qui
ne sait pas méme son abc, eet homme, disent-ils,
est incapable de rempür les fonctions importantes de
l'électeur. C'est l'insLrument du fanatisme ou de Ia
passion il est it celui qui le menace ou qui le paie, et
s'il est a lui-même, il ne connait ni les besoins ni les
intéréts du pays, il vote aveuglément, au risque de
tout compromeltre. Sans doute, ajoutent les libéraux,
il ne faut pas se monlrer trop exigeant quant a la ca-
pacité électorale. Nousne demandonspas que pourètre
élecleur, le eitoyen alt passé un examen en philoso-
phie et en droit public; mais est-ce trop demander
que d'exiger que celui qui veut participer a la vie po
litique et dire son mot dans les affaires publiques de
son pays, sache au moins lire etécrireT
Les cléricaux n'entendenl pas les choses de celte
fa§on, et cela se comprend ce n'est pas sur les gens
instruits qu'ils peuvent compter pour rétablir leur
domination. Aussi s'élèvent-ils, avec beaucoup d'in-
dignalion, contrece qu'ils appellent 1'oligarchie lellrée.
Mais qu'est-ce done qu'ils proposent eux-mêmes au-
jourd'hui si ce n'est l'oligarchie de l'ignoranco et du
fanatisme? Des électeurs a dix francs l Pourquoi pas
acinq francs, a deux francs, a cinquante centimes?
Pourquoi ne réclament ils pas immédiatement le suf
frage universel pour la Province et la Commune? Dés
que le eens n'est plus une présomplion de capacité,
dés que celui qui le paie n'est plus censé appartenir
celte oligarchie de l'inlelligence contre lequel nos
nouveaux démocrates retour de Rome s'élèvent si
chaleureuseinenl, le eens n'a plus aucune raison de
subsister el doit être aboli sans retard.
MM. de la droite affectionnent les dilemmas. Qu'ils
nous permettent, a notre tour, de leur en posor un
Le eens est ou n'est pas uno présomption de capa
cité.
Si c'est une présomplion de capacité, vous ne pou-
vez vous dispenser d'admeltre ;i l'exercice du droit
électoral les ciloyens qui, en dehors du paiement du
eens, justifient de leur capacité. II serait absurde, en
effet, d'accueillir les présumés capables cl dc repous-
ser ceux qui prouvent leur capacité.
Ou bien, lecens n'est pas une présomption de ca
pacité et, dans ce cas, pourquoi le maintenez-vous?
Abolisscz-le done, si vous osez et proclamez immé
diatement le suffrage universel pour la commune et
Ia province, en attendant une bonne occasion pour en
demander l'application aux élections parlementaires.
Quoiqu'il en soit, la question de la róforme élec
torale est posée aujourd'huielle fait désormais
partie de tous les programmes des ministères pré
sentset a venir. Libéraux, c'est par Ie dóveloppcment
de l'inslruction générale que nous voulons arriver
élargir la base sur laquelle reposent nos institutions,
N'oublions pas que nous sommes comptables envers
cette multitude a qui nous refusons aujourd'hui i'ac-
cèsdel'urne électorale et que nous n'avons ce droit
qu'è la condition de consacrer tous nos efforts h pré-
parer son avénetnent a la vie publique, on lui prodi -
guanl pleines mains I'instruction qui doit celairer
son intelligence et lui donner le sentiment de sa
dignilé de eitoyen. II ne suffit pas que nous disions
au peuplc inslruits-loi d'abord et jc te reconnaitrai
élecleur ensuite, car il pourrait bien nous répondre
un jour Si je ne suis pas instruil, c'est que vous,
messieurs les bourgeois, vous ne I'avez pas voulu et
la barrière que vous leniez ferméo sur moi, je Ia
brise.
Dépensons, s'il le faut, dix, vingl millions pour
éclairer le peuple, pour dissiper les ténèbres du fa
natisme, des préjugés et de l'ignorance; créons par-
tout des écoles, bannissons en I'ensoignement do™-
matique, cette absurdité sans nom dans un pays
fibre, arraehons l'insliluteur a la domination du
prêlre cn lui créant uno position indépendanle qui
lui permette de vivrc honorablement de l'exercice de
sa profession, et nous pourrons alors marcher avec
confiance, mais sürement, a la conquête du suffrage
universel.
K/Inslituteur ct le cnrc.
On se rappelle que l'année dernière, le gouverne
ment se décida a ouvrir une enquête sur les effels
produits par la loi de 1842, qui régit l'enseignement
primaire en Relgique. A cel effet, il s'adressa tous
les instiluteurs du royaume, avec prière de lui trans-
mettre les renseiguemenls nécessaires.
Cette enquête, comme on l'a su depuis, ne devait
porter ni sur le cóté politique ni sur le oötó religieux
de la loi; il s'agissait simplement pour le gouverne
ment d'êlre exaclement renseigné sur les rósullats
qu'elle avait produits au point do vue de I'instruc
tion. Seulemcnt Ie clergé, comme tous ceux qui
vivent d'abus, s'alarme facilement dés que l'on tou
che, de prés ou de loin, a son cher monopole. Crai-
gnant quelque surprise, il se mit aussitót en cam
pagne pour délourner l'orage dont il se croyait me-
nacé. Dans la séance du 10 juin dernier, M. le mi-
nistre de l'intérieur a donné lecture d'uno circulaire
émanée de l'autorité ecclésiaslique et adressée a
MM. les cures, dans laquelle circulaire il est enjoint a
ces derniers de surveiller très-attenlivemant les rap
ports que les instituteurs se proposent d'adresser au
gouvernement et au besoin do leur dicter leurs ré-
ponses. Voici le texte de cette pièce curieuse
Monsieur le curé,
J'ai l'assurance que lo gouvernement fera dans
les premiers jours une enquête chez voire inslilu-
teur voire inslituteur est charmant) une enquête
concernant le progrès des écoles depuis l'année
1842.
Une chose qa'ils devront certainement répondre
ou du moins qu'ils doivent exposer dans tous les
cas, est la suivante L'intervenlion du clergé est
nécessairo pour pouvoir maintenir l'école dans
une bonne situation, l'école a fait des progrès grAce
a Ia protection que Ie clergé lui a accordée depuis
cette époque.
La solution donnéeè des questions de celte na-
ture pourrait avoir, dans un avenir rapproché, les
plus graves consequences pour la religion, pour
l'enseignement spiriluel dans notre pays et pour la
r. juste influence quo lo cure doit avoir en tout temps
sur l'institutcur et sur les enfants des écoles do sa
paroisse.
Veuillez done, monsieur le curé, aulant qu'il
vous est possible, guider votre inslituteur dans
a cettc circonstanco qu'il réponde par exemple
1° En indiquant le nombro des enfants qui sont
envoyés annuellemenl l'école par Ie curé ou par
Ie prétre.
2" En disant quo la première communion est
a l'unique ou au moins la grande cause qui attire les
enfants dans les écoles.
3° Que l'expérience prouve facilement que les
a enfants sont moins assidus quand le curé ne peut
fréquenter l'école pour cause de maladie ou d'ab-
sence.
4° Que l'influence de l'instituteur est grande,
a mais que le curé seul peut convaincre les parents.
5° Que le curé peut toujours érigev avec ses pre-
miers communiants une école qui rendrait I'exis-
tence de toute autre école impossible.
Pour que ces vérités et d'autres puissent péné-
trer facilement dans l'espril de votre instituleur et
qu'il sache les exposer adroitement dans son rap-
port, il ne peut pas savoir que ['inspecteur ecclé-
siastique s'en est mêló, d'autant moins que proba-
n blemenl il sen lira aussi, d'un autre cóté, leseffets
d'une influence élrangère.
Ayez la bonté, M. le curé, do m'honorer d'une
réponse dans laquelle vous voudrez bicn me dire:
1° si votre inslituteur a déja expédié son rapport
et dans quel sens a peu prés il a répondu, 2° s'il a
recu une visite ou des instructions queleonques de
t la part de l'inspection civile.
Votre très-humble et dévoué serviteur.
De pareils documents peuvent se dispenser de com-
mentaires. Au surplus, cette circulaire ne nous a
nullement surpris nous étions convaincus d'avance
que l'influence du prêtro annihilerait tout ce que l'on
L'OPINION
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