JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Biinaiiche
Quatrième année. 3.
21 Janvier I860
Paraissant le dimanche.
ÜN DUEL A WINGLEBURY
1*15 IX U'lUOllXEillEST
POUR LA BELGIQUE
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Ypres, «o janvier is««.
La question de la réforme électorale se trouve de
nouveau posée devant le pays. Ecartée, il y a quel-
ques mois, par une sorle de fin de non-recevoir, elle
réappnrait aujourd'huiavec la proposition de
M. Guillery. plus vivante et plus impérieuse que ja
mais, réclamant une resolution qu'il n'est plus dans
la puissance de la législature de lui refuser.
A ne considérer les choses qu'au point de vue
absolu et abstraction faite des principes constitution-
nels, que personne ne songe a modifier, le droit de
tout citoyen de participer, par son vote, au gouver
nementdes affaires du pays,nous parait incontestable.
Si on l'oblige payer, s'il peut être obligé a se bat-
tre, si I'on exige qu'il obéisse, il doit avoir le droit de
savoir pourquoi, de donner ou de refuser son consen-
tement, de voir compter avec son opinion.
II y a cependant certaines exclusions motivées par
des raisons positives qui ne sont pas en contradic
tion avec ce principe et, quoique ces exclusions
soient un mal en elles-mêmos, elles ne peuvent cesser
qu'avec l'élat dechosesdont elles sont la conséquence.
Ainsi nous regardons comme totalement inadmis
sible qu'une personne participe au suffrage sans sa
voir, tout au moins, lire et écrire. Sans doute, il se-
rait éminemment desirable que des conditions de
capacité plus completes phssent être exigées et que,
par exemple, l'électeur fut obligé de posséder la con-
naissance des éléments de l'histoire générale et de
l'bisloire et des institutions de son pays. Mais ce de-
gré de savoir n'est pas accessible a tout le monde dans
notre pays, et probablement il ne l'est pas davantage
ailleurs.
II n'existe pas non plus un mécanisme digne de
confiance pour s'assurer si I'on y est parvenu ou non.
La tentative produirait de la parlialitè, de la chicane
et toute espèce de fraude. Cependant, par rapport
a la lecture et a i'écriture, il n'y a pas de difficulté
rien ne serait aussi aisé que d'assurer, par des régies
fixes et par une publicité compléte, ('application hou-
Suite et fin.)
Déja M. Alex. Trolt avait pose un pied sur la
marche, quand soudain il remarqua ce que la
lumière blafarde des flambeaux ne lui avait pas en
core révélé une forme humaine assise au fond de
la chaise-de-poste et soigneusement enveloppee dans
un manleau pared au sien.
Qui est la dedans? demanda-t-il tout bas a Over
ton.
n Chut 1 répondit le maire c'est l'autre assuré-
ment.
C'est l'autre, cria Trolt, en cherchant a battre en
retraite.
Mais oui, c'est l'autre j'imaginc que vous vous
expliquerez a merveille, avant que vous soyez ioin.
Failes encore un peu de tapage vos causeries a voix
basse pourraient exeiller des soupcons.
Je refuse d'entrer dans cette voiiure, hurla aus-
p) Reproduction intcrdite,
nête d'une épreuve aussi simple. C'est pourquoi, dans
notre opinion, cette condition devrait, dans tous les
cas, accompagner le suffrage universal, et au bout de
quelques années, ceux-la seulement seraient exclus
qui se soucieraient si peu du privilége, que leur vote,
s'ils le donnaient, ne serait pas ['indication d'une opi
nion politique reelle.
Dans quelle mesure la Constitution nous permet-
elle de réaliser eet idéal? La Constitution a fait du
paiement du eens une des conditions essentielles du
droit de parliciper aux élections législativesor,
comme nous avons, en 1818, abaissé le eens jus-
qu'au minimum qu'elle détermine, il en résulte qu'en
ce qui concerne les élections pour les Chambres et
sauf la question de savoir s'il est possible de faire en-
trer daus la computation du eens les ceutimes addi-
tionnels et les impóts communaux et provinciaux, Ia
legislation électorale actuelle a atteint l'extrême limite
des réformes que la Constitution autorise.
II n'en est pas de même pour les élections provin-
ciales et communales. lei, tout est abandonné au pou-
voir discrétionnaire du législateur la Constitution l'a
laissé raaitre de régler les conditions de l'électorat, et
cela, d'une manière absolue, illimitée.
II faut bien reconnaitre que le législateur n'a guère
mis a profit l'extrême latitude que le pouvoir consti
tuent lui avail abandonnée Ioin de marquer un pro-
grès, notre législation électorale, en matière com
munale et provinciale, accuse un esprit évident de
défianee, sinon d'hostiliié, envers les populations ur-
baines, c'est-a-dire envers les idees modernes de li
berie el d'emancipation politique.
Nous ne voulons d'autre preuve de ce que nous
avancons ici, que le eens differentiel ètabli par la loi
communale. Comment expliquer, si ce n'est par une
pensee de défianee, qu'on soit électeur communal dans
une petite commune de la Flandre, en payant quinze
francs d'impót direct, tandis qu'il en faudra payer
42 fr. 50 a Bruxelles, pour jouir du même droil?
La proposition de M. Guillery doit être considérée
si lót M. Alex. Troll, dont les premières lerreurs se
réveillaient avec dix fois plus de violence. Je serai
assassinè, je serai....
Bravo I souffla Overton a l'oreille de son protégé,
bravo I je vais vous pousser dans la voiture.
Mais je ne veux pas m'en aller, moi I je ne veux
pas partir au secours au secours On veux m'em-
mener contre mon grè. C'est un complot! on en veut
ii ma vie
Le pauvre jeune hoinme, fit encore la compatis-
sante Mrae Williamson.
Maintenant, cocher, fouelte les chevaux, cria le
maire, poussant Trotl dans l'intérieur de la voiture et
fermant sur lui la portière, parlez au triple galop et
que rien ne vous fasse arrêter en route d'ici au pre
mier relai. Allright. Partez!
Les chevaux sont payés, Tom, cria Mme William
son d'une voix percante. L'attelage entraina la voiture
a raison de quinze milles a l'heure, avec M. Alexandre
Trott et M"e Julia Manners soigneusement enfermés a
l'intcrieur.
Durant les deux ou trois premiers milles, M. Alex.
comme une réaction de l'esprit libéral contre l'esprit
manifestement arriéré de Ia législation actuelle en
proclamanl l'uniformité du eens, elle fait disparaitre
une inégalité choquante, un privilége injustifiable et,
ne possédat-elle a nos yeux que ce seul titre, il serait
suflisaut pour nous déterminer a l'appuyer de toutes
nos forces.
Sans doute, cette proposition ne donne pas pleine et
entière satisfaction a nos aspirations. Nous eussions
désiré, nous ne le cachons pas, que, rompant définiti-
vement avec Ie vieux préjugé du eens, Ie projet de l'ho-
norable représentant de Bruxelles proclamat le droit
pour tout citoyen sachant lireetécrire,departicipera
l'élection de ses mandataires a la province et a la com
mune. Mais,paree que la réforme dont ilapris l'initia-
tive aurait pu être plus compléte et plus radicale, ce
n'est pas une raison pour que nous la repoussions.
Tout ou rien ne sera jamais notre devise politique.
Nous acceptons le bien quand il se présente el coinp-
tons sur l'avenir pour obtenir le mieux.
La réforme proposée par M. Guillery rencontre,des
deuxcotés de la Chambre, d'ardents adversaires. D'a-
près les catholiques, elle enlrainerait la ruine com
pléte de leur parti. Ecoulez, après cela, les doctrinai
res ils vous assureront, sur la foi de I'Echo du Par
lement et du Journal de l.iége que son adoption strait
un coup de mort pour l'opinion libérale.
Qu'y a-t-il de vrai dans ces craintes conlradic-
toires? Nous I'ignorons et ne tenons pas du tout a
nous en enquérir, la question n'étant pas de savoir
si cette réforme sera favorable ii telle ou telle opinion
au détriment de l'opinion contraire, mais si elle est
conforme a la justice el inspiree par un sentiment
de véritable libéralisme. Gar, encore une fois, toute
la question est la et rien de ce que l'esprit de parti
imaginera pour la denaturer ne parviendra a donner
le change au bon sens public est-il juste, est-il li
béral d'accorder a tous les citoyens sachant lire et
écrire el payant une certaine quotité d'impót, le droit
de nommer leurs mandataires a la province et a la
Trott se tint coi dans un coin de la voituie et son
compagnon mystérieux, dans un autre M. Trolt
s'enfonciit de plus en plus dans son coin a mesure
qu'il senlait que son compagnon, sortant du sien,
s'approchail de plus en plus de lui. II fit de vains
efforts pour déeouvrir, dans l'obscurité, les traits de
la physionomie de la personne qu'd supposait n'être
autre que Horace Hunter.
Nous pouvons parler maintenant, fit a la fin son
compagnon de voyage, les postillons ne peuvent ni
nous voir, ni nous entendre.
Ce n'est pas la voix de Hunter, pensa Alexandre
étonné.
Cher lord Peter, ajouta miss Julia d'une voix
insinuante, on même temps qu'elle posa doucement
sa main sur l'épaule de Trott; cher lord Peter I vous
ne me répondez pas?
Hé quoic'est une femme 1 s'écria M. Trott ex-
cessivement surpris.
Ah! quelle est cette voix? dit Julia. Ge n'est pas
la voix de lord Peter.
a Non, c'est la miennc, répliqua M. Trott.