JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Rimanche
Cinquième année. N° 15.
14 Ayril 1867.
Paraissant le dimanche.
PKIX D'ABOHüGHEHT
POUR LA BELGIQUE
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E.a neutralité beige.
On voudrait en vain se le dissimuler I'Europe
touche a une nouvelle conflagration, et sans qu'on
puisse encore préciser l'heure ou elle éclatera, chacun
comprend que toute illusion sur utie issue paciflque
du differend qui vient de surgir entre les gouverne-
ments de France et de Prusse est devenue impos
sible.
Si la possession du Luxembourg était seule en jeu
dans ce differend, si 1'on pouvait croire que les recla
mations de la France n'ont d'autre objet que de faire
fixer le sens des traités de 1839, en ce qui concerne
l'occupalion par I'armee prussienne de la forleresse
de Luxembourg, il y aurait peut-être quelque chose a
espérer de l'interveution des puissances étrangéres.
Mais nous ne savons que trop bien que cette ques
tion, si inopinèrnent soulevée par le gouvernement
francais, n'a vu le jour que pour servir de prétexte
a des griefs bien autrement graves el dont la diplo
matie européenne est impuissante a adoucir I'amer-
tume.
La guerre est done fatale et très-probablement im
minente, car s'il est vrai. comme quelques uns l'af-
firment, que Napoléon ill cherche a gagner du temps
pour compléter l'a'rmement de ses troupes.il est assez
vraisemblable de supposer que M. de Bismark ne s'en
monlrera que plus pressé d'en finir avec des nègocia-
tions diplomatiques dont le seul résultat serait d'ac-
croitre les chauces de son adversaire.
La Belgique, placée entre les deux pu'ssances belli -
gérantes, echappéra t-élle a la collision? Nous n'osons
pas l'espérer. Que ('offensive soit prise par la France
ou par la Prusse. il nous parait difficile d'aJmettre
que les puissances beliigèrantes consentent a sacrifier
les necessités de la stratégie au respect de notre neu
tralité. Sans doute elles v regarderont a deux fois,
l'une et l'aulre, avant de mettre le pied sur notre
territoire; mais lejour peut arriver oü les intéréts de
la vicloire parleront plus haul que toutes les autres
considerations, et ce jour-la, nous en sommes con-
vaincus, c'en sera fait de la neuiralité beige.
C'en sera fait, disons-nous, de la neutralité beige,
car nous n'aurons pas a hésiter un seul instant
quelles que soient nos sympathies personnelles pour
l'une ou l'aulre des deux nations en guerre, notre
devoir, nos intéréts les plus impérieux nous com-
manderont de tourner nos armes contre celle qui
franchira, la première, les frontières de la Belgique
el de tendre la main a ses adversa'irés.
Ne l'oublions pas l'indépendance de la Belgique
n'est point absolue. Aux yeux des puissances signa-
taires des traités de 1839, nous n'avons le dro t
d'éxister qu'a !a condition d'observer une stride et
rigoureuse neutrahte dans les contestations qui peu-
vent surgir entre elles, et s'il nous est permis, en
tant qu'individus, d'exprimer nos sympathies pour
telle ou telle cause, notre premier devoir, comme
nation, est de nous maiulenir dans les limites d'une
indifference absolue.
Mais la neutralité n'est point I'inaction quand même.
De ce que les traités nous obligent a ne prendre parti
ni pour les uns ni pour les autres, il ne s'ensuit pas
qu'ils nous condamnent n'opposer aucune resis
tance a I'envahissement de notre territoire. L'absence
de toute resistance serait. au contraire, regardée a
bon droit, comme une violation des régies de la neu
tralité. Supposons, par exemple, qu'une armée prus
sienne, en marche vers la France, franchisse la fron-
tière beige. N'est-il pas évident que si l'armée beige
ne lui disputait pas le passage, la France aurait mille
fois raison de nous accuser de complicité avec son
ennemie? Et au jour du reglement de la paix, quel
compte n'aurions-nous pas a rendre a I'Europe
Après un oubli aussi coupable de nos devoirs, quels
titres pourrions-nous invoquer en faveur du main-
tien de notre indépendance? Ceux-la même qui au-
raient tiré profit de notre Idche complaisance seraient
les premiers a abandonner notre cause vainqueurs
et vaincus seraient unanimes pour effacer la Belgique
de la carte de I'Europe et, chose terrible a penser,
I'hist >ire enregistrerait cette resolution comme un
acte de justice et une expiation legitime de notre
félonie.
Notre devoir est done tout tracé; il est clair, il est
impérieux. Francaise ou prussienne, l'armée qui met-
tra le pied en Belgique sera notre ennemie. Jusque-
la, mais jusque-la seulement, nous sommes des
neutres.
Mirabsau disait de l'abbé Maury, 1'un de ses plus
rudes adversaires a l'Assemblée constituante quand
il a tort, je l'écrase; quand il a raison, nous luttons.
M. Ie ministre des finances, plus heureux lutteur en
core que Mirabeau, écrase l'oppositiou dans les deux
cas. II est vrai, car il faut tout dire, que Ie Parle
ment beige de 1867 et la Constituante de 1789 ne se
ressemblent guèremais qu'importe après tout, que
l'arme soit brillante ou roui'lée, pourvu que le coup
terrasse son homme? L'arme de M. Frère, e'est sa
majorité. Arrrie lourde, si I'on veut, mais admirable-
ment flexible, offensive ou defensive a volonté, bou-
clier ou goedendag selon les besoins du moment et
offrant I'iramense avaniage de n'avoir besoin, pour
étre toujours en état, que d'être recurée une fois
tous les quatre ans, a l'époque des élections.
M. Frère Orban ne croit pas a la souveraineté du
nombre. Je la trouve raide, dirait Barantin Car en-
fin, en sa qualité de ministre des finances, il doit
savoir ce que valent les chiffres et quand, dans une
Chambrecomposée de 124 representants, il en compte
63 de son avis, ce qui lui arrive chaque fois qu'il
veut bien s'en donner la peine, il ne manque jamais
de prociamer que le pays est avec lui et que ses ad
versaires ne representant rien du tout, si ce n'est
peut étre quelques énergumènes ou l'archevéque de
Malines.
Armé de sa majorité- massue, il n'est thèse si
étrange, si ridicule, si absurde, que M. le ministre
des finances ne puisse se flatter de mener a bien.
Mercredi dernier, il lui a pris la fantaisie de faire
déclarer que la proposition de M. Guillery constituait
un amendement au projet du gouvernement. Cela n'a
pas fait un pli 61 voix contre 50 ont proclamé que
rien n'était plus évident et qu'il fallait n'avoir pas le
sens commun pour prétendre le contraire.
La tentative était hardie, on en conviendra. La
proposition de M. Guillery ayant été déposée environ
quatre mois avant le projet du gouvernement, il s'a-
gissait d'obtenir une declaration de la Chambre con-
statant que l'enfant était venu au monde avant le
père et c'était raide. Mais, bah, la témérité sied aux
hommes forts et, moyennanl quelques grands gestes
bien sentis et une tirade sur la coalition des déma-
gogues avec le parti-prètre, M. Frère a emporté la
pièce. Les journaux en crieront bien un peu, mais
Vaffaire est faite, et e'est le principal.
Le gouvernement avait-il grand inlérèt a ranger la
proposition de M. Guillery parmi les amendements?
Evidemment, car en obtenant que la Chambre votat
d'abord sur cette proposition, il pouvait compter, en
faveur de son projet, a lui, sur toutes les voix de la
gauche avancée acquises a la proposition de M. Guil
lery, tandis que si son projet avait été soumis au
vote le premier, il n'etait pas douteux que ces uiêmes
voix se seraient prononcées contre son adoption. La
chose valait bien un petit coup de majorité. Un de
plus, un de moins, voila bien de quoi s'embarras-
ser
Nous félicitor.s bien sincèrement M. Frère-Orban
de sa nouvelle victoiremais qu'il preune garde la
persistance de son bonheur a quelque chose qui nous
effraie et qui nous remet involonlairement en mé-
moire cet autre mot de Mirabeau La roche Tar-
péïenne est prés du Capitole.
Yille d'Ypres.
Consell communal.
Séance publique du Sarnedi 6 Avril 1867.
Présents MM. P. Beke, bourgmestre; L. Van-
heule, G. de Stuers, échevins Th. Vandenboo-
gaerde. Ch. Vandebroucke, Ed. Cardinael, P Boedt,
Ch. Becuwe, Cb. Lannoy, L. VanalleynnesAug.
Beaucourt, F. Messiaen, Aug. Hynderick, Aug.
Froidure, conseillers.
Absents M. Aug. Brunfaut, conseiller.
Le procés-verbal de la dernière séance est adopté.
Plusieurs pièoes sont communiquées au Conseil
A. Une lettre de M. Angillis qui déclare retirer sa
requéle et s'en tenir, pour la construction de l'école
des filles, aux clauses et conditions du contrat.
B. Le rapport de M. Carez sur la distribution des
eaux.
Le projet présenté par cet ingénieur est double. II
prend les eaux culinaires prés de la tranchée du che-
min de fer, a Zillebeke, oü il élablit un puisard a
proximité de la ferme deM.de Stuers. De cette ma-
nière, M. Carez affirme devoir obtenir un débit mini
mum de 100 mètres cubes d'eau par 24 heures. Cette
eau il la déverse dans un réservoir ayant une capacilé
de 150 mètres cubes d'eau, placé sur le plancher du
2mo étage de la tour des Halles, d'oü elle se répandra
dans une vingtaine de bornes-fontaiues. Pour la qua-
lite potable de nos eaux, M. Carez s'en rapporte au
rapport présenté par M. Becuwe et dont nous nous
sommes occupé dans le temps; il ne dit pas qu'il ait