JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMEN'I
YPRËS, Dimanche
Beuxième année. i\° 5jÖfi
18 Décembre 1864.
Le tout payable d'avahce.
PARAISSANT LE DIMANCHE DE CHAQ,"^ SEMAINE.
PltlX »'AB01\E11ËST
P^UR LA BELGIQUE
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Vpres, is Décembre.
La loi sur les fondalions de bourses d'étude, votée
par le Ssnat dans sa séance du 26 novembre dernier,
n'a pas encore paru au Monileur. La presse clèricale
exploile a son profit ce retard prolongó, qu'il devient
assez difficile, en effet, d'expliquer par des raisons
simpiement administratives. Sans ajouter une foi ab-
solue aux rumours que les organes de l'épiscopat ont
pris soin de repandre a ce sujet, nons ne sommes pas
eloignès de croire qu'un obstacle imprévu a surgi et
que la promulgation de la loi s'en trouve momenta-
nóment entravée mais, de quelque part que vienne
la resistance, nous avons la conviction que le minis
tère saiira faire son devoir et qu'il ne penneltra pas
que la souverainelé nationale sorte amoindrie du de
bat. Sa ligne de conduite est, d'ailteurs, si nellement
tracee qu'il n'y a pas de crainte qu'il en devie. Le
pro-et de loi sera promulgnè ou biea le ministère se
relirara et la Couronne aura a pourvoir, dans sa sa-
t^sse. aux nécessites de la situation nouvelle que Ie
refus de la sanction royale aura creées.
Les journaux cléricau* auront beau crier que c'est
la de la tyrannie; que la couronne doit rester mai-
tresse absolue du droit de sanction que lui confère la
Constitution et que c'est vouloir la violenter que de
lui i ui poser des luis q-ti lui soul antipalhiques. II ne
fa ui pas èired cteur en droit public, ii sulfit d'un peu
de ban sens pour comprendre qu'il n'y a iei nulleal-
teinte a la liberie de la prerogative royale,!» Couronne
restant lotijours parfaitement libre de sanct onner ou
de ne pas sanctionner les iois qui lui sunt presentees
par ses mimstres, sauf a ecux-ci ie droit de se retirer
en cas de refus de sanction.
Dans la situation actuelle, a supposer que, pour
une raisou on pour une autre, la sanction royale fut
refusee, le ministère, en se retirant, n'userait pas
seuiernent d'un droit incontestable; il ne ferait que
tout juste ce que lui commanderaient le soin de sa
dignite personnelle el Ie respect de la majorite qu'il
représenle au pouvoir. Le ministère a proclamé, dans
son programme, l'impérieuse necessite de réviser
l'ancienne legislation sur les bourses d'étudele pays,
consultè sur ce programme, l'a ratifie d'une manière
éclatante en envoyant au Parlement une majorite qui
a reen pour mission d'en poursuivre la realisation.
Le cabinet, fidele a sa promesse, revise la lot, les
Chambres la votent sans y changer une ligne. Des
lors, comment imaginer que la Couronne refusant de
la rendre execuioire, des ministres soucieux de leur
di°nité et de leurs devoirs euvers le pays, consentent
a garder le pouvoir?
Mais ce ne sont la que des bypothèses imaginaires
sur lesquelles, par respect pour la Couronue, il ne
nous convient pas d'insister pius longuement. La
presse clèricale, depuis quelque temps surtout, ne
fail que trop souvent intervenir la persounalitè du
Roi dans nos debals. II y a la, non-seulement unoubli
grave des régies et des convenances parlementaires,
mais un danger réel pour nos institutions, dont le sort
serait sérieuseinent compromis si l'un des deux
grands partis qui divisenl la Belgique pouvait crain-
dre une resistance systématique de la Couronue a se»
aspirations. Cette crainte, nons ne l'avons pas pour
nous-mèmes et nous n'avons nul désirde l'inspirer a
nos adversaires mais, pour eux-mêmes comme pour
nous, il est dèsirable que la promulgation de la loi
sur les bourses d'étude ne soit pas plus longtemps
retardèe et nous fesons des vceux, non des voeux de
parti, mais des voeux patriotiques pour qu'elle pa-
raisse incessatnment dans le journal officiel.
Correspondence particuliere de l'OPINION.
Bruxclles, 17 Décembre 1864.
L'émotion produite par la lettre de M. Conway est
loin d'être apaisée. Au contraire, elle va grandissant
tous les jours, si bien que, pour peu qu'elle aug-
mente encore, elle atteindra les proportions d'un évé
nement politique considérnble. Déja la presse et les
meetings ont fait entendre d'ènergiques prolestations;
de leur cóié, les solidaires, les affranchis et les mem
bres de la Libre Pensee ne sont pas restés inactifs et
préparent une vigoureuse répliqueatix assertions té-
méraires et inconsidérées de M. l'inlendant de la
liste civile. Les choses en resteront-elles la? J'en
doute, car l'émotion est universelle ici et si un dè-
saveu net el fe mel ne vient pas donner bientót sa
tisfaction a l'opinion publique indignée, il n'est pas
probable que le mouvement s'arrête en si beau che-
min.
A la première nouvelle de la fameuse lettre, six
membres de Ia cauche s'élaient réunis pour sou-
mei tre a la Chambre une proposition ayanl pour ob-
jet de faire alienor, sur le crédit des cultes, une
somine de mille francs, a litre de subside, aux socié-
tés d'enterrement civile Le coup était rude, trop
rude peut êlre. Soumise a M. le ministre des finances
par quo|ques-uns des signntaires, la proposition,
c'est une chose connue ic,i de tout le monde, n'a été
retirée que sur l'engagement pris par M. Frère Orban
d'obtenir satisfaction compléte et publique du lan-
gage aggressif de M. Conway. Mais en quoi consistera
cette satisfaction? C'est ce que le ministre n'a pas
jugé a propos de dire et pour cause.
J'enlends dire ici que le ministère doit obtenir le
désaveu de M. Conway et qu'en cas de refus. il n'a
pas a hésiter a donner sa démission. Ces choses-lii
sont plus faciles a dire qu'a faire. Supposez que le
Roi résiste a la sommation minislérielle voila la dis
solution des deux Chambres inévitable et les élec-
teurs appelés en masse a se prononcer, non pas,
comme d'habitude, sur telle ou telle question poli
tique, mais sur un acte personnel de la royautéc'est-
a-dire que si l'éleclion nouvelle donne raison aux an
ciens ministres, je ne vois pas trop comment ferait le
Roi pour ne pas abdiquer. Des hommes d'Elat y re-
gardenl a deux fois avant de se lancer dans de sem-
blables aventures el quant a moi, si vif que soit mon
désir de voir la liberie sortir saine et sauve de l'inci-
dent Conway, je me garderai bien de pousser le mi
nistère dans une voie aussi pcrilleuse, N'ayons, d'ail-
leurs, aucune inquietude a eet égard nos ministres
sont tous gens peu disposés a ceder aux entraine-
ments de la foule. On peut se fier a eux du soin de
conduire les choses le plus doucemenl du monde,
sans crainte des cahots de la route. Pour ce qui est
des ornières, c'est. une autre affaire.
La discussion du budget de l'Intérieur se poursuit
a la Chambre sans présenter d'incident rernarquable.
M. Giroul, Ie nouveau député de Huy, a prouoncé un
fort bon discours sur la loi de l'enseignement pri
maire dont il a signalé, avec infiniment de bonheur,
les abus les plus criants. M. Vandenpeereboom, le
ministre de l'intérieur, a répondu M. Giroul en
tracint a grands traits le tableau des dépenses que
nous consacrons chaque année a l'enseignement de Ia
jeunesse et des progrès accomplis depuis quelques
années. II a terminé son discours, fort écouté du reste
par une declaration dont bon nombre de libéraux se-
ront peu satisfails Le cabinet, a dit M. Vandenpee
reboom, est décidé a maintenir, sans aucun change
ment, la législation actuelle sur l'enseignement pri
maire. Nous le savions depuis longtemps, mais Ie
ministère a peut-être tort de nous le répéter si sou
vent.
Et la loi sur les expulsions, on la maintiendra sans
doute aussi? Pendant six mois on l'a laisse dormir
dans les cartons et la Belgique ne s'en est pas plus
mal portée pour cela. Mais apparemment que de nou-
veaux dangers nous menacent, car M. Tesch vient de
dernander qu'on la remette de nouveau en vigueur.
Très-bien Maisj'espère que cette fois-ci, du moins,
on s'expliquera franchement et que nous ne verrons
pas, comme nous ne l'avons vu que trop souvent,
cette malheureuse loi escamotée dans un tour descru-
tin. S'il faut que l'éiranger qui foule Ie sol beige reste
livré au pouvoir discrélionnaire du gouvernement, on
nous dira nettetnenl pourquoi et si ceux qui seront
chargés de nous expliquer la chose ne nous donuent
pas des raisons décisives, póremptoires, esperoas,
pour l'honneur de la Belgique, qu'il se trouvera dans
la Chambre 58 députés pour repousser cette loi hon-
teuse et humiliante, qui fait tache dans le Code d'un
peuple libre.
Disons, pour rendre justice a chacun, que si la loi
de 1835 est tombée aujourd'hui daus un si profond
discredit, Ie Meeting liberal de Bruxelles a droit a re-
vendiquer une large part dans ce beau succès. C'est
grfice a ses efforts,» sa persistance,que l'opinion pu
blique doit d'être éclairée sur ia situation véritable
des étrangers en Belgique, situation qui n'ètait pas
connue auparavant et dont l'ignorance permetlait
l'arbitraire de l'administration de se donner pleine et
entière carrière. C'est grhee a la pression exercée par
le meeting que Ie gouvernement s'est vu contraiut de
publier tout récerriment la liste des expulsions pro-
noneées depuis 1830 et qu'y avons-nous vu Prés
de 42 mille expulsions en 24 ans, dont deux mille
environ en vertu de la loi de 1835 I Et eet épouvan-
table abus était si loin d'étre connu que, dans la
séance du 15 janvier 1861, \1. le ministre de la jus
tice avail pu dire, en pleine Chambre, sans rencon-
trer un seul contradicteur, que la loi sur les étran
gers avail eté toujours appliquée avec modéralion et
circonspeclion. Nou savons a quoi nous en tenir au-
jourd'hui sur la modèratiou et la circonspeclion des
gouvernements en pareille tuatière et si nos repré-
sentants s'y laissent prendre de nouveau, l'opinion