JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Troisième année. 39. 24 Septembre 18ö5, Paraissant le dimanche de ehaque semaine» 8 Ene le^on. Quand on a eu l'honneur d'avoir été ministre des affaires étrangères dans son pays, quan 1 on porte le litre de ministre d'Etat, quand on s'appelle Adolphe Dechamps, il est dur de recevoir une le§or) de civisme. Et si c'est une plume étrangère bien qu'amie qui vous i'inflige, ia lecon devient presque chêtimenl. La Gazette de France, qui n'e jamais marchandé I'eloge le plus chaleureux a M. Adolphe Dechamps, lui a dit, presque sans Ie vouloir, de pénibles vérites a propos de sa brochure .- La France et l'Allemagne. Situation de la Belgique. Un organe francais a dii rappeler a un hotntne politique beige, qui se targue d'être patriote par excellence, que la Belgique pour se défendre contre ['invasion, pour sauvegarder son indépendance et son existence, possédait un talisman plus puissant que les armées, plus efïicace que la protection des traites et plus redoutable pour l'en- vahisseur que les fortifications d'Anvers. La liberté, voila d'après la Gazette de France, la véritable, l'u- nique gardienne de la Belgique. M. Dechamps a réuni en brochure, y lit-on, Ie remarquable article qu'il publiait dernièremenl dans Ia Revue générale de Bruxelles sur la situation exté rieure de la Belgique. Cette brochure circule iibre- ment en France; ce n'est done pas commettre une temérité ni un anachronisme que de s'entretenir des éventualiiés qui préoccupent si vivement l'ancien ministre des affaires étrangères du roi Leopold. Avec une liberté de langage qui sort de plus en plus de nos habitudes, l'illustre homme d'Etat a netiement posé la question d'une annexion partielle ou totale de la Belgique a la France, après la mort du premier sou- verain de ce petit Etat. M. Dechamps s'est alarmé, paree qu'il a constate que l'Europe était divisee, que l'Angleterre s'abstenait, que la Russie continuait a se recueiilir, que l'Autriche et la Prusse ne voyaient rien au-dela de leurs querelles de prèpondèrance, et il a conclu que le gouvernement francais se trouvail c rn- plètement maitre de la situation. G'est le patriotisme de eet homme d'Etat beige qui le fait penser et parler, et il est tout naturel qu'un ministre beige ait a coeur l'indépendance de la Bel gique. Nous croyons cependant que M. Dechamps ne tient pas assez compte, dans les probabilités qu'il énonce, de certaines conditions nouvellement intro duces dans la politique et qui rendraient plus diffi cile qu'il y a trente-cinq ans Pagrandissement de la France de ce cóté. L'homme d'Etat n'a envisagé que les facilités ou les difficultés extérieures que pourrait rencontrer la politique impériale. La n'est point toute la question. G'est dans la population beige eiie-même que le gouvernement francais trouverait, certaine- ment, le plus de résistancenous ne p:\rlons pas de resistance malèrielle, mais de résistance morale, En effet, le gouvernement francais, qui affecte de consulter partout les populations, qui a même opposé le principe du suffrage populaire au droit des traités, devrait, avant lout, interroger les tendances du peuple beige. Or, le peuple beige ne serait disposé a se laisser incorporer a l'Empire que par l'appat des a vantages qu'il retirerait de l'annexion Tout se ré- duit, en définitive, a une balance de profits et de peries. v De lous les bien? que peut posséder une nation, le premier est incontestabiement la liberté. La Bel gique a-t-elle quelque chose a gagner, sous le rapport de la liberté, en s'unissanta la France La Gonslitu- tion beige est fondée sur la liberté qui en est la base; la constitution impériale ne fait de la liberté qu'un couronnement, et ce couronnement, depuis longtemps promis, nous l'altendons encore. Quelles que soient les restrictions illégales que le ministère anti-catho- lique qui gouverne actuellement la Belgique ait fait subir aux franchises du pays, ces franchises sont tou- jours maintenues en principe et souvent en pratique. La commune beige est dégagée de la lutelle qui pèse sur la commune francaise, et nos voisins ont conservé l'habitude de faire leurs affaires par eux mêmes.sans se décharger de ce soin sur l'Etat qui, en France, absorbe tout. Les universitós fibres fleurissent en Belgique; on saits'il en est de même en France. Les provinces beiges ont gardé une autonomie adminis trative digne d'exciter l'envie de nos départements. Le gouvernement représentatif n'a jamais été gêné en Belgique, jamais jalousé par la couronne. La respon- sabilité ministérielle est intacte, et toutè initiative législative est laissée aux élus de la nation. Aucun lien n'enchaine la presse, qui n'a a s'inquiéter ni de timbre ni de cautionnement, ni de demandes en au- torisation, ni de communiqués, ni d'avertissements, ni de suspensions, ni de suppression, et ne relève, comme tout citoyen, que de la loi commune. On ne saurait supposer que le peuple beige sa- crifie de gaité de cceur toutes ces franchises on sait ce qu'il possède en fait de libertés, et il n'a qu'a jeter les regards sur ses voisins, travaillant avec tant de lenteur au couronnement de l'édifice, pour apprécier les jouissances que nous sommes a même de lui offrir. Le régime intérieur de la France serait done le plus grand obstacle a l'annexion de la Belgique. Tant que la liberté, qu'on a si souvent fait miroiter a nos yeux dans les discours officiels, ne nous aura pas été rendue, il s'élèvera une impossibilité fondamentale, pour ainsi dire, a toute pensée d'annexion pacifique. Plus d'une fois, le bruit s'est répandu qu'on allait en fin detendre la corde, que le pouvoir allait se dessaisir de la législation exceptionnelle que Ia Constitution a établie, qu'il décentraliserait ['administration, éman- ciperait la commune et Ie département, replacerait la presse dans le droit commun, et toujours ces flat- teuses rumeurs se sont évanouies comme un fugitif rayon de soleil. Sans vouloir autrement examiner une question aussi grave, nous avons simplemont essaye de faire comprendre cecique le premier pas, pour conquerir pacifiquement la Belgique, est de couronner l'edifice en France, et que chacun de nos mécomptes sur ce point est un gage de sécurité pour Ie royaume de Belgique. Garnier. Mais a condition, ajouterons-nous, que la Belgique elle-méme sache-rester fibre. Malheureusement, nous voyons le ministère liberal s'engager de plus en plus dans les funestes voies d'une politique aveuglément réactionnaire et anti nationale. II ne lui a pas suffi de compromettre Ia Belgique, neutre a perpétuité aux yeux des gouver- nements étrangers, par sa deplorable et coupable participation a l'expèdition mexicaine; aujourd'hui, grêce a ('application qu'il fait de la fatale loi contre les étrangers, il nous ravit encore le respect des peuples. Bientót on nous montrera au doigt en Europe. Et si jamais le danger que prévoit M. Adolphe Dechamps frappe a notre porie, pas une voix s'élévera en notre faveur. Et, chose amère a avouer, nous aurons perdu jusqu'au droit de nous plaindre. La liberté, voila Ia raison d'être de la Belgique. Aussi longtemps qu'elle l'affirmait en Europe, elle était entourée de sympa thies. Les peuples invoquaient son exemple, les gou- vernements la craignaient et la respectaient malgré eux. Que le ministère Rogier-Frère-Vandenpeereboom rebrousse done chemin au plus vite. II en est temps encore, mais il n'est que temps. Qu'il cesse de rendre de honteux services a des gouvernements étrangers qui ne lui savent même pas gré de ses bassesses. Non, ce n'est pas en frappant des hommes deux fois exilés que l'on sauvegarde les intéréts nationaux. Cousultez le pays, il vous rèpondra qu'il n'enlend pas être sauve de la sorte. II vous rèpondra qu'il préfère suceomber glorieusement que de vivre dans le déshouneur. Le rouge de la honte nous monte au front la pen sée que le 35moanniversaire de notre victorieuse lulle pour l'indépendance de Ia Belgique, vient d'être mar qué par une nouvelle expulsion, celle de M. Charles Longuet, rédacteur en chef de la Rive Gauchequ'un arrête royal enjoigne a quitter le pays dans les vingt- quatre heures. Ge n'est pas seulement le Requiem de la Révolution que l'on chantera aujourd'hui a Ste-Gudule, c'est le Requiem de la liberte. Rapport de la Chambre de commerce d'Ypresk [Troisième article.) Pour les farmeries le rapport précédent n'offrait aucune donnee, aujourd'hui il ne présente que des renseignements imparfaits. G'est une industrie qui mérite cependant beaucoup de sollicitude, les meune- ries a vapeur augmentant d'aunée en année, surtout dans notre arrondissement. La récolte de Un en 1864 n'a pas été de qualité superieure et n'a pas offert un prix élevé. Une ma chine a teil Ier le lin a eté construite a Warnêton et une filature de lin a Poperinghe. Et les établissements de Wervicq, Gomines o Le ruissage dans la Lys a été contrarié par Ie manque d'eau et par les eaux corrompues de la Defile, i) Ge sont ces eaux que nous amènera quel que jour Ie canal de jonction de la Lys a l'Yperlee I La distillerie est dans un état precaire. De nos trois distilleries urbaines, une seule continue a lutter pé- niblement contre Ia concurrence des grands établis^ PRIX II' ABOWH EHE1T POUR LA BELGIQUE francs par an 4 fr. 50 par semestre. Pour l'Etranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes. PRIX RES AWIOIICES ET DES RECLAMES 10 centimes la petite ligne. Corps du journal, 30 centimes» Le tout païable d'avancei, Laissez liire, lais'sez-vous blémer, mais publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du journal, chez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Dixmude, 55. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduit.es. Toutes lettres ou envois d'argent doivent étre adressés franco au bureau du journal.

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L’Opinion (1863-1873) | 1865 | | pagina 1