Les pensions civilcs en Sfelgique. La presse et quelques associations intelligentes et humanitaires se sont fréquent rrtent occupóes de la loi qui règle les pensions des fonctionnaires et empioyès qui ont consacré toute leur vie au service de l'Etat. L'article 1" de celte loi porte Les magistrals, fonctionnaires el employés, faisant parlie de l'ad- ministration générale et rétribués par Ie trésor pu- blic, pourront être admis a la pension 5 65 ans et apres 30 années de service, s L'article 3 ditTout magistrat, fonctionnaire ou employé reconnu bars d'état de conlinuer ses fonc- tions, pbr suite d'infirmités, ponrra êtré admis a la b pension, quelque soit son êge, s'il compte au moins b 10 années de service. L'article 8 s'ènonce corame suit Les pensions b de retraite seront liquidées, sauf les exceptions, 5 raison, pour chaque année de service, de 1/65 de la b moyenne du traiternent dont l'intéressó aura joui pendant les 5 dernières années. b Les fonctionnaires et agents subalternes réunissant 65 ans d'êge et 30 de service forment Ja grande excep tion ceux qui, saus se trouver dans ce cas, sont dans l'impossibilité de continuèr l'exercice de leurs fonc- tions par suite d'infirmités, sont invités a comparaitre devant une commission, chargée d'émetlre un avis motivé sur Ie bien-fondé des observations et récla- inations qui lui sopt soumises par les intéressés. Dans quelles conditions ce personnel, usè et souf- frant, se présente-t-il ordinairement devant la com mission Ges invalides sont, en grande partie, des vieux douaniers, des facteurs ruraux, des petits employes de chemin de fer, que l'on fait comparaitre d'office paree que le service exige des hommes robustes, jeunes et dispos. Ces malheureux sont vieux, décrépits, brisés par la fatigue, ils n'en peuvent plus et ue demandent pourtant pas leur inise a la pension, ils rappellent la fable de la Mort et du Bucheron Plutót souffrir que mourir, b etc. Au lieu de voir des hommes qui, après avoir dé- pensé pendant trente ans, leur santé, leur vigueur et leur intelligence pour satisfaire aux exigences de ['ad ministration, réprimer les abus et contribuer a la prospéritépublique, viennent recevoir,en récompense d'un devoir bien rempli, la garantie de quelques an nées de cal me et de paix, l'oncroirait voir des mal- faiteurs qui se présenlent devant des juges. Je ne sache pas qu'il y ait des méfaits aussi sóvère- ment chêtiés que le sont généralement trente années de services loyaux et dóvoués au gouvernement. Ceux qui sont appelés devant la commission font involontairement songer aux malheureuses victimes de cette moustrueuseinstitution quiavaitnorn «Saint- Office, 8 oü l'on torlurait impitoyablement les corps de ceux qui,par la pensee ou leurs actes, s'etaient ren- dus coupables d'avoir aidé au developpement du bien- être général, en sacriiiant généreusement.en dépil du supplice qui les atlendait, leurs forces et leur volonté puissante pour améliorer la position des masses. L'inquisiteur mutilait les meilleurs citoyens, l'Etat condamne a la misère ses plus vieux serviteurs Ces appréhensions ne sont que trop justifiées, on serait craintif a moins, qu'on en juge tel douanier b et au revers, deux mains joiules, avee ces mots b Jusques a la besace. Les Gueux furent les enfants dé Ia réforme reli- gieuse du XVI» siècle il est done nécessaire de jeter un petit coup d'ceil sur ce mouvement immense qui bouleversa toute l'Europe. La réforme eut pour père Martin Luther, profes- seur a l'Üniversité de Wittemberg, né le 10 novouibre 1483, Eisleben, dans lecomtó de Munsfeld. Ce moine impélueux, aux passions ardentes, mals érudit et éloquent, s'cleva de toute la force de son ge nie contre les abus qui désolaient l'Eglise romaine, particulièrement contre le traQc des indulgences, et, grêce la predisposition des esprits, il trouva bien vite des partisans. Dans le principe, on s'inquiéta médiocrement des discours et des manoeuvres de eet homme obscur et pauvre, dont ni le nom ni la réputation n'avaient de prestige, mais, quand il s'avisa d'altaquer la pri- raauté du Saint-Siége, Linfaillibilité de l'Eglise, les voeux monasliques, le célibat des prêtres, le pouvoir temporel et la hiërarchie ecclésiastique, lorsqu'il ró- voqua publiquement en doute et rejeta ensuite les dograes los plus veneres par Ie catholiques, tels que touche pour tout traiternent 900 fr. par an, lel facteur rural 750 fr., tel fonctionnaire regoit de deux a trois mille francs, souvent ils ont charge de familie ce der nier a rêvé pour les siens Ia possibilité d'une éduca- tion convenable et pour lui-móme una vieillesse a l'abri de la gêne. II avait compté, ils avaionl lous compté sans l'inexo- rable loi des pensions, qui, après trente années d'un dévouement a toute épreuve, leur dit Vous avez assez travaillé, vous ne pouvez désormais plus être utiles au gouvernement que vous avez si fidèlement servi, retirez-vous, on tachera de ne pas rendre vos demiers jours trop pénibles, vous n'aurez plus qu'a vous protnener oü il vous plaira, distrayez-vous, vi- vez heureux et sans soucis au milieu des vótres, la loi a pourvu a tout, elle vous assure une pension de retraite de 30/65me* de votre traiternent d'activité. De manière que l'employé de la douane touchera a peu prés fr. 415 50, un receveur des contributions, un contröleur des douanes, un chef de station, un chef de bureau d'une administration centrale, au trai ternent de 3,000 fr., recevra au moment oü tous les besoins auront grandi avec les années, oü l'instruc- tion de ses enfants exigera des frais plus étendus, afin de leur donner les moyens de se créer une position modeste mais honorable dans la société, il recevra, dis-je, au lieu de trois mille francs, une pension de retraite d'envirou fr. 1,384 50. Quelle deri sion 1.. Aux termes de l'article 3 prémentionné, si la mala- die entame le fonctionnaire, de telle sorte que l'on n'en puisse plus espérer utilité, l'Etat l'admettra a la pension, sHl a dix années de service. Supposons un homme dont toute la jeunesse s'est passée se préparer a l'une des grandes administra tions de l'Etat, une belle intelligence mise au service d'un savoir réel acquis par vingt années d'études et d'application pratique, prenons un professeur agé de 30 ans, un ingénieur des mines ou des ponts-et-chaus- sées, ou tout autre fonctionnaire dislingué, qui, en cinq années de service, obtient une position de 3,000 francs, et se trouve, après un service total de dim ans, par suite de maladie,dans l'impossibilité de coutinuer ses fonctions. Qu'en adviendra-t-il 11 jouira (Ie mot est cruel) des 10/65mc* de son trai ternent, soit fr. 462, ou peu s'en fautil tralnera peut-être sa maladie pendant de nombreuses années, la raison peut l'abandonner, aucun hospice ne pourra convenablement le traiter moyennant le montant de sa pension, et, chose horrible a penser, s'il n'a pas dix années de service, que lui reste-t-il a faire? II ne peut échapper a la mendicité que par le suicide Législateur, au nom de l'humanité, au nom de Ia dignitédu pays, au nom de votre dignité personnelle, que tous vos efforts tendent a reformer cette loi qui frappe dans leur vieillesse ceux qui, toujours ont compté parmi les citoyens dévoués a la palrie, cette loi iriiquequi les voue a la privation perpétuelle. Comprenez done et faites comprendre que, règle générale, les fonctionnaires blanchis sous le harnais, si je puis m'exprimer ainsi, ou ceux qui plusjeunes, doivent se retirer pour infirmités, ne vivent pas assez longtemps pour qu'en leur laissant, jusqu'aux appointemenls de 3,000 francs inclusivement, les 4/5 de leur traiternent d'activité et, pour les emplois iu- la confession auriculaire, leculte des saints, la trans- substantiation, la messe et la communion sous une seule espèce, alors les yeux se dessillèrent et les fou- dres de l'excommuuication vinrenl frapper le hardi novateur. C'étail trop tard Rejeté du sein de la grande association catholique par une bulle de Léon X, du 20 juin 1520, Luther li- vra publiquement aux Hammes l'arrèt de sa condem nation, en s'écriantMort a l'Antechrist I Pour lui, l'Antechrist était le pape. Ce cri fut le i Dieu le veut o de la réforme. Aussi,les opinions nouvelles se propagèrent-elles rapidetnent. o L'entralnemenl, dit Michelet, (1était immense. Les b nobles et le peuple, les chüteaux et les villes libres, b rivalisaient de zèle et d'enlhousiasme pour Luther. A Nuremberg, a Strasbourg, a Mayence tnême, on b s'arrachait ses rnoindres pamphlets. La feuille toute b humide était portée sous Ie manteau el passée (je b boutique en boutique. Hans Sachs (2) sortait de tl) Michelei. Mémoires de Luther, tome 1, page tO. (2) Hans Sachs, cordonnier. surnommé le prince des mai- Ires-chanteurs, naquit a Nuremberg, en 1494. Sa biograpbie a étê faite en vers par Puscbmann, poète du xvie siècle. Le fameux poèrae le RossU/nol de Willemberg est le panê- gyriquede Luther, on y voit Comment cette classe labo- férieurs a mille francs, l'intégralité du traiternent, le gouvernement puisse en aucune facon compromettre la situation si prospère de nos finances, a laquelle situation, ceux que la loi condamne a 1'indigence, ont tous contribuó dans leur sphere d'action, en pro portion de leurs aptitudes. Je chercherai a établir mathémaliquement la dif ference que produirait, dans la dépense générale de l'adminislration publique, la modification de la loi sur les pensions dans le sens préconise dans eet exposé. Je prendrai pour base la province de la Flaudre Occidentale, qui, aussi bien par sa situation géogra- phique, confinée par la mer du Nord, les frontières de France et de Hollande, que par la spéeialité de son industrie, ses nombreuses brasseries et distilleries, ses fabriques de Sucre, son commerce international et interlope très-actif, son étendue et sa population, nécessite un personnel administratif considérable. D'après des renseignements pris a bonne source, il s'est présenté en 1865 devant la commission pro vinciale des pensons 1° 15 brigadiers, sous-brigadiers et employés de la douane ayant en moyenne un traiternent de 1,000 fr. par lête, 56 ans d'age dont 33 de service, ce qui constitue peur chacun d'eux, calculó a raison de 1/65 par année de service, une pension de fr. 558 33, representant un total de fr. 8,374. 95. En adop- tant la mesure que j'ai l'honneur de soumettre a l'ap- preciation du public, c'est-a-dire en limitant leur pension 1,000 fr. la dépense serait annuellement uiajorée de ce chef, d'une somme de fr. 6,625 05.' 2" 7 Employés subalternes, appurte nant a d'autres administrations, touchant un traiternent rnoyen de 900 fr., ayant 59 ans, dont 18 faire valoir pour la fixation de la pension, qui atteindrait, au taux de 1/65 m" par année de service, a la somme de fr. 249 30 par individu, soit pour les sept, a celle de fr. 1,745 10. En augmentant cette somme jusqu'a concurrence du traiternent d'activité qui est de 900 fr. par agent, le chiffre du budget s'accroitrait de fr4,555 00 8° Deux fonctionnaires jouissant d'un traiternent moyen de 3,350 fr., leur êge etait de 62 ans, ils comptaient chacun 25 années de service, avaient conséquem- ment droita 25/65"du traiternent susdit, soit fr 1,307 50, ce qui représento pour les deux, fr. 2,615. En adoptant ma limite de 4/5" pour les traitements de 3,000 fr., il y aurait une difference a charge du tresor public de fr. 2,185 00 Fr. 13,365 05 Done pour la Flandre occidentale treize mille trois cent soixaute-ciriq francs. Répótons neuf fois cette somme pour tout le royaume et nous arriverons a un total de fr. 120,285 45. Dans l'hypothöse que la Flandre occidentale ait fait exception en 1865 et qu'il faille pour éviter aux fonctionnaires leplus épouvanlable malheur qui puisse alteindre un homme la vieillesse ou l'infirmité, ce qui est un, mariée 5 l'indigence une augmentation de un million, au lieu de fr. 120,285 45 et un second million pour majorer le chiffre des pensionsaccordées sa vulgarité ordinaire, il laissait son soulier com- b mencè, il écrivait ses meilleurs vers, sa meilleure b pièce. Ilehantaita demi-voixle Rossignol de Wittem- i berg dont la voix retentit partoutRien ne se- b conda plus puissamment Luther que le zèle des im- b primeurs et des libraires pour les idees nouvelles. b L'empereur Charles-Quint effrayè, convoqua une diètea Worms, lo 28 janvier 1521. Luther y compa- rut, protégé par un sauf-conduit, mais il refusa de ré- tracter ses opinions. Le motiarque exaspëró, fit publier un édit qui déclaraitle réformateur criminel et le dé- pouillait de tous les privileges dont il jouissait comme sujet do l'empire, defendant en outre, a tous princes et souverains, de lui donner asile et protection. Mais Luther s'était fait de nombreux amis, qui ne crain- gnaient pas ou craignaieul fort p u les menaces de l'empereur. Avant l'expiration du sauf-conduit, Fre deric, électeur de Saxe, fit enlever le proscrit et lui donna, pendant un an (1521-1522), l'hospitalité au chéteau de Wartbourg. rieuse (le liers-Élat en Allemagne), saluait l'aurore du jour avec le rossignal et quitlait le désert oü l'avait enlrainée le lion rusé. Ce meistersaenger composa en outre quelques comédies, dont la plus célèbre, croyons-nous, est celle qui a pour litre Les enfants d'Eve.

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L’Opinion (1863-1873) | 1866 | | pagina 2