1 que dans n'importe quel pays d'Europe II me sem- ble que l'on ne pourrait guère reprocber a toutes les sectes aux Elats-Unis qu'un excès de prosélytisroe el d'esprit de controverse. Gependanl l'enseignement dogmalique s'y donne enlièremenl a l'Eglise ou au Temple, el il n'y a pas u.ne secte qui se plaigue de ce régime. Les écolesysont indifferemraent administrées par des catholiques ou des protestants, sous la sur veillance d'une commission nommée par la majorité des électeurs de la commune. Je ne vois pas pourquoi ce regime ne pourrait pas êlre appliqué chez nous. Sans blesser aucune conviction, il organise pour ainsi dire de bonne heure el sous les yeux de la jeunesse, eette tolérance qui, elle aussi, est tines des vertus es- sentielles au citoyen. Applaudissements M. le Président. II résulte de la discussion, Messieurs, que nous sommes tous d'accord sur la nécessité de la révision de la loi de 1842. M. Laurent. Le parti libéral n'est pas d'accord sur cette nécessité. Ne nous faisons pas d'illusions a eet égard, nous n'obdendrons pas la révision. 11 est bon cependanl d'insister. L'enseignement religieux donné dans I'Ecole ne constitue pas le seul vice de la loi, cet enseignement est tout simplement ridicule. II se donne mécaniquement par I'instituteur que les enfants necomprennent pas, puis trois quarts d'heure par semaine, un séminariste vieut enseiguer le caté- chisme et on ne l'écoute pas. Cet enseignement est une trisle chose, il est vrai, mais le veritable vice de la loi, c'estqu'elle inculque aux inslituteurs des idéés anti-progressistes, un bigotisme étroit et absurde. Et c'est le maitre qui fait I'Ecole. Dans l'état actuel de la législation, qui forme les maitres? La plus grande parlie dans les villes et l'immense majorité dans les campagnes sorlenl des écoles normales du clerge. Mais ce qui est réellement un scandale, c'est que les instituteurs sortant des écoles normales de l'Etat sont aussi imbus de cléri- calisme. D'oü cela provient-il? C'est que ces- ecoles sont placèes sous la haute direction d'un abbé. La loi dit-elle que des abbés doivent être places a la tête de ces établisseiuents? Non elle ne le dit point. Pourquoi done alors agit-on ainsi? Paree que un ministère mixte (la pire espèce de tous les ministères) a fait exócuter la loi de cette facon. Les ministres qui sont arrivés depuis n'ont pas fait disparaitre ces abus, au contraire. Et en effet, depuis 1847 nous avons des ministres libéraux au pouvoir, et qu'ont-ils fait depuis 20 ans pour avoir des maltres instruits daus un esprit laïc? Après 20 ans de pouvoir... nos écoles normales sont diri- gees par... des o.bbés nommés par le ministre de Vin struction publique de Malines! Cela est-il lolèrab'e? Nous n'avons encore que deux écoles normales de l'Etat; l'épiscopat en possède dans toules les pro- vinces. II est vrai de dire que depuis environ un an on en a êtabli 2 nouvellessur le papier. II n'y a cependant aucune loi qui oblige le gouver nement a adopter les couvents. Les libéraux rendent done la loi plus cléricale qu'elle ne l'est... Ce qu'il faut réclamer toiH d'abord, et ce que l'on ne peut nous refuser, c'est Vexecution libérale-de la loi. Car la compléte révision, nous ne l'obtiendrons pas aujourd'hui. Une bonne loi mal appliquée devient mauvaise. Une mauvaise loi bien appliquée peut devenir sinon bonne, au moins tolerable. On m'objecte que M. le ministre de l'intérieur est animé de bonnes intentions, mais je soupconne ces intentions d'être de celles dont l'enfer est pavé. Un ministre de l'intérieur, véritable chef du cabinet dans notre pays, est beaugoup trop occuné; ('instruc tion est pour lui une chose accessoire. II y a mille be sognes diverses qui lui incombent. Ainsi actuellement tous ses instants sont accaparés par la grave ques tion de la peste bovine. N'a-t-il pas eu a s'occuper jadis de la crise industrielle des Flandres? La nomina tion des bourgmestres et èchevius lui prend au moins trois mois de l'année. Comment et quaDd voulez- vous done qu'il s'occupe d'instruclion? Ce qu'il faut absolument c'est un ministre de l'instruction pubiique. Les inspecteurs provinciaux et cantonaux sont tous catholiques. Tous les agents du gouvernement chargés de faire executer la loi sont catholiques et l inierprêtent natureilement dans le sens le plus clé- rical possible. Les cqpimunes les mieux inlenlionnées sont liées bras et jambes et ou leur dit Marchez! L'on ne peut s'imagiuer tous les déboirs qu'a èprouvés ii Bruxelles l'homme qui a tant fait pour l'instruction daus noire villeCollier. Un jour il demande une miserable somme au mi nistre, et on la lui refuse. Ou trouve des millions pour les enterrer a Anvers, et l'on ne trouverait pas un million pour l'instruction pubiique? Yoila ce qu'il faut trouver et ou le trouvera. La force est dans les óines et dans ies hommes libresAyez une popu lation instruite et vous aurez une nation. Ne mar- chandez pas Ies subsides quand il s'agit d'instruclion. A Gand nous sommes pauvres, nos institutrices sont moins payées que les ouvrières de fabrique. II exisle dans la loi une disposition qui détermiue la part obligatoire d'instruclion de l'Etat dans les dé- penses relatives a l'enseignement primaire. Depuis 20 ans cette disposition reste sans execution On ne pourrait croire quelle est la position de I'in stituteur dans les villages. II est Ie véritable valet du curé. Donnez lui une position convenable et il ne voudra plus être le sacristain et le valet du curé. Donnez-nous des millions, vous le pouvez. II n'existe jusqu'a ce jour aucune école normale de l'Etat pour les institutrices. Jusqu'ici les institutrices sont formees par des couvents adoptés et subsidiés par des ministres libéraux! L'immense majorité des insti1 tutrices est done forrnée,.... je devrais dire detormee par des religieuses. Les écoles d'institutrices exis- tantes sont des couvents. A Gand, il est vrai, nous avons une école normale provinciale qui nous fournit d'excellentes institu trices. Ou a cependant trouvè le tnoyen d'y faire pré- douiiner le clericaiisme en certains points, On oblige les institutrices a étudier la théologie pendant trois ans. Elles sont obligées de faire ces études pour pas ser leur examen, car cette matière y compte pour 85 points 1 Le cure domine dans I'examen, done il domine dans I'Ecole. Après leur avoir fait étudier la theologie pen dant trois ans, on leurdéfendde 1'enseigner, car elles ne peuveul donner des explications dogmatiques a leurs élèves. Je suppose qu'ou leur fasse étudier le chinois, puis quand elles le savenl qu'on leur dófende de 1'enseigner. C'est identiquement la même chose et cela n'a certes pas le sens commun. C'est encore l'exécution clericale de la loi qui est en cause cela ne s'y trouve pas cependant. Vous me demanderez pourquoi le ministre permet- il une telle facon d'exécuter la loi? Pourquoi? Je pourrais le diremais je n'aime pas a dire des choses desagréables. Je veux un ministre de l'instruction pubiique... 11 y a un ministre pour les pavés, les routes et les chemins de fer. J'aime beaucoup les chemins de ter, moi, c'est une bonne chose... Mais si nos pieds valent beaucoup, notre intelligence vaut bien quelque chose aussi, je peuse. Je repète done que l'exécution de la loi se fait dans un sens clerical Et les libéraux maintiennent un lel ètat de choses Si nous travaiilons avec ardeur aux élections, esl-ce pour avoir des gouvernanis qui se nomment Pierre, Jacques el Guillaume plulót que Joseph et Nicolas? Non certes, c'est pour voir nos principes mis en pratique par les depositaires du pouvoir. Applaudissements Quand nous élisons des libéraux, nous voulons qu'ils agissent libéralement. (Bravo, bravo.) Jus qu'ici que fait-on? Que l'on sache que nous voulons lulter sérieuse- ment. La grande affaire du libéralisme, son avenir, n'est-ce pas l'instruction L'un de nos deputes ici présent (VI. de Moere) fera connaitre nos vmux a la Chambre Une exécution libérale d'uue mauvaise loi, en attendant la revision de cette loi, et un ministre de l'instruction pubiique, voila ce que je demande. (Applaudissementsprolongés M. Wagener. La question qui nous occupe est grave.Au point de vue de la theorie elle est simple. II n'y a pas de religion d'Etat en Belgique, done l'en seignement de la religion doit être donne dans les eglises. Cette loi a cependant èté votée a l'unanimitè par le Sénat et a l'unanimitè moins trois voix par la Chambre des representants. A quoi tient cette con tradiction singuliere? La revolution de 1830 avait desorganise l'eiiseiguement public a tous les degrés. Ainsi l'enseignement public a dh subir une lutte contre les administrations commuiiales. Cette loi de 1842 a produit un certain bien. Elle a prescril ['orga nisation dans ohaque commune d'une école, et pres cril que chaque enfant pauvre aurail droit a l'instruc tion gratuite puis elle a organise l'instruction nor male. Les libéraux se sont ditle ciergé est fort, nos écoles ne seront pas peuplees si nous n'accepions pas cette loi. De la leur transaction. II s'agit de savoir si aujourd'hui, ccmme en 1842, le même obstacle subsiste. Beaucoup craiguenl de tou cher a cette loi Collier lui-mème hèsilail a en de- mander la revision. Dans les villes cela n'occasion- nerait aucun mal, mais dans les communes, pourrez- vous chasser le prêlre de I'Ecole Evidemment non, car elles seraienl anathematisées et bien vite désertes. Je n'ai pas peur cependant de la révision, mais voici le moyen que je propose. ContrairemeDl a ['opi nion de M. Laurent, je crois qu'il y a moyen de faire la révision de suite. Laissez les communes libres d'en- seigner la religion dans ou hors de I'Ecole, ou de ne pas 1'enseigner du tout, d'y appeler ou d'en exclure le prêtre. Mais si, par exemple, un instituteur demande d'enseigner le catéchisme, autorisez-le. Ou don- nera-t-il cet enseignement Que la commune décide. Ce n'est pas l'idéal, je le sais; mais comme beau coup de députés n'osent réviser Ia loi dans le sens de l'exclusion du prêtre et de la suppression de l'ensei gnement religieux dans les écoles, je crois que dès aujourd'hui nous pourrions obtenir la révision de la loi dans le sens que je viens d'indiquer. Quant moi, je demaode en toutcas, non-seulement la révision de la loi de 1842, mais encore la révision de tous les arrêtéset de toutes les inesures administratives créées par son exécution. Je me rallie a la proposition de M. Laurent et demande avec lui la création d'un mi nistère de l'instruction pubiique. M. Rollin-Jacquemyns croit ne pas être éclairé as- sez sur la création d'un ministère de l'instruction pu biique. II est d'accord avec M. Wagener pour réclamer l'autonomie des communes en matière d'enseignement. M. Laurent dit que si nous n'avons pas l'exécution de la loi, c'est que nous n'avons pas de chef qui fasse de l'instruction son unique occupation. Quant a l'au- touomie des communes en fait d'enseignement, il la trouve bonne pour les grandes villes, mais détestable pour les communes. Rappelez-vous, dit-il, qu'il a fallu recourir plusieurs fois a l'intervention du gou vernement contre les écoles adoptées ou l'on crétinise les enfants. Je finis toujours par demander un minis tre responsable. Sans direction, il est évident que vous n'aboutirez a rien. M. Wagener, tout en réclamant l'autonomie pour les communes, est loin de vouloir abandonner com- plétement a celles-ci l'instruction primaire. M. Rollin-Jacquemyns demande simplemeul a réser- ver la demande d'un ministère de l'instruction pu biique. II croit que l'on doit se borner a demander uniquement la révision de la loi de 1842 et des ar- rêtèsroyauxetcirculaires administratives prises pour son exécution. M. Laurent. Aussi longtemps que vous n'aurez pas de ministère, vous n'aurez rien. M.VanNerum.A cóté de notre ministre, il faudrait la création d'un Conseil supérieur de l'instruction. M. le Président. En résumé, ce que vous voulez, c'est l'exécution de la loi dans un sens liberal aussi longtemps qu'elle existe, et ensuile sa revision, car d'aulres modifications sont impossibles. II met cette proposition aux voix; elle est adoptée par acclamation. M. le Président. De quelle manière faut-il ré- sumer le vote? Le vote signifie-t-il l'emission d'un vceu, 1" de révision de la loi, 2" de l'exécution de la loi dans un sens plus libéral, et 3" la création d'un ministère de l'instruction pubiique. Be toutes parts Oni, oui, c'est cela. M. Guequier. Si j'ai bien compris, nous aurons bientót une assemblée pour la discussion du Règle- inent de l'Associalion. Le bureau ne pourrait-il se charger de la rédaetion d'une petition pour cette séance M. le Président. Si on rédige une pétition, il est difficile de le faire de manière a ce qu'elle ait l'assen- timent général. L'un ne voudra pas signer pour tel motif, l'autre pour tel autre motif. Et puis aurez-vous assez de signatures? L'Association ne peut d'ailleurs pas pélitionner en tant qu'Association. Depuis le fa- meux pétiiionnement du clergé contre la loi des bour ses d'études, les petitions out beaucoup perdu de leur valeur. J'estime que nous devons nous borner a émetlre un voeu et a iransmettre ce voeu nos re- présentants. De tous cólés Non, non, il faut pétilionuer. M. Laurent. Prècédemment, nous avons encore émis et transmis des voeux a nos députés, et ceux-ci les onl soigneusement conservés dans leurs poches. (Hires.) Voix hombreuses Le vote! le vote M. le President met aux voix la question de savoir si une pétition contenant les voeux ci-dessus expri- mès sera adressée par les membres de l'Association a la Chambre, ou bien si ces vceux seront simplement transmis aux députés. Tous les membres qui se rangerontasa gauche voteroiil l'envoi de la pétition, tous ceux qui se rangeront a sa droite voteront la transmission des voeux aux députés. Tous les membres présents sauf ti'ois se rangent a la gauche du président. En conséquence, l'envoi d'une petition est decide. Sur la proposition de la grande majorité de l'assem- blée, les orateurs qui out pris la parole a cette séance sont charges de la rédaetion de cette pétition et de la soumeltre a la signature des membres de l'Associa tion lors de sa prochaine assemblée générale. La séance est levée. Brux. Typ. V. Verteneuil, 93, rue de Louvain.

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L’Opinion (1863-1873) | 1867 | | pagina 6