Tel ne fat pas pourtant l'avis du Collége échevinal.
Cesoblacles,qai a beaucoup paraitraientfortsérieux,
n'embarrassèrent pas notre Collége. II n'est jamais
erabarrassé, malheureusement pour le public et pour
lui-même! Tour a tour ingénieur hydraulique,
conducteur des ponts et chaussées, redresseur de
routes, architecte, inacon, il se fit jurisconsulte pour
la circonstanöe et voici le plaisant raisonnement qu'il
tintS'adresser aux concessionnaires, serail s'ex-
poser a subir leurs conditions. Ayons plutót recours
au département des travaux publics; lui seul a ac-
cordé toules les automations, lui seul est compétent
pour faire modifier les premiers plans
Ainsi done, des plans sont defiuiLivément approu-
vés, une concession légalement faite et aucun droit
n'est acquis aux concessionnaires. rien de stable pour
eux le département des travaux publics, par cela
seul qu'il a accordé toutes les autorisations, sera tou-
jours compétent pour faire modifier les premiers
plans
Telle est Ia penséedu Collége, telles sont du moins
ses paroles. Quant a nous, nous ne craignons pas de
dire que, non seulement aucun jurisconsulte, mais
pas même un homme au plus simple bon sens ne le
suivra sur ce terrain Ah 1 les bons éclats de rire qui,
au ministère, ont dCi accueiliir la thèse de notre tri-
nitè administrative 1
Tout ceci se passait le 6 janvier et, en présence du
silence qui enveloppait cette affaire, les plus dévoues
a ('administration espéraient que l'intervention cha-
rilablement officieuse de quelque ami avail determiné
ie Collége a abandonner ses reclamations de haute
fantaisje, lorsque, dans la dsrnière séance du Conseil,
lecture fut donnée d'une lettre du département des
travaux publics. Cette lettre, le Collége l'avait en
mains depuis plusieurs semaines. Nous comprenons
qu'il en ail retardé la communication autant que pos
sible et l'embarras manifeste que sa lecture occasion-
nait a noire honorable bourguteslre. Impossible, en
effet, de recevoir un désaveu plus formel et, sous une
forme courtoise, une plus dure lecon de droit admi-
nistratif.
La lettre du département des travaux publics est
laconique; mais elle déclare nettement que le Col
lége échevinal a commis uneprofonde erreurlorsqu'il
a cru que ce département pourrail prendre a sa charge
la totalité, ou méme une par tie, des dépenses occa-
sionnées par le nouveau tracé du canal. C'est la un
intérèt local qui exigeune entente entre la commune et
les concessionnaires.
Le minislre reconnait done implicitement, d'une
part, qu'il n'a pas le droit de faire modifier Ie tracé
d'autorité d'autre part, il refuse de faire servir les
deniers de l'Etat a la satisfaction d'un intérêt local.
Sa seule intervention se borne a stipuler év'entuelle-
ment l'approbation de son département pour les mo
difications a interyenir.
L'affairè en est la et la ville se trouve dans l'alterna-
tived'avoiruneStalion insuflisante pour ses besoinset
les exigences futures de son industrie et de son com
merce, ou de faire en pure perte un nouveau sacrifice
de 200,000 francs la première consacre un mal a
jamais irréparable, la seconde est une dépense bien
lourde pour une petite localitó qui n'est pas riche et
se trouve en presence de grands et importants tra
vaux qui la pressent.
Sacrifice en pure perte, disons-nous.
Eflèclivement, rien n'etait plus facile que d'avoir le
favoriser les tendances populaires et qui s'etaient te-
nus jusques-la prudemment a l'ecart.
II parcourait les campagnes en habit d'augustin et
parlout, grêce a cette supercherie, on l'ècoulait vo-
lontiers. II prêche.a Elverdinghe, Messmes, Poperin-
ghe et alia enfin se fixer a Rousbrugge, oü il prit la di
rection des affaires spirilue1l.es. Un temple fut cons-
truitprèsdu hameau De haghedoorm etGuillaume
l'inaugura lui-même, le 15 octobre 1566. La plupart
des habitants de la commune contribuórent dans les
frais de construction de eet édifice.
Le 26 septembre, le magistral de Furnes, persuade
que l'émeule avait dit son dernier mot, et cédant sans
doute a un mouvement d'éconoinie, rappela ses hom
mes armés qui baltaient la campagne et auxquels le
peuple avait donné le noin de chasseurs de gueux
(Geuze jagers.) Ge fut une fan te a laquelle vint s'ajou-
ter une mesure fort impolitique et^dont les résultats
furent desastreux, cur le feu de la révolte prés de s'é-
teindre, se rallum.i.
Une dizaine de Gueux attendaient, dans les prisons
de Furnes, l'arrét do la justice qui devait fixer leur
canal tel qu'on Ie demande aujourd'hui, sans bourse
dëiier. Availt d'accorder la concession, le département
des travaux publics a soumis les plans a l'avis de
l'administration communale, tout au moins en cequi
concerne Ie parcours sur le territoire de la commune
et particulièrement les abords de la Station.
II fallait faire valoir alors les motifs que le Collége
échevinal n'a trouvé qu'après coup, grace encore a
['interpellation d'un honorable conseiller. Le ministre
se serail rendu sans aucun doute a ces raisons très-
fondées d'ailleurs et les concessionnaires, de leur cóté,
se trouvant en présence de l'oclroi de leur concession,
aurait accepté, sans aucune difficulté, l'un tracé aussi
bien que I autre.
Mais nonle Collége n'a pas prévu que d'autres
voies ferrées viendraient s'ajouter a celle qui existe,
il n'a pas soupconnó le réveil de l'industrie dans nos
murs. Cela se comprend. Sa perspicacité ne s'etend
pasjusqu'au lendemain.Et puis d'ailleurs ses amis ne
faisaient-ils pas ['impossible pourenrayer l'industrie,
ses amis n'étaient-ils pas tout-puissantset infailiibles?
Ilélas I tous ces beaux calculss'on sont allés en fumèe
l'industrie s'apprête a triompher des misérables roue-
ries de quelques pygmées.
Mais le mal est fait et la même fatalité qui a empê-
ché tant de choses utiles, se redresse de nouveau de-
vant nous TROP TARD. La ville d'Ypres est une
fois de plus victime de l'impéritie, de la cécité de ses
magistrats. 200,000 francs seront pour les contri-
buafiTes la carte a payer des bévues du Collége échevi
nal.
Un dernier mol. Celui-ci sentant le lourd fardeau
qui l'accable, tenle de s'en allèger en portant la ques
tion a l'examen des commissions. Les conseillers au-
ront dèjè apercu ce piége grossier qui cherche, en
divisant la responsabihté, a les accuier dans une
impasse. Quelle qu'en soit d'ailleurs I'issue, que nous
ne chercherons même pas a prévoir, il est certain
que les contribuables seraient peu charmés de voir
ajouter aux defenses communales une nouvelle
charge de 200,000 francs.
Lundi a eu lieu l'inauguration de la nouvelle fabri-
que de la Société Barbier-Muiier et Ce. Différents dis
cours ont été prónoncés. Cette cérémonie avait attiré
un immense concours de population.
Nous avons eu occasion, dans le temps, de nous oc-
cuper des projets dé la Société Barbier-Muiier et C".
A présent que ces projets ont pris corps, il nous
reste a formuler un voeu. Puisseuneprospérité rapide
encourager d'autres tentalives, puisse le développe-
ment de l'industrie, après avoir créé l'indèpendance
des positions, répandre de plus en plus celle des ca-
ractères et arracher notre ville aux étreintes mal-
snines qui la luenl. Ces voeux nous les faisons, non
pour un intérêt privé auquel nous n'avons rien a
voir, mais pour le bonheur de nos concitoyens,
Tel parait avoir été également l'appréciation de la
majeure partie de noire population, qui ne s'est pas
contentée de se porter en foule a la cérémonie, mais
encore a pavoisé ses maisons aux couleurs nationales.
Quiconque sent battre en lui un coeur yprois se
réjouissait de cette première tentative industrielle
comme d'une resurrection.
Seul, au milieu de cette satisfaction publique, le
Progrès jette un cri strident, semblable au sifflement
du serpent. Rage impuissante I Nous ne sommes
plus au temps ou tout ce vacarme produisait son
sort. C'étaient Regnauld Ringho t, de Watou, Pierre
Myoot, Jean-Philippe Maes, Louis DeMaerel et Philippe
Top, de Rousbrugge (Haringhe) Guislain Ballie, de
BeverenJean Bonvoisin, d'Elverdinghe, et trois au-
tres dont les noms sont restés incónnus. Les minis-
tres protestants se fondant sur la restriction de sé-
bastien Malle, dont nous avons parlé plus haut, récla-
mèrent ces prisonniers. Le magistrat répondit que
cette clause ne le regardait pas et que bon ne leur
semblait pas d'accéder a la demande des rninistres.
Ce n'était pourtant pas le moment de susciler a la
réforme denouvelles diffioultés qui, inévitablement,
devaientêtre suivies de nouvelles réprésailles.
Les rninistres exaspérés, résolurent d'employer
la force pour délivrer ces dètenus. lis prêchèrent
une croisade et a leurs voix accoururent des habitants
de presque toutes les communes des environs de
Rousbrugge, entre autres des villages d'Arnèke, de
Bavichove, Bierne, Bissezeele, Bollezeele, Coudelcerke,
Ekelsbeke, Herzeele, Rexpoede, etc. Des villes de
Bourbourg, Bergnes et üunkerque, toutes dans la
Flandre francaise. Cette foule immense., réunie dans
effet. En dépit de ses efforts pour alteindre a l'odieux,
sou entrefilet traine dans le ridicule. II lui arrivera
ce qui arrive d'un méchant gamin a l'école on le
laissera bouder dans son coin.
Un arrêté royal du 13 mars 1866 accorde a la
ville d'Ypres un subside de fr. 2,833-33, pour l'ai-
der a subvenir aux frais de construction d'un tir a la
cible eri cette ville. Cet empressement du gouverne-
mont a intervenir dans les frais d'un projet qui n'a
pas encore fait les frais de la discussion devant le
Conseil et dont les conseillers n'ont pas appris le
moindre détail jusqu'ê présent, est fort singulier.
Mais peut-être est-ce un appêt destine, dans la pen
see de quelques-uns, a triompher plus aisément des
resistances qui pourraient se produire'?
Quoiqu'il en soit, il est probable que ce subside
aura pour première conséquence de faire sortir le
projet de cible tout armé, comme Minerve, 'du cer-
veau de nos Jupiter.
Samedi 17 de ce mois, on faisait sauter par la mine
quelques pans de murs de l'ancienne porte de Lille.
Aucun avertissement ne prévenait les passants du
danger, et des personnes arrivant en voiture, sur
prises par la detonation, ont failli être victimes d'un
accident.
Nous savions que notre Collége échevinal triomphe
a la pensée que la demolition de cette porte a pu se
faire sans iuterrompre la circulation jusqu'a présent,
el il en prend texle pour arhorer une nouvelle plume
sur son chapeau. C'est fort bien mais encore ne faut-
il pas que la securitè du passant t'asse les frais du
triomphe.
Et tenez, franchement, notre Collége nons semble
un peu tropComment dirions-tious
Quand on enregistre dans ses annalas tani de vic-
toires éclatanles et qu'on élale, dans un legitime or-
gueil, sur son sommet, des plumes de toutes series,
il est bon, il est génereux de ne pas cueillir aux infi-
niment pelits. Le dédain, dans ce cas, est la veritable
grandeur.
La peste des bestiaux produit des effets inattendus
en Arigieterre. Elle n'a point fait augmenter la viande,
comme on le redoutait, mais les éleveurss'empressent
d'envoyer leurs bestiaux sur les marchés aussitöt
qu'ils peuvent s'en défaire a des prix tolérables. La
famine de viande ne se déclarera done, de l'autre cóté
dudétroit, que lorsque l'épizoolie se sera calmée et
que les éleveurs auront cessé de trembler.
A ce moment, qui ne peut tarder a se produire,
car l'épizootie semble être arrivée a son maximum,
la demande de l'Angleterre sera immense.
Nos fertniers doivent done-se preparer a pourvoir a
l'alimentalion des marchés de viande, et a la remonte
des etables d'Angleterre. La précocité providentielle
de la saison actuelle leur permet de multiplier le nom-
bre de leurs èlèves. Dans les circonstances présenles,
le fermier qui envoie un veau a la boucherie est aussi
coupable que s'il mangeait son blè en herbe.
Au lieu de pleurer sur les misères de l'agricullure,
comme le font tant de journaux agricoles francais, il
est mieux, sans aucun doute, de signaler nos labo-
rieux cuitivateurs la source d'un trafic immence qui,
dans quelques mois, pourra les enrichir.
les vasles prés des bords de l'Yser, acclama le siége
de Furnes.
A cette nouvelle, a laquelle ils devaient pourtant
s'altendre, les Furnois furent frappès de stupeur. Ce
n'étaient plus des brigands qui venaient piller leur
ville, c'était la réforme qu'on leur avait dópeinte sous
les plus noires couleurs, ('infernale réforme enfin, qui
leur arrivait l'épée au poing.
Le magistrat se hala de prendre les mesures né
cessaires pour opposer a l'armée protestante une de
fense énergique. Le tocsin sonna, les corporations
s'armèrent et coururent aux remparts, sous la con
duite de leurs doyens. Lecapitaine Berri,commandant
de la place de Loo, fut mandé avec ses hommes. 11 ar-
riva a la porte d'Ypres vers les huit heures du soir.
Dans l'entre-temps, les Gueux sauvages ne res-
taienl pas oisifs, les abbayes d'Eversam et de Rous
brugge furent saccagées.
E. VanüJi.n Bussche.
{La suite au prochain n°.)