JOURNAL D'YPRES ET DE I/ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimanche
Deuxième année. N° 40.
2 Öctobre 1864
Le tout payable d'avaNCb.
PARAISSAKT LE DIMANCHE DE CHAÜUE SEMAINE.
PItlX U'AltOlSEMEIT
POUR LA BELGIQUE
S francs par an 4 fr. 50 par semestre.
Pour I'Elranger, Ie port en sus.
Un Numéro 25 Centimes.
L'OFiNIOlf
PKIX DES ANNONCES
ET DES RECLAMES
10 centimes la petite ligne.
Corps du journal, 30 centimes.
Laissez dire, laissez-vous blèmer, mais publiez voire pensée.
On s abonne a Ypres, au bureau du journal, chez Félix Lambin, imp.-lib., On traite a, forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres
rue de Dixmude, 55. j om envois d'argent doivent ëtre adressés franco au bureau du journal.
li faut en finir.
La session prochaine, dont nous sommes a peine
séparés par quelques semaines, s'ouvrira vraisem-
blablement par un discours du tróne. Après le pro
gramme de AL Dechamps, qui a soulevé autour de lui
de si ardenles controverses après Ie Congrès de Ma
lines, oü nous avons vu s'étaler, dans leur nudité
cynique, les pretentions ullra-réactionnaires du parti-
prêtre, le ministère libéral ne peut se dispenser de
déployer, lui aussi, le drapeau de ses doctrines et
d'affirmer solennellement les principes qu'il a recu la
mission de faire prèvaloir. Mais quel que soit le pro-
gramme qui va sarvir d'ordre du jour a la session
prochaine, nul doute qu'il ne donne rnatière a des dis
cussions trés-vives dans le sein de la legislature. A
supposer même que ie ministère s'en tienneaux pro
jets de loi présentés dans les sessions précédentes et
ne dépose aucun projet nouveau, que de prétextes a
recriminations dans un arriéré législatifoü l'on trouve
des projets tels que ceux qui concernent les fraudes
électorales, Ie tempore! des cultes et les fondations de
bourses d'étude 1
Quelques-uns s'imaginent que le parti clérical,
momentanement réduit a l'impuissance, reprendra
la tactique qu'il a suivie de 1857 a 1860 et s'impo-
sera pour quclque temps la loi du silence. C'est une
erreur. Le parti clérical est decide a lutter et a lutter
de toutes ses forces sur toutes les questions suscep-
tibles de tenir en éveil les passions religieuses, aux-
quelles il doit sa puissance et qui sont sa seule raison
d'ètre. Si ce parti, a la suite des événements de 1857,
s'est tenu pour quelque temps dans l'immobilité, il
n'y avait pas la, comine on l'a trop souvent répété,
une tactique, une manoeuvre de parti c'était tout
simplement paree que l'inertie du pouvoir ne lui
fournissait aucun preiexte de crier a la persécution
religieuse. Mais aujourd'nui qu'avec la loi sur les fon
dations de bourses, il peut nous accuser de spoliation
et de volaujourd'hui que nous nous apprêtons a
voter la loi sacrilege qui permet a l'autorité laïque de
contróler la gestion des couseils de fabrique aujour
d'hui que, par une violation brutale de la Constitu
tion, nous allons donner des reprèsentants a 250 mille
citoyens qui en sont dépourvus, compter sur le si
lence du parti clérical, en vérilé, c'est faire preuve de
trop de naïveté.
Au fait, puisque nous devons nous attendre a des
accusations, a des récriminations de tout genre, pour-
quoi n'en finirions-nous pas d'un seul coup avec les
questions cléricales? Depuis vingt ans qu'elles agitent
le pays, elles doivent être müres ou bien il y a a dé-
sespérer qu'elles le soient jamais. Après la loi sur les
bourses et celle sur les fabriques d'églises, il ne nous
reste plus a faire, dans le même ordre d'idées, qu'une
loi sur les cimelières et une autre pour remettre l'en-
seignement religieux a sa place, c'est-a-dire dans
l'Eglise. Cela fait, nous serons débarrassés a tout ja
mais de ces malheureuses questions de clérical a libé
ral dont le moindre tort est de nous enrayer dans
l'ornière et de nous empêcher de vaquer a d'aulres
soins infiniment plus importants.
Séculariser l'enseignement primaire, exclure le
prêtre de l'école, vont nous répondre les peureux I
Mais vous ne voyez done pas que vous allez soulever
contre le libéralisme un déchainement immense, que
le clergé va trouver dans votre loi une arme mortelle
contre les écoles laïques et que, pour donner satis
faction a vos théories, vous exposez l'enseignement de
l'Etat a une ruine compléte? Ne voyez-vous pas que
le moment n'est pas encore venu et qu'il faut at
tendre
Attendre quoi nous ne demandons pas mieux que
d'être convaincus de notre tort, mais encore faut-il
que l'on nous donne une bonne raison. Espère-t-on
qu'un jour viendra oü l'on pourra meltre le prêtre
hors de l'école sans qu'il crieet, si l'on vent bien re-
connaitre qu'il n'y a pas a l'espérer, pourquoi ue pas
le-faire crier tout de suite et en finir?
De même pour la question des cimelières. Faute
d'une loi claire et prècise, il ne se passé presque pas
de semaine que l'une ou l'autre inhumation nesoit
l'occasion d'un conflit d'autorité entre le pouvoir civil
et le curé. Quand un conflit de cette nature éclate
dans un village, le plus souvent l'opinion publique
donne tort au bourgmestre et raison au curé, qui
trouve, dans la circonstance, un excellent prétexte
a sermon contre le despotisme libérêtre. Neserait il
plus rationel et d'une politique plus sage d'enlever
tout prétexte a conflit en décrétant législativement la
sécularisation des cimetières? On criera, soit, mais
on ne criera qu'une fois, au lieu qu'avec Ia loi actuelle,
qui dit tout ce qu'on veut et dont le texte, pris isolé
ment, est évidemment contraire a l'ioterprétation
libérale, on crie tous les jours.
Quand nous disons que le pays en a son soül du
libéral et du clérical, ce n'est pas que nous enten-
dions contester a ces questions ['importance qu'elles
ont acquise et conservée en Belgique depuis vingt ans
que l'esprit public les agite. Loin de la, nous estimons,
au contraire, que sous bien des rapports ces questions
ont une gravité extréme et que leur solution définitive
est en quelque sorte préalable a tout progrès réali-
sable dans l'ordre moral et politique mais précisé-
ment paree que nous avons cette conviction, nous
désirons en finir une bonne fois avec ces questions
et passer outre, et c'est dans ce sens qu'on peut dire,
avec vérité, pensons-nous, que le pays en a par des
sus Ia lête des querelles du libéral et du clérical,
querelles vaines et inutiles entre toutes si, après
vingt années, le pays ne se sent pas encore en état
de décider entre les deux parties contraires.
Done finissons-en. L'occasion est propice; l'opi
nion libérale attend du ministère une impulsion vi-
goureuse. En retour de la confiance qu'elle vient de
lui marquer a nouveau dans les dernières élections,
elle a le droit d'espérer que le cabinet ne diffèrera pas
plus longtemps le couronnement de ('edifice qu'elle
attend vainement depuis le Congrès libéral de 1846,
c'esl-a-dire la separation compléte et absolue, dans
les limites de la Constitution, de l'Eglise et de l'Etat.
Cel te séparation a été décretée, il y a sept ans, en
rnatière de bienfaisance publique; elle se poursuit
aujourd'hui en rnatière de fondations pour l'instruc-
tion publique et d'administration du temporel des
cultes. Achevons-la et meltons un terme définitif a
nos misérables luttes intérieures en I'appliquant, dès
la session prochaine, a l'enseignement et aux inhu
mations.
Mais on ne voudra pas nous suivre jusque la on a
peur de faire trop de bruit, on préfèrera temporiser.
Soil. Mais Dieu veuille que le jour oü nous croirons
venu le moment d'agir, nous en ayons encore les
moyens. Qui peut dire si, dans quatre ans, nous ne
serons pas gouvernés par MM. De Theux et De
champs
II ne peut se faire une réunion cléricale, sans qu'im-
médiatement il soit question de quêtes, au profit de
l'une ou l'autre oeuvre, réputée catholique, c'est-
a-dire au profit du pape et des couvents, dissimulés
sous le nom d'oeuvres de Ia propagation de la foi, et
des missions.
11 parait qu'on négligeait un peu les jésuites dans
la distribution des offrandes. Sans doute, les bons
pères ont un art tout particulier pour mettre la main
sur les gros héritages, mais ils ne dédaignent pas non
plus le produit des quêtes, et ils sont d'appétita tout
avaler.
On a fondé l'oeuvre du denier de St-Pierre ils ont
voulu avoir l'oeuvre des jésuites. Or ce sont les jésuites
qui actuellement font la pluie et le beau temps dans
le parti catholique, et quand ils commandent, il ne
reste plus au troupeau qu'è obéir.
Déja au Congrès de Malines, ils avaiont prouvé leur
puissance par le cri de Vivent les jésuites, poussé par
la dévote assemblee, qui acclamait ainsi ses orgueil-
leux dominateurs.
Au Congrès de Wurtzbourg, ils ont fait un pas
nouveau. Gens positifs avant tout, la toute -puis
sance ne sufïit pas aux jésuites, il leur faut la
caisse. Aussi ont-ils fait proposer d'organiser de
vastes quêtes a leur profit, et l'assemb'óe qui n'a-
vait rien a leur refuser, a voté la chose par accla
mation.
Presque toute l'assistance, disent les feuilles ca-
tholiques dans leur compte-rendu, léve les mains en
signe d'adhésion: chacun s'engagea faire une collecte
particulière de 10 a 20 florins ou thalers jusqu'a la
prochaine assemblée générale. Les besoins de ces
missions sont immenses il faut 230,000 fr. aux PP.
jésuites de Paris, pour payer le terrain de leur église,
et 300,000 fr. pour la construire. Au Havre, il faut
200,000 fr. en tout et b. Londres on est chargé de
80,000 francs de dettes, bien que l'école et d'autres
accessoires manquenl.
Bref, messieurs les jésuites demandent quelques
millions, et l'assemblée générale s'est engagée a les
leur fournir.
Quelques millionsAvouons que les Révérends
sont désintéressés et pas du tout gloutons. Mais aussi
ils travaillent "pour la grande gloire de Dieu.
{Alliance.)
Causerie.
(Suite et Fin.)
Faisons notre entrée par la porte de Thourout, et
prenons d'abord ici un verre de cette bonne bière
flamande a l'estaminet du Boeren-Hol. Depuis eet en-