JOURNAL O'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT Y I* IVES, Dimanche Deuxième année. N° 30 Lk tout payable d'avance. PARAISSANT LE DIMANCHE DE CHAQUE SEMAINE. I*UIX «'ABONNEMENT POUR LA BELGIQUE 8 francs par an A fr. 50 par semeslre. Pour l'Etranger, Ie port en sus. Un Numéro 25 Centimes. PUI* 1>ES ANKOICEK ET DES RECLAMES ÏO centimes la petite ligne. Corps du journal, 30 centimes. Laissez dire, laissez-vous blèmer, mais publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, nu bureau du journalchez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Dixmude, 55. On traite d forfait pour les annonces souvent reproduces. Toutes lettres ou envois d'argent doivent étre adressés franco au bureau du journal. Ees elections et la réforme electorale. De toutes les situations qui peuvent sortir de l'é- lection prochaine, la pire, a notre avis, serait le main- tien du statu quo, c'est-è-dire uue majorilé libérale sans force, sans consistance, incessamment tenue en échec par une opposition factieuse et, par la même, rendue incapable de gérer utilement les affaires du pays. La crise que nous venons de traverser a suffi- samment montré les perils d'une semblable situation it n'est personne qui ne soit convaincu qu'elle ne pourrait renailre aujourd'hui saus oompromettre les plus chers intéréts de la patrie. Quant a nous, nous le disons avec une sincérité entière, si la lutte qui va s'ouvrir devait avoir pour résultat de ramener a la Chambre une majorite libérale de deux ou trois voix seulemenl et de faire, en quelque sorte, consacrer par 'la voix du scrutin un état de off ses aussi gravement dangereux pour le pays, nous ne serions pasèloignés de céder la place a nos adversaires et de renoncer aux chances d'une victoire qui nous cofuerait plus cher qu'une défaite. Le parti clerical au pouvoir au- rait bien vile fait son temps et la certitude d'en triom- plier, dans un avenir prochain, nous consolerait ai- sément d'une humiliation momentanée. Mais, Dieu merci, le parti libéral n'en est pas réduit a ce point qu'il lui faille renoncer a l'espoir d'une victoire com pléte et décisive sur ses ennemis. Quoi que ceux-ci puissent dire, si grande que soit la confïance qu'ils font paraitre, nous affirmons, sans crainte de nous tromper, que jamais le parti libéral ne fut plus fort et p'us puissant en Belgique qu'en ce moment. Et nos adversaires le savent si bien, que Ie jour oü la force des choses les a contraints a accepter le pouvoir, ils n'ont osé affrcnter le jugement de l'opinion publique qu'en se fesant précéder d'un programme de gouver nement qui n'est, pour une partie, qu'un mauvais plagiat du nótre et, pour l'autre, qu'un masque de faux libéralisme jetè sur leurs vieilles pretentions cléricales. Qu'ajouler a la force d'une pareille démon- stration? Quand un parti en est arrivé la, qu'il re doute de paraitre en public sous ses propres habits et qu'il est obligé de s'annexer ceux de ses adversaires, crainte des huéesde la foule, faut-il chercher ailleurs une preuve plus éclatante de l'impopularité dont ce parti se sent frappé et de la puissance de l'opinion contraire Soyons done sans inquietude. La lutte est belle a entreprendre et le succès assure si, comme nous en avons la ferme confiance, toutes les nuances du libé ralisme se réunissent dans un même el vigoureux effort conlre l'ennemi commun. Que faut-il pour cela un peu de bonne volonté de part et d'autre et l'oubli des ressentiments personnels dans le dévouement aux intéréts d'une grande idéé commune a tous. Ge dé vouement n'a jamais fait défaut chez nous a l'heure du danger et quant a la bonne volonté, nous estimons trop haut nos amis politiques, a quelque nuance de l'opinion libérale qu'ils appartiennent, pour avoir quelque chose a appréhender de leur mauvais vou- loir, Notre confiance, sur ce point comme sur l'autre, est entière, absolue. Mais, pour combattre ensemble, il nous faut un drapeau aulour duquel tous puissent se rallier, et ce drapeau, il faut bien le dire, nous ne l'avons pas. Notre commune horreur de la domination théocra- tique ne suffit plus, en effet, au temps oü nous vi- vons, pour nous appeler tous sous une même ban- nière; l'indépendance du pouvoir civil, au nom de laquelle le parti libéral a Iuttè pendant vingt ans, a cesséde tenir une place exclusive dans ses préoecu- pations. Le progrès des lumières, Faction incessante des idéés ont fait éclore et mürir d'autres réformes non moins importantes, au triomphe desquelles un grand nombre de libéraux ont attaché les destinóes du libéralisme lui-méme et dont aucun intérêt,si grave qu'il soit, ne leur permet d'accepter l'ajournement. Au nombre de ces réformes, il en est une laquelle il a sufli de quelques jours pour conquérir l'assentiment de tous les amis de la liberté et pour se mettre de pair avec les questions politiques que l'opinion publique agite depuis un quart de siècle. Nous voulons parler de la réforme electorale dont un orateur du Conseil provincial du Brabant a pu dire avec raison qu'elle est semblable a une bombe qui doit éclater, quoi qu'on fasse pour en empêcher l'explosion. A la Chambre des représentants, le principe de cette réforme, dans le sens de la substitution de Ia capacitó au eens electo ral comme base du droit d'élire, n'a rencontré, parmi les libéraux, que des adhérents. M. le ministre des Finances, MM. Orts, Bara et Guillery ont tour a tour proclamé la supériorité de l'intelligence, comme ga rantie donnée a l'ordre public, sur les présomptions tirées du paiementd'un certain impêt. L'honorable M. Orts, qu'on n'accusera pas sans doute de se livrer trop facilement a l'esprit d'aventure, M. Orts n'a pas craint d'exprimer le voou que le gouvernement s'oc- cupat prochainement de la réforme, dans ce sens, de notre législation electorale. Dés lors, le drapeau que nous cherchons est trouvé. La gauche parlementaire doit publier bientót un manifeste aux électeurs. Qu'en tête de ce manifeste, elle proclame la nécessité impérieuse et irnmédiate d'appeler a l'exercice du droit de suffrage, dans les limiles aulorisées par la Constitution, tous les ci- toyens sachant lire et écrire; que le gouvernement y réponde en annoncant la résolulion de présenter sans retard un projet de loi conforme aux voeux de son ancienne majorité, et nous ne doutons pas un seul instant que le concours des libéraux de toutes les nuances ne soit acquis a la lutte qui va décider du sort du cabinet et du libéralisme parlementaire. L'idée que nous émettons ici ne peut pas même s'ap- peler une transaction, car toule transaction implique un abandon partiel et réciproque de pretentions eon- traires et, comme nous l'avons rappelé, aucune di vergence de principe ne nous sópare sur la question de la réforme électorale. Le seul point sur lequel nous pourrions étre en désaccord se reduirait a une ques tion d'opportunilé. Faut-ü accomplir cette réforme immédiatement ou bien ne conviendrait-il pas triieux d'attendre trois mois, six mois, un an? Rèduite a de pareilles proportions, la divergence d'opinions, si elle existe, n'a plus qu'une importance secondaire et nous croirions faire injure a la gauche parlementaire si uous la supposions capable, dans les circonstances graves ou nous sommes, d'en faire dépendre le triomphe du libéralisme, et qui sail? peut-étre l'avenir du pays. Les elections a Bruxelles. Le Comité de ['Association liberale de Bruxelles, dans sa reunion du 19 de ce mois, a pris une resolu tion importante et que nous considérons comme d'ex- cellent augure pour le résultat des élections prochai- nes. A Bruxelles comme a Ypres, le règlement de l'Association confère au Comité le droit de proposer des candidats provisoires, lesquels sont ensuite sou mis au vote de l'assembléo, concurremment avec les candidats présentés par les membres. Vu la gravité des circonstances et déterminé par une pénsée de conciliation a laquelle tous les libéraux rendront hom mage, le Comité de l'Association de Bruxelles a décidé qu'il s'abstiendrait, cette fois, de faire usage de sa prérogative et que le soin de former la liste provisoire serait abandonné a l'assemblee générale, sans aucune intervention de sa part. Cette sage resolution marque le premier pas dans une voie oü nous désirons ardemment voir entrer nos amis politiques de Bruxelles. Si les conséquences de la lutte qui les sépare aujourd'hui en deux camps rivaux devaient rester circonscrites dans les mursde laCapi- tale,siellesdevaientdemeurersaus influence sur le ré sultat général du scrutin,nous n'aurions qu'a déplorer cette lutte sans avoir le droit d'y intervenir. Mais que nos amis nes'ytrompent pas ['antagonisme maintenu a Bruxelles, c'est le libéralisme affaibli dans les pro- vinces et notre victoire rendue douteuse partout. A Bruxelles et a Liége, les libéraux peuvent se diviser sans peril pour la cause commune le parti clerical y est trop faible pour avoir a retirer quelque bénéfice de nos divisions; partout ailleurs, nos adversaires sont puissants, redoutables et nous, ne pouvons espe- rer en avoir raison qu'en marchant tous unis sous un seul et même drapeau. Bruxelles divisé, répótons-le, c'est la division per- pèluée dans un grand nombre d'arrondissements electoraux, e'est-a dire une defaite certaine et d'au- tant p us honleuse que nous ne pourrons l'attribuer qu'a nous-mêmes. Que si, parmi ceux a qui uous nous adressons, il en est qui ne savent rien accorder aux nécessites de la lutte el qui préfèrent l'abaisse- ment de leur parti a une victoire achelée au prix de quelques concessions secoudaires, ceux-la, quelque nom qu'ils portent, nous les tenons pour de faux libéraux, indignes de figurer dans nos rangs. Sans entrer dans l'examen des griefs que se renvoient re- ciproquemenl les deux associations principals de Bruxelles, nous sommes convaincus qu'en ce moment un accord également honorable pour l'une et pour l'autre est possible et que si eet accord ne s'établit pas, c'est que l'une ou l'autre ne l'aura pas voulu. Que nos amis de ['Association et du Meeting le sa- chenl: le pays a les yeux sur euxetjugera sévère- ment ceux qui, par leurs prélentions outrées ou par une injuste resistance a des exigences légitimes, au- ront compromis les deslinées du libéralisme et pré paré sa défaite. Ceux-la n'obliendront ni merci ni pardon l'opinion publique leur sera inexorable.

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1864 | | pagina 1