sur quels principes de droit et d'équité il base ses conclusions reconventionnelles, je suis certain qu'il serail fort embarrassé de me répondre. II pourrait bien faire preuve de science et dire que dans les Institutes il y a un titre De la peine a inQiger au plaideur téméraire. II y a quarante ans, je lisais aussi ce chapilre. Mais dans la législation moderne, dans Ie droit qui nous gouverne aujourd'hui, je ne connais pas uhe seule disposition qui permetle de conclure a des dommages intéréts, paree que je vous aurai inlenté une action non fondée. Vous avez dans Ie Code de procédure un article qui gouverne toute cette matière. Get article porte que Ie juge condam- nera aux frais et dépens la partie succombante. Eh bien, cette disposition exclut virtuellement toute autre pénalité a infliger du chef d'une action non fondée. Je me hftte d'ajouter que la justice, dont la pre mière mission est de róparer les torts qui lui sont dénoncés, a, dans certains cas bien dèterminés, al- loué des dommages-intérêts tantót au demandeur, tantót au défendeur. C'était lorsque la demande ou la defense était vexatoire et tortiorinaire, lorsque vous faisiez pratiquer une saisie sur un titre absolument valide en apparence, mais nul au fond, lorsqu'un dé biteur, par de mauvaises chicanes, mettait son créan- cier dans l'impossibilité de satisfaire lui-même aux obligations qu'il a contractées vis-è-vis d'un tiers. Je Ie répète, dans Ie cas seuleraent oü la demande ou la défense était vexatoire et tortionnaire,vous com- prenez ('énergie de cette expression, la justice éclairée faisant ce que Ie droit et l'équité comman- dent, a alloué des dommages el intéréts. Mais évi- demment ce n'est pas l'espèce dans Ie procés ac- Uiel. Je veux admettre pour uu instant que vous ayez vingt fois raison, que les faits que vous avez signalés soient tous vrais, que les conséquences que vous en tirez soient toutes logiques. En résultera-t-il que vous soyez fondé a me demander ft moi, qui me serai trompé de bonne foi, des dommages-intérêts par voie de reconvention? Je ne Ie pense pas. Ce premier écrit de mon adversaire fut suivi d'un écrit d'articulation de griefs, et je regrette pour mon adversaire d'avoir fait cette signification. Je Ie re grette a un double point de vue. Sans connaitre mon adversaire, je ne Ie soupconne pas de mauvaises in tentions ft l'égard de personnes qui ne sont pas au procés. Eh bien, dans eet écrit des griefs sont arti- culés au nombre de six contre Ie chef de station de Poperinghe et au nombre de treize contre Ie chef de station d'Ypres. Et la conclusion ft en tirer seraitpu- rement et simplement cel!e-ci C'est que la Société qui donne des ordres sévères pour que le service marche bien, pour que le public recoive satisfaction sous toutes les formes, sous tous les rapports, est indignement trompée et raisérablement servie dans ces deux stations. Mais au point de vue de cette in- curie, de cette négligence coupable, de ce désordre administratif, les faits que vous imputez sont des vé- lilles ou sont irrelevants aux fins d'une admission a preuve. lis ne sont ni relevants, ni pertinents. Je n'ai pas mission de défendre le chef de station de Poperinghe ou le chef de station d'Ypres, mais ils pourraient avoir eux ft se défendre si pas vis-ft-vis de la Société, du moins vis-a-vis du dófendeur, dans Ie cas oü les allegations que celui-ci se permet contre eux recevaient une plus grande publicité. les faits qui sont signalés a charge du receveur de Poperinghe ont un caractère particulièrement regrettable. Et vous le comprendrez lorsque je vous aurai dit que ce receveur de la station de Poperinghe est veuf a vee six enfants en bas-age. Son fils atnè peut avoir alteint l'ège de douze ft treize ans. On l'a depeint ft l'admi- nistration comme un garcon intelligent, actif. Le pere a sollicité de la Société qu'il füt admis dans son bu reau comme surnuméraire. On l'a admis par commi seration, en considération de la trisle situation du père. C'est de ce jeune homme qu'il est question aussi bien dans l'écrit d'articulation que dans l'écrit dont je vous ai dönné lecture. Les griefs contre le chef de station de Poperinghe sont au nombre de six, je le répète. M. Durand, chef de station d'Ypres, est mieux partagé. II y a treize ou quatorze griefs ft son adresse. Et savez-vous ce que sont ces faits? Une pièce a été remise tardive- ment. L'argent d'une expédition contre rembourse- ment n'est revenu que six semaines après. Une pièce a été remise tardivement. Mais on ne dit pas ft qui elle a été remise, ft qui elle appartient. Quant au retard de la remise de l'argent, c'est un fait qui se passé tous les jours. On expédie contre remboursement, le deslinataire peut refuser et de mander qu'on garde ses marchandises, jusqu'a ce qu'il ait écrit ft l'expéditeur. L'administration rend service en gardant la marchandise. Mais alors i! est bien certain qu'elle ne peut vous remettre votre ar gent que lorsqu'elle l'a recu elle-même. Ainsi, qu'un colis soit expédié contre remboursement sur Anvers ou sur Paris, je ne puis opérer le remboursement, si je n'ai pas n<>te de Ia réception de la marchandise ainsi que du paiement. Autre fait Un négociant de cette ville a déchargé utr wagon ft l'insu dö chef dé station. Un négociant a vu un wagon ai #on adresse, il a fait venir une char- rette pour le dècharger. Cela est arrivé ft Ypres et c'est la une preuve de ces inconvénients, de ces acci dents auxquels on expose ceux qui se fient a cette administration I On a exigé un port pour un paquet expédié frais payés. Eh bien, le fait m'est arrivé il y a deux jours. J'ai mis le plus grand empresseraent ft payer Ie port. Que fait-on en pareil cas Dènonce-t on le fait ft la justice? Le prend-on peur teste d'un article de jour nal? On s'adresse ft l'administration, on lui dit Vous rn'avez fait payer deux fois le port, restituez- moi la somine qui n'est pas due. Cela ne se fait ja mais autrement. On procédé ainsi vis-ft-vis de I'Elat et de toutes les administrations de sociétés conces- sionnaires. Uu vol de mille francs a été commis ft la station. C'est la un fait dont la justice a a s'occuper avec le soin, l'assiduité qu'elle met toujours ft decouvrir les voleurs. Quelle est la conséquence? C'est qu'il y a des voleurs dans les bureaux de la Société des Chernins de fer, comme il y en a dans la plupart des adminis trations. Cela est-il concluant? Evidemment, non. On m'a volé mille francs, mais pas plus que la jus tice qui m'est venue en aide, je n'ai pu découvrir le voleur. II est vrai, d'après ce qu'on m'a dit, qu'un tiers avait fait des restitutions partielles. Nous avons done affaire ft un honnête voleur, puisqu'i! s'opère des restitutions ft charge de c.es mille francs. Un convoi (1) a été égaré pendant quatre jours. Y a-t-il quelque chose de plus naturel dans une grande exploitation, que de voir uu convoi qui est envoyé dans une direction, arriver dans une autre. Cela arrive non-seulement pour un wagon mais en core pour uu grand nombre de wagons. Les convois qui viennent des houillères sont d'immenses convois. On en separe les wagons ft 1'une ou I'autre station principale, et comment peut-ilne pas arriver que I'on détache I'un wagon au lieu de I'autre. II en est de même pour les paquets. Ainsi, lorsque vers l'époque oü parüt I'article, le gouvernement a établi le trans port des petits colis ft prix réduit, combien de pa quets n'ont pas fait fausse route? II s'en est trouvé qui en destination d'Ypres sont allés ft Verviers, tan- dis que d'autres en destination de Verviers sont ve- nus a Ypres. Et qu'est-il résulté de ces erreurs invo- lontaires? Des actions en dommages-intérêts. Non, chaque fois qu'un envoi tardif a pu occasionner une perte, I'Elat a réparé cette perte. Ces inconvénienis sont inhérents ft Ia société la plus soigneuse. II est impossible de les éviter. Des futailles, ont été trouvées dans un fossé. Le propriélaire les a vues et les a prises. Je ne veux pas parler d'un enfant qui a été broyé. Un immense train de charbon a été mis en mouve ment quand sous un wagon se trouvait un pauvre enfant qui prenait, on ne peut même se servir du mot voler, quelques morceaux de charbon II a éte victime de son imprudence. Mais dans ce fait qu'on reproche au chef de station, il n'y a rien qu'un mal heur a déplorer. Après avoir fait ainsi le procés ft ces deux fonction- naires, il est encore quelques nouvelles articulations ft l'adresse de la Société elle-même. On signale d'abord, sous le litlera C, quelques re tards dans l'arrivée et le départ des trains et l'on conclut par cette ingénieuse remarque que lorsqu'un train arrive ft l'heure, le public se dit Le minislre ou l'ingénieur doit être ft bord. II est trés-regrettable que la Société n'ait pas de quoi payer un ingénieur qui voyagerait avec tous les trains et surtout avec ceux qui sont en destination d'Ypres. Mais, Messieurs, mon adversaire en est-il ft ignorer jusqu'au premier mot de l'organisation du chemin de fer de la Flandre et des diflicuités que rencontre sou exploitation. On (1) Fraeys a dit convoi; c'est un lapsus Ungual. It faut évidemment wagon. dirait que tout retard dans l'arrivée des trains soit un fait imputable a la negligence de l'administration. II en est rarement ainsi Et pourquoi Paree que pour arriver a destination d'Ypres et de Poperinghe, les deux seules villes auxquelles vous sembliez vous intéresser, les autres n'ayant élevé jusqü'ici aucune plainte, il y a quatre coincidences ft observer. La pre mière est celle de Bruges. Impossible de partir de cette ville avant que le train d'Ostende ne soit ar rivé. La seconde coïncidence est a Lichtervelde. II faut atlendre les voyageurs de Furnes avant de par tir pour Ypres et Poperinghe. Troisième coïncidence a Ingehnunster, quatrième a Gourtrai. Que Ie moin- dre retard se produise dans l'arrivée d'un train cor- respondant, il se fera sentir ft l'arrivée ft Ypres, ft moins qu'on ait pu l'éviter au moyen d'une plus grande vitesse. Mais si la Société n'observe pas ces coïncidences, si les trains partent avant l'arrivée des trains correspondants, les voyageurs se plaignent de devoir passer la nuit a Ypres. On doit comprendre que dans de pareilles conditions, l'arrivée ft heure fixe est une chose très-difficile. Et si l'arrivée a lieu ft heure juste, on ne doit pas dire que c'est parceque le minislre ou l'ingénieur est sur le train, mais bien parce que les coincidences ont correspondu réguliè- rement. On me dira qu'on calcule les distances. Evidem- meml, mais les calculs ne sont pas toujours véritiès par les faits. Ainsi depuis six mois je me demande comment ily a possibiiite pour le train d'Ypres d'arri- ver ft son heure. Je suis condarané ft pratiquer beau- coup les chemins de fer je voyage fréquemment. Eh bien, depuis six mois, il ne m'est pas arrivé une fois, venant de Br'uxelfes, d'être a Bruges ft l'heure fixée. Et pourquoi? Parce qu'on relève la ligne prés de Gand. On y établit un viaduc sans vouloir inter- rompre le service. Je m'étonne, je Ie répète, que de puis six mois un seul train ait pu arriver ft l'heure. Tous ceux qui ont fait la même route d'Ypres ft Bruxel- les, ont du remarquer qu'au départ comme au re - lour, on marche au petit pas pendant un quart d'heure et malgré toutes les précautions, il s'est pro- duit 10, 12 déraillementset même un plus grand nombre. De telle facon que les trains express et de vitesse qui devaient arriver ft 7 h. 15 m. n'arrivaient qu'ft 8 1/2 h. Y a-t-il un seul journal qui se plaigne de eet état de choses inhérent ft toute administration Fallaii-il pour quelques misérables retards, rédiger un article concu dans des termes d'une telle acerbité comtne ce lui qui est déféré ft votre justice. Enfin, dit-on, Ie matériel est lojn d'être suffisant pour le service. Cela est excessivement vague. Si mon conlradicteur avait formulé ce reproche un peu plus explicitement qu'il ne I'a fait dans son article ou dans son libelle, il est possible que nous nous fussions mis d'accord. Je crois même quej'aurais été fort peu éloigné de lui proposer de soumettre la question ft des expertsdont je luiaurais probablement laissé lechoix. Mais on ne va pas aussi loin, on est prudent, on se contente de dire que le matériel n'est pas suffisant pour le service. Savez-vous pourquoi il n'est pas suf fisant? Parce qu'on n'exerce pas toujours librementie droit de la chaufferette. Un voyageur aurait réclamé une chaufferette et le chef de station auquel il s'adres- sait n'auraitpas répondu poliment. Mais ce voyageur, plus énergique que le chef de station, aurait insiste et aurait obtenu sa chaufferette. Et parce qu'un voya geur n'aura pas eu de chaufferette, on dira que Ie ma tériel est insuffisant I Les voitures de 2«classe sont très-malpropres. Je veux volontiers admettre que les voitures sont moins propres certains jours que certains autres. Cela depend de I'usage que I'on en fait. Mais est-il vrai oui ou non que l'administration donne l'ordre ft son personnel de neltoyer chaque jour les voitures Que voulez-vous de plus Parce qu'une voiture aura ete malpropre pouvez-vous en lirer la conclusion que le matériel n'est pas suffisant. Un voyageur a dü faire route dans une voiture ayantun chassis brisé. Est ce que la Société en peut quelque chose II en serait autrement si vous me di- siez qu'elle a fait voyager un wagon ayant un chassis brisé, alors qu'elle avait eu le temps suffisant pour le reparer ou qu'elle pouvait ne pas s'en servir. Mais dire que cela est arrivé ft un voyageur, est-ce le fait dela Société Queje brise un chassis etque mon ho norable conlradicteur monte après moi dans la voi ture, il aura voyagé dans une voiture ayant un chas sis brisé. k II manque souvent des voitures de troisième

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L’Opinion (1863-1873) | 1867 | | pagina 2