constance et faisant preuve d'une impartialité qu'on ne saurait trop louer, vint appuyer la demande de la minorité. Adieu dès lors résistance et votePuis- qu'on réclame 1'appel nominal, fit M. Ie Président, nous allons y procéder, o Ce résullat final nous satisfait, parce que nous y voyons la consécration d'un droit que nous n'avons cessé de revendiquer. Mais en même temps le f.iit démontre la valeur réelle des protestations de M.Car ton ii établit pour les moins clairvoyants que toutes ces belles paroles sont de la monnaie de mauvais aloi dont on paie les crédules. Aux yeux de M. Carton et de ses amis les plus in- times, une même proposition est bonne ou mauvaise selon qu'elle émane de la majorité ou de la minorité; touies les assertions possibles n'empêcheront pas Pincident de samedi de le prouver une fois de plus. Nous l'avons toujours ditce ne sera pas la dernière fois que les faits nous donneront raison. Rldicnlus mas. La séance de ['Association libérale aurait élé bien sérieuse sans un incident imprévu qui est venu lui, donner un relief très-pittoresque. C'est M. Eugène Iweins qui s'est chargé de la partie comique et nous lui rendons immédiatement la justice de dire qu'il y a parfuitement réussi Mais qu'est-ee que M. Eugène Iweins, se demande le lecteur? M. Eugène Iweins est un nouveau-né la vie poli tique. Prenant volontiers les allures du grand sei gneur, il professail, il n'y a pas longtemps encore, des opinions cléricales; cela élait fort bien porté alors. Même, pas plus tard qu'aux élections de 1863 et peut- être aussi en 1864 qui sait il prónait de sa petite influence la candidature de M. Van Renynghe. On voit que le brave gar$on appartient a l'école des ménagements et des compromis. Mais un jour, ou plutót une nuit, il rêva qu'un fau" teuil au Conseil provincial ne l'habillerait pas mal. O miracle de la grêce Le lendemain il était libe ral 1 Que d'autres ricanent de cette volte-face plus ra- pide que l'éclair, qu'ils orient a la palinodie; ce sont lè propos de brouillons auxquels il ne faut attacher aucune importance. Nous afiirmons, nous, au con traire, que jamais conversion ne fut plus sincère, ni surloul plus désintéressée. Et qu'on n'aille pas lui rappeler surtout ses premières convictions, il ne s'en souvient pas plus que s'il sortait d'un long sommeil léthargique; il a fait litière de ses dieux d'autrefois et les offre en holocauste a ses nouveaux amis. Aujourd'hui il combat avec l'ardeur du néophyte et l'aplomb d'un libéral de l'avant-veille. Musicien, il aspire a devenir le ténor de la coterie. Cependant ce nouvel apótre de la liberté semble supporter impatiemment la discussion. Déjadès l'ouverlure de la séance, nous l'avions remarqué lan- $ant des regards courroucés, gesticulant, demandant la parole, se démenant sur sa chaise; on aurait dit un diable dans un bénitier. Les amis de M. Eugène Iweins sont-ils done moins pénétrés que lui-même des efforts de son éloquence? Avaient-ils peut être quelque sinistre pressentiment? Chacun a pu remarquer, en effet, que ce n'est qu'a- près des instances réitérées qu'il obtint la parole. II nous semblait lire dans les yeux de M. le Président ce conseil paternel Jongen, zwygen is overbetèrlyk. M.Eugène lweinsa eu le tort de nepaslecomprendre; il a parlé...... nous voulons dire il a essayé de par- ler. Le moment était solennel. Le ton sur lequel il avait réclamé la parole, sa facon de se lever et de se cam per en face, non pas de son auditoire, mais de l'ad- versaire qu'il allait empoigner corps corps et jus- qu'è certain petit rengorgement qui n'est pas dénué de prélention, tout en lui indique un orateur qui va dominer, subjuguer, entrainer ses auditeurs. Le pu blic est tout oreilles, il est suspendu aux lèvres de l'orateur. Quand nous disons Vorateurc'est une facon ordinaire de s'exprimer; nous prions le Iec- teur de ne pas prendre ce mot trop a la lettre. M. Eugène Iweins commence Conciliation et union sont dans toutes les bou- ches; tout le monde le saitJe m'attendais a n'entendre ici que des paroles de conciliation et, dès le début de son discours d'invectives et d'in- sinuations.... M. Capron.... dans son journal On fait observer a l'orateur qu'il ne s'agit pas la de journal; on proteste contre les mots insinuations et invectives. Après un moment d'arrét, il reprend a Conciliation et union sont dans toutes les bou- chestout le monde le saitJe m'attendais n'entendre ici que des paroles de conciliation et, dès le début de son discours d'invectives et d'insi- nuationsM. Caprondans son journalt Nouvelle interruption nouvelles protestations. Des cris a I'ordre I se font entendre. L'orateur reprend une troisième fois sa phrase cette fois il commence par la fin. Bref, cette nouvelle tentative n'est pas plus heureuse que les précédentes; il s'embrouille tout-a- fait. C'est en ce moment que M. le Président, toujours plein de tact et de délicatesse, croyant sans doute ve- nir au secours de son jeune et malheureux ami, lui lance un dernier pavé. M. Iweins, dit M. Ernest Merghelynck, je vous engage a abandon ner le terrain personnel et vous renfermer dans la question. M. Eugène Iweins. M Carton a apporté assez de lumières dans cette question je ne saurais plus rich dire après luiII s'assied. Immense désappointement dans 1'audiloiret Et voilé ce qui reste de ce beau debut qui pro- méttait tant 1 Toute cette fantasmagorie s'en est allée en fumée! Mais quelle chfite 1 Et qu'il est done vrai qu'il ne faut pas tomber de bien haut pour se casser le nez 1 Que voulait done M. Eugène Iweins? Faire des per- sonnalités. C'était son seul but, car, arrèté sur la pente oü il glissait, mis en demeure de s'occuper de la question, il reste court, il ne trouve pas un mot, pas une idee, pas un argument. Heureusement, M. Carton avait tout dit pour lui. Heureusement; car nous pensons fort que M. Eugène Iweins, en prenant la parole, ne connaissait pas le-premier mot de I'objet en discussion. Pour un homme qui affecte le serieux, cela n'est pas bien fort 1 Mais c'est M. Carton qui doit être content de voir ses raisonnements provoquer la confiance adorable- ment naïve de M. Eugène Iweinsil tiendra sans doute a honneur de faire a son tour l'éloge de l'éloquence de son nouvel ami. Pourquoi pas Le sené et la rhubarbe, entre gens qui se comprennent, cela se passe fort bien. Ce serait crime d'ailleurs au grand-prêtre de décou- rager ce jeune lévite. II a fait preuve de dévouement et de soumission, il mérite un bon point 1 Qu'il per- sévère dans cette voie, il ira loin 1 La foi n'est rien sans la persévérance. Mais surtout qu'il ne négligé aucune occasion de prendre la parole a l'Association c'est une condition de succèsEt puis le public aime tant a rire 111 Le Mont-de-Piété. M. Vanheule a présenté, dans la dernière séance du Conseil communal, un rapport extrêmement inté ressant sur la situation de notre Mont-de-Piété. II est regretter que ce document, dont nous n'avons pu saisir que quelques passages au courant de la plume, n'altpas étó livréa lapublicité,car il renferme des ren- seignements fort instructifs, au point de vue surtout de la moralité de ces établissements soi-disant chari- tables que nous a légués le moyen-Sge. Les Monts-de-Piété datent de loin. Pour bien des gens, cela répond a tout. A Ies convertir, on perdrait sa peine et son temps. Mais Ies partisans de ces ins titutions ne se recrutent pas seulement parmi les adorateurs quand même du bon vieux temps. Séduits par certaines apparences, soumis, a leur insu, l'empire des idéés préconcues, beaucoup de bons es- prils croieut encore a l'uiilité des Monts-de-Piété et ne peuvent se faire a l'idée de supprimer des établisse ments qu'ils considèrent comme rendant de notables services aux classes nécessiteuses. Quant a nous, qui n'aimons pas les Monts-de-Piété et qui hótons de tous nos voeux le jour oüces institu tions malheureuses auront disparu du sol de la Bel- gique, nous n'allons pas jusqu'a prétendre qu'elles soient dépourvues de toute utilité. Si les Monts-de- Piété étaient absolument mauvais, il est clair qu'ils n'auraient pas subsisté jusqu'a ce jour. Mais ce dont nous sommes profondément convaincu, c'est que le mal qu'ils er.gendrent est incomparablement plus grand que le bien accidentel qu'ils produisent et que leur suppression absolue,immédiate,serait un bienfait réel pour ceux-ló même qui les envisagent comme une suprème ressource. La science a prononcé, d'ailleurs, sur Ie sort des Monts-de-Piété et elle les a condamnés a moupir. Ce qu'elle leur reproche, c'est de favoriser le désordre et la paresse; d'éveiller, chez le pauvre, Ie désir d'emprunter et, par la facilité ouverte aux emprun- teurs, de les araener a se dépouiller des objets indis- pensables a leur existence journalière; c'est, enfin, de rendre la libération des emprunteurs impossible et d'aggraver ainsi leur position, raison même du taux énorme de l'intérêt que les Monts-de-Piété sont obli- gés de réclamer. Et la statistique, chaque fois qu'elle a été consultée, est venu donner une éclatante confirmation aux re- proches de la science. Elle a démontré que la plupart des engagements sont contractés le lundi ou Ie lende main d'une fête publique et que le nombre en est surtout considérable pendant le temps du carnaval; e'est-a-dire qu'au lieu d'être une ressource dans les jours difficiles, les Monts-de-Piéte sont, pour le pau vre, ce que sont les usuriers pour les fils de familie des encouragements au désordre et a la perdition, des instruments de ruine. M. Vanheule constate les mêmes faits dans son rap port, savoir que les engagements sont infiniment plus nombreux le lundi et le lendemain des jours de fête qu'en temps ordinairemais quand la Commis sion a voulu se rendre un compte exact du mouvement journalier des gages et des capitaux, si important a connaitre pour apprécier sainement les services pró- tendüment rendus par les Monts-de-Piété, elle s'eit trouvée arrêtée par un obstacle invincible, la compta- bilité de noire Mont-de-Piété étant montée de telle facon qu'aucune investigation de ce genre n'est pos sible. Voici, d'après le rapport, le mode de procéder de cette administration il est vraiment des plus cu- rieux Au lieu de clore, jour par jour, le compte des opérations d'engagemenl et de dégagement, elle a ima- giné, ceci est a peine croyable, de ramener l'une et l'autre de ces deux opérations, a un chiffre journalier uniforme; chaque page du livre d'inscription conte- nant 40 lignes, il a été entendu, pour la facilité des écrüures, que ce chiffre serait 40, et que tout ce qui dépasserait ce chiffre serait reporté au compte du lendemain. Ainsi, supposez que, demain lundi, notre Mont-de-Piété revive 45 gages, on n'en inscrit que 40 au compte du jour et les cinq restants sont places en tête de celui du lendemain.Si Ie mardi,on ne regoit que 25 gages, on attend jusqu'au lendemain mercredi et Ie compte du mardi se trouve ainsi composé d'une série de gages recus le lundi, le mardi et le mercredi. Notons cependant que si le chiffre sacramentel est doublé ou triplé en un jour, l'inscription a lieu jus- qu'è concurrence du double ou du triple. Ainsi l'on inscrira 80, 120, 160, 200, 240 gages, mais pas un de plus, pas un de moins. II y en aurait 239, que les 39 formant le surplus du chiffre rond seraient inman- quablement renvoyés au compte du lendemain. Inutile de faire ressortir les nombreux inconvé- nients d'une semblable comptabilité. II est clair d'a- bord qu'elle rend impossible toute investigation sé rieuse sur le mouvement journalier des gages et qu'aussi longtemps qu'on y persistera, il n'y aura en tirer que des enseignements fort incomplets au point de vue des résultats moraux et matériels que le maintien ou la suppression de ('établissement pourrait produire. Sous un autre rapport encore, il est non moins évident que les vices de cette comptabilité nui- sent singulièrement Paction de la justice, en ce qu'ils ne permettent pas de déterminer, d'une manière pré- cise, la date d'un dépót ou d'un dégagement. Quoiqu'il en soit de cette bizarrerie. probablement unique dans le pays, elle n'a pas empêché le rappor teur de constater que le nombre des dépóts s'accroit démesurément le lendemain du dimanche et des jours de fête. Ainsi, pour le mois de janvier 1864, si les chiffres tels que nous les avons saisis la lecture du rapport sont exacts, le lundi, 4, il a été déposé 320 gages; le lundi 11, 240 le lundi 18 et le lundi 25, chaque fois 240, tandis que la moyenne des aulres jours du mois ne dépasse pas 50. Les quatre lundis ont fourni, a eux seuls, 1,0 40 gages, 30 de plus que tous les autres jours du mois réunis Ces chiffres ont leur éloquence et nous engageons notre administration commnnale a les méditer sérieu- sement. M. Brunfaut en a été frappé comme nous; h ia suite du rapport présenté par M. Vanheule, il a cru de son devoir de provoquer la suppression de notre Mont-de-Piété. M. le bourgmestre a répondu par quelques paroles évasives On avisera, on espère ar- river tót ou tard, a supprimer eet établissement. Nous espérons bien que notre Conseil communal ne s? contentera pas d'une semblable réponse et qu'il se trouvera, dans son sein, quelqu'un d'assez courageux pour prendre l'initiative d'une proposition formelle de suppression. Tót ou tard, dans la bouche de tous les administrateurs du monde, veut dire jamais et

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L’Opinion (1863-1873) | 1865 | | pagina 3