JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Quatrièrae année. N° 46. 18 I^oYembre 1866. Paraissant le dimanche. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journalchez Félix Lambin, imp. -lib., rue de Dixmude, 55. i On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'argent doivent ètre adressés franco au bureau du journal. PRIX RES ASSOACES ET DES RECLAMES 10 Centimes la petite ligne. Corps da Journal, 30 centimes. Le tout payable d'a vance. PRIX O'AROXXEllEST POUR LA BELGIQUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour UElranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes. Laissez dire, laissez-vous blêmer, mais publiez voire pensée. Ee Discours du Tróne. Le discours du Tróne a deconcertè, par sa rare in- signifiance politique, les prévisions de tons les partis. Les clérioaux, surloui, sont dans la slupefaction ils s'attendaient a un manifeste de guerre; et voil n qu'ils se trouvent en présence d'un document tellement inerte et incolore que, faute d'autre prise par oü ils puissent l'atlaquer, ils en sont reduits a lui faire un crime de sa paleur même, taxee par eux d'hypocrisie et de couardise. Bien des libéraux partagent la surprise de leurs adversaires. Ceux la comptaient que le ministère in- jurié, vilipendé par le parti clerical avec un acharne- ment de haine qui ne connait plus de bornes, allait saisir l'occasion que lui offrait l'ouverture de la ses sion legislative pour-affirmer, avec une nouvelle ener gie, les grands principes qui sont l'honneur du libé ralisme beige Ils allaient même jusqu'a penser, ces honnêles libéraux, qu'il y avait, pour le ministère, un devoir élroit de moralite politique a accorder cette satisfaction a la majorité du corps electoral qui venait de lui douner tout récemment une marque si éclatante de sa confiancè. Eux aussi ont vu leur attente trom- pée; mais, en gens bien appris et faconnes depuis longtemps aux deceptions, ils gardent le silence et s'efforcent, comme toujours, de faire bonne mine a mauvais ji u. Quelques uns même vont jusqu'a ap- plaudir et jurent qu'ils sont pléinement satisfaits. On n'est pas p us accommodant Quanta nous, spectateurs désintéressés de la petite comedieqne la presse des deux opinions donne en ce moment au pays, si qm-lque chose nous ètonne, c'est l'etonnement même des deux partis en presence. Pour s'imaginer que le ministère, en possession d'une ma jorité considerable et assurée pour deux sessions au moins, allait debuter par une campagne en regie centre les pretentions clericales, il a fa 11u vraiment qu'ils eussent tons les deux oublie l'histoire de ces dix dernières ann 'es Ah! si nous etions a la veille d'une élection generale, ce serail different loin d'éviter la ]ulte, nos gouvernants saisiraienl tous les pretextes pour la fomenter. Au lieu du langage insipide qu'ils ont mis dans la bouche du Roi, nous eussions en- tendu de fières paroles, de ces paroles émouvantes comme M. Frère Orban suit les trouver quand son existence ininistèrielle est tnenacée et qu'il s'agit de la réconforler par quelque grand coup de lheêtre. Mais le ministère n'en est pas la avec virigt voix de majorité garanties jusqu'en 1868, il a, comme on dit, du pain sur la planche, et peut attendre, quitte a emboucher de nouveau la trompette guerriere le jour oil l'approche des elections lui fera sentir la nécessité de donner du montant a I'opinion publique Endorinir et révèiller, reveiller et endorinir le secret de la poli tique ministerielle est lout entier dans cette formule, empruntee aux magnétiseurs forains. Qu'on cesse done de critiquer I'insignifiance poli tique du discours du Tróne. Ce discours est, de tous points, conforme aux traditions gouvernementales Ie ministère ne pouvait I'accentuer davantage sans manquer a tons ses antécédents. M. Frère-Orban, d'ailleurs, le declare excellent. II suffit. Mauvais libé- ral, a prés cola, qui trouverait a y redire. Que si, abandonnant le point de vue politique, nous n'envisageons ce discours que de son cöté social etéco- noi-nique.nous ne faisons nulle difficulté de reconnaitre qu'il contient des promesses dont la réalisation sielle s'accomplit, fera le plus grand honneur au ministère. L'assainissemenl desquarliers insalubres, Ie dévelop- pementde ('instruction du peuple, I'abolition de la con- trainte par corps, la dètenlion preventive adoucie, le CodePénal militaire révisè constituent un ensemble de mesures dont le pays devra une profonde reconnais sance au gouvernement qui saura les conduire a bonne fin. Personne plus que nous ne souhaile que Ie ministère s'acquitte avec honneur de la têche qu'il s'est solennellement imposee, et puissent ces nou velles promesses ne point partager le sort de lant d'autres, qui attendent, depuis si longtemps, leur accomplisse- ment 1 C'est notre devoir a tous, a dit S. M., de conti- nuer a nous occuper de tout ce,qui peut favoriser l'amelioratiun morale et matériede des populations laborieuses. 11 n'est personne en Belgique qui n'applaudisse de tout coeur a ces nobles paroles, vrai ment dignes du jeune souverain qui préside aux des- tinèes de la patrie. Nos querelles de parti ne nous ont fait que trop souvent oublier qu'en dehors et au-des- sus des questions politiques, il en est d'autres qui touchent a des intéréts bien autrement importants par la-même que nul progrès social veritable n'est possible que du jour oü ils auront recu pleine et en- tière satisfaction. Nous pouvons discuter cent ans encore la question de l'independance du pouvoir civil et loutes celles qui se rattachent a la solution de ce grand prob'ème de notre politique intérieure nous aurons fait peu de chose, aussi longtemps que les po pulations ouvrières resteront assujéties au double ioug de la misère et de I'ignorance. C'est que la li berie n'est pas seulement le droit de penser et d'agir, mais qu'elle implique nécessairement la puissance d'exercer, de pratiquerce droit. L'ignorant, le rnisé- rable sont libres de penser et d'agir ni plus ni moins que l'aveugle et le paralytique de voir et de mar cher. Le gouvernement a pris ['engagement d'étudier résolument ces questions capitales et, comme pre mier gage de sa sollicitude, il nous promet un projet de loi sur l'assainissemenl des quartiers insalubres el des mesures destinees a donner un nouvel essor a l'enseignement populaire. Les amis du progrès, a quelque parti qu'ilsappartiennent, s'associeront avec bonheur a cette genéreuse et vraiment libérale entre- prise. Le pays a accueilli avec non moins de satisfaction la promesse de l'ab ilition prochaine de la contrainte par corps. Cette mesure, inspirée par un sentiment d'humanite et de justice auquel tous les par lis reu- dront hommage, ne fera qu'ajouter un litre nouveau a tous ceux que le ministre de la justice a su mériter dèja de la reconnaissance publique. C'est aussi a ce ministre, trop jeune au gré de M. Dolez, que nous allons devoir la révision de eet affreuxCode Pénal militaire contre Lquel le sentiment public a vainement protesté depuis vmgt anslejour viendra bientót oü les iniquités criantes de cette le gislation barbare seront divulguées et l'on aura peine a croire qu'un pareil régime ait pu subsister jusqu'au- jourd'hui au milieu d'une société policée et qui se pique de justice. Nous lui devons encore, a ce trop jeune mi nistre, l'améliofation de nos lois sur la dètenlion préventive et sur les extraditions, qui appelaient également une révision radicale au point de vue des garanties de la liberté individuelle. Hélasl que les aulres membres du cabinet ne sont-ils aussi jeunes que M. Bara Nous n'aurions pas a entou- rer de tant de réserves la satisfaction que nous a fait éprouver le discours du Tróne et nous pour- rions, a l'instar de l'Echo du Parlement et du Jour nal de Liége, saluer dans l'oeuvre ministèrielle, le programme sincere et complet des voeux du libé ralisme. En coalition. Jusqu'ici nous nous sommes très-peu occupé du résultat de nos elections communales, voulant d'une part laisser au temps le soin de calmer la première effervescence, car notre habitude est de nous adres- ser uniquemènt au bon sens et a la raison de nos concitoyens, sachant de l'autre que le Progrèsqui ne brille pas précisément par une grande richesse d'imagination, ressasserait quelques pitoyables ca- lomnies pour tout argument et que nous en aurions fini d'un coup si nous avions la patience d'attendre. Jamais le Progrès ne fut plus loquace. Jamais pie bavarde ne fit entendre pareil caquetage Le libé ralisme pratique vient de triompher de l'opposition clèricale, radicale el hargneusele pacte a èté con- clu.... le drapeau rouge et noir a étéprboré et de ce mariage monstrueux est nè la plus honteuse des coa litions IEnfin c'est le cóté le plus grave de la question I 'Opinion fait en ce moment un effort suprème d'imagination et un tour de force de cal- cul II! Tout doux, beaux sires, vous donnez soltement vos qualites aux autres. Non certes, 1 'Opinion ne se tient pas pour battue, non certes el le n'est pas découragée et ne renonce pas a la lutte plus d'une fois encore vous la retrouverez sur votre chemin alors que vous le désireriez le moins, signalant les abus, demasquant vos intrigues, fletrissant votre ambition égoïste, ridiculisant vos puériles vanitès, s'efforcant enfiu d'arracher le clin quant de vos oripeaux et d'eclairer la ville d'Ypres sur votre valeur intrinsèque. Mais el le n'a besoin d'aucun tour de force pour comprendre que tous vos pretendus arguments ne reposent que sur une calom- nie a laquelle vous-mêmes ne croyez pas et que vos efforts ne tendent qu'a plótrer une victoire qui vous donne plus d'un souci. Dèja précédemment nous avons parlé de cette mon- strueuse coalition enlre clericaux etradicaux, comme on nous appelle. Notre droit serait done de n'y plus revenir aujourd'hui, d'autant plus que nos accusa- teurs se sont contenlés de vaines déclamations, sans apporter même un sembianl de preuve a i'appui de leur these Qu'esl-ce qu'une coalition?

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L’Opinion (1863-1873) | 1866 | | pagina 1