Mais jusqu'a ce que le parti clérical se soit
nettement et catégoriquement expliqué, com
ment M. Dechamps veut-il que les libéraux
répondent a ses avances? II nous met en de-
meure de faire trève aux querelles religieuses
et de nous unir avec ses anciens amis nos en-
nemis pour conjurer le péril qui menace le
pays. Qu'il commence par nous communiquer
les clauses du traité d'armisticenous les dis-
cuterons debonnefoi,avec lameilleure volonté
du monde de donner au clergé toutes les satis
factions compatibles avec nos principes. Peut-
on mieux parler et montrer plus de condescen-
dance?Mais M. Dechamps n'en fera rien
M. Dechamps sait aussi bien que nous qu'il
n'y a a attendre du clergé ni acccomodement,
ni concessions d'aucune espèce. Le clergé vent
être maitre et maitre absolu. Tout ce qui lui
résiste doit plier sous la volonté du Dieu Tout-
pvussant, dontilest l'infaillible organe sur la
terre. On est avec lui ou l'on est contre lui.
Quant a des allies, il n'en veut que pour les
réduire a l'état d'esclaves, comme jadis fe-
saient les Romains.
M. Dechamps est, a coup sur. un habile
homme, plein de ressources d'esprit et A'im/é-
niosité. mais ses malices ont le tort d'etre
trop vieilles, te monde ne s'y laisse plus pren-
drerII aura beau crier par dessus les toits que
la Belgique va périr si elle refuse plus long-
temps d'avaler son spécifique. La Belgique n'a
foi ni dans lemédecin, nidans le remède. La
Belgique ne croit plus qu'en elle mêrne et cette
foi-la vaut mieux, pour sa santé, que toute la
pharmacie politique de 1'ancien représentant
de l'arrondissement de Charleroi.
L'article suivant nous est adressé avec
prière d'insertion. Nous déférons volontiers au
désir formulé parnotrecorrespondant, tout en
faisant des reserves formelles sur quelques-
uues des idéés qui y sont exprimées
II est
Victor Hcgo.
Service des Ctnrdes Claanijtètres.
CIRCULAIRE.
Monsieur le gouverneur,
Je suis informé que des gardes champêtres exercent
leurs fonctions d'une manière peu satisfaisante dans
certaines communes. lis y negligent parfois le service
public qui leur est conflc pour se mettre a la disposition
des chefs de 1'administration communale.
Ce reproche s'adresse moins aux gardes champêtres
qu'aux administrateurs des communes. Je vous prie
done, M. le gouverneur, de les rappeler a 1'observation
des lois et des réglements qui déterminent les devoirs
et les attributions des gardes champêtres.
Ce sont des agents de l'autorité publique et on ne
saurait, sans méconnaitre le but de leur institution, les
considérer comme les serviteurs de tels ou tels fonc-
tionnaires locaux.
11 y aura lieu de recommander aux commissaires
d'arrondissement d'être attentifs, dans leurs tournees
pèriodiques, aux abus dont il est question ici et de
signaler les administrations communales qui s'en
rendraient coupables.
Le Ministre de 1'intérieur.
Ar,p. Vandenpeereboom.
I.'enjieisiH'iiienit dait-il êtrc «onfic
au elcr^é
Admettons en principe que tout état, librement ac-
cepté, est la consequence d'aptitudes spéciales, de ten
dances inexplicables, mais pourtant re'elles, qui se
manifestent chez rhomme, et le portent, dés sou eul'ance,
a se cre'er un idéal, vers la realisation duquel il dirige
toutes les facultés que la nature et la destinéc lui ont
départies. C'est ce que j'appcllerai une vocation.
Je prendrai pour types, en fail de vocations, les deux
professions qui, a nion point de vee, oilrént le plus
d'inte'rêt, l'une et 1'autre devanI avoir pour but Eman
cipation des intelligences, le progrès de la civilisation
et ['amelioration de l'espèce humaine dans ce que, mo-
ralement, elle a de défcctueux. J'ai nommé le prêtre
j et le professeur.
I.
Dans eet immense travail d'ensemble, d'oü doit dé-
couler pour la jeunesse, en mêrne temps que la science,
Ia connaissance des exigences sociales et des moyens
de compter avec elles, le röle le plus important échoit
évidefoment a ceux qui sont chargés de former son
education.
Cette mission incombe-t-elle au prêtre ou au pro
fesseur 1
C'est ce que nous examincrons
Les études du prêtre sont cssentiellement religieu
ses elles absorbent tout son Jemps, toute son attention
toutes ses facultés s'exercent ii comprendre, aussi bien
que possible, la gravité et la sainteté du lot qui lui est
dévolu. Son premier devoir lui commaude impérieu-
sement la repression jnimédiate des passions qui pour-
raient l'agiter il doit s'appliquer a lescombattre par
une austérité demoeurs exemplaire, puiséedans un en-
seignement spécial qui réclame tous ses moments.
Avant d'entrer au séminaire, ses preoccupations
portent principalemenl sur l'idée que, du jour oil il sera
oint disciple du Christ, il devra, comme lui, être un
homme tout de sacrifice, de paix et d'abnégation.
11 sc pénètre bien qu'il ne pourra a aucun prix inter-
venir dans les luttes que se livrent les partis dans un
hut exclusivement mondain et temporel, sans contpro-
mettre son caractère sacré, qui doit rester exempt de
toute atteinte, pour l'bonneur et la dignité de son ori-
gine.
II doit se surveiller toute sa vie entro tous il doit
être le plus humble, le plus dbux et le plus tolérant, il
doit se conduire de telle sorte que les champions qui se
disputent la direction des affaires publiques, le trouvent
toujours impartial, planant au dessus d'eux, les domi
nant de sa foi dans la vie éternelle, de son ealme et de
sa vertu.
Désintéressé dans la question, qui n'a nul rapport
avec son sacerdoce, auquel il apparlient tout entier, il
ne peut s'émouvoir de ces querelles mesquines qui divi—
sent les hommes.
11 a renoncé au monde, il ne peut pas s'en occuper
done il ne veut pas le connaitre.
Les vieillards l'ont vu naltre c'est ordinairement
un enfant issu de bons artisans ou de modestes cultiva-
teurs le premier exemple qui ait frappé ses yeux a été
le sacriliee, souvent trés pénible, que s'imposaient ses
jiarents pour l'élever.
Cet état voisin de l'indigence, cette resignation admi
rable, le langage si caressant de sa vertueuse mère qui,
dans ses élans de tendresse, ne pouvant, a dél'aut d'un
peu d'or, satisfaire les désirs de son petit, le consolait
en mêrne temps qu'elle se soulageait, en lui racontant
que le bon Dieu était né dans une étable, que les pau-
vres étaient ses privilégiés, que plus on est doux et
humble ici-bas, mieux on se conforme a ses divins pré-
ceptes, que les prêtres, ses représcnlants sur la terre,
doivent eontinuer sa vie de simplicité, de douceur et de
paix.
L'enfant, attendri jusqu'aux larmes, répondit a ces
touchants récits Oh bonne mère que je voudrais être
prêtre
Le germe en est jeté, les parents ravis se promettent
de cultiver ces beureuses dispositions et cnvoient leur
enfant a 1'age de dix ans au collr'ge de la petite ville
voisine.
La direction de l'établissement est confit'e a des ee-
clésiastiques, qui, informés du voeu exprimé par leur
nouvel élève, ne négligeront rien pour développer les
sentiments si pui s de ce jeune et candide rils de la chau-
mière.
II grandit, on lui enseigne une morale sévèrcla
renonciation a tous les biens et a tous les plaisirs ter-
restres. qui ne sont qu'éphéir.ères et nuisibles au salut
de lame; on lui inspire 1'horreur du monde, ce theatre
oü toutes les passions se beurtent et se combattenton
cherche a lui persuader qu'il doit rester étranger a ces
luttes. Dieu n a-t-il pas dit Mon Rogaume n'est pas
de ce mondeOn lui prêcbe l'amour du prochain, le
pardon des offenses href, on veut en faire un prêtre
digne du Christ.
Aprèss'ètre nourri pendant huit années des sublimes
préceptes de l'liomme-Dieu, son maitre et son modèle,
il se trouve a la veillc d'entrer au séminaire pour s'a-
donner entièrement a l'étude approfondie de la théolo
gie. dont les cours qu'il a suivis jusqu'iei ont été, en
quelqiie sorte, des classes préparatoires.
A vingt-un ans, l'heure du sacre a sonné.
Aussi pur que les anges, il se prostenie devanl l'autel
pours'en relever Je fidéle ministre til n'apoint souillésa
robe virginale il peut, satis arrière-pense'e comme
c sans mensonge, nothmer tous les hommes ses frères,
toutes les femmes ses sceurscar nul souvenir ne se
réveille parfois en lui d'une injustice ou d'une injure,
nul mauvais levain ne fermente ni dans sa tête, ni
dans son cceur. (Aug. Chevalier.)
11 s'attend a être appelé a l'exercice de son culte
dans quelque pauvre village, oil il pourra pratiquer
1'évangile, prêcher la charité chrétienne, encourager
etsoulager les malheureux.
Tout son passé n'a été qu'un long apprentissage de
cette belle mission. - Oh deception l'évêque le dé-
signe pour aller occuper une cliaire dans l'un ou l'autre
Collége episcopal, ou il devra enseigner aux jeunes
gens les devoirs de la familie et les besoins de Iasociété.
Dieu en fit un prêtre et l'évêque exige qu'il soit pro
fesseur.
Vous avez remarqué, lecteur, qu'il lui a été maté-
riellement impossible de s'initier aux fonctions qui lui
sont imposées en dépit d'une vocation bien délerminée;
toutes ses études ont été dirigées vers un autre but que
celui qu'il doit l'orcément chercher a atteindre c'est
ainsi que s'improvise le prêtre-profcsseur. Parents,
quelle garantie offre-t-il pour l'instruction et l'éduca-
tion de vos li ls
11 est honnête, j'en conviensest-ce assez
II.
Passons au professeur laïque.
Celui qui vous graudit, celui qui vous élève,
Qui donue a vos raisous las deux trancHants du glaive.
Art et science, afiu qu'en marchant au tomheau,
Vous tiviez pour le vrai, vous luttiez puur le beau.
La vocation du professeur ne se trahit pas aussi
spontanément que celle de la prêtrise, la carrière des
amies, ou toute autre profession qui frappe plus vive-
ment l'imagination d'un enfant, soit par la répétition
fréquente d'histoires miraculeuses qui se rattachent a
1 une, soit par le récit des aventures clievaleresques ou
extraordinaires qui appartiennent a l'autre.
L'enseignement n'a ni martyrologe, ni sorcellerie.
ni chauvinisme a faire agir sur l'esprit de l'enfance
rien qui fascine, rien qui passionne, rien qui extasie ou
fanatise l'homme dans son premier rudiment, n'est de
son domaine. Cette vocation est le partage des ames
fortes et des coeurs généreux, elle ne se dessine que
quand des études déji» sérieuses ont müri l'intelligence
de celui qui est appelé a inculquer, tot ou tard, aux
jeunes generations, en mêrne temps que des principes
d'honneur et les devoirs de la familie, le gout de la
science et l'amour de la patrie.
Le corps professoral se recruta parmi les jeunes gens
qui se distinguent pendant le cours de leurs études.
Ces jeunes gens s'éprennent bientut d'un profond respect
pour l'homme supérieur qui, avec autant de tact que
de justesse, leur étale le pour et le contra de la vie,
leur expose ses écueils et les moyens de les e'viter, les
rend bons et. indulgents.
Ils ne s'attachent pas seulement au maitre, mais ils
prenneut en allection le mandat qu'il remplit avec tant
de distinction, ils se sentent predestines a la continua
tion do cette oeuvre magniüqueils ne tarderont
pas a éprouver ces frémissements inexprimables que
l'homme ressent au moment suprème oh Dieu, lui révè-
lant sa \olonté, lui dit Je te donne la tache de te
dévouer a 1 instruction de tes semblables, tu leur leras
dislinguer le bon du mauvais, le vrai du faux, le juste
de 1 injuste, tu en l'eras des hommes honnêtes, instruits
et utiles, des citoyens capables de soutenir et de dé-
fendre les institutions du pays.
A partir de ce jour, le cercle des études s'élargit et
elles prennent une autre directionon lui apprend a
connaitre l'enfant et tous les besoins inhérents a eet
age, on lui inspire l'attachement le plus ardent au