JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Quatrième année. N° 42 21 Octobre 1866. Paraissant le dimanche. PBIX BES AilSO.lCES ET DES RECLAMES 10 Centimes la petite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Le tout payable d'avance. PBIX B'ABONIEHENT POUR LA BELGIQUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour FEtranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes. Laissez dire, laissez-vous blèmer, mais publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journal, chez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Dixmude, 55. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toules lettres ou envois d'argent doivent étre adressés franco au bureau du journal. Ypres, «o Octobre is®«. Notre intention n'est point de revenir sur notre dernière polémique avec Ie Progrès. Encore moins nous sentons-nous l'envie de triompher bruyamment du silence ou nous avons réduit notre piteux contra- dicteur et de battre le tambour sur sa peau. Le Pro grès nous avait injuriés, nous lui avons dit son fait. II n'y a la nulle matière a nous énorgueillir le pre mier venu, a notre place, en eut fait tout autant. C'est que le temps n'est plus oii les hauts et puis- sants barons du Progrès pouvaient s'arroger impuné- ment le droit d'insolence dans notre ville et régenter 1'opinion publique du haul de leur omnipotence. II n'est plus, le temps oü toute parole sortant de leur bouche était tenue pour parole d'Evangile et recue avec vénération par Ie commun des fidèles. Le senti ment populaire, longtemps énervé sous Faction délé- tère des influences, a repris confiauce dans ses forces. II commence a apprécier a leur juste valeur ces soi- disant libéraux dont la vie ne fut qu'une lutte perpé- tuelle contre les aspirations de la liberté^ ces préten- dus dèfenseurs du pouvoir civil, toujours prêts ja tendre la main au parti cléricalces apótres de la tolérance, que la moindre contradiction jelte dans des transports de rage; ces amis de la libre discussion, qui n'ont a la bouche que Finjure et la personnalité grossière ces grands oraleurs muets, ces grands écri- vains sans ortbographe, qu'une longue habitude lui avait appris a admirer de confiance et qu'il admirait ainsi, depuis une vinglaine d'années, avec une foi naïve renouvelee des temps de i'Eglise primitive. On les voit enfin, tels qu'ils sont, orgueilieux ou plats valets, suivanl les circonstances, mais ègale- ment nuls toujours et forts seulemenl d'une certaine habileté qui consiste a mépriser les hommes et a leur apprendre a n'écouter que la voix de leurs intéréts. Le prestige qui les environnent a disparu el, avec lui, la terreur qu'ils inspiraient. On rit tout hout aujourd'hui de la sottise du Progrès, le vieil oracle naguère si redouté, et loin de trouver mauvais que nous l'ayons rerais a sa place, on applaudit ouverte- menta la verte correction que nous lui avons admi- nislrée. G'est la uil premier résultal dans lequel nous vou- lons voir le gage d'une victoire prochaine et definitive de l'esprit public sur l'esprit de coterie el de familie dont notre ville a si longtemps subi l'empire. Avons- nous besoin de le répeter encore Nous sommes un journal liberal et pas autre chose; nous demandons la réalisation des promesses qu'on nous a faites eu 1848, et rien de plus. Mais ces promesses, nous en tendons qu'elles soient remplies et nous avons la con viction qu'elles ne le seront pas, aussi longtemps que le sentiment public n'aura pas fait justice des charla tans qui exploitent sa crédulité. Ne nous en prenons pas toujours a uos représentants de nos mecomptes et de nos dèceptions. Ces representants, après tout, c'est nous qui les avons élus nous pouvions en choi- sir d'autres, nous avons préferé ceux-lè Sachons ac cepter la responsabilité de notre faiblesse et de notre incurie; sachons surtoul tirer du passé une lecon utile pour Favenir. Les elections sont, chez nous, affaire de pure camaraderie. Habiluons-nous a les considérer comme des choses sérieuses, dignes de toute notre attention et n'accordons nos suffrages qu'aux hommes qui nous inspirenl une pleine con fiance. Le jour oü nous serons tous pénétrés de ce devoir, l'ère des coteries sera définitivement fermée et Ie souci des principes prendra, dans nos assem blees délibèrantes, la place qu'y occupent aujourd'hui les preoccupations personnelles et les intéréts de boutique. Denouement. Les intrigues sont arrivées a leur terme le Pro grès a parlé Le comité de l'Association libérale se réunira samedi soir, dit-il, a l'effet de faire choix de candidats provisoires pour les èlections communales et l'Association sera convoquèe.quelques jours après en assemblée générale. Ce que nous avions prévu depuis longtemps se rea lise MM. Bourgois, Merghelynck et Aug. De Ghelcke renoncent au renouvellement de leur mandat. En ce qui concerne M. Léopold Merghelynck, cette résolution se comprend aisément. La retraite de MM. Bourgois et Auguste De Ghelcke est due a une heureuse inspiration et nous croyons que la ville d'Ypres leur en sera reconnaissante. Ces deux honorables conseillers n'ont pas brillé dans leur carrière publique. Aussi ne comprenons-nous pas au nom de quel principe, de quel intérêt M. De- ghelcke a été appelé a siéger a I'Hótel-de-Ville. Quant a M. Bourgois, nous exprimerons un regret. C'est que ['honorable échevin n'ait pas pris sa retraite avant la démolïtion de la porte de Lille ou que ['admi nistration n'ait pas eu Ie bon sens de retarder cette démolition jusqu'après cette retraite. Quoiqu'il en soit, ce monument restera comme une preuve irrecu sable de la faillibilité humaine. II n'y a pas lieu de s'occuper davantage aujourd'hui de ces parlicularités, si ce n'ést pour féliciter de re- chef ces deux honorables conseillers de leur bonne inspiration. L'essenliel en ce moment est de savoir qui les rem- placera. Et ici nous renconlrons l'entrefiiet du Pro grès de jeudi. L'organe de la coterie s'étonne que nous nous soyons plaint du retard qu'on mettait a convoquer l'Association II ne partage pas notre opinion, dit- il; c'est tout naturel. II faut le temps de discuter les candidats en familie, de travailler le corps electoral, et l'Association arrivera toujours assez tót pour la simple formalité d'enregistrer la volonté des me- neurs. Mais oü éclate surtout l'insigne mauvaise foi du Progrès, c'est quand il affirme que dans aucune ville jusqu'ici, les choix definitifs ne sont arrêtés. Cela serait que la feuille doctrinaire n'en pourrait ti rer aucun argument en faveur de sa thèse. Chacun sail, en effet, que la plupart des associations libérales sont constituées sur de toutes autres bases que la nótre. La presentation des candidats est laissée a l'initiative individuellele comité se contente d'en prendre acte. Ici c'est tout le contraire. Le comité fait les présentations que l'assemblée, par des raisons que nous pourrions exposer, ratifie invariablement. Cette considération, jointe a beaucoup d'autres, ferait comprendre sufiisamment pourquoi quelques associations n'ont pas encore fait leur choix défi- nitif. Au moins se sont-elles occupées des èlections. Celle de Courtrai a été convoquée dés les premiers jours du mois. Le comité de Bruxelles adressait, vers la même époque, une circulaire a tous les membres de la so- ciété. II ya douze jours que l'Association libérale de Bruges s'est réunie. Et voici de plus un fait matériel, indëniable, qui renverse tous les sophismes du Pro grès. Pendant qu'il imprimait les lignes auxquelles nous répondons, lesiournaux de Bruges nous appor- taient les choix définitifs de l'Association de cette ville, arrêtés dans sa séance du mardi, 16. Voila done uue association qui se prononce au moins huit jours avant la nótre. Mais,dira le Progrès, a dans une localité qui, comme la nótre, oompte moins de 600 electeurs, il sufïit de ne s'occuper de ces choses que sept a huit jours avant les èlections. A qui ferez-vous done accroire qne vos patrons altendent les décisions de l'Association pour recom- mander leurs candidats? S'il n'est besoin que de huit jours pour assurer voire succès, pourquoi vous voit- on depuis prés de trois semaines courir de porte en porte, le chapeau a la main, les promesses et les mensonges a Ia bouche? Non, non, votre but est tout autre que celui que vous proclamez, et si tant de personnes respectables se taisenl et s'abstiennent, gardez-vous bien d'v voir un acquiescement a votre conduite. Non, ce n'est la qu'une des formes de leur profond mépris pour vos scaudaleuses monées. Hypocrisie. Le Progrès publie un long compte-rendu de Inau guration de la nouvelle fabrique de M. Seys, compte- rendu tout émaillé d'éloges,auxquels chacun adhé- rera, mais qui jurent sous la plume de son rédacteur, pour le patron, pour les ouvriers et même pour un ancien industriel qu'il cite, M. Vanden Driessche. II termine en se disant heureux de pouvoir don- ner un petit apercu de cette rèunion fraternelle. Depuis quand done le Progrès est-il animó d'un si tendre amour pour Findustrie et les industriels? Cela lui prend-ii par hasard comme une fièvre intermit- tente, la veille des èlections el lorsqu'il a besoin du concours des industriels pour faire reussir ses pians Le succès assuré, il reprendra sa vieille défroque, minant sourdement Findustrie et calomniant les in dustriels. Au reste, il a raison a son point de vue d'en agir ainsi, et l'on peul assurer que nul mieux que ses pa trons ne comprend la vraie situation. Si Findustrie venait a s'implanter dans nos murs, la ville devien- drait richeet prospère sans doute, mais leur règne ne serait plus de longue durée.

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L’Opinion (1863-1873) | 1866 | | pagina 1